Visiblement tout le monde c’était donné le mot. Je ne pouvais pas être dehors sans avoir les foudres de qui que ce soit sur le dos. J’avais toujours ma chaussure à la main lorsque j’étais en train de marcher en direction du pick-up. Arthur était venue en rajouter une couche de façon absolument poétique. Je n’étais pas juste ça ! J’étais un être humain, une femme un peu déboussolée, mais j’avais des émotions quand même et un petit cœur d’artichaut. Le plus important, c’est que j’avais mes émotions à fleur de peau et résultats, le torrent de larme que je retenais depuis quelques minutes finit par avoir lieu. Je n’avais même plus la force de mettre ma chaussure ni rien. Il fallait peut-être que je m’occupe de ma fille, mais comme ça c’était juste pas possible.

- Je voulais juste me rendre utile.

J’avais de la peine à articuler entre deux sanglots, je finis tout de même par retirer ma chaussette trempée pour l’essorer entre mes doigts avant de mettre ma chaussure comme ça et tenter de s’errer un peu plus les lacets pour éviter qu’elle disparaisse à nouveau. Heureusement pour moi, je n’étais pas resté suffisamment avec le pied nu pour avoir un quelconque problème de ce côté. Je finis tout de même par répondre à Arthur sur un air de défi alors qu’on me mettait ma petite Elie, ce qui était en train de me redonner du courage.

- Pourquoi se serait à moi de m’en occuper et pas Abel d’ailleurs !

Je savais très bien en vérité pourquoi c’était comme ça. J’avais accouché, il y a moins d’une semaine et résultat pour beaucoup, j’étais simplement une infirme. Je le regardais avec un air de défis, mais finalement c’était sa référence à Skyrim qui me calma. Ce n’était pas pour rien que j’avais voulu me faire appeler Tamriel, non, que je me faisais appeler comme ça depuis toujours. J’avais même gardé précieusement cette fausse carte d’identité comme pour me rappelait qui j’étais avant tout ça, mais aujourd’hui tout ça me semblait si loin. Je finis par m’assoir dans cette voiture en gardant la porte ouverte tout de même et les pieds qui pendaient dans la vide étant donné la hauteur des sièges. Il était simplement impensable que je me coupe de l’extérieur totalement. Abel était de toute façon devant moi comme pour parer à une nouvelle fuite de ma part.

C'est un peu sous le choc qu'il était monté dans le véhicule à côté d'Elena. Il était dégouté de voir qu'à peine arrivés, ou si peu, ils étaient déjà obligés de repartir sur les routes. Joshua ne savait plus vraiment quoi penser de tout ça. Est ce que ça valait vraiment la peine de se donner tout ce mal ? De toute façon, à chaque fois qu'ils trouvaient un refuge, tout finissait par s'effondrer, inlassablement, pour les mener inexorablement vers la mort. Parfois ils réussissaient à l'éviter, et puis parfois certains y passaient, et ils ne semblaient rien pouvoir y faire.

Il était silencieux, et rien ne le sortait de son mutisme. Hope le connaissait bien, et elle savait sans aucun doute que lorsqu'il était comme ça, il ne fallait même pas essayer d'engager la conversation. D'abord sur ses gardes, surveillant la route, il finit par s'endormir une heure, ou deux, tenter de récupérer du stress auquel ils avaient été confrontés.

C'est l'arrêt de la voiture qui lui fit ouvrir les yeux. Là, devant eux, un pont bien trop encombré pour faire passer la file de véhicule qu'ils conduisaient. Joshua soupira, et saisit son couteau avant d'ouvrir la portière de la voiture et de s'en extirper. Il s'étira très furtivement, avant de rejoindre Marcus et Jake. Au moins il avait confiance en eux. Les autres fouillaient les débris, débarrassaient le pont, et lui aussi allait en faire de même.

Ca avait du être un camp de fortune, à un moment particulier. Mais maintenant, ce n'était que désolation. Le poids de la neige avait fait plier les toiles de tentes qui ne ressemblaient plus à grand chose. D'ailleurs, c'est en en soulevant une qu'il eu un mouvement de recul. Prisonnier du froid et du tissu, un homme avait du mourir là, enveloppé dans sa doudoune, la peau bleutée par le gel. Il aurait presque pu lui faire pitié, s'il n'avait pas soudainement tendu les bras pour essayer de l'attraper. Aussitôt, Joshua lui enfonça la lame dans le crâne, et lui jeta un dernier coup d'oeil en passant à autre chose.

- Marcus, t'as besoin d'aide ?

Il eut à peine fini sa phrase qu'il sursauta à nouveau, alerté par les pleurs d'un bébé. Non, ce n'était pas Seamus, l'enfant qui pleurait était plus petit, et il n'y avait du coup qu'une seule solution. Ah oui, il comprenait pourquoi, vu qu'Arthur venait d'engueuler Tamara qui se baladait comme ça, à l'extérieur, laissant son nouveau né. Normal dans un monde des plus normal, n'est ce pas ? Quoi qu'il en soit, le sergent avait renvoyé la tatouée dans son véhicule et Joshua ne put retenir un petit sourire en reprenant sa tâche. Ouais, il l'aimait bien ce mec.