Stanley sentit ses dernières ressources lui échapper, alors que son corps saignait. La vision d’Elias qui paniquait de sa responsabilité se brouilla et il sombra définitivement dans l’inconscience avant que le pick-up ne le dépose au dispensaire.

- Le pouls est faible, jura le médecin, contrarié, alors qu’ils déchargeaient le jeune homme de la voiture. C’était plusieurs minutes avant que les autres victimes, Evelyn, Swann, n’arrivent jusqu’à l’infirmerie.

L’urgence était de stopper l’hémorragie. Le personnel médical s’équipa rapidement de blouses et de gants stériles. Si le polynésien n’avait aucune idée de ce qu’il devait faire, ce n’était heureusement pas le cas du médecin. Un quadragénaire qui avait de la bouteille. Il n’était toutefois pas sûr à 100% de son diagnostic, mais l’heure n’était plus au scanner ou échographies. Il devait ouvrir. Il fit sortir Eddie, qui était désemparé, puis donna des ordres à son collègue qui en dépit de l’angoisse, obéissait avec application. Le scalpel affuté entailla ainsi finalement la peau claire du ventre du militaire.

Ce ne fut qu’après de longues minutes qu’il parvint à stopper l’afflux de sang qui parvenait dans la rate endommagée. Stan était toujours dans un état critique, il avait trop saigné, mais il gardait un pouls. D’autres personnes avaient rejoint entre temps les deux hommes pour les aider.

- Il faudrait le transfuser, affirma le chirurgien. C’était de ça que discutaient les deux types en blouses blanches que Swann croisa par la suite. Car si l’île ne disposait pas de poches de sang en réserve, n’ayant guère les moyens de les conserver, ils avaient établi une liste de donneurs universels – volontaires – pour donner leurs sangs en cas de grosses galères. Et cela arrivait de temps en temps hélas ! Des civils pour la plupart.

L’opération dura près de trois heures. En sortant de la salle, les protagonistes purent ôter leurs blouses tâchées de sang écarlate. Éprouvés. Ils ne pouvaient pas encore l'affirmer, pourtant Stanley vivrait.

D'aussi loin qu'il tente de s'en rappeler, Davis n'était pas certain d'avoir déjà rejoint aussi vite le laboratoire qu'à cet instant, à croire que l'urgence avait été bénéfique mais il était temps que le stress passe ; inutile de préciser qu'il n'avait qu'une hâte : se poser tranquillement avec un foutu joint pour relâcher un peu cette pression qu'il espérait inutile.

Arrivé au bâtiment qui s'apparentait à son deuxième chez-lui, il grimaça en voyant quelques vitres brisées, la porte légèrement de travers et un néon de l'entrée à moitié décroché. Ça commençait mal. S'engouffrant sans plus attendre dans le cœur du laboratoire il avait immédiatement repéré Chad qui s’affairait dans un coin, un bandage au bras. « Constats, Sanders ? » Relevant la tête vers lui, le jeune bactériologue avait pincé les lèvres. « Une partie du matériel a été endommagée, la coupure de courant a désactivé les portes automatiques du sous-sol, la menace a été contrôlée » avait-il rétorqué sur un ton légèrement nerveux ; angoissé par ce qui était arrivé ou par la potentielle réaction de son supérieur ? Qu'importait.

Soupirant en comprenant que les sujets infectés qu'ils gardaient au sous-sol n'étaient désormais plus, le quarantenaire avait hoché la tête. « On s'active, on protège ce qu'il faut et on refait un constat. Attention aux potentielles répliques » avait lancé le brun sur un ton relativement directif aux sbires présents dans la pièce. Il allait y avoir du boulot, beaucoup de boulot, et ils devraient sans doute reprendre certains travaux au début mais c'était aussi cela son boulot : gérer les crises, même quand tout était à refaire.

Spoiler:

Un autre jour se levait, quelques heures de plus où, suite au carnage de la nature, Evelyn imaginait pouvoir rester dans cette bulle réconfortante. Ce n'était qu'une idée car déjà, à peine levée dans un endroit qu'elle ne connaissait pas suffisamment pour n'être guère sa demeure habituelle, la jeune fille avait senti l'angoisse monter d'un cran en les voyant se préparer. Joy et Swann allaient sortir, cette information – aussi dure à avaler était-elle – la fit blêmir tandis que ses yeux jouaient au ping pong entre les deux Blackmore. Partir où ça ? Pour quoi faire ? Peu importait les raisons le stress l'envahissait et la gosse sentait déjà ses entrailles se retourner.

- J'peux venir...

La réplique était très conne, si véritablement elle les accompagnait, elle ne serait qu'un boulet manchot, non, ce n'était pas envisageable mais son cœur lui, contrairement à son corps endolorie, désirait leur emboîter le pas. Joy lui avait même répondu, quant à Swann, alors qu'elle était debout – comme une conne – livide, lorsqu'il s'était approché d'elle, Collins avait immédiatement pressé ses doigts en quelques larmes qu'il n'empêcha pourtant guère de couler suite à son geste. Un baiser, le premier... Sur le coup, son cœur lui avait semblé se gonfler, grossir si fort que l'idée qu'il puisse s'extirper de sa poitrine, pour s'écrouler aux pieds de Blackmore, lui avait paru plus que réelle. Elle ne sut quoi dire, n'eut aucune réponse, simplement l'instinct de loger ses doigts valides à la nuque de son petit ami avant de déglutir.

- Fais attention... faites attention tous les deux. Sourit-elle piteusement.

Ça la déchirait autant que la chaleur l'envahissait. Il lui promit puis lorsqu'ils passèrent le seuil, Evelyn ferma les yeux en laissant couler les perles s'étant accumulées à ses cils. Il fallait que ça se passe bien, il fallait que tous deux reviennent sans quoi, elle ne s'en remettrait jamais. Mais rester ici, à l'abri des murs de la demeure, finirait par la rendre folle aussi, et parce qu'elle devait s'occuper l'esprit, Collins ne tarda pas à rejoindre l'extérieur. Elle trouverait bien quelqu'un qui aurait besoin de son aide...

Spoiler:

Affirmer que Stanley n’était pas tout à fait apte à sortir était un doux euphémisme ! Presque 24h s’étaient écoulées depuis son opération et il était bien entendu toujours alité. Le dispensaire de Brainbridge serait sa maison jusqu’au lendemain. Voire le surlendemain. En même temps, il n’en avait plus d’autre… Il partageait sa chambre avec plusieurs autres blessés. Malgré la grosse – grooosse – frayeur de la veille, le jeune homme ne s’en sortait pas si mal. Il serait sur pieds dans deux jours, grand maximum. D’ici une semaine, il aurait même complètement récupéré, et après quelques semaines de repos, il pourrait de nouveau gambader comme avant.

- Il parait que dans l’antiquité, on enlevait la rate aux athlètes, parce qu’ils pensaient que ça faisait les gars courir plus vite. Il fit un sourire mesuré à Casey qui était à son chevet. C’était le doc – son sauveur – qui lui avait dit ça. Certainement pour le consoler.

Si le garçon était resté sérieusement dans le gaz toute la fin de journée la veille, il avait retrouvé tous ses esprits aujourd’hui, en même temps que ses forces lui revenaient. Sa perte importante de sang l’avait mis KO, mais il était de bonne constitution. Jeune, en bonne santé, il se remettait. Sa voix restait quand même un peu rauque et sa posture figée. Il avait une sale tronche aussi, sans mentionner les écorchures ici et là. On ne sortait pas indemne de l’éboulement d’un bâtiment. Ses séquelles seraient invisibles toutefois, si ce n’était cette immense cicatrice qui lui barrait dorénavant le ventre.

- Swann m’a dit qu’ils retournaient à l’hôpital de Port Orchad, souffla-t-il en effectuant un geste qui lui arracha une grimace. Bordel, il douillait !

L’ancien étudiant était passé rapidement au petit matin. Pour s’enquérir de son état et lui évoquer cette sortie. C’était tout un symbole pour lui ! Une chose qu’ils projetaient de faire depuis leur retour de cette mission maudite, mais qui n’avait pas été une urgence jusqu’ici. Une sortie potentiellement dangereuse. Super dangereuse même ! A laquelle Stanley ne participerait pas, hélas.

- Ça ressemble à quoi dehors ? Demanda-t-il à sa copine. Y a plus rien debout par chez nous ? Il ne se souvenait plus de l’état des baraquements. Tous ses souvenirs de la catastrophe étaient flous.

Spoiler:

Elle errait dans le camp sans but précis, autour d'elle les gens se démenaient pour débarrasser les restes des éboulements. Cette fois elle prenait la réalité en pleine face, personne ne pouvait la protéger de ce que mère nature avait commis la veille, pas de bulle, seule... Seule sans lui, sans eux car, en écoutant distraitement les voix de quelques hommes en plein travail, Evy apprit que Lucas était lui aussi de sortie. Immédiatement, cette information rejoignit son crâne à l'en affoler, pas avec Swann au moins ? Si tel était le cas, que lui ferait-il de pire encore ? Le laisserait-il mourir s'il en avait l'occasion ? Les questions fusaient dans sa tête comme un tas de scénario macabres dans lesquels Richardson était le bourreau et Blackmore sa pauvre victime. Aussi quitta-t-elle l'endroit où elle s'était figée et s'approcha du dispensaire vers lequel elle redressa des billes rondes.

Stanley et Casey s'y trouvaient, malgré sa rancœur envers la blondinette, aujourd'hui et après avoir frôlé la mort de peu, Collins savait que rien ne serait jamais aussi important que la vie. De plus, Maverick et Summer étaient proches de Swann, elle à son tour à l'heure actuelle, arranger les choses – si toutefois on lui en laissait l'occasion – serait peut-être mieux que de faire l'autruche ou, pire, ressasser ce qui pouvait potentiellement se passer, en dehors des murs, pour l'étudiant et le trentenaire.... Inspirant donc un grand coup, elle passa le seuil et observa tous ces gens. Elle s'en sortait bien, un bras cassé ce n'était rien comparé à ce que certains avaient vécu, certains dont Stanley faisait évidement parti. Statufiée un moment, cherchant du regard l'instructeur auprès duquel la blondinette serait certainement, Evelyn les vit enfin et esquissa un sourire pitoyable à l'intention de Stanley dont le regard croisait le sien – à distance – puis redressa lentement la main libre, une fois Casey retournée vers elle, en guise de salutations. Elle approcha ensuite, avec des pieds de plombs, leur dernière entrevue restait dans leur mémoire, elle en était persuadée en fixant les billes claires de la jeune fille.

- Ça.... Non ça va n'était certainement pas la chose à dire, bien entendu que ca n'allait pas pour eux. Evy reprit donc une inspiration et rouvrit la bouche. Vous vous sentez mieux ?

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