Le convoi avait quitté Walla Walla plusieurs jours plus tôt. Trois véhicules, qui se dirigeaient vers la cité d’Emeraude. Il aurait certainement pu déléguer, laisser River ou un autre compagnon de confiance assurer. Mais Armand voulait récolter ses informations à la source. Il n’était pas certain que ses indicateurs parleraient à d’autres : Demetra, Moon. Il avait travaillé personnellement leur fidélité. Il voulait aussi les entendre en direct lui donner des nouvelles du « monde », juger leurs affirmations, leurs hésitations. Qui savait ce qui s’était passé depuis la chute de Providence. Retrouverait-il même leurs traces ici comme il l’espérait ?

Le groupe de New Eden en expédition s’était installé dans une planque non loin de Junk Town. La forgeronne avait révélé l’endroit à l’ancien Colonel des mois auparavant et il envoya deux de ses hommes dans la décharge, en repérage. Des visages inconnus de ce côté de l’état. Ils ignoraient comment des membres de New Eden seraient reçus…

- On aimerait s’faire faire des armes, à l’ancienne. Y a moyen par ici d’trouver quelqu’un pour nous bricoler ça ? Innocemment, l’un des agents du nouveau président pistait la présence de Demetra.

Ils discutèrent à droite, à gauche. Ils avaient sur eux de quoi prouver leur lien avec Armand s’ils trouvaient leurs cibles. Mais ce ne fut pas le cas. Alors leur objectif était d’en attirer d’autres, qui pourraient les rencarder. En échange de certaines denrées. Ce fut ainsi qu’un rendez-vous fut organisé quelques heures plus tard seulement. Deux filles semblaient enclines à discuter. Elles avaient négocié ce qui les intéressait et donné leurs conditions. Les New Eden s’y étaient pliés.

L’afro-américain se présenta sur place en compagnie de Kendale. L’ancien pompier était son capital sympathie. Il avait connu du monde à Seattle également et n’était avec un peu de chance pas catalogué comme un New Eden pur et dur. C’était moins vrai pour lui, encore que son travail au No Man’s Land et à Providence lui avait apporté bien du respect auprès d’une partie des survivants des environs. Du moins ceux qui n’étaient pas aveuglés par la haine que les habitants de Walla Walla leur inspiraient.

- On essaie d’abord de récolter des informations sur les Remnants et les interactions des différents groupes, rappela le quadragénaire à son voisin. On défendra notre cas ensuite, en sondant si on peut espérer annoncer nos changements plus publiquement au sein de leur repaire. Ok ?

C'est lequel qui cherchait Demetra ? Elle ne perd pas de temps avec les présentations, alors qu'elle s'approche de ceux avec qui elle a partiellement négocié. Lily avec elle, les deux femmes ont discuté longuement du prix que ça couterait, pour leurs clients. Et ça n'a pas été difficile de tomber d'accord pour tout le monde. Des médicaments, voilà ce dont ils ont besoin. Elle se dit que l'affaire peut se poursuivre s'ils font l'effort de bien travailler. Le but maintenant, c'est de les fidéliser.

Elle n'est pas revenue d'une expédition vers l'Est, explique-t-elle à celui qui semble être le chef de la meute. L'autre homme avec lui, elle ne le connait pas du tout. Mais qu'importe, ils apprendront sans doute à se connaitre à force. Un convoi attaqué apparemment, on ne sait pas où elle se trouve aujourd'hui et si elle reviendra, elle a comme un doute. Ne se fait pas d'illusion. Mais on peut encore gérer votre commande, comme il se doit. Il y a une personne qui a l'habilité pour ça qui s'en occupera, promet-elle pour les rassurer, avec confiance.

Elle n'était pas au courant du bordel qui s'est passé du côté de New Eden. Dans son esprit, il y avait encore l'attaque qu'ils avaient organisé contre son ancien groupe, Haven, qui avait forcé tout le monde à déménager. L'idée de les savoir ici l'inquiète forcément, jusqu'à lui retourner l'estomac et lui nouer la gorge. Mais elle devait savoir pourquoi ils étaient là. Et si leur but maintenant c'est de conquérir tout les petits territoires ? Junk Town ne s'en remettra pas.

Lui, je crois. Souffle-t-elle à Max qu'elle accompagne. A mesure qu'elles s'approchent sa gorge se noue mais la fermière tente de faire bonne figure et de ne pas être un poids pour sa voisine. Fais attention à ce que tu peux dire Max, par contre. C'est un groupe assez dangereux. Préfère-t-elle lui préciser, au cas où. Dans tout les cas, arrivée devant les deux hommes, Lily se contente de rester silencieuse mais très attentive.

Quitter Walla Walla pour plusieurs semaines, je l'ai fait plusieurs fois déjà. Mais là, c'est forcément différent. Sean est resté tout seul avec Sienna et Amalia et je dois avoué que j'ai eu du mal à le quitter. Mais ma présence ici est sûrement nécessaire. Nous avons des choses à faire savoir aux gens qui vivent ici, des informations à récolter.

Alors quand nous approchons de deux jeunes femmes, je leur adresse un signe de la main « Salut. » Mon visage est marqué par la fatigue du voyage et sûrement par les derniers événements douloureux que j'ai subi, mais j'essaye de me montrer sympathique. « C'est vous qui tenez l'endroit non ? C'est vraiment cool. » Après avoir traîné des années sur Seattle, je suis content de voir que des petites groupes prospèrent toujours.

Un coup d'oeil vers Armand, avant de reprendre « Nous sommes venus pour récupérer quelques infos. Est-ce que vous auriez quelques minutes à nous accorder ? Nous avons de quoi vous payer, évidemment. » J'attends de voir comment elles vont réagir, laissant à Armand le soin de poser les bonnes questions.

Les deux types qu'elles avaient croisés étaient présents les premières minutes puis ils se mirent en retrait pour observer et sécuriser les environs.

- Tu les connais ? Avait soufflé Armand à son voisin alors qu'elles approchaient. Mais non, leurs visages étaient inconnus au bataillon.

Kendale prit la parole en premier et pour appuyer son propos, l'afro-américain dévoila un sac avec des médicaments aux deux filles. Il leur présenta brièvement le contenu, avant de le refermer et de le garder pour lui.

- Quand nous aurons discuté, certifia-t-il. La quantité dépendra évidemment des confessions qu'elles leur feront.

L'une des filles leur évoqua ainsi l'absence de Demetra et la contrariété s'afficha sur le visage du quadragénaire. Il avait toujours su que c'était une possibilité, mais cette nouvelle ne l'enchantait guère. D'autant qu'il allait aussi devoir surtout prévenir sa mère qu'elle ne reverrait certainement jamais sa fille de nouveau...

- Nous voudrions connaître des évènements majeurs qui auraient eu lieu ces derniers mois. Dans les environs ou autour de Seattle. Nous savons que les rumeurs circulent vite, parmi les survivants. Le sujet des Remnants nous intéresse tout particulièrement, ajouta-t-il. Mais si vous voyez aussi d'autres choses... Qu'elles ne se privent surtout pas ! Après tout, Maxine et Lily étaient ici parce qu'elles avaient affirmé avoir des informations à partager.

Ne t'en fais pas ok, tout va bien se passer et je gère de toute façon, assure Maxine avec un grand sourire de circonstances. Pouce en l'air et risette commerciale, le coup d'oeil dans le sac tendu par l'afro-américain lui met déjà des étoiles dans les yeux. Bien sûr, que diriez vous d'aller faire ça autour... D'une infusion ? C'est le mieux que nous ayons, admet-elle alors avec un sourire contrit. Avec la forge qui tourne en continue, faire chauffer de l'eau ne sera pas si compliqué. Elle leur fait signe de ne pas rester planté au milieu.

Avoir un peu d'intimité leur permettra de discuter plus librement. Quoi qu'il en soit, elle échange un regard avec Lily lorsqu'ils gagnent tous les quatre le local principal. Les chaises dépareillées en disent long sur l'ambiance au sein de Junk Town, mais au moins, il n'y a pas de rats ici. Pour l'instant. Eh bien... Vous n'êtes pas les seuls pour les Remnants, entame-t-elle de but en blanc en fronçant les sourcils. Maxine n'est pas très au fait des tensions entre les deux groupes.

Nous sommes en lien avec eux mais n'avons pas eu de leurs nouvelles depuis de nombreuses semaines, j'ai entendu parler d'une épidémie là-bas qui causerait des dégâts et nous n'avons pas l'autorisation de nous approcher du campement, explique-t-elle. Les lettres de Yuan sont encore marquées dans sa mémoire. Les communications sont rompus et les émissaires ne se déplacent plus, explique-t-elle ensuite en haussant les épaules.

Si vous allez autour d'Olympia, il y a le Store qui survit toujours, le troc y est organisé et à part quelques pillards, il n'y a pas de gros bousculements, ajoute-t-elle en tendant au binôme une tasse chacun. Si l'afro-américain s'en sort bien, l'autre homme a droit au plus affreux mug qu'elle ait en stock. Elle s'en excuse d'une grimace. Il y a des rumeurs sur le fait que certains clans tenteraient de revenir sur Seattle, mais je n'en sais pas plus de mon côté, a voir si Lily est plus avertie. Pourquoi ça ? Questionne-t-elle par curiosité.

Lily hôche la tête aux mots de Max, lui laissant tout le privilège de ce futur échange. Elle ne parvient pas cependant à retenir les étoiles qui brillaient dans le fond de ses yeux à la vue des médicaments, qui ne seront certes pas en trop chez eux, mais le sac est rapidement refermé. Après. Logique. De son côté, laissant Max répondre aux deux hommes, Lily dévisage l'un et l'autre en captant très nettement la réaction d'Armand au sujet de Demetra. Et il n'est pas le seul à qui elle manque. C'était quelqu'un de votre famille ? Demande-t-elle à tout hasard, prenant à son tour une tasse de thé.

Elle acquiesce au sujet de Remnants. L'échange avec Clay est rompu, et les mots de Ruben n'ont rien arrangé sur son inquiétude. Oui, l'épidémie est bien réelle. Apparemment il ne faut pas s'approcher du camp. Précise-t-elle, même si Max en a suffisamment dit. Et mis à part l'attaque menée contre les Haven, je sais rien d'autre pour ma part. Elle sert la mâchoire, jette un œil à sa voisine. C'est peut-être pas le moment.

Elle finit par pousser un long soupire, fixe le fond de sa tasse avant de reprendre : On peut espérer avoir bien plus que ça, en fonction des informations qu'on peut vous donner ?