"Tu es passionnée par ce que tu fais... ça fait plaisir. En tous cas j'espère devenir aussi doué que toi... ou pas trop mauvais ce serait déjà bien." dit-il en souriant. Sans savoir pourquoi, Jon était sacrément enthousiaste à propos de ce nouveau projet. Il avait toujours été adroit de ses mains et rigoureux, alors il ne devrait pas y avoir de problèmes concernant son apprentissage. Jon avait réussi à la faire rire, cela changeait de leurs tous premiers échanges, qui avaient été plutôt froids et très méfiants. Petit à petit... ils apprenaient à se connaître et à se faire confiance. Elle dit alors que ses blessures, elle les avaient un peu cherchés. "Je ne pense pas que tu ais cherché à te blesser, mais c'est vrai... tu as pris des risques." Cette pensée, il avait tenté de lui dire lors d'une conversation à la prison, afin de comprendre surtout. Sauf que ça n'était pas le bon moment. Ne voulant pas la blesser ni la vexer, il ajouta : "Ce que je veux dire... c'est que j'ai bien vu que beaucoup de personnes tiennent à toi et que ça leur ferait du mal si il devait t'arriver quelque chose..." Il la regarda alors, jaugeant sa réaction, puis continua à travailler comme elle lui avait montré. Il sourit en la voyant rire à nouveau. Fallait dire qu'elle avait un sacré beau sourire. "Mais ça m'intéresse... j'aimerais bien savoir comment tu t'es retrouvée ici ? À avoir toutes ses responsabilités ?..." Autrement dit, ce qu'il voulait savoir, c'était l'histoire de sa vie depuis l'apocalypse, tout simplement.

J’hoche de la tête avec un sourire quand Jonathan découvre que je suis assez passionnée par le sujet. Difficile de le cacher dès qu’on aborde le sujet en fait. J’ai le regard pétillant et l’envie de soulever des montagnes à chaque fois.

- Ah ça, ce sera l’apprentissage et la discipline. S’il veut acquérir les connaissances et bien faire les choses du moins.

On en revient toutefois à l’incident avec ce fils de pute de Nazi à qui j’ai arraché un œil. J’arque un sourcil alors qu’il me dit que j’ai pris des risques. Il veut me faire la morale ou quoi ? Il tente d’apaiser le jeu en s’expliquant un peu plus, parlant des gens qui tiennent à moi.

- J’étais en position d’agir et j’ai agi. Tuer quelqu’un, c’est trop facile. C’est trop rapide. Et ce type allait la tuer juste pour gagner, même si on le tuait après. Si c’était à refaire, je le referais et les gens qui tiennent à moi comprendraient. Il n’y a pas d’animosité dans ma voix, aucune rancœur ou colère. Ce sont des faits et je les explique simplement à Jon pour qu’il comprenne un peu mieux mon choix ce jour-là.

J’ai bien l’impression qu’il n’y arrive pas et pour une fois, j’ai envie de faire un petit effort avec quelqu’un d’autre.

On se remet à travailler un petit moment et finalement on reprend la conversation. Il veut en savoir plus sur moi, sur ce qui m’a amené ici. Plus en détail cette fois que lors de notre conversation à Gig Harbor. Bon, on se connait un peu mieux depuis, mais… si c’était lui qui commençait ?

- Seulement si tu me racontes pour toi d’abord. Uno inversé ! Je rigole intérieurement, mais… oui je veux aussi en savoir un peu plus sur le type dans mon vignoble.

"Ça me va" répondit-il, sûr de lui. Elle ne le savait pas encore, mais Jon était militaire quand le monde était encore debout, pas dans n'importe quelle branche, la discipline était donc une des valeurs les plus essentielles pour lui. Et malgré le chaos, il avait gardé quelques réflexes de son ancienne vie, il se connaissait bien et savait à quel moment faire les bons choix. En général du moins.

"Sur le coup c'est facile c'est vrai, c'est même exaltant parfois. C'est après que c'est plus dur. En tous cas je constate que tu as bien appris à survivre... et à te défendre." ajoutait-il en continuant de tailler les vignes. Elle n'avait pas tort, le Jefferson aurait sûrement voulu emporter quelqu'un avec lui pour ne pas perdre complétement la face. Enfin bref, il valait mieux rester sur l'idée qu'un déchet de plus avait été éliminé de cette planète. C'était déjà ça.

Bien fidèle à sa nature méfiante et mystérieuse, Camila renversa la situation afin que Jon commence à parler de lui. "Tu en sais plus sur moi que j'en sais sur toi..." dit-il en la regardant avec bienveillance. Mais bon, si c'est comme cela qu'elle voulait procéder, il était prêt à céder à ses désirs. Continuant son activité manuelle, il se lança : "Tu sais déjà que j'ai passé une longue période seul... à arpenter les routes, en prenant le soin d'éviter tout contact humain... je suis resté dans un groupe une fois, ils m'ont retrouvés à moitié mort, j'avais sauté d'un pont pour échapper à des morts. Je suis resté deux mois avec eux... et je suis reparti. Ça m'est arrivé plusieurs fois de me rendre à différents endroits où des personnes troquaient. A vrai dire j'y allais que quand mes chasses ne donnaient rien..." Il repensa à l'ancienne version de lui-même, sans espoirs, sans but, sans âme. "A cette époque, j'étais plus que l'ombre de moi-même... je crois que c'est pour ça que j'étais plus avec les morts que les vivants." dit-il en lui jetant un coup d'œil avec un léger sourire, mais qui en disait bien long. "Si tu veux en savoir plus... il va falloir me payer un verre." lança t-il en la regardant à nouveau, histoire de la faire sourire. Maintenant, c'était à son tour.

Jon est assez futé pour accepter de parler de lui quand je le lui demande. Ça me laisse un peu de temps pour décider ce que je vais partager ou pas. Je ne suis pas non plus déçue d’en apprendre encore un petit peu plus sur son compte il faut dire. On se ressemble un peu en fait… Cette part d’ombre, préfèrer les morts aux vivants…

J’éclate de rire quand il me dit que pour en savoir plus, il faudra que je lui paye un verre. Futé le Jonathan. Je secoue la tête de gauche à droite en revenant à la vigne que je taille. Je suppose que c’est à mon tour…

- Si j’en sais autant sur les Oblivions, c’est parce que j’ai été esclave chez eux pendant des années.

Ça me fait drôle de le dire tout haut comme ça, mais c’est un exercice que Faith m’a fait faire en thérapie. Je n’entrerai pas dans les détails, mais je veux bien partager un petit peu mon vécu avec Jon, un tout petit peu.

- J’ai pu m’enfuir et j’ai voulu mettre le plus de distance entre moi et ces fous furieux. J’ai évité les vivants comme la peste. C’était bien plus facile de côtoyer les morts. J’ai… c’est une période aussi sombre qu’à Portland au fond… J’ai fait ce qu’il fallait pour survivre, pour me défendre. Tout ce que ça implique… Je me suis posée un petit peu près de Seattle. Fatiguée de fuir. Je voulais prendre une petite pause et les Fuckers me sont tombés dessus. On a bien failli s’entretuer. C’était durant une canicule pas possible et… On a cohabité pour survivre. Ensuite, on s’est bien supporté, puis… j’ai décidé d’essayer. De côtoyer des gens, de rester au même endroit, de… redevenir humaine. Après bien des merdes, nous sommes aujourd’hui installés ici et je peux continuer de prendre soin de mes vignes. Voilà, dans les grandes lignes. Je ne regrette pas du tout. Et c’est pour ça que je t’ai donné des conseils… à Gig. Tu en fais ce que tu veux par contre. Que je lui lance d’un ton amusé.

Jon ne put s'empêcher de sourire quand Camila rit à sa plaisanterie. C'est par de petits moments comme cela, accumulés les uns aux autres qu'une relation solide et durable pouvait se créer. Tous les deux n'en étaient qu'au début, mais c'était déjà plutôt prometteur. La jeune femme se lança à son tour, parlant de ce fameux groupe qui l'avait martyrisée. A leur rencontre, elle avait pris Jon pour l'un des leurs, et sa révélation d'aujourd'hui expliqua le comportement qu'elle avait eu cette première fois. Des années ?? Jon ne s'attendait pas à cette révélation. Il savait qu'il était encore loin d'imaginer ce qu'elle avait pu traverser. Il écouta alors attentivement son récit, continuant de tailler les vignes pour avancer plus vite, mais aussi pour éviter de lui mettre une quelconque pression en posant les yeux sur elle pendant qu'elle parlait de choses douloureuses. Elle n'était certes pas entrée dans les détails, mais elle avait joué le jeu et Jon appréciait ce petit pas de plus qu'elle avait décidé de faire, à sa juste valeur. Quant à sa remarque sur les conseils qu'elle lui avait donnés : "Tout conseil est bon à prendre." Ce qu'il espérait, c'est qu'elle soit en mesure de prochainement écouter les siens...

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1 août 2023.
21h30.

C'est sous un ciel de pleine lune que Jon se trouvait, en train d'admirer l'immense étendue d'eau longeant le camp des IF. Le spectacle était magnifique, reposant. Mais bien que le décor soit magique, Jon ne se trouvait pas là par hasard. Il s'avère que cela faisait plusieurs fois qu'il rencontrait Camila à ce même endroit, par hasard. Ce soir il y était retourné, ayant calculé qu'il y aurait plus qu'une pleine lune, une super lune. De plus, il avait au préalable pris une bouteille de vin dans la réserve, de quoi passer le temps en dégustant d'agréables saveurs. Ce qu'il espérait au fond, c'est que Cam passe par cette endroit et le rejoigne...

J’aime bien décompresser le soir en écoutant les vagues venir paresseusement mourir sur la grève tout en bas. Près de nos habitations, nous sommes un peu plus élevés et pas au niveau de Puget Sound. Ce n’est pas très haut, quelques mètres tout au plus, mais la vue est belle !

J’ai pris l’habitude depuis cet été de venir y passer un peu de temps avant d’aller au lit. Juste histoire de faire le vide dans ma tête. Parfois, j’ai de la compagnie et ça ne me dérange plus. La preuve encore une fois que le temps passé avec Faith m’est bénéfique.

Ce soir ne sera pas exception visiblement, alors que je découvre Jon à l’endroit où j’ai l’habitude de trainer. Bon, il faut dire que c’est l’un des rares endroits où on peut voir l’étendue d’eau, autrement il y a une épaisse lisière d’arbres.

- Hey ! Je le salue avec un sourire, avant de repérer la bouteille de vin. On profite de mon dur labeur ? C’est lancé sur le ton de la blague. Ça me fait toujours plaisir de voir les gens déguster mon vin à dire vrai.

La vue était juste magnifique et la température parfaite. Jon était assis sur une espèce de banc, face à l'étendue d'eau, lorsque son souhait se réalisa plus vite qu'il ne l'avait imaginé. Reconnaissant immédiatement la voix de Camila, il tourna la tête vers elle, rétorquant : "Moi qui pensais que nous étions coéquipiers désormais..." en souriant. C'était bien entendu de l'humour, Jon n'était pas là depuis assez de temps pour s'accaparer le mérite d'un travail aussi difficile comme le soulignait sobrement la jeune femme. Néanmoins, jusqu'à présent, il avait fait de son mieux pour la seconder. "Tu savais que j'étais devin ?" Lança-t-il en s'abaissant pour attraper les deux verres qu'il avait posés au sol un peu plus tôt. "La nuit est trop belle, je savais que quelqu'un passerait par là... Ça te dit ?" dit-il, prenant la bouteille en main, attendant de savoir si elle accepterait ou pas de prendre un verre (voir plus si affinité...) avec lui. En tous cas, le quelqu'un en question, il était bien content que ça soit tombé sur elle...