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Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 10:06

JEFF
POWELL

WHO AM I
- Informations personnage -
Nom : POWELL
Prénom(s) : JEFF
Âge : 33 ANS
Date de naissance : 31/03/1986
Lieu de naissance : EVERETT, WASHINGTON
Nationalité : AMERICAINE
Groupe : FACTION – THE REVIVAL
Ancien métier : PION DANS UN LYCEE
Célébrité : JOSEPH GILGUN
- Défauts -
TÉMÉRAIRE
TÊTU
EGOCENTRIQUE
MENTEUR
IMPULSIF
- Qualités -
DRÔLE
MALIN
CREATIF
ENERGIQUE
ELOQUENT

WHAT'S IN MY HEAD

- Psychologie du personnage -

Il s'agit d'un homme qui peut se faire tout un tas d'amis comme un tas d'ennemis. Ce genre de personne que vous pouvez adorer ou détester en quelques secondes, selon le contexte, l'heure de la journée, l'alignement des étoiles. Car Jeff Powell n'est pas un enfant de cœur, mais il n'est pas non plus le dernier des salopards. Un juste milieu, un équilibre astral, peu importe la vérité : Jeff a le ying dans son yang et le yang bien intégré dans son ying, c'est un personnage hors du commun et énergique, qui bien souvent marque les esprits.

Vif et débrouillard, Jeff a toujours été dégourdi et réactif. Son mot d'ordre ? La réactivité. À bat les mous du genou et les indécis, les méthodiques et les observateurs : Jeff fonce dans le tas, quel que soit le sujet de l'action. Physiquement, cela peut lui porter préjudice, mais tant pis pour la casse : Jeff préfère perdre des dents que d'avoir des regrets. C'est un jeune homme téméraire, qui réfléchit après avoir agi mais qui ne manque pas d'ingéniosité pour se sortir du pétrin. Deux principaux atouts : l'éloquence et la rapidité. Au jeu du chat et de la souris, Jeff préfère jouer les cafards pressés, inarrêtables et coriaces. Cet ancien surveillant est, comme vous l'aurez compris, un homme d'action, un type un peu bourru qui a toujours profité de son environnement pour passer entre les mailles du filet et toujours tourner la situation à son avantage.

On peut dire que Jeff est un bon menteur. Il est très franc, mais sait agréablement manier les mots pour détourner ses paroles de la vérité telle qu'elle est, sans pour autant être un gros mythomane. "Il suffit de voir les choses sous un autre angle !" Dit-il bien souvent à ceux qui oseraient le traiter de menteur directement, offusqués par tant de culot. Non, Jeff n'est pas un mauvais bougre, on peut simplement dire que la vie l'a obligé à s'adapter, comme le cafard encore une fois, quitte à prendre le mauvais plis pour se faire accepter des classes dominantes. À trop vouloir se faire remarquer, Jeff a parfois eu tendance à se croire unique au monde, à surestimer son ego. Seulement, il n'est pas non plus insensible et il lui arrive de céder face à la sympathie ou la détresse des Hommes. C'est un créatif qui trouvera toujours le mot pour faire rire une âme en peine ou pour charmer ces dames. Un charisme certains qui ferait oublier ses mesquineries ponctuelles, qui le ferait presque passer pour un enfant de coeur. Car ce charisme et cette éloquence, Jeff les possédait déjà lorsqu'il était plus jeune, il s'en servait toujours dans le but de charmer les adultes, car intrinsèquement, il ne s'agit en fait que d'un moyen de se faire aimer, se faire accepter dans un groupe construit, d'exister en somme. Jeff est, comme tout le monde, habité par des angoisses et des démons qui lui son propre, il fait son possible pour les étouffer dans le sable et de profiter de sa vie tant qu'elle existe.


WHAT AM I MADE OF

- Physique / équipement -

Jeff possède sur le corps, toutes les traces d'une vie passée qui n'a désormais plus grande importance : des traces de coups, de vieilles cicatrices, mais également de nombreux tatouages, réalisés pour beaucoup, dans la hâte et au trente-sixième degré. Les coups et les cicatrices sont, quant à elles, le souvenir de violences multiples subies depuis l'enfance, le souvenir du fait que la vie n'a pas toujours été un cadeau, mais également le souvenir d'un Jeff toujours battant, toujours prêt à se battre pour sa survie, depuis sa naissance.

Pour 1m83, Jeff est assez sec, un corps qui à l'adolescence était considéré comme un gras, perçu comme digne d'un toxico une fois adulte et désormais propre à sa condition. Est-ce parce qu'il a souvent dû courir pour fuir ou tout simplement parce que manger n'est pas la priorité du vagabond ? Peu importe. Toujours est-il que Jeff n'est pas un athlète, mais possède une endurance particulièrement améliorée depuis que l'Apocalypse lui a fait réduire considérablement sa consommation de psychotropes et autres substances nocives pour son corps. Le visage de Jeff a la caractéristique d'être très expressif. Il a le visage de celui capable de faire passer toutes les émotions facilement, mais se verrouille complètement lorsqu'il est mis à nu. Ce visage, couplé à un charisme et un culot certains peuvent faire de lui quelqu'un d'attachant, mais il est clair que pendant une grande partie de sa vie, Jeff a été caractérisé comme un personnage quelque peu ingrat, négligé ver peu fréquentable. Le jeune homme en jouait et tirait toujours son épingle du jeu grâce à sa prestance, son côté sans gêne et son habileté à mentir avec délicatesse.

Depuis qu'il est sur les routes, depuis le début de l'épidémie, Jeff voyage léger. Il est comme un enfant sans cartables libéré dans un parc après une dure journée d'école : libre de toute charge. Lorsque les périodes sont plus rudes ou qu'il est nécessaire de s'éloigner des débris de la civilisation, Jeff s'équipe avec ce qu'il peut récupérer et chaparder dans le sac que Jeff a déjà dû changer au fil des années sur survie. À l'intérieur, toujours la même chose : un briquet, deux ou trois pull qu'il fourre en boule à l'intérieur, une vieille bouteille d'eau dont le plastique est abîmé par la corrosion et le temps, qu'il change lorsqu'il en trouve une autre sur le chemin, un couteau suisse de poche qu'il a trouvé dans la chambre d'un élève et quelques rations quand il a la chance d'en avoir. De toutes façons, voyager léger et ne pas avoir beaucoup d'affaires personnelles est quelque chose d'habituel pour Jeff, qui n'a jamais été habitué à la notion de propriété. Il trouve ce dont il a besoin sur place, lorsqu'il campe quelque part, mais n'hésite pas à abandonner le reste derrière lui si la situation l'exige. Ses armes, il les récupère au fil de ses ballades : sur un infecté dont le cadavre jonche sur le sol, sur les corps en décompositions, dans des campements abandonnés... Jeff n'est pas difficile bien qu'il préfère éviter au maximum d'éviter d'avoir à se servir d'une arme à feu. Avant l'épidémie, il était plutôt adepte des objets contondants, puis par la suite, des armes blanches, qui s'avéraient être monstrueusement efficace contre les infectés : les revolvers ne sont à ses yeux qu'un moyen extrême d'instaurer un climat de tension, de montrer sa dominance et surtout son culot en tant que survivant. Jeff en possède un qu'il n'utilise que pour se défendre lorsque c'est nécessaire, intimider ceux qui se montreraient agressifs.


HEAR MY STORY



• 1984 – Quartier de South Park de Seattle

Elle ne pensait pas vraiment à mal en avouant sa grossesse à son petit ami. Emily n'était qu'une fille paumée, livrée à elle-même. Elle avait rencontré Doug à une fête paumée, près de la bretelle d'échange de Marginal Way. La nuit, tous les chats sont gris, ce qui encourageaient les jeunes à réaliser parfois de sombres "fêtes" ou rien n'avait de joyeux. Emily était tombée sur ce type qui l'avait fait rêver l'espace d'un instant : il était grand, il avait de beaux yeux vert-gris rougis par la drogue et un grand sourire qui lui paraissait sincère. Emily n'avait rien dit lorsqu'il avait commencé à la peloter, le week-end après leur première rencontre à cette fête. C'était sur le parking d'un McDonald's. Elle n'était pas sûre d'avoir envie qu'il la touche, mais elle n'avait rien dit. Quand même... Il s'intéressait à elle et lui avait même proposé de rentrer chez lui après leur petite sortie pour fumer ensemble. Elle avait une vie compliquée, elle avait été abusée par son père dans la petite enfance et faisait tout pour rendre la vie de sa mère impossible. Coucher avec Doug, c'était comme envoyer sa mère se faire foutre. Elle, elle savait ce qu'elle faisait. En tirant des lattes sur le joint de Doug, pendant que celui-ci commençait à explorer les bas-fonds de sa petite culotte, Emily avait l'impression de gagner la partie. Elle avait mentie à Doug lorsqu'il lui avait demandé si elle prenait la pilule, si elle était encore vierge et si elle était encore au lycée. Doug ne savait pas qu'Emily avait 17 ans. De toutes façons, avec la dose qu'il s'était injecté après avoir couché avec elle, il ne se souciait plus de grand chose.

Emily s'était sentie mal après cette première fois. Le matelas de Doug était à même le sol, l'odeur de renfermé de son appartement lui donnait la nausée, mais elle était tout de même restée allongée, à attendre que Doug rentre en elle pour faire d'elle une femme. Parce que c'est ce que sa mère lui avait dit : quand on couche, on devient une femme. C'est comme ça. Il faut franchir le pas à un moment ou à un autre. Quand ce fût fini, elle ne ressentit rien. Il ne l'avait pas prise dans ses bras et lui avait dit qu'il avait besoin d'une dose. Après une sieste, il voudrait recommencer. Ça y'est, elle était une femme, mais elle avait terriblement mal au ventre. Le test de grossesse, plus tard, l'avait alarmé. Elle n'avait personne à qui en parler, mis à part Doug, le premier concerné. Elle lui avait annoncé, tout sourire, en expliquant que c'était l'infirmière scolaire qui lui avait suggéré de réaliser ce test de grossesse. "Mais attends... Quoi ?! Tu t'fouts d'moi ?! T'es au lycée ?! Mais putain !" Doug avait complètement paniqué en apprenant la nouvelle. C'est là qu'il la frappa pour la première fois.

De nombreuses années plus tard, on verra de nouveaux Emily et Doug sur le canapé du même studio, complètement défoncés après s'être tapés dessus mutuellement. Parce qu'à cause de Doug, Emily avait continué de se droguer, même après l'accouchement, même après qu'on lui ait retiré son bébé, même après que sa mère l'ait envoyé de force en pension. À son retour de l'internat, elle avait fait la morte et était retournée toquer à la porte de Doug, qui vivait, à son grand bonheur, toujours à la même adresse. Emily ne demanda rien sur l'enfant qu'elle avait mis au monde en hurlant de douleur, dans l'hôpital le plus proche. Elle avait refusé d'en entendre parler : elle n'en voulait pas, elle pensait qu'il avait gâché sa relation avec Doug, qui était si extraordinaire à ses yeux. Lorsqu'elle entendit les premiers pleurs de l'enfant, elle avait commencé à pleurer : elle n'en voulait pas. Elle se maudissait de n'avoir pas essayé de se faire avorter. Mais Doug et Emily venaient d'un monde où il n'y avait que la défonce et leurs amis. Depuis que Doug l'avait frappé, Emily n'avait plus été voir l'infirmière scolaire. L'enfant né sous X fut confié aux services sociaux. C'est la sage-femme qui nomma l'enfant : Jeff. "C'est court, c'est rapide, comme l'accouchement." Avait-elle commenté auprès de l'agent venu cherché l'enfant à la pouponnière quelques jours plus tard.

• 1991 – Bureau des services sociaux

Un petit garçon est assis sur une chaise beaucoup trop grande pour lui. Il a le crâne presque rasé à blanc et un énorme cocard à l'œil droit. Il serre les poings sur les accoudoirs de cette chaise et fixe ses chaussures, balançant ses pieds qui ne touchent pas le sol. Qu'avait-il fait de mal ? Il s'était simplement contenté de se défendre. Au foyer, les enfants de son âge vivaient dans l'angoisse de se faire embêter par les plus âgés. "Personne ne voudra de vous bientôt, vous serez trop vieux et trop moches. Les riches préfèrent les bébés ou les petits." C'était faux, pensait Jeff, les sourcils froncés, tandis qu'il entendait deux adultes parler à voix basse à la porte du bureau. C'était faux. Jeff était au foyer depuis tout bébé et malgré tout, personne ne s'était attardé sur lui. La faute à pas de chance ? Était-il un bébé difficile ? Il n'en savait rien, il ne s'en rappelait pas après tout. Jeff avait six ans et n'avait envie que d'une seule chose : s'en aller d'ici et rentrer à la maison. Mais quelle maison ? À cette pensée, des larmes montèrent dans ses petits yeux fermés. Il était fatigué des cris des autres enfants, de la pression des grands et de la fermeté – pour ne pas dire méchanceté – des autres instructeurs.

Une femme était entrée dans la pièce. Elle s'était avancée jusqu'à la chaise et s'était agenouillée pour regarder l'œil de Jeff. Ce dernier s'était détourné en se frottant les yeux de ses poings, ce qui ne fit qu'accentuer la douleur à cause du cocard. "C'est rien Jeff, ce sera parti dans quelques jours..." Avait dit la femme en frottant la pulpe de son pouce contre sa joue. "Pourquoi tu as frappé l'éducateur Jeff ?" Jeff refusa de répondre. Cette femme savait parfaitement pourquoi. Ce cocard n'était pas arrivé là tout seul. Trop de pression pour un petit garçon. L'éducateur en question avait expliqué que le petit avait fait une crise, qu'il était devenu incontrôlable et qu'il avait fallu le maîtriser. Le coup-de-poing était parti tout seul. Jeff savait qu'il avait due raconter quelque chose de semblable à cela. Il savait aussi que c'était faux. Mais intérieurement, il était impressionné comme le mensonge de cet éducateur paraissait si vrai, qu'il arrivait à faire naître le doute en lui. "Est-ce que je vais aller en famille d'accueil ?" Demanda Jeff, plein d'espoir. Il rouvrit les yeux et fixa la femme qui évita consciencieusement son regard. Elle aussi connaissait la vérité du foyer, mais elle fermait les yeux, comme beaucoup d'autres. "Je suis désolée, Jeff. Pas aujourd'hui, pas encore."

Jeff avait été renvoyé dans le dortoir avec une poche de glace sur l'œil et une sucette en poche. Aucune sucette n'avait un goût assez merveilleux pour effacer celui du sang qu'il aurait plusieurs fois en bouche à cause de coups et des blessures.

• 2000 - Salle du réfectoire du foyer.

"_ Jeff, descend de là !
_ Eh, ces petits ont le droit de savoir ce qui les attends !
_ Jeff, si tu descends pas de là, on appelle la directrice !
_ Mais appelez-là, qu'est-ce que vous voulez que ça me foutes ?! J'voulais prévenir les p'tits, qu'ils savent ce qu'ils vont vivre ici ! Faut qu'ils soient prêts ? Hein les gars ?
_ JEFF !"


Maîtrisé par deux éducateurs, Jeff se retrouva vite plaqué au sol. Il était monté sur une table du réfectoire et voulait, une fois de plus, se lancer dans un discours argumentatif sur la vie dans ce foyer. C'était la troisième fois qu'il fuguait. Il avait quinze ans et durant l'été, avait poussé comme une flèche : on avait presque l'impression que son corps n'appartenait pas à son visage, les joues encore marquées par une enfance volée et dénuée de toute innocence. Depuis l'épisode du bureau de la directrice, Jeff avait décidé de ne plus se laisser faire : en grandissant, il était devenu celui qui met des coups de pression, celui qui menace, celui qui ment et qui manipule les plus jeunes pour leur faire faire ce qu'il voulait. Petit à petit, Jeff s'était désintéressé de l'école parce qu'il n'y trouvait pas sa place : il côtoyait les enfants du quartier, qui avait une famille, qui rentraient à la maison chez eux le soir pour retrouver le confort de leur chambre. Jeff n'avait jamais connu ça, ne connaissait pas le plaisir d'avoir des affaires personnelles.

Jeff commençait à fuguer depuis l'été : il venait de revenir d'une escapade de plusieurs jours, plus d'une semaine où il avait rencontré des personnes extraordinaires dans les rues de Seattle : des sans-abris, des punks à chiens et des rejetés de la société qui lui avait offert à manger, un sweat à capuche et son premier tatouage, réalisé avec de l'encre d'un stylo bille et une aiguille. La peau entre son pouce et son index lui brûlait, mais il était plutôt fier de lui.

"Que ce passe-t-il ici ?!" C'était la femme, la même femme qu'en 1991, les traits beaucoup plus tirés et un air beaucoup plus dur sur le visage. Elle fermait les yeux concernant les violences, mais n'hésitait pas à sortir de son bureau pour remonter les bretelles des jeunes qui menaçaient de sortir du rang. "Heyyyy ! Maman ! J'peux vous appeler maman ? Ça fait plaisir de vous voir !" La directrice de l'établissement s'approcha du visage de Jeff et colla ses narines contre sa joue. "Jeff, tu as bu ?" Demanda-t-elle, le visage impassible, la voix dure, mais calme. "Peut-être. Qu'est-ce que ça peut foutre ?" Rétorqua-t-il plein d'arrogance.

Quelques heures plus tard, après avoir été forcé à prendre une douche, Jeff se retrouva dans le bureau de la directrice. La petite scène de Jeff avait entrainé un remue-ménage sans précédent dans le réfectoire, les enfants et les adolescents présents avaient retourné les lieux. Des mesures avaient été prises pour que ça ne recommence pas. Assit sur la même chaise qu'en 1991, il serrait toujours les poings sur les accoudoirs. Il fixait cette fois-ci non plus le sol, mais la directrice qui faisait les cent pas derrière son bureau. "Jeff..." Dit-elle en secouant la tête. "Jeff, ça ne peut plus continuer comme ça." Jeff eut un sourire en coin, un sourire mauvais en fixant cette femme, qu'il avait toujours profondément détesté. "Qu'est-ce que vous allez faire Madame ? Vous allez me renvoyer ? Où ça ?" Il savait qu'il touchait juste. Jeff était l'un des rares qui n'avait jamais été en famille d'accueil, l'un des oubliés du système comme il en existe parfois, ceux qui passent entre les mailles du filet. La directrice avait les lèvres pincées. Elle était littéralement coincée, parce que Jeff était encore mineur. Cependant, intérieurement, elle était rongée par de profonds remord à propos du sort de cet enfant. Elle regrettait parce qu'elle se sentait responsable, parce qu'elle n'avait rien fait pour lui. Parce que Jeff était un garçon plutôt dégourdi et intelligent, tout le monde avait pensé que "ça allait passer", qu'il allait simplement grandir, quitter cet endroit et commencer sa vie.

Seulement, les années au foyer avait transformé le jeune homme qu'il était désormais. La directrice cherchait un moyen de se rattraper. "Je vais y réfléchir, mais je pense qu'il serait bénéfique pour toi d'aller au lycée en internat. Je ferais le nécessaire. Prends ça comme une main tendue, Jeff." Encore une fois, les paroles de la directrice ne firent qu'amuser le jeune homme. Une main tendue ? La solution était d'éloigner les enfants problématiques ou en danger de ce foyer, plutôt que d'arranger les choses en son sein. C'est ainsi que Jeff fût envoyé suivre le reste de sa scolarité au South Lake High School, dans un internat. On pouvait lire sur la brochure de l'école "le développement et la polyvalence de cette école se fait notamment grâce à une ambiance familiale." Jeff avait découpé cette partie de la brochure pour l'accrocher dans son dortoir, à côté de son lit. Chaque soir, il y songeait, tandis qu'il se couchait en ignorant totalement ses camarades. Désormais, ce n'était plus les éducateurs qui l'encadrait, mais des surveillants, des professeurs et des animateurs. Une toute autre prison pour un adolescent qui avait passé sa vie à être enfermé et encadré par l'Etat.

• 2005 - Quartier de South Park de Seattle

À 20 ans, Jeff avait fini le lycée depuis un moment et enchaînait les petits boulots. Il avait été obligé, pour ne pas se retrouver à la rue. Quelque chose qui avait bien fait rire le jeune homme : avoir été lâchement abandonné par l'Etat qui n'avait rien fait pour lui rendre les choses plus simples. Jeff était dans une période où il en voulait à la Terre entière, aux personnes qui l'avait mis au monde et au système. Il enchaînait les soirées dans des coins peu fréquentables, les partenaires sexuelles, la défonce et les concerts. Seulement, la journée, peu importe le programme de sa veille,, Jeff était toujours à son poste. Il avait décroché un emploi de facteur, distribuant le courrier dans les quartiers où personne ne voulait aller.

Le jour de son anniversaire, Jeff était de service. Le quartier de South Park avait toujours été mal fréquenté. Il n'était pas loin du foyer dans lequel Jeff avait grandi. Jeff avait pénétré dans un immeuble aux allures de squat. Il avait un colis à remettre : quand il vit l'étiquette, le tatoué fronça les sourcils. Il était à son nom... Pas véritablement à son nom à lui, mais le destinataire possédait le même nom de famille que lui. La boîte aux lettres étant cassée, il n'eut que pour autre choix que de monter au septième étage de l'immeuble et de remettre le colis en main propre. Il entendit un chien aboyer, un aboiement rauque, semblable à un boxer ou une race similaire. Une femme ouvrit la porte. Elle avait une trentaine d'années, mais paraissait plus âgée, des cheveux blonds en désordre et une allure négligée. Le chien était retenu par une laisse constituée de maillons en acier. Quand la femme leva les yeux vers Jeff, elle eut un sursaut. Peut-être avait-elle reconnu la silhouette de Doug, ce nez si caractéristique ou ces yeux profonds... Elle lâcha le cendrier qu'elle tenait dans son autre main qui tomba et se brisa à ses pieds. "Nan... C'est pas possible." Avait-elle commencé à balbutier en fixant Jeff comme s'il s'agissait d'une personne armée jusqu'aux dents. "J'ai un colis à votre nom." Avait alors répondu Jeff en évitant soigneusement de la regarder, en tendant le colis vers la femme qui le prit maladroitement sans quitter Jeff du regard. Jeff pensait avoir compris. Mais il refusait de croire que cette personne était sa génitrice.  

Il se dépêcha de lui remettre le parquet et dévala les escaliers quatre à quatre. Jeff sortit de cet immeuble terne, laid, comme le reste de cette vie, pensait-il et refusa de retourner travailler. Il cherchait activement un environnement où il n'aurait jamais à retourner dans cet horrible endroit, pour ne pas risquer de recroiser un jour cette femme.

• 2015 - Lycée James A. Garfield

Si Jeff n'était pas mort d'une overdose comme beaucoup de ses copains zonards, c'était uniquement parce qu'il ne voulait pas finir comme ceux qu'il pensait être ses parents. La vue d'un spectacle aussi grotesque lui était insurmontable. Il valait mieux que ça : il ne s'était pas battu toute sa vie pour finir dans le caniveau, comme eux. Mais Jeff n'était pas idiot : il savait qu'il ne pourrait changer de classe sociale ni sortir complètement de sa condition. Cependant, il pouvait mettre son envie de pouvoir à profit en s'engageant dans une autre branche dans laquelle il était assez facile de se faire une place : la surveillance dans les écoles. Jeff n'inspirait pas forcément la confiance, quelques années auparavant, mais malgré ses tatouages et son air quelque peu louche, Jeff était assez rusé et malin pour prendre soin de son look : paraître singulier, impressionnant, charismatique, cela lui permettait d'ouvrir des portes qu'il n'aurait pas pu ouvrir sans cette audace.

Il avait obtenu en 2013 ce poste de surveillant au lycée James A. Garfield. C'est dans ce lycée qu'il était au début des événements. Le lycée lui offrait un logement de fonction puisqu'il était également chargé de surveiller l'internat du lycée, beaucoup plus petit que celui qu'il avait connu en vue du nombre restreint d'internes. Jeff avait donc un logement, de la nourriture comprise dans son salaire en échange d'un œil aguerrit sur ce qu'il se passait entre les élèves. Jeff était d'ailleurs plutôt bon dans son travail, menaçant sans vergogne les têtes qui ne lui revenait pas tout en prenant soin de ne pas trop attirer l'attention sur lui pour pouvoir garder sa place au chaud.

Jeff, qui avait quitté ses amis vagabonds après qu'une vieille connaissance ne décède dans la rue en plein hiver, pensait devoir s'éloigner de la drogue et de l'alcool. Mais les temps avaient changé et il trouva derrière une innocence adolescente et l'emploi du temps classique d'un élève, des histoires sombres qu'il couvrait parfois ou se chargeait de régler lui-même, pour le bien de ces ados qui devaient faire leur maximum pour ne pas gâcher leur vie. C'était peut-être la seule fois où Jeff avait tenté de faire de ses défauts, de son culot, de ses talents de menteur et de manipulateur, quelque chose de bien. Mais n'allez pas croire qu'il faisait ça par bonté, il faisait ça "... parce qu'ils sont trop cons pour connaître la vérité. Ils ne méritent pas tout ce fric et cette dope de qualité." Encore un peu coincé dans le système de l'Etat, Jeff pensait pouvoir encore changer le monde tout en profitant de ce dernier. Encore une fois, il constaterait que rien ne serait possible. Si l'Apocalypse n'avait pas pointé le bout de son nez, Jeff aurait très certainement fini par perdre son emploi : une adolescente, du nom de Chloe Johnson, tournait autour du trentenaire. Elle n'avait que seize ans et se montrait particulièrement suggestive avec lui. Jeff n'était pas aveugle, il savait qu'elle lui tournait autour et ne pouvait pas dire que cela lui déplaisait. Bien que Jeff n'ait pas l'esprit très clair quant aux normes de la société, il ne pouvait nier le fait que cette gamine lui plaisait. Elle faisait bien sûr beaucoup plus âgée qu'elle ne l'était vraiment et faisait toujours tout pour avoir à faire à Jeff et lui-seul. Elle lui laissait des mots sous la porte de sa propre chambre et se débrouilla pour dégoter le numéro du surveillant. Depuis bien deux mois, l'adolescente et le trentenaire s'échangeait des photos suggestives, des messages plutôt ambiguës et flirtait à l'écrit. Face à face, Jeff faisait son possible pour ne pas céder à ses pulsions mais savait qu'il risquait bientôt de franchir la limite.

Chloe était plutôt insistante et jamais Jeff ne se posa la question de savoir pourquoi est-ce qu'elle faisait cela. Normalement, les adolescents de seize ans sortent entre eux, ils ne cherchent pas à se faire défleurer par le premier vieux qui passait par là ? C'était ce que pensait Jeff au début, mais à force de côtoyer ces ados, il ne pu s'empêcher d'affirmer que les adolescents qu'il côtoyait cachaient bien des choses au reste du monde, notamment le monde des adultes. Certains savaient parfaitement jouer la carte de l'étudiant sage pour garder la face, se transformant littéralement dans les soirées les plus folles qu'ils organisaient. Dans son adolescence, Jeff n'avait pas connu tout ça, trop occupé à subir sa situation. Quand Chloe avait tenté de l'embrasser dans une classe vide, quelques jours avant le début des festivités Apocalyptique, Jeff avait pris sur lui pour la repousser du mieux qu'il pouvait : sa place était en jeu, si jamais la hiérarchie en était informée. "Tu peux pas me repousser éternellement. Ca commence à faire long." Avait envoyé Chloe au surveillant en étirant un peu plus la patience de Jeff.  "Je sais." N'avait-il pas pu s'empêcher de répondre. Néanmoins, les événements qui suivirent résolurent alors le problème par la force.



• Le 25 octobre 2015 - Lycée James A. Garfield

Dans l'internat, tout était très calme. L'établissement avait été vidé mais Jeff avait refusé de suivre les forces de l'ordre. Il avait traîné dans le quartier, prétextant "retourner dans sa famille" auprès des autorités, avant de retourner tout simplement à l'intérieur du bâtiment de l'internat. Son anti-patriotisme l'avait convaincu de rester ici : il connaissait le bâtiment comme sa poche et partirait dès qu'il aurait réfléchi où aller. Il était hors de question qu'il ne se retrouve à la rue, alors que les événements se multipliait. Où pouvait-il aller de toutes façons ? Il n'avait pas de foyer, juste cette chambre au rez-de-chaussée de l'internat.

Seulement, Jeff avait oublié un élément dans son équation : Chloe, cette adolescente complètement obsédée par sa personne qui voulait profiter de la fin du monde pour s'envoyer en l'air avec Jeff – c'est ce qu'il pensait alors. Il la trouva à la porte du dortoir quelques jours après l'évacuation, un sac sur l'épaule, prête à rester avec lui. "Il est hors de question que je rentre chez mes vieux. Je reste avec toi." Avait-elle dit d'un air catégorique, que Jeff eut beaucoup de mal à analyser. Ce qu'il ne savait pas, c'était tout l'Enfer qu'elle vivait dans sa famille, aux apparences si parfaite. La maltraitance morale et physique ne se cachait pas que dans les centres sociaux. Elle insista, sur le parking du lycée, pour venir avec lui, lorsqu'il décida au bout de deux jours, à quitter le navire. "Poupée, y a rien à faire avec moi ! Tu devrais avec les autres, ils vont s'occuper de vous, tout ça... Allez, casse-toi !" S'était-il exclamé en essayant de la chasser. Mais elle avait refusé. "Nan, c'est avec toi que je veux partir. De toute façon t'as pas vraiment le choix." Avait-elle rétorqué en montant dans la voiture sans qu'il n'ait eu le temps de faire quoi que ce soit. Levant les yeux au ciel, Jeff avait fini par céder, montant sur le siège du conducteur et prenant la route. Son objectif ? Sortir de la ville. Chloe avait un sourire idiot sur les lèvres, ne se rendant pas bien compte de la situation. La main sur la cuisse de Jeff, elle sautillait sur son siège en regardant la route qui commençait à être complètement anarchique en raison de l'agitation générale. "Enlève ta main de là ou j'te l'encastre dans le tableau de bord." Avait-il été obligé de dire, d'un air menaçant, en fronçant les sourcils.

Ce n'est que lorsqu'ils virent les premiers morts sur leur route que le visage de Chloe s'était affaissée. Elle commençait à comprendre que tout était perdu, qu'ils vivaient vraiment quelque chose de grave et que rien ne rentrerait dans l'ordre aussi rapidement qu'elle ne pouvait l'imaginer. "Je pensais que c'était la merde, mais j'ai sous-estimé mon intuition pour le coup !"

• Décembre 2015 - Rainier Valley

Ils vivaient au ralenti. Depuis plusieurs mois, Jeff et Chloe vivaient en récupérant des vivres dans des magasins abandonnés par leurs propriétaires, en pillant des voitures de survivants qui n'étaient jamais revenu de la pause-pipi en bordure de route. La route devenait de plus en plus difficile et les routes impraticables à cause des voitures abandonnées qui formaient une barrière informe pour laisser passer un quelconque véhicule. Chloe proposa de sortir des grandes routes, d'essayer les cotes qu'il serait plus facile de longer pour se repérer. Pas bête la gamine, avait pensé Jeff. Bien sûr, il n'avait pas fallut attendre longtemps avant que le trentenaire ne cède aux avances de l'adolescente, plus motivée que jamais pour arriver à ses fins, Apocalypse ou non. Bien sûr, intérieurement, Jeff s'en foutait : il n'y avait plus personne pour dire si les choses étaient morales ou non. Plus rien de ce qu'ils avaient pu voir n'avait l'air intéressé par la morale. La civilisation et les codes sociaux étaient partis en fumée si vite que Jeff en était presque amusé.

Ce qui avait fait baisser la garde de Jeff, c'était aussi l'esprit vif de Chloe, qui n'était finalement pas qu'une petite rouquine écervelée, assoiffée de sexe, mais également vive d'esprit et téméraire, ce qui plaisait bien à notre surveillant. L'idée de devoir désormais veiller sur Chloe était quelque chose de presque agréable pour le tatoué. C'était la première fois de sa vie qu'il s'intéressait à quelqu'un d'autre qu'à lui-même. Au fil des mois, Chloe avait également montré qu'elle s'intéressait profondément à lui. Elle lui avait posé de nombreuses questions sur sa vie. Jeff avait menti pour certaines choses, parce que c'était dans sa nature, mais lorsque le foyer fût mentionner, le brun décida d'être honnête. "Quand on était p'tits, on nous tapait dessus et on nous terrorisait. Ensuite, c'est moi qui me suis mis à terroriser les plus petits. C'est comme ça qu'on a été élevé." Chloe avait porté sa main sur la joue rugueuse de Jeff et avait posé sa tête sur son épaule : le premier geste tendre de toute sa vie.

• Février 2016 - Renton Municipal Airport

Il était difficile de continuer de vivre dans des conditions pareilles. Si Jeff était un coriace, Chloe n'était qu'une adolescente, qui avait quant à elle, toujours vécu dans un certain confort de vie. La folie adolescente avait des limites et lorsqu'il fût question de s'éloigner un peu plus des habitations pour se réfugier dans un endroit où les infectés ne risquaient pas de les mordre dans leurs sommeils, Chloe pâlit. L'aéroport de Renton était un endroit qui leur avait semblé idéal. Apparemment l'endroit avait été déserté. Mais c'est dans cet aéroport que Jeff dû continuer son voyage seul.

C'était en fin d'après-midi, la nuit tombait encore tôt. Il y eut une attaque soudaine, des cris, du sang, des larmes, un coup de hache récupérée à l'arrière d'un fourgon abandonné. À la fin de la partie, plus un bruit. Jeff était couvert de sang. Autour de lui, deux infectés qui avait échappé à leur tour de reconnaissance lors de leur arrivée dans la matinée. Entre eux deux, l'adolescente se tenait à terre, le ventre complètement ouvert. Les infectés s'étaient jetés sur elle avant que Jeff n'ait eu le temps de quoi que ce soit. Elle pleurait, tenant son ventre comme elle pouvait, en se rendant compte de ce qu'il se passait. "Merde... Merde... Raaah nan merde..." Jeff était resté là jusqu'à ce que les yeux de Chloe s'ouvrent de nouveau. Il voulait attendre, voir ce qui allait se passer. Il voulait comprendre en voyant la chose arrivée de ses yeux. Quand il entendit le gargouillis de sa bouche qui n'avait rien d'humain, quand il la vit se tendre vers lui, complètement désarticulée, Jeff n'hésita pas une seule seconde. Il asséna un énième coup de hache sur son crâne. Elle était partie.

Jeff comprenait, à présent, quel était son ennemi principal. Il était de nouveau seul. Il n'avait même pas eut le temps de s'attacher correctement, que la vie l'avait repris, comme un parent qui empêcherait son enfant de se réfugier contre son ours en peluche : marche seul, ou crève. Attache-toi, crève. Reste au même endroit, crève. Baisse ta garde l'espace d'un instant, crève.

• Janvier 2017 - Renton

Presque un an s'était écoulé depuis que Jeff s'était retrouvé seul. Cette expérience, déroutante, traumatisante, lui avait servi de leçon. Une leçon de la vie, la leçon la plus dure qu'il existait sur cette planète, celle qu'on peut apprendre à tout âge. Renton était devenu une ère de jeu pour le tatoué, qui commençait cependant à perdre légèrement la tête, à force de déambuler dans la ville, piller des maisons, construire des barricades, tuer des infectés, piller des maisons, piller des commerces, construire encore des barricades et ainsi de suite. L'Homme est un animal social, et Jeff refusait de se l'avouer, mais rester seul presque un an avait quelque chose de véritablement nocif pour sa personne : Il avait été obligé de pallier à sa révulsion pour les armes en s'entrainant à sa pratique à l'aide d'un revolver qu'il avait récupéré sur un corps qu'il avait trouvé dans un vieux hangar qui servait autrefois à stocker les céréales. Le bougre c'était suicidé à l'aide d'un revolver emmitouflé dans un sac de couchage, si bien caché que personne n'avait eu le réflexe de fouiller son corps en putréfaction. Tirer était une action qui déplaisait à notre tatoué, mais il comprenait que s'il était capable de gérer cela, s'en servir habilement, il serait capable de tout supporter, de se défendre en cas d'extrême urgence et ainsi, d'être plus incisif.

Jeff n'avait pas de scrupule à tuer ses choses, n'avait pas de scrupule pour voler des survivants qui pouvaient croiser sa route. Bien souvent, ils n'avaient pas le temps de connaître son nom ou de véritablement voir son visage : Jeff était une ombre, un véritable moustique pour l'Homme. L'avantage d'être resté dans la zone était que le tatoué connaissait cet endroit comme sa poche. L'inconvénient, c'est que certains groupes qui traversaient la ville commençaient petit à petit à se passer le mot : un inconnu, vivant seul, profitaient des regroupements de survivant pour voler des provisions, des médicaments. À la fin du mois de janvier, après s'être fait régler son compte par un père de famille, menacé d'un fusil, Jeff avait compris : il fallait qu'il parte d'ici.

• Mars/août 2017 - Skyway Park/Bryn Mawr-Skyway

"BAH TIRE ! BAH VAS-Y TIRE !" Jeff avait hurlé sur le chef du groupe. Il s'était fait prendre par un énième groupe de survivants, la main dans le sac. Sauf que cette fois-ci, le tatoué n'était plus d'humeur pour supporter de courir davantage. Il s'avouait vaincu, il avait besoin de repos. Si le chef de ce groupe d'avait pas baissé son arme, impressionné par le culot du tatoué, mais voulait avant tout fouiller dans le peu d'affaires qu'il transportait avec lui. "Mec, j'ai rien sur moi à part cette hache à la con, y a que des merdes là-dedans. J'ai jamais eu besoin de rien j'm'en bat la r*ce !" Cette phrase, pleine de résilience amère, raisonna dans la tête du chef. Il s'agissait un SDF d'une cinquantaine d'années,qui avait vécu assez longtemps dans la rue avant tout cela pour savoir quand quelqu'un mentait pour garder la face ou pensait vraiment ce genre de chose. Il vit, dans les yeux de Jeff, de sombres histoires qui piquaient sa curiosité. Alors, lui rendant ses affaires, il l'accueillit au sein de son groupe.

Jeff était tombé sur un groupe de punks à chiens : dans sa tête, il eut le souvenir de cette période de sa vie pleine de haine et de solitude, où il avait reçu ses premières marques d'affection et d'entraide par des gens de la sorte. Dans ce groupe, d'une vingtaine de personnes, Jeff avait laissé sa casquette de vagabond sur la plage arrière de sa conscience pour tenter de s'intégrer à ce groupe.

Au début, ça avait été simple : il suffisait de rester dans son coin, participer un minimum aux diverses tâches et ne rien voler de ce qui appartenait déjà à quelqu'un. Presque facile. Jeff impressionnait avec son allure complètement décalé, bien qu'il ne soit pas le plus coloré du groupe : c'était son culot, sa grande gueule et son humour affûté qui le rendait presque infréquentable. Jeff se montrait cinglant avec tout le monde pour ne surtout pas s'attacher. Il n'avait jamais eu réellement de famille, n'avait eu que des amis éphémères, dont beaucoup s'étaient auto-détruits à cause de la défonce et de la rue. Difficile alors de réellement apprendre à se sociabiliser, même dans un environnement aussi alternatif que celui-ci. Si Jeff avait grandi dans un foyer, il n'avait aucune notion de propriété et ne convoitait que rarement les affaires d'autrui. Il allait là où le vent le menait, se fichait pas mal des conventions relationnelles entre les personnes et commença à s'attirer, petit à petit, la foudre de plusieurs survivants. Il fût question d'une femme, dans un premier temps. Jeff n'avait pas compris que Sarah était engagée dans une relation avec Igor. Il n'avait pas saisi qu'Hervé lui en voulait pour avoir installé des pièges pour le gibier sans avertir personne. Il ne comprenait pas pourquoi deux hommes se battaient pour un sac de couchage. Au bout de plusieurs mois, s'en était trop, Jeff craquait : parce qu'il n'avait pas la langue dans sa poche, mais aussi parce qu'il les trouvait ridicules, Jeff n'avait pas pu s'empêcher de leur hurler le fond de sa pensée, avant de prendre quelques affaires, quittant les lieux en les menaçant de son arme, un air dégoûté sur le visage. "Vous pensez être en marge du commun des mortels parce que vous vous foutez des anneaux dans le nez ou parce que vous avez vécu dehors avant les autres ? Vous pensez que vous êtes libérés de l'oppression parce que les morts se sont réveillés pour nous bouffer ? Mais vous m'faites rire avec vos "principes" à la con. Vive le punk rock, vive la dope et les chaînes aux pantalons... VOUS ÊTES PATHÉTIQUES !"

Après ce léger débordement émotionnel, Jeff soufflait, sur la route qui l'éloignait de ce point stratégique qu'il avait pourtant rejoint au début, en pensant qu'il avait enfin trouvé des hommes et des femmes qui lui ressemblaient. Mais Jeff se trompait : ils n'avaient rien en commun avec lui, une fois de plus. Alors, le tatoué décida de rester seul, sur les routes, et zoner et de profiter de l'étendue de terre et de béton abandonné qui s'offrait à lui. Il était véritablement libre et se mis à éviter complètement les groupes de survivants : Jeff ne volait plus, ne se faisait plus courir après par des hommes affamés et furieux. Il les évitait comme la peste.

• Février 2018 / mars 2019 - Le long du canal de Duwanish, Duwamish Cultural Center & Puget Park.

Que dire de plus sur l'errance de Jeff ? Ce dernier avait décidé, à la manière d'un Jean-Baptiste Grenouille, de ne plus s'approcher de ses congénères. Mais le tatoué était forcé de constater que la tâche était difficile. Dans la région, près de l'aéroport de Boeing Field, il y avait un nombre conséquent d'infectés - beaucoup de morts avaient envahi petit à petit l'aéroport au début de l'épidémie – mais aussi de groupes divers de survivants. Jeff eut plusieurs mois de doute, durant lesquels il ne trouvait pas d'objectifs à sa survie : ce fût une longue période sombre pour l'ancien surveillant, qui se rappelait des bras chauds de la jeune Chloe autour de lui, des questions qu'elle lui posait, de ce sentiment étrange dans le ventre s'était réveillé en lui, le poussant ainsi à la défendre et à veiller sur elle, alors que ça n'était pas dans sa nature.

Est-ce que le tatoué voyait en sa solitude, l'inutilité de sa vie, depuis le début ? Peut-être. Cette désagréable sensation de vide en lui commençait à le peser, alors que l'année 2019 pointait le but de son nez. Jeff errait dans différentes zones, notamment tout les alentours du district industriel en périphérie de Seattle. Qu'était-il en train de faire finalement ? Retournait-il volontairement vers la ville, désormais fantôme, qu'il avait quitté à la hâte quelques années plus tôt ? Jeff ne le savait pas, mais cette solitude qu'il semblait vouloir à chaque fois finissait par le grignoter comme un parasite. Il se sentait déphasé et complètement en proie à de véritables angoisses qui ne lui étaient pas familière. Jeff traversa alors le canal pour retrouver un peu plus de verdure, avant l'approche de l'hiver. En février 2019, il s'installa au centre culturel de Duwamish, et tomba nez à nez avec une famille qui attira son attention : une mère et sa fille de 7 ans. Elles étaient encerclées par deux rôdeurs, dans une petite zone au bord du canal, apparemment interrompues en pleine pêche. Jeff avait vu leurs silhouettes, avait entendu les gargouillis des infectés et les plaintes de la fillette. Sans chercher à comprendre, il avait accéléré le pas avant d'asséner un coup de machette dans la tête des deux créatures. La petite fille avait sursauté et s'était réfugiée près de sa maman, celle-ci encore bouleversée par ce qui venait de se produire, si rapide et si inattendu. "Mer... Merci. On a rien à te donner. Je suis juste ici avec ma fille." Clara, c'était le nom de la fillette. Elle avait regardé Jeff, son visage abîmé par des mois de survie en solitaire, avec de grands yeux noirs, impressionnée et à la fois intriguée. Loïs & Jeff avaient commencé à échanger avant que celle-ci ne lui montre la loge du gardien dans laquelle ils avaient élu domicile depuis quelques temps. La petite fille s'était présentée sur le sentier comme un mirage dans la vie de Jeff. Il avait été marqué par le regard intense qu'elle lui avait porté : jamais personne ne l'avait regardé avec autant de tendresse et d'intérêt. Même pas Chloe. Loïs, une véritable lionne, avait accueilli le tatoué en ne cessait de garder à la main une arme : elle était prête à se défendre si jamais ce tatoué leur était hostile. Mais tout de même : il leur avait sauvé la vie. Jeff découvrit alors quelque chose qu'il ne connaissait pas non plus : une mère prête à mourir pour l'enfant qu'elle aimait.

Le cœur de pierre de notre tatoué se fit ciseler consciencieusement par la petite fille qui gagnait son cœur de jour en jours. Lois lui avait dit qu'il ne pouvait pas rester longtemps, qu'elle le remerciait de les avoir sauvé mais qu'elle voulait rester seule avec sa fille. Il avait dormi à même le sol, dans la loge du gardien, tandis que la mère et la fille dormaient, blotties l'une contre l'autre dans le lit unique de la pièce. Jeff n'avait rien dit : il avait été singulièrement impressionné par la prestance de cette mère qui n'avait plus rien, mais donnait tout pour sa fille. Petit à petit, au fil des jours, puis des semaines, Lois commençait à comprendre qui était Jeff : le fantôme d'une société qui l'avait usé jusqu'à la moelle avant de disparaître complètement de leur vie. Un dommage collatéral, rien de plus. Jeff avait encaissé la vie sans jamais la savourer. Alors petit à petit, Jeff commença à plaire à Lois. Elle se méfiait toujours – elle ne faisait plus confiance à personne depuis longtemps de toute façon — ce qui allait parfaitement à Jeff qui ne posait aucune question sur sa vie, aucune question sur son passé. Clara quant à elle, avait l'impression d'avoir trouvé un ami. Elle ne savait pas d'où il venait, mais elle s'en fichait pas mal : cette enfant était complètement déconnectée de la réalité de la vie qu'elle ne se posait pas ces questions. Elle demandait à ce qu'il la mette sur ses épaules lorsqu'ils étaient dans le parc et se cachait derrière lui lorsqu'ils croisaient un rôdeur. Petit à petit et sans vraiment parler intimement avec Lois, Jeff commençait à croire que la mère et la fille étaient ce qu'il attendait depuis toujours : une famille, qu'il devait protéger et assumer.

En mars 2019, une dispute éclata entre Lois et Jeff, qui s'unirent alors sauvagement, exprimant par les plaisirs du corps tout le désespoir de leur situation. Lui comme elle ne voulait pas rejoindre de groupe, il s'accrochait à cette femme comme une moule à son rocher, ne sachant pas vraiment où était la limite de l'intrusion. Mais pour le moment, cela allait parfaitement à Lois. Leur ébat se conclut par une grossesse non désirée de la jeune femme, qui ne savait pas quoi faire. Jeff avait complètement paniqué en apprenant qu'il allait engendrer un être complètement démuni dans un tel monde. Cette nouvelle inquiétait profondément notre surveillant, qui semblait être le seul comprendre toute l'ampleur de cet événement. "Ça ne peut pas bien se passer. Rien ne s'est jamais bien passé, c'est impossible."

• Novembre 2019 - Terminal 107 Park puis Harbor Island

Ce qui arriva en novembre 2019 confirma l'intuition de Jeff. Tout commença à cause de la petite Clara. Elle s'était éveillée avec le temps, complètement transformée depuis le temps qu'elle vivait avec Jeff et sa mère. Une véritable petite famille. Le ventre de Lois s'arrondissait doucement. Jeff l'observait avec inquiétude. Il allait se produire quelque chose. Clara, qui avait envie de se rendre utile, souhaitant également se faire remarquer par sa mère, jura avoir vu des animaux vivre près du parc Terminal 107, alors qu'elle avait suivi Jeff en repérage. Personne ne la croyait, Jeff assurait que les pièges n'avaient rien donné. La fillette, qui voulait s'affirmer en tant que future grande sœur, disparue un matin. Jeff partit à sa recherche pendant des heures, sans mettre la main sur la fillette. "NON ! ON DOIT LA RETROUVER !" Hurlait Lois en se tenant le ventre. Jeff ne savait pas quoi faire, il savait qu'il allait arriver quelque chose et il ne savait pas quoi faire pour tout arranger.

La fillette était introuvable. Tout ce que retrouva Jeff fût l'écharpe de Clara, coincée dans les branches d'un arbre, près du canal. Au bord de ce dernier, l'écharpe à la main, la montrant, totalement impuissant face à la situation, Lois se mis à hurler. La douleur était telle qu'elle tomba à terre. "Non non,non c'est pas le moment ! Nan !" S'était exclamé Jeff en tenant fermement l'écharpe de la fillette dans sa main en s'approchant de Loïs. Celle-ci se tordait de douleur en tenant son ventre, gémissant de douleur, Jeff eut un mouvement de recul. Il ne voulait pas, il ne pouvait pas gérer tout cela.Il recula, encore, alors qu'elle tendait une main vers lui en gémissant de plus belle. "Jeff... Arrgh. Non..." Sans faire attention à ce qu'elle dit, Jeff continua de reculer, se répétant "non non non non" dans sa tête. Il recula dangereusement contre le bord du canal. Ce qui était à prévoir arriva : le tatoué tomba à l'eau et fût emporté par le courant.

• Novembre 2019 - janvier 2020 - Harbor Island

Bien sûr, Jeff avait survécu à cette chute. Il s'était débattu et avait atterri contre une barque renversée au bord d'Harbor Island. Crachotant, l'écharpe de la fillette enroulée autour de sa jambe, Jeff ne savait pas où il avait atterri. Tout était arrivé si vite. Il ne chercha cependant pas à retourner au Puget Park, il n'avait plus rien à y faire : Il agissait comme un lâche et comme un irresponsable. Il lui arrivait de culpabiliser, notamment à cause de cette petite fille perdue, quelque part. Au fond de lui, Jeff pensait qu'elle devait avoir survécu, mais il était beaucoup trop déboussolé par les derniers événements qu'il ne se laissa pas le luxe d'établir une stratégie pour revenir dans la fameuse loge du gardien.

Jeff reste alors à Harbor Island et s'aperçut au bout de quelque temps qu'il n'était pas le seul. En décembre, il eut un premier contact très bref avec un groupe de survivant, se faisait appeler The Revival. Méfiant et calculateur, Jeff n'osait même plus approcher de campement, parce qu'il était complètement terrifié d'attirer la poisse autour de lui. Jeff ne rejoignit le groupe qu'en janvier 2020, après avoir été forcé de constater que le groupe paraissait plutôt sain et étrangement amical envers lui. Jeff prend donc ses marques petit à petit, difficilement même : il n'est pas aisé de mettre tout ceci derrière soi et d'accorder sa confiance si facilement...



Jeff dort à l'extérieur du bateau. Il n'est pas encore prêt à rejoindre à proprement parler la faction. Il sera question de quelques temps avant que celui-ci ne comprenne qu'ils l'accueillent tel qu'il est, sans se soucier de son passé. Le jeune homme est donc habitué à se débrouiller seul. N'osant cependant pas s'attirer les foudres de cette faction qu'il vient à peine de rencontrer, Jeff se contente de pêcher dans son coin, sans même chercher à dérober les vivres du groupe marin. L'hiver n'y aidant pas, le tatoué prend vraiment sur lui pour ne pas s'approcher du groupe à outrance. Il commence, cependant, à croiser sans cesse les mêmes personnalités de la faction, qui l'intrigue grandement et émoustille sa curiosité.

Les journées sont donc pour l'instant assez longues et similaires, durant lesquelles Jeff tente de conserver un semblant d'organisation pour sa propre survie. La cohabitation avec la faction est difficile tout simplement parce que Jeff n'arrive pas encore à se mêler aux autres et à considérer les portes comme accueillantes et ouvertes. Ce n'est que début février que Jeff commença à fréquenter plus souvent et davantage la faction, sans pour autant s'avouer en faire parti.

Jeff cherche donc constamment des moyens de se débrouiller tout seul, sans avoir à leur demander quoi que ce soit. C'est pour cette raison qu'il part si souvent en vadrouille à l'intérieur de l'île portuaire, qu'il fouille, ramène tout un tas d'objets inutiles pour les bricoler et cherche absolument, comme un enfant en quelque sorte, à se faire remarquer. Cependant, comme un enfant, Jeff est contradictoire dans ses propos et ses actes et envoie souvent ballader les survivants qui tenteraient de rentrer en contact avec lui, peut-être encore une fois pour se protéger. Ses journées sont donc rythmées par sa faim, le temps qu'il fait et ses pulsions sociales qui commencent à s'éveiller petit à petit.


Time to meet the devil

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Re: Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 10:10

Rebienvenuuuue !





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Re: Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 10:14

Et bah, te re-re-revoilà !
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Re: Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 11:43

:MisterGreen: promis j'arrête après !
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Re: Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 13:28

Roh il a l'air bien sympa ce perso !!! Rerererebienvenuuuue ! Hâte de le voir en action !
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Re: Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 14:04

Jeff Powell • Raw
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Re: Jeff Powell •

Mer 12 Fév 2020 - 18:03

R'bienvenue, twa ! =D
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Re: Jeff Powell •

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