Si Hadley avait pu tuer avec son regard, Noah et Peter seraient sans doute morts l’un et l’autre. Oui, elle avait peur du noir et oui, c’était stupide à son âge. Toute sa vie elle n’avait eu que des moqueries à ce sujet. Il n’y avait que sa mère qui prenait cela au sérieux. Durant leur enfance, Steven ne s’était pas gêné pour l’enfermer à de nombreuses reprises dans sa chambre en la plongeant dans l’obscurité la plus totale. C’était un jeu pour lui mais elle, elle finissait rapidement en larme à supplier qu’on la sorte de là. Hadley n’aurait su dire exactement ce qui avait créé cette peur. Enfant, elle avait toujours insisté pour garder une veilleuse puis, lorsque ses parents avaient décidé de lui retirer parce qu’elle était arrivée en âge de dormir sans, leur fille avait multiplié les crises. Le fait que Steven s’amuse à lui faire peur lorsqu’ils étaient petits avait sans aucun doute joué. Les monstres sous son lit, dans son armoire, derrière la fenêtre. Les bruits de l’appartement provenaient toujours d’une personne venue pour la kidnapper elle. Seulement elle. Et même si les années étaient passées, qu’elle avait pu réaliser qu’aucun monstre n’existait et que rien ni personne ne pouvait rentrer chez eux, le malaise était resté. Alors maintenant que des morts cherchaient à les tuer, Hadley refusait totalement d’affronter la nuit.

En tout cas, le regard qu’elle adressa au militaire suffit pour lui confirmer qu’effectivement, elle avait peur. Les dents serrées, elle ne prit même pas la peine de se justifier. Elle n’avait pas à le faire face à cet inconnu de toute manière. Et, comme le disait Holly, chacun avait ses phobies et il n’y avait rien de ridicule là dedans. Savoir où il était installé lui permettrait de visualiser le temps qu’il leur restait à passer ensemble. Bien qu’elle ne soit pas forcément en confiance, elle savait que faire route à part en allant tous dans la même direction était complètement stupide. Au moment où il commença à répondre, Hadley, Noah et Peter levèrent tous la tête vers le plafond. Un bruit. La brune n’aurait pas su dire de quoi il provenait exactement mais il y avait eu un bruit. Chose anormale puisqu’ils avaient nettoyé l’immeuble quelques minutes auparavant. A la question de Peter, Hadley resta silencieuse, toujours concentrée pour écouter un éventuel bruit supplémentaire. « Oui, ça semble provenir des étages. » Répondit Noah qui s’était relevé et observait Peter et Hadley à tour de rôle.

Et là, Hadley fut tiraillée. Elle avait le choix entre rester ici et faire la rencontre de l’auteur ou des auteurs du bruit qu’ils venaient d’entendre ou, affronter l’extérieur et l’obscurité. Deux possibilités aussi horribles l’une que l’autre. Mais sa réflexion fut stoppée par le bruit des râles qui commença à résonner dans le couloir. Les yeux ronds, elle n’avait plus le choix. « HADLEY » Noah qui, lui aussi avait entendu les râles, commençait à paniquer. « D’accord. » Se contenta-t-elle de répondre en se levant pour récupérer son sac.

A la volée, elle récupéra son sac et y fourra les affaires qu’elle avait sorties. Noah fit de même et, une fois leurs affaires rangées en pagailles dans leurs sacs, tous prirent la direction de la sortie. Hadley restait incroyablement silencieuse tout simplement parce qu’elle n’était pas en mesure de parler. Dans sa tête, elle s’imaginait déjà dehors, au beau milieu des rues, dans le noir le plus complet. L’angoisse, avant même qu’elle y soit, s’insinuait en elle et lui tendait les muscles. « Où on va ? » Souffla-t-elle d’une voix qui trahissait toute sa crainte alors qu’ils avançaient dans le couloir, Peter à l’avant, qui éclairait leur chemin grâce à la lampe installée sur son arme. Noah vint glisser sa main dans celle de la brune. Ainsi il lui faisait comprendre qu’il ne l’aiderait du mieux possible à avancer. Pauvre Noah. Ses doigts étaient à peine venus se mêler à ceux de la photographe que déjà, elle lui serrait la main de toutes ses forces.

« On vient du sud. Seward Park, ça te parle ? » Annonça Noah à l’attention du militaire. Il ne restait que quelques mètres avant qu’ils n’atteignent la sortie. Ils devaient définir la route qu’ils allaient prendre. Si ils continuaient ensemble ou séparément.

Hadley n'allait pas tarder à arracher le bras de Noah si elle continuait à crisper aussi fort. Les dents serrées, la brune n'arrêtait pas de se répéter que dans peu de temps tout cela sera fini. Surtout que Noah avait donné l'endroit où ils vivaient et que Peter semblait connaître. Elle devait juste serrer les dents et suivre les pas de son coéquipier.  Mais le « oui » qu'avait répondu le militaire était assez évasif. Oui il connaissait l'endroit mais il n'avait jamais dit qu'il les aiderait à y aller.

Lorsque Noah s'arrêta net, Hadley eut un sursaut. Entre les doigts qu'elle avait plaqué contre ses yeux, elle réussit tout de même à voir ce qui se passait. Une ombre s'écroula au sol et Peter annonça que la voie était libre. Ils allaient pouvoir sortir de cet enfer. Évidemment, la brune resta silencieuse. Elle ne tenait pas à en attirer d'autre et vu qu'ils n'allaient pas tarder à se retrouver dehors elle était dans tous les cas incapable d'ouvrir la bouche. « Allez. » Lui souffla Noah qui resserra ses doigts autour de ceux d'Hadley. Le petit groupe se remit en marche et après seulement quelques pas, l'air frais indiqua à la photographe qu'ils étaient enfin dehors. Alors elle rouvrit les yeux. « Qu'est ce qu'on fait ? » Demanda-elle en regardant les deux côtés de la rue. C'était le moment de se décider. Soit ils partaient chacun de leur côté, soit ils continuaient ensemble. Et vu les réponses qu'offrait le militaire depuis qu'ils étaient sorti de la chambre, Hadley était décidée à savoir le plan maintenant.

D'un coup brusque elle attrapa l'avant bras du blond pour le stopper. « Qu'est ce qu'on fait ?! » Répéta la brune. Très sincèrement, à cet instant, Hadley ne se voyait franchement pas continuer avec Noah pour seul équipier. Parce qu'il se retrouverait rapidement seul en cas de problème et, même si elle ne les portait pas dans son cœur, elle savait très bien que les militaires étaient les plus disposés à pouvoir assurer leur sécurité. « Est-ce que tu viens avec nous ? » Autant ne pas tourner autour du pot. Elle ignorait complètement ce qu'allait bien pouvoir lui répondre Peter. Peut-être que non, il ne voudrait pas. Ou alors peut-être bien mais se contenterait de les raccompagner et, à la suite, il partirait. Ou alors il resterait quelques jours avec eux. Immédiatement après sa question, elle se mit à bafouiller légèrement pour donner des arguments. « On est plusieurs. Il y a mon frère, ma belle sœur, ma mère. On vit dans une maison, on a de quoi manger. On est en sécurité. » Oui Hadley cherchait à le faire répondre positivement à sa demande. « Si tu nous ramène on te donnera des trucs. » Pas besoin d'en parler avec Steven ou Holly avant de proposer ça. Elle savait très bien que sa famille était prête à troquer quelques conserves et bouteilles d'eau en contrepartie de la voir revenir vivante. Perdue, elle tourna le regard vers Noah qui, lui aussi, semblait vouloir que le militaire continue la route avec eux.

Il acceptait. Peu importe les conditions qu'il y mettait, Hadley était prête à tout lui promettre afin qu'il la ramène chez elle le plus rapidement possible. Sa trouille l'empêcha de lui répondre. Ce fut Noah qui, d'un hochement de tête, conclu le marché. Il ne restait plus qu'à se mettre en route.

Toujours attachée au bras de Noah, la photographe alla même jusqu'à coller son front contre son épaule pour ne pas regarder devant elle. Évidemment, la route fut ponctué de très nombreux « On est bientôt arrivé ? » et de « Et là ? On est bientôt arrivé ? » Mais mis à part ça, la brune se tint tranquille tout en suivant les pas de son coéquipier. Plusieurs heures furent nécessaires avant que les murs de la maison qu'ils squattaient ne se dressent devant eux. Le soleil commençait à se lever timidement, teintant la façade d'une couleur orangée. Hadley le savait, Steven n'allait pas tarder à sortir pour la vérification habituelle des alentours. Encore que, il était déjà peut-être à l'extérieur, parti à sa recherche.

« On y est oui. » Répondit elle, beaucoup plus soulagée d'être arrivée chez elle. Puis il y eut un silence. Hadley se contenta d'observer la maison tout en réfléchissant à comment elle allait procéder pour présenter Peter. Les mains moites, elle frotta ses paumes contre le tissu de son jean puis, avec une grimace un peu gênée, elle tourna la tête vers le blond. « Je vais rentrer la première. Il faut que...je prévienne mon frère que..tu...es là. » Et ça, elle ne savait pas si ça allait vraiment bien se passer. Mais quand même, elle n'allait pas le laisser attendre dans la rue avec Noah. Avec précaution, elle fit glisser le portail et, une fois tous à l'intérieur du jardin, elle le referma, signant définitivement la fin de leur aventure. « Attendez-moi là. » Fatiguée, la brune eut quelques petites difficultés à lever les jambes pour grimper les quelques marches qui donnaient sur la porte d'entrée. Aussi discrètement que possible, elle ouvrit la porte. Elle n'eut pas le temps de prononcer un mot que Penny et son frère se jetaient déjà sur elle. Écrasée contre le torse de Steven, Hadley vint automatiquement nouer ses bras autour de son cou en inspirant profondément de soulagement.

Elle eut le droit à une avalanche de question et elle du expliquer la présence de Peter, là, dans leur jardin. Le regard que lui lança Steven voulait tout dire. Ce fut exactement à cause de ce regard noir qu'Hadley s'interposa dans l'ouverture de la maison. « Sans lui, on serait plus là. » Dit elle, en fixant son frère. « Sans lui, je ne serai pas là. » Répéta-elle pour que ses mots aient plus de poids. Les mains levées dans les airs, son frère lui promettait silencieusement de ne lui faire aucun mal. Mais elle savait qu'une petite inspection serait inévitable. De retour sur le perron, elle présenta Steven à Peter d'un geste de bras. « Steven, mon frère. » Dit elle en le désignant. « Peter, un inconnu pas mercenaire. » Après tout c'était la seule chose qu'elle savait de lui.

« Hm. » Grogna Steven en le détaillant de la tête aux pieds. Il ne prit pas la peine de descendre. Holly arriva entre temps et, sans les interrompre, elle assista à la scène, comprenant seule ce qu'il s'était passé. « Tes armes, dans l'entrée. Tu les récupéreras quand tu partiras. J'te met pas en garde sur le reste, tu dois te douter de ce qui t’arrivera si tu fais un pas de travers une fois passé cette porte. » Steven et son amabilité légendaire. Du regard, Hadley fit signe à Peter d'accepter. Même si l'accueil n'était pas le plus chaleureux du monde, ils avaient besoin de se reposer et de manger. « Je m'occupe du reste. » Fit Hadley pour stopper cette situation gênante. « Viens. » Dit elle à Peter en accompagnant la chose d'un mouvement de tête. Plantée dans l'entrée, Hadley attendit que Peter pose ses armes. Et si possible sans trop discuter.