Comme souvent, Zack était le premier levé ; il avait toujours fait partie de ce genre de personnes n'ayant besoin que de peu d'heures de repos, quoi que les cernes sous ses yeux ne légitimaient pas réellement ce fait. Ansel cependant lui faisait de la concurrence dans ce domaine, il ne dormait également que peu d'heures et était plein d'une énergie qu'il ne prenait pas vraiment la peine de mettre à profit, hormis quand il s'agissait de monter la garde du haut de la tour radio. Assis à la table à manger de la maison de gauche dans laquelle il vivait et dont le salon – salle à manger  était devenu une pièce commune à tout le groupe, le trentenaire repensait aux événements survenus depuis un bon mois. La disparition de Jonah, Malcolm et Nick, l'arrivée au phare de Stewart et Kyle, puis celle d'Ariel. Ça faisait beaucoup en trop peu de temps et les choses étaient encore assez compliquées. Tout d'abord car Zack, malgré les apparences, ne pouvait s'empêcher de se questionner sur le sort des frères Parks et de Nicky, ensuite parce-qu'il peinait encore à voir Kyle d'un bon œil -il le tolérait, certes, mais ne lui faisait pas confiance pour autant- et, enfin, parce-que la venue d'Ariel et de ses petites représailles suite à l'abandon qu'il avait subi avait instauré une atmosphère un peu tendue qui avait tendance à agacer au plus haut point le blond.

Il s'était levé pour sortir avant de poser machinalement les yeux sur le calendrier que tenait à jour Ansel et que ce dernier avait accroché dans leur salle commune ; celui que l'homme d'affaires tenait avait été pitoyablement laissé de côté plusieurs mois auparavant, ne voyant plus l'intérêt de situer quoi que ce soit, le temps continuait à défiler et lui était peu à peu resté sur place. Mais heureusement pour tout le monde, Ansel suivait méticuleusement l'écoulement des jours. 17 décembre. Imprimant dans son esprit la date plus par habitude que par réel intérêt, Zack sorti de la maison en enfilant sa veste, frissonnant immédiatement à cause du froid mordant qui l'enveloppa instantanément. Le trentenaire se dirigea jusqu'à la tour radio à quelques mètres, y monta, et s'installa en haut. Il était encore tôt, à peine sept heure ; le vent soufflait encore plus en haut de la tour, tant qu'il dû s'y prendre à deux fois pour allumer la cigarette qu'il venait de sortir.

Observant le parc, le blond s'y désintéressa rapidement en le voyant aussi vide. Il regarda autour de lui avant que son regard ne tombe sur la mer ; foutue étendue, foutu bruit. Ne retenant pas un soupire à fendre l'âme, il s'enfonça un peu plus dans sa chaise et regarda à nouveau les quelques arbres qui les séparaient de la ville. Ils étaient encore givrés et le pseudo-calme qui régnait en ville avait un côté apaisant ; indéniablement il repensa à ces matins où il sortait sur son balcon, zieutant la ville encore endormie. C'était loin tout ça... Plus d'un an déjà. Un an qu'il avait quitté son duplex pour errer dehors, il aurait au moins pu attendre que l'hiver passe au final et passer de pseudo-fêtes de fin d'années chez lui, avec Ariel, se donner l'illusion que rien n'avait changé.

Les fêtes de fin d'année... Dans près d'une semaine ils y étaient. Bloquant son regard au loin, le trentenaire se remémora ô combien Noël avait toujours été important pour lui. Se retrouver en famille, dans la petite maison du quartier miteux que ses parents n'avaient jamais voulu quitter. Il aurait bien pu tout faire chez lui, mais le blond avait toujours tenu à ce que cette célébration se fasse chez eux, comme quand il était enfant. Et avec des parents catholiques, autant dire que les traditions étaient parfaitement respectées. Son regard se fit un peu plus sombre en repensant à ses parents, sa sœur, Chris... tous n'étaient plus désormais. Ils ne fêterait pas Noël ensemble cette année, ni les suivantes. Mais il n'était pas seul pour autant, pas cette fois.

Se relevant d'un air décidé après être resté un temps considérable en haut de la tour, il en descendit rapidement pour retourner à la maison. Le Gamin, Ariel et Kyle étaient là, encore à moitié endormis. « Bon, cette année, on fait Noël. » avait-il lancé avant de s'adosser au dossier d'un fauteuil. Leur laissait-il le choix ? Pas vraiment. « Alors aujourd'hui, on va partir chercher ce qu'il faut. » Bien sûr, ils ne pourraient pas tous y aller, l'un d'entre eux devrait rester ici pour garder le coin ; Ansel accepterait sûrement, tout pour ne pas se traîner en ville à chercher des boules, des guirlandes et autres conneries.

Le rire franchement hilare de Stewart lui valu un regard des plus condescendant, sourcil haussé comme s'il toisait un gosse qui prenait la remontrance de ses parents comme une grosse blague, l'homme d'affaires avait croisé les bras. Il n'avait pas l'intention de céder, pas cette fois. Et le brun pouvait bien se tordre de rire tout au long du trajet ou faire la tête, ça ne changerait pas. A sa remarque concernant le charbon, le blond leva exagérément les yeux au ciel, ne faisant rien pour masquer son agacement. Se penchant au dessus du canapé pour s'approcher encore un peu de son compagnon qui avait dans l'optique de se repieuter, il reprit sur un ton sans appel. « Je te préviendrais de rien du tout. Tu viens, c'est pas négociable. » Se redressant, il se tourna vers les deux autres, attendant leur validation ; validation oui, aucune négation n'était admise. Kyle d'ailleurs sembla assez emballé par l'idée, quoi qu'emballé était peut-être un mot trop fort... Il donnait plutôt l'impression d'avoir peur de dire non. Croisant son regard, Zack lui adressa un sourire satisfait ; au moins, lui, il ne faisait pas de vague. Il hésita une seconde à balancer une pique à Stew, du type qu'au moins Kyle était plus docile et devait être bien plus facile à vivre, mais se ravisa, peu envieux de se lancer dans une chamaillerie qui ne ferait que l'agacer.

Soupirant bruyamment à la remarque d'Ariel, son sourire retomba au même temps. Ce dernier n'avait toujours pas digéré l'abandon de Zack un an plus tôt mais comment lui reprocher ? Il aurait sans aucun doute été lui même vexé comme un pou si on lui avait fait la même chose. Quoi que... il se serait plutôt mis dans l'idée de traquer ceux qui l'avaient laissé pour leur faire la peau ; heureusement pour lui, Ariel n'était pas aussi mauvais que lui. Faisant quelques pas vers la table où étaient assis les deux autres, l'homme d'affaires y déposa ses paumes, arquant un sourcil passablement indifférent. « T'es pas mort à c'que je sache. » A la fin de sa phrase, ses lèvres s'étirèrent en un sourire carnassier ; son cadet voulait jouer à lui lancer encore et encore des petits pics ? Soit. Il jouerait. Jusqu'à ce qu'il en ait marre et qu'il ait à lui faire comprendre de manière bien moins correcte que celle-ci.

Repensant à la remarque de son ex-revendeur concernant le repas, le trentenaire hocha la tête. « T'auras qu'à nous préparer un truc ouais, je demanderais à Ansel de te surveiller, sait-on jamais. » Il n'excluait pas le fait qu'Ariel pourrait avoir envie de foutre encore un peu la merde et de mettre Dieu savait quoi dans le repas, ou dans son verre tiens. Se passant machinalement une main dans les cheveux, il s'éloigna un peu de la table, remontant un peu la fermeture éclaire de sa veste. « Bon, puisqu'on est tous d'accord, on part dans quelques minutes. » Avait-il vraiment besoin de préciser à chacun de prendre sac vide et armes ? Ils étaient suffisamment grands pour le savoir ; ou pas. Le fait que Stew n'ait d'ailleurs pas clairement validé sa demande lui importait peu, il n'allait certainement pas le laisser flemmarder toute la journée.

Quelques minutes après, ayant prévenu Ansel de leur sortie, les quatre hommes traversaient le Discovery Park pour rejoindre les boutiques. Il n'y avait pas à dire, le blond se sentait réellement bien entouré. Entre celui qui était blasé par l'expédition, celui qui traînait les pieds d'un air résigné, et l'autre qui souriait bêtement en réfléchissant sûrement au repas qu'il pourrait faire... fine équipe.

Ils arrivèrent finalement dans une rue assez calme où de nombreuses boutiques aux devantures brisées pouvait renfermer ce qu'ils cherchaient. Probablement que des putrides seraient aussi dans le coin mais c'était un risque à prendre, un risque devenu relativement banal aux yeux du trentenaire. S'arrêtant, il zieuta les deux côtés de la rue et s'adressa à ses compagnons. « On peut se mettre par deux, chaque groupe d'un côté, ça ira plus vite. » Pour sûr que les trois autres allaient prendre tout et n'importe quoi, qu'ils auraient des trucs en double, des trucs inutiles aussi ; quoi qu'au fond, rien de ce qu'ils avaient prévu de ramener ne serait utile. Il faudra sans doute que Zack fasse le tri une fois rentré ; pas de noir, pas de bleu ou de orange ou de connerie du genre, les couleurs traditionnelles. Comme avant.