Ces temps-ci, je traîne souvent à Olympia, plus particulièrement au Store. J’ai quelques connaissances et ça me fait du bien de les voir, de leur parler. Je traîne, je sais pas quoi foutre d’autres.

Il y a des mois j’ai vu une certaine Alice qui devait faire passer un message à ma sœur. Chiara. Qu’on me prenne pas pour un demeuré, je sais très bien que c’est elle. Ma Chiara ! Qui d’autre ? J’ai perdu la moitié de ma famille. Le soir avant de dormir je serre les dents, ayant appris également que Finan s’est fait buté. Je pensais qu’il était mort noyé ou de morsure de ces « crèves la dalle ». Finalement, il avait survécu là où j’ai faillis mourir. Pour que la vie lui dise « t’auras pas de troisième chance mec, t’es foutu ».

La seule sœur que j’ai est quelque part, et mes yeux scrutent sans cesse les lieux dans l’espoir qu’elle apparaisse enfin devant moi. J’en ai mal au crâne. Sincèrement, je pense que j’ai trop attendu. Mais j’ai pas d’autres pistes. Elle a rien voulu me dire. Et moi non plus d’ailleurs. Déjà elle connaît pas mon vrai prénom. Tout le monde ici m’appelle Arthur. Car je me présente en tant que tel. Il y a tellement eu de merdes à Seattle que c’est la seule défense qui me permet de me protéger un minimum. Mais Chiara comprendra. Je l’espère. J ene lâcherai pas l’affaire, alors rester ici me permet de ne pas m’éloigner trop d’elle. Mon groupe à Idaho ne m’en voudra pas et ils savent que ma famille est plus importante que tout le reste. Même si plus jeune, je m’en foutais royalement. Mais, elle, je ne l’ai jamais abandonné. Et il y a quelques années, quand le monde et les télécommunications ont été coupées, j’étais malheureux, en colère, frustré de ne pas savoir si elle était vivante ou non.

Quand j’ai perdu mes frères, je me suis également dit qu’elle n’était plus parmi nous… jusqu’à cette étincelle.

C’est humide dehors, la brise est froide. Je porte mon Sweat à capuche gris. La boue à certains endroits ne me dérange pas. Alors que je marque sur un bout de papier les derniers éléments pour une future course, j’aperçois un jeune qui me zyeutent. Pas plus âgé que moi je crois, ça tête me dit peut-être quelque chose. J’en sais rien, à force de chercher une même personne on peut tomber plusieurs fois sur les mêmes visages. Il veut quoi ? Marchander ?

Je suis pas du genre à rester dans un coin à attendre que les autres viennent me parler, alors je range mon papier, vise ma capuche et fais les quelques pas qui me rapproche du mec en question :

Salut, lancé-je.
On s’connaît ?