Ah les insomnies. J’adore ça. Non mais vraiment. Etre totalement à l’ouest le lendemain et même plus savoir où on vit, sans exagération. Enfin, entre ça et les cauchemars, j’prends quand même les insomnies. La peste, le choléra, tout ça quoi.

Hum, bref.

Casque sur les oreilles, je glisse plutôt que j’marche en direction d’la taverne. J’ai trop la dalle. Un petit pas sur le côté, alors que je chantonne, sans faire gaffe à ce qui s’passe autour de moi. « Heeeey, heeeey, what’s the matter with your head, yeaaaah… » Et hop, j’tourne sur moi-même. La grande classe. J’espère qu’il reste du fromage, il a couté la blinde à troquer celui-là. Oh et un peu de gibier ramené par Allia. Ce serait parfait.

Sauf que là, d’un coup, j’me fige. Y a quelqu’un de posé à table, dans l’obscurité, en train de se remplir la panse. J’plisse des yeux, glissant mon casque au niveau d’ma nuque sans couper la musique. « Merde alors… » Il est vraiment revenu donc. J’ai un large sourire qui barre mon visage, alors que j’souffle, un ton plus haut. « Cez ! J’suis trop content d’te voir mec ! Comment tu… sérieux ?! T’as bouffé tout le fromage ? »

Spoiler:

J’avise Cez quelques secondes, comme pour m’assurer qu’il est bien là et que j’suis pas en train d’halluciner. Ou d’rêver. Remarquez, si j’devais rêver de lui, j’suis pas sûr que ce serait posés comme ça à grailler du fromage. Mais j’préfère éviter de penser à ce que ça pourrait être hein. « J’espère bien qu’il en reste. » J’fais le tour du comptoir pour récupérer d’la viande et je la pose entre nous, avant d’m’installer face à lui, chopant aussi une bouteille de … jus de pommes, pour fêter ça. « Ouais, c’est moche, mais on a pas grand-chose en stock là. J’ai fini ma dernière bouteille de rhum l’autre nuit. » Il avait qu’à revenir plus tôt. « C’est plutôt à toi qu’il faut d’mander si ça va non ? Dans quelle galère tu t’es foutu pour disparaitre aussi longtemps ? »

Et j’ajoute quand même, avec un large sourire. « J’suis content d’te voir mec. » Ouais, ça fait du bien d’se dire que tout le monde rentre à la maison. Encore plus de m’dire que, définitivement, j’me sens chez moi dans ce groupe. Et ça, c’est cool.

Nan moi j'venais juste m'anesthésier la gueule pour dormir un coup. Qu'elle réplique à Cez et sa question con, fronçant les sourcils. Retirant sa clope du coin de ses lèvres alors qu'elle avise Echo, esquissant un sourire dans sa direction alors que l'italien lui demande de ramener à bouffer, levant les yeux au ciel à l'idée. Cent balles et un mars aussi ? Ca ne l'empêche pas de s'y plier, ramenant le tour pour les deux affamés de Crescent, tapotant la cuisse d'Echo. Bouges. Quoi que, même pas. Venant directement s'asseoir sur sa cuisse pour la peine, fouillant dans la poche de sa veste pour lâcher un paquet de cigarettes sur la table, reprenant. Mon daron m'a lâché une cartouche avant que j'quitte Gig.

Silence, alors qu'elle les avise tour à tour, haussant les épaules. Ouais, j'ai r'trouvé mon daron ouais. Quoi que c'était plutôt lui, qui l'avait retrouvé, en l'état. Tirant sur sa clope en offrant un clin d'oeil amusé à l'italien, recrachant la fumée. Allez, expliques au monde comment t'as pu esquiver la meilleure baston du siècle contre des fils de putes d'nazillons. J'suis toute ouïe, clairement.

« Une longue histoire genre qui va m’tenir en haleine le reste de la nuit ? Parce que j’te préviens, j’suis insomniaque depuis des semaines là. » Pour pas dire des mois. Et putain, je pensais que ça s’arrangerait avec la fin de ce cauchemar, le retour des uns et des autres, mais visiblement, c’était trop demander. J’lui rends un sourire quand il me tapote la main et j’commence à l’écouter avec attention, relevant la tête quand une autre silhouette débarque.

Evidemment, j’bouge pas d’un poil quand elle m’dit d’le faire et, de toute façon, elle vient m’utiliser comme siège. J’passe un bras autour de sa taille pour éviter qu’elle se casse la gueule et j’me focalise sur la bouffe, avant que Cez me pique le reste de fromage. Ouais, y a des priorités dans la vie. « Y a plus rien à boire. J’ai fini la dernière bouteille que j’ai trouvée avec Yu’ l’autre nuit. » Remarque, j’en ai partagé une autre avec Allia, mais j’préfère éviter de dire l’nom de la chasseuse à haute voix, Lex serait foutue de remarquer un truc et de me faire chier. J’me contente de plisser les yeux, la mine réprobatrice, quand elle sort le paquet de clopes, sans faire d’commentaire au reste. Elle m’a parlé d’son père déjà. « J’aurais bien aimé démonter du nazillon. J’suis sûr qu’ils auraient adoré s’prendre une rouste d’ma part. » Forcément, j’me rappelle ces petits connards racistes de mon enfance et j’me demande à quel point ce serait karmique qu’ils aient été dans le lot.