Allongé sur la petite couchette de sa cellule, Preston lit un des livres conseillés par Maddie. Il l'a miraculeusement trouvé dans la petite bibliothèque de la prison. Certains ouvrages ont été épargné par les intempéries et ça aide bien à passer le temps, il doit l'avouer. Le temps s'écoule lentement ici. C'est même assez étrange. Il passe ses journées à retaper l'avant-poste, à donner des coups de main à droite et à gauche et après l'effervescence de l'automne avec la bataille de Tahlequah, il doit avouer que tout lui semble un peu trop calme. Combien de temps cela va-t-il encore durer ?

Finalement, il décide de se lever et de profiter de la journée à venir pour faire une petite excursion à l'extérieur de la prison. Les ressources commencent sérieusement à manquer, il devrait peut-être s'essayer à la chasse. « Salut » Preston s'adosse contre le mur de la cellule de Rafaël. « Je voulais faire une petite sortie. On manque de nourriture. Tu m'accompagnes ? » propose-t-il. Dehors, mieux vaut être au moins deux pour pouvoir assurer les arrières de l'autre. On ne sait jamais sur quoi on va tomber : vivants, morts, animaux... Et puis, il apprécie bien l'homme devant lui. C'est une personne de confiance et du même groupe de surcroît.

Le gitan grattait quelques cordes de sa guitare, enchaînant des accords sans lien, machinalement. Le froid mordant, impossible à contrer malgré les couches de vêtements et les couvertures plus ou moins élimées qu’il avait empilées sur lui, avait tenu Morphée bien loin de lui. Sans compter la fin qui le tiraillait. Il était très reconnaissant à leurs alliés de leur aide, mais malgré tout ça, ils étaient bien loin de l’abondance. Ils n’étaient pas à plaindre pour autant et, si la météo ne s’aggravait pas, malgré les difficultés, tout devrait bien se passer.

Concentré sur ses notes, il n’entendit pas les pas qui s’approchaient de lui, avant qu’une voix familière ne retentisse. Rangeant sa guitare dans sa housse, l’enveloppant dans autant de couvertures que possible, il se leva pour faire face à l’homme. Parfois, quand il avait l’impression de perdre la tête face au silence et à la solitude, il allait lui tenir compagnie – en silence, quelques fois. Il avait eu un avis mitigé à son sujet au début, mais force était de constater qu’il lui faisait entièrement confiance maintenant. « Allons-y. Tu veux chasser quoi ? » Il n’espérait pas retrouver un fauve comme celui chassé avec Nascha, ils auraient probablement de plus petites proies.

Saisissant sa lance, il rattacha son bouclier dans son dos avec les lanières conçues et améliorées avec Teresa, avant le déménagement. S’il ne l’utilisait pas fréquemment, il s’était habitué au poids familier.

Rafaël est partant pour une petite sortie chasse ce qui ravie Preston. Il ne se voyait pas sortir seul. « Hmm, je pensais remettre Ewok au travail » souffle-t-il à propos de son faucon. « Normalement, il devrait être capable de ramener de petites proies comme des lapins » S'ils arrivent à en ramener 2/3, ça sera un bon repas chaud pour le soir-même. Certes, ce n'est pas un gros gibier, mais c'est mieux que rien, ils mangent rarement à leur faim ces temps-ci. Alors, personne ne serait contre un lapin ou même pourquoi pas, un faisan ?

Ils sortent de l'avant-poste. Le froid est tel qu'une fine buée s'échappe des lèvres du militaire. Il resserre les pans de sa veste autour de son torse. « J'ai repéré sur une carte un club de golf à une heure de marche au nord. Les espaces y sont normalement assez dégagés, c'est idéal pour la chasse. » annonce-t-il ensuite. L'idée est simple. Ils vont s'y rendre, tenter de choper de quoi manger et revenir en espérant ne pas faire de mauvaises rencontres en chemin.

Un bruissement d'ailes attire son attention. C'est Ewok qui arrive et qui vient se poser sur son épaule avec douceur. Preston le salue d'une caresse. L'oiseau est assez libre de ses mouvements, mais il ne reste jamais bien loin de la prison. « Tu as déjà chassé ? » demande-t-il à son coéquipier du jour.

Le gitan regarda le faucon, admiratif. Ils en avaient quelques-uns, dans le cirque de son clan, mais lui n’avait jamais appris à les dresser. « Tu as appris il y a longtemps ? A dresser les faucons. J’espère que tu sais lui faire faire des tours qui n’ont rien à voir avec la chasse. » Il lui adressa un sourire amusé, le taquinant. S’il avait appris à apprécier l’homme, et à le considérer comme un ami, il continuait à le voir comme quelqu’un d’assez strict. Bien qu’il lui ait prouvé savoir être l’inverse, malgré tout.

S’habillant davantage pour faire face au froid sans bénéficier de la protection des couvertures, en s’assurant d’être toujours libre de ses mouvements, Rafaël suivit Preston à l’extérieur des cellules, se demandant si le froid ne finirait pas par les congeler avant qu’ils ne puissent trouver quoi que ce soit. « Les animaux n’auront pas fuit les lieux ? » Quoi que, un espace dégagé et à la vue de tous… Peu devaient être les survivants se risquant à l’emprunter, sauf cas de force majeure. Les différents animaux avaient pu y trouver des abris ou y creuser des terriers. « Je te suis. » S’il avait exploré les environs, ce golf ne lui disait rien.

Inclinant légèrement la tête en voyant Ewok, il hocha la tête à l’attention de l’oiseau – il était intelligent, il le verrait, n’est-ce pas ? « Bonjour Ewok. » Il secoua légèrement la tête, alors qu’il se retournait vers Preston. « Pas vraiment. Il ne put retenir une grimace. On a traqué un puma, à Cliffdel… Et nous en avons trouvé un nouveau ici, avec Nascha. Mais ce n’est pas mon point fort. » Il laissa le silence s’installer, avant de renchérir à nouveau. « Toi oui ? »

« Mon père était fauconnier. J'ai grandi dans ce milieu-là. Je devais prendre sa suite, mais... » Preston hésite à se confier davantage et finalement, ils savent peu de choses l'un sur l'autre, alors apprendre à se connaitre ne peut pas faire de mal. « Ma sœur jumelle est morte dans les tours du World Trade Center, j'ai intégré l'armée suite à ça » Une envie de combattre le terrorisme, de servir son pays pour sa jumelle. « Mais j'ai réussi à faire intégrer à l'armée un programme avec des faucons et j'avais monté un petit élevage à New Eden aussi. » Voilà donc pour sa petite histoire avec les faucons et la fauconnerie en général. Il laisse échapper un rire « Non, pas vraiment. Ewok est assez libre, je ne lui enseigne que ce qui pourrait être pratique » La chasse en faisant donc parti.

« J'ose espérer que non » murmure-t-il à propos des animaux. Preston espère réellement qu'ils pourront mettre la main sur quelque chose car les ressources commencent cruellement à manquer. « Un peu » De la chasse à l'homme aussi, à l'armée, bien plus que des animaux à vrai dire. Dans l'idée, ça doit revenir un peu au même non ? Il garde ce détail pour lui, le trouvant un peu trop glauque comme anecdote.

« J'ai su pour le puma » Il grimace. « J'aimerais pas en croiser un » Ce sont de beaux animaux, mais un peu trop féroces même pour un amoureux de la nature comme lui. Ils se mettent en marche, évoluant à travers les cadavres de voitures sur la route qu'ils empruntent. Tout est assez désert, silencieux. Les morts se font rares et ils les éliminent dès qu'ils en croisent une. « Par là ! » affirme-t-il en montrant un panneau tombé au sol et indiquant la direction du golf à quelques kilomètres de là.

Rafaël regarda, interdit, l’homme qu’il n’avait pas toujours accueilli avec sympathie, alors qu’il se confiait. S’approchant finalement, il posa sa main sur son épaule, la pressant en un geste rapide, sans s’attarder dessus. « J’ai perdu une sœur aussi, pendant l’apocalypse. Ce n’est pas comparable, mais je sais que cette peine ne disparaît jamais vraiment. Je suis désolé pour toi. » Sa voix tremblait légèrement, il ne se confiait pas souvent sur elle. « C’est elle qui t’a poussé à te démener comme ça, n’est-ce pas ? » Après tout, lui aussi aurait tout fait pour sa sœur, même s’il n’avait pas la même force de caractère que Preston. Il ne put s’empêcher de sourire légèrement, alors que son ami niait avoir appris des tours à Ewok. « Quel dommage. J’ai grandi dans un cirque, tu sais, j’ai un peu appris à dresser les animaux… Ne t’étonnes pas si tu le vois faire une roulade, un jour ! » Il était bien conscient de l’impossibilité de la chose : Ewok ne devait répondre qu’à son maître, mais ça l’amusait.

« On verra par nous-même… » Et s’ils ne s’y trouvaient plus, ils iraient plus loin. Ils finiraient bien par en trouver. « C’était… effrayant. Déroutant. Et les enfants… » Que lui avait-on répété, exactement ? A quel point connaissait-il Shawna ou même Soo ? Le poids de cet échec pèserait toujours sur Raf, en tout cas. « Si on en voit… Hors de question de le laisser en vie. » Il était catégorique, mais il ne parvenait pas à être rationnel à ce sujet. Hochant la tête en voyant le panneau, il se mit à courir lui aussi. « Attends ! » Il s’était arrêté net, pointant le sol du doigt à Preston. « Là, deux traces d’animaux. » Un renard et un blaireau, peut-être. Mais il n’était pas connaisseur.

Spoiler:

Preston grimace « Désolé » souffle-t-il à propos de la sœur de Rafaël perdue pendant l'apocalypse. Il porte une main sur son cœur. « Tous ceux que j'ai perdu, oui. Ma femme, mes enfants, ma sœur... Ils me poussent à me démener... » Ils ont tous leur lot de regrets, de pertes pesant lourds sur leurs épaules. Le militaire a longtemps été tiré vers le bas par ces décès, mais aujourd'hui, ils sont sa force. Ils se forcent à agir de la bonne manière, toujours dans le positif pour qu'ils soient fiers d'eux. Ce n'est pas simple, on ne peut pas faire le deuil d'un enfant, mais il vit désormais avec.

« Une roulade hein » réplique-t-il, un sourire amusé aux lèvres tandis qu'il vient passer un doigt sur le plumage du faucon. « Oh, on peut leur apprendre tout un tas de trucs utiles. » D'un geste, il relève la main pour indiquer à l'oiseau qu'il peut s'envoler. « Est-ce que ça t’intéresserait d'en apprendre un peu plus sur la fauconnerie ? » Ce n'est pas un enseignement donné à tout le monde. Il ne faut pas avoir peur des rapaces et être suffisamment calme et maitre de soi pour ne pas transmettre tous ses émotions aux oiseaux.

Preston hoche doucement la tête et se garde d'insister trop. Il a eu des échos de ce qu'il s'est passé là-bas. Il se doute que ça a été assez traumatisant... « Les animaux reprennent leurs droits et à leurs yeux, nous sommes désormais des proies. Surtout qu'ils doivent fuir les rôdeurs, je suppose qu'ils ne font plus vraiment la différence entre les morts et les vivants. » Si auparavant, la cohabitation pouvait être possible, c'est désormais plus compliqué.

Il se penche pour observer les traces. « Blaireaux je dirais. Je reconnais ces traces. Nous en avions pas mal autour des champs de mon père à l'époque. Ils faisaient pas mal de dégâts. » Animal fouisseur, le blaireau est assez destructeur. « Je ne sais pas si ça se mange par contre » grimace-t-il. Le militaire remonte le regard juste à temps pour apercevoir Ewok fondre sur une proie. « Un lapin probablement, il est plus efficace que nous... » souffle-t-il, amusé.