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Vows made in wine

Mar 19 Fév 2019 - 15:42

Athènes, en septembre 2014.
« Je vous souhaite, à toutes et à tous, une excellente soirée ! »

Avec un sourire éclatant, Valérian effectua une élégante courbette qui acheva de séduire son public. Les applaudissements, comme une pluie cristalline, redoublèrent alors d’intensité et quelques commentaires approbateurs parvinrent jusqu’aux oreilles du grec, dont le sourire s’élargit. Il n’y avait pas à dire, Valérian était doué ; doué pour manipuler ses interlocuteurs, leur faire ployer le genou et les inciter à fourrer leur argent directement dans ses poches ! Et cela, sans avoir recourt à la force ou à l’intimidation. Oh que non ! L’arme favorite du grec était, de fait, une éloquence parfaitement maîtrisée, parée d’une redoutable politesse et d’un charme indéniable. Comme un marionnettiste à l’oeuvre, Valérian flattait ainsi l’orgueil de son public pour mieux le contrôler. À présent, il lui suffisait donc circuler au sein de la foule pour récolter le fruit son travail. Car cette conférence, si elle avait pour but de promouvoir la viticulture biodynamique, lui permettait en réalité de vanter les produits de GWC. En effet, Valérian n’apportait que peu de crédit à la biodynamie et se retenait à grand peine de pouffer à la mention de « forces cosmiques » et autre sottise dans le genre. Son père Giorgos avait cependant exigé sa présence à l’événement en raison de la participation de Mr Boutara, le principal concurrent de GWC - « Vole lui la vedette ! » avait ainsi tonné son paternel et Valérian, soucieux de satisfaire Giorgos, s’était exécuté.    

À l’occasion de cette conférence, Valérian s’était ainsi paré de son plus beau costume : un deux pièces sobre, mais chic ! dont le pantalon et la veste d’un noir profond avaient été taillés sur mesure. Dépourvu de cravate, une pochette en soie dépassait cependant de sa veste et affichait un motif rouge et bleu tout à fait aguicheur. Un verre de vin à la main - un nykteri au noble millésime, le grec parcourait son public d’un air satisfait depuis une estrade où il avait réalisé la présentation de vins santorinis que son entreprise, quelle coïncidence ! proposait justement.

Parmi l’assemblée, il remarqua des femmes dont les joues et le décolleté s’empourprèrent à la vue de son sourire. Gênées, toutes détournèrent immédiatement le regard pour s’absorber dans la soudaine et absolue contemplation du programme de la soirée, tout en réprimant cependant une moue béate. À l’une d’entre elles, Valérian adressa même une discrète oeillade, comme un archer qui décoche un trait pour atteindre sa cible ! Un gloussement particulièrement sonore l’informa aussitôt que sa flèche avait fait mouche. Quelques hommes, debout au premier rang, affichaient quant à eux un air maussade, clairement agacés par son comportement de coq de bassecour. L’un d’entre eux, un monsieur à la mâchoire serrée, attrapa soudain sa femme par le bras pour l’entraîner au fond de la salle - véritablement excédé par ses joyeux applaudissements.  

« Je vous remercie ! » roucoula le grec, tout en levant son verre pour saluer une dernière fois l’assemblée.

Avec l’air d’une vedette que le devoir appelle, Valérian fit mine de descendre de son piédestal. C’est à ce moment là que ses yeux croisèrent le bistre auréolé de malice d’un regard qui, chose surprenante, ne se déroba pas. Bien au contraire ! Celui-ci, aussi aiguisé qu’un harpon, captura le regard du grec et le traîna impitoyablement après lui, jusqu’à le faire suffoquer comme un poisson hors de l’eau ! Absorbé dans la contemplation de ce regard stupéfiant, Valérian en avait en effet oublié de respirer. L’air décontenancé, il revint finalement à lui, quelque peu honteux, et passa un doigt fébrile dans le col soudain trop serré de sa chemise. Comme un homme brusquement tiré d’une plaisante rêverie, Valérian recouvra peu à peu ses esprits et réajusta un sourire de façade, dont les commissures étaient pourtant tièdes : Qui était-elle ? Son esprit fouillait avec empressement dans sa mémoire, en quête d’un nom assorti à cette jolie paire d’yeux. Pourtant, celui-ci ne lui revenait pas et le grec se rendit bientôt à l’évidence : cette mystérieuse demoiselle lui était parfaitement inconnue. Une méprise à laquelle il comptait bien remédier !

Après avoir ajusté la veste de son costume, Valérian descendit de l’estrade pour se mettre en quête de la demoiselle. Comme un serpent au coeur d’une jungle lustrée, le jeune homme ondula avec aisance parmi la foule, mais fut contraint de s’arrêter à plusieurs reprises pour saluer des invités a-bso-lu-ment charmés par son discours d’ouverture ! « Un grand merci à vous ! » leur répétait alors le grec, dont le regard fuyant trahissait l’artifice de son sourire. Valérian les aurait de fait volontiers écartés de sa route, sans ménagement aucun, pour se consacrer à sa quête personnelle. Il devait la trouver ! Il était hors de question de laisser un tel mystère s’évanouir dans la nuit !

Et puis, soudain, il la vit. Installée au bar, une jambe délicatement croisée sur l’autre, un verre de vin à la main. Elle ne le regardait pas et son indifférence frappa Valérian avec la puissance d’une déferlante. Ebranlé, le jeune homme se cramponna de toutes ses forces à son assurance, et parvint finalement à maintenir un sourire éclatant à la surface de son visage. Le coeur battant la chamade, il prit son courage à deux mains et s’élança enfin vers la responsable de tant d’émois.      
Parvenu à sa hauteur, Valérian esquissa une élégante révérence puis psalmodia de la voix la plus mielleuse dont il était capable :

« Mademoiselle, je vous souhaite le bonsoir. Veuillez excuser mon interruption, mais il me semblait avoir observé au loin le flamboiement de bijoux exceptionnels, dont je découvre à présent l’écrin : tout aussi somptueux, dois-je dire ! Me voici par conséquent face à vous, ébloui par un éclat sans pareil ! Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, puis-je m’enquérir du nom que l’on donne à votre grande beauté, Mademoiselle ? »

Il avait certainement fait mieux et attribué de meilleurs compliments à de moindre beautés. Mais Valérian, une fois n’est pas coutume, était réellement impressionné par cette mystérieuse inconnue dont il dévorait silencieusement la silhouette, du bout des yeux.
Valérian Zacharias
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Re: Vows made in wine

Sam 23 Fév 2019 - 22:23

« … et surtout, passez mon bonjour à votre père. » répéta Loukas Petridis, figure incontournable de la haute société Athénienne. Le septuagénaire serra chaleureusement la main d'Elena, avant de disparaître pour jeter son dévolu sur un autre convive. En attendant, l'héritier de GWC achevait de conquérir de potentiels nouveaux collaborateurs et la foule s'embrasait au terme de son discours. Discours parfaitement maîtrisé d'après les quelques échos parvenus jusqu'à elle avant que le retraité, fondateur d'une chaîne célèbre d'hôtels en Grèce ne vienne à sa rencontre. La biodynamie émergeait progressivement, largement encouragée par ce genre de manifestations à la tête desquelles des personnalités influentes s'évertuaient à vanter les mérites d'une telle pratique. Si la brune accordait une réelle importance au label environnemental, elle devait reconnaître ne pas prêter grand crédit à d'autres méthodes qu'elle jugeait farfelues. Pour autant, elle avait fini par céder devant l'insistance de son père qui à l'inverse, croyait dur comme fer que l'avenir résidait dans les substances naturelles. Ça, plus le fait que tort ou raison, le phénomène prenait de l'ampleur et qu'elle ne pouvait simplement pas l'ignorer.

Aussi se retrouvait-elle confortablement installée au bar de la salle de réception, sirotant son grand cru, ressassant quelques beaux souvenirs de son dernier passage en France. C'est à cet instant que le conférencier du soir lui apparut, l'arrachant à ses souvenirs pour lui articuler quelques formules supposément flatteuses. Quelques secondes s'écoulèrent entre l'étonnement et la réaction de la grecque.

« Vous êtes meilleur orateur que séducteur Monsieur Zacharias. Moi qui pensais que l'un et l'autre étaient intimement liés.» répondit sans détour la jeune femme sans ciller, alors que son regard pétillant sondait sans réserve celui du maître de cérémonie. « Enfin un domaine où vous dépareillez de votre géniteur. » poursuivit la brune, faisant largement allusion aux rumeurs de coureur de jupons du chef de clan. Dans leur milieu, chaque anecdote était une arme capable de faire ou défaire une réputation. La famille de Valérian était connue en Grèce. Gorgios était un redoutable homme d'affaires, mais pour un pays qui prônait les valeurs familiales, l'annonce de son divorce avait fait jaser beaucoup d'aristocrates. Nikola, tout comme Elena, n'avaient jamais accordé le moindre intérêt ni aux potins qui se relayaient à vitesse grand V dans ce genre de soirées mondaines, ni aux affaires personnelles de chacun. C'est ce qu'il manquait à Hortos pour atteindre des sommets dans le monde des finances arguaient certains ; du vice. Souvent, sa fille en arrivait à être d'accord avec les opinions. Son père était bien trop droit pour ce genre de métier. Elle n'en était pas pour autant moins fière. Nikola était un homme de l'ombre que la lumière n'intéressait pas. Il n'agissait toujours que par conviction profonde que ce qu'il entreprenait était juste. Il délaissait les négociations et autres activités plus pénibles à d'autres bien mieux qualifiés et armés que lui.

La jeune femme continuait de balayer du regard son vis-à-vis, une lueur malicieuse virevoltant sous ses prunelles noisette. Elle porta tranquillement sa coupe à ses lèvres, le précieux nectar venant vite lui chatouiller la langue, avec une finesse propre aux grands crus. Tourmenter ce pauvre homme pouvait s'avérer être une activité fort distrayante, mais elle jugea silencieusement que cette simple entrée en matière suffirait à refréner ses élans d'enjôleur du dimanche. Aussi, bonne joueuse et considérant que le message était passé, la brune déposa les armes. « Energique, complexe... » Elle lâcha des yeux le jeune héritier pour suivre avec passion les mouvements rotatifs du vin dans sa coupe. « Je vous conseille ce non-millésimé. Le Champagne est le seul vin à ouvrir l'esprit et affiner la langue dit-on. Ce sera un allié précieux pour dispenser votre attirail de compliments à une telle foule. » Ses yeux retrouvèrent ceux du brun avec espièglerie, avant qu'elle ne termine le contenu de son verre, qu'elle reposa sur le marbre du comptoir. La jeune Hortos consentit alors à tendre une main vers Valérian. « Elena Hortos. »
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Re: Vows made in wine

Jeu 28 Fév 2019 - 22:44

Arborant le sourire le plus ravageur dont il était capable, Valérian scrutait la mystérieuse inconnue avec une avidité qu’il peinait à dissimuler, tel un prédateur qui évalue silencieusement l’onctuosité de sa proie. La jeune femme, âgée d’une petite trentaine d’années, avait un éclat de malice plein les yeux, une bouche généreuse et une mâchoire dont la ligne, volontaire, était parfaitement tracée ! Au coeur de cet attirail tapageur, de décolletés plongeants et de maquillages aguicheurs, la beauté naturelle de l’inconnue fit à Valérian l’effet d’une fraîcheur inédite. Quelque peu coi, il observait donc la demoiselle derrière une assurance on-ne-peut-plus radieuse, tandis que celle-ci se tournait vers lui pour brusquement railler les compliments dont il l’avait couronnée - avec une élégance incontestable, cependant !

D’une main experte, la jeune femme s’était en effet approprié le jeu de Valérian pour immédiatement en redistribuer les cartes et prétendre à la victoire. Avec l’ombre d’un sourire narquois, le grec esquissa alors une moue affectée et s’empara du jeu que lui tendait l’inconnue. Excellent ! Cette conversation s’annonçait infiniment plus excitante qu’il ne l’avait imaginée. En plus de sa beauté désarmante, la demoiselle était effectivement dotée d’un répondant sec, aussi vif qu’un coup de fouet, qui enchanta aussitôt le grec. L’allusion à Giorgos avait cependant froissé son ego et Valérian se fit un instant violence pour réprimer l’indignation que faillit révéler son visage. L’adultère de Giorgos s’était répandue comme une traînée de poudre parmi la Haute, très en proie aux racontars, tant et si bien que son héritier, et fervent admirateur, s’évertuait désormais à en étouffer les braises pour redorer le blason familial. Sa dévotion envers Giorgos aveuglait Valérian et la remarque de l’inconnue manqua par conséquent d’exposer sa contrariété, dont la lueur fit un instant briller ses yeux. Après une lutte acharnée contre ses humeurs, le maître de cérémonie parvint cependant à demeurer maître de lui-même et élargit considérablement son sourire.

« Outch, touché ! » S’esclaffa t-il en portant comiquement une main à con coeur. Puis il ajouta d’une voix mielleuse - cependant piquée d’espièglerie : « Je dois en effet admettre que les mots, très limités, ne sont pas toujours en mesure de flatter une beauté telle que la vôtre ! Ils feraient par conséquent défaut au meilleur des séducteurs en votre compagnie, Mademoiselle. »  

Valérian, sans quitter la jeune femme des yeux, leva alors son verre en hommage à celle-ci avant d’en boire une gorgée. Ses yeux verts, décidément piqués d’intérêt, surveillaient l’inconnue dont le regard ambré et provocateur se ruait constamment à sa rencontre. Un bras de fer silencieux semblait de fait s’être engagé entre eux ; chacun souhaitant faire ployer l’autre sous l’intensité de son regard ! Absorbé par les iris à la fois dorés et mordants de sa partenaire, Valérian n’était, à dire vrai, plus en mesure de lâcher prise : proprement fasciné, il se trouvait littéralement suspendu aux prunelles adverses, tel un poisson ferré qui remue faiblement au bout d’une ligne ! Son sourire et son orgueil de façade perduraient cependant, et l’appréhension qu’il avait ressentie s’était désormais muée en une allégresse toute particulière.

Malicieuse, la jeune femme le libéra finalement de son emprise pour s’intéresser au vin qu’elle fit danser dans sa flûte. Elle parut un instant déposer les armes, avant de le piquer d’un revers inattendu qui, une fois sa surprise passée, fit rire Valérian : « En effet, Mademoiselle, à condition cependant de ne pas lui succomber ! Le Champagne, s’il donne des ailes à n'importe qui, peut en effet s’avérer dangereux et inciter les moins avertis à révéler leurs plus terribles secrets - comme l’existence malencontreuse d’un slip à motifs léopard, par exemple ! » Il lui adressa un clin d’oeil espiègle, puis ajouta d’un ton quelque peu désinvolte : « Quant-à cette foule, je dois vous avouer qu’il n'est pas bien difficile de l’impressionner ! L’astuce consiste simplement à la flatter tout en lui adressant de larges sourires, et le tour est joué ! En ce qui vous concerne, cependant, il est évident que mes talents d’orateur seuls ne suffiront pas. Votre simple élégance suffit à désarmer mes humbles compliments ; c’est pourquoi je gouterai volontiers à ce Champagne, avec l’espoir qu’il m’engaillardisse et affine mon esprit, comme vous l’avez si bien souligné ! » Petite pause : « Et tout cela au risque de vous dévoiler la couleur de mes sous-vêtements ! »

La galanterie habituelle n’ayant pas fait mouche, Valérian avait par conséquent ajusté le tir et paré son discours d’une pointe d'humour. Fin tacticien, il prolongeait de fait la partie engagée par l’inconnue et s’activait à découvrir ses faiblesses pour mieux les exploiter ! Ainsi, lorsque la jeune femme consentit finalement à lui dévoiler son nom, c’est avec une douceur et un respect calculés que Valérian choisit de lui serrer la main au lieu de la lui baiser. Compte tenu de son fort tempérament, Elena Hortos n’aurait certainement pas apprécié le geste.

« Elena Hortos ? Enchanté de faire votre connaissance. Je suis Valérian. » Ajouta t-il quelque peu inutilement, par simple souci de politesse, avant d’enchaîner d’un air intéressé : « Si je ne me trompe pas, vous êtes la fille de Nikola Hortos ? Mon père m’a beaucoup parlé de votre famille. Lui et Nikola n’entretiennent que très peu de rapports, mais ils ont toujours été cordiaux. Giorgos éprouve en effet un grand respect pour votre père et le considère comme un trésor de sagesse au coeur d’une profession de serpents. » fit Valérian, en imitant la voix grave de son père avec une précision troublante.

Se tournant vers le barman, le jeune homme ordonna alors deux nouveaux verres de vin : « Nous prendrons chacun une nouvelle flûte de ce Champagne, Monsieur ! » Un nouveau sourire fut adressé à Elena : « Accepteriez-vous de vous joindre à ma folie, Mademoiselle Hortos ? »
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Re: Vows made in wine

Dim 17 Mar 2019 - 16:31

Sans prétention aucune, la jeune grecque n'était pas étrangère aux tentatives d'approche de la gent masculine. Elle était consciente d'avoir quelques prédispositions physiques qui ne laissaient pas indifférents ces derniers, quand bien même l'inverse n'était pas vrai. Elena n'était pas de ces prédatrices qui se délectaient de corps à embrasser ou de cœurs à briser. Si elle n'était pas inexpérimentée dans ce domaine et qu'elle appréciait la bonne compagnie de temps à autre, elle n'en avait jamais fait une priorité dans sa vie ; collectionner les amants ou dénicher l'amour de sa vie, elle laissait la tâche aux autres. Elle aspirait à bien plus de simplicité. Se laisser porter, vivre au jour le jour, c'était ça qui lui faisait se sentir vivante. Néanmoins, elle savait reconnaître les indices de quelques émois, et en apprécier le caractère flatteur. Le regard ardent sans être concupiscent dont l'homme la couvait depuis qu'il était venu la trouver ne la perturba aucunement. Loin d'être déstabilisée, elle n'appartenait pas à cette catégorie féminine dont le derme s'enflammer dès lors qu'un homme venait croiser leurs yeux papillonnant. D'un naturel impassible, la jeune femme retournait constamment au duel avec son soupirant du soir, sans que les longs cils à peine relevés de noir n'en soient troublés.

Il y avait pourtant matière à, consentit silencieusement la brune. Pas plus que le brun, elle n'éprouva pas la moindre gêne à détailler son vis-à-vis. Ses prunelles ambrées glissèrent sur le visage de l'homme. Il n'avait ni la silhouette élancée et imposante d'un athlète, ni la symétrie effrayante de ces visages parfaits. Il était de taille moyenne. Il portait sur lui cette assurance qui l'avait conduit jusqu'à elle. Homme de négociations qui a l'habitude de mener son combat jusqu'à la fin. Homme d'affaires qui ne voit que la conquête autour de lui. Valérian ressemblait à ces gens autour d'eux. À ces hommes et femmes qui serpentaient et semblaient vouloir s'approprier le monde sans laisser la moindre miette à quiconque. Elena n'était qu'un terrain de jeu de plus. Elle le savait, elle s'en moquait. D'autre part, il avait ce regard sombre. Intense. Qui invitait à s'y perdre. L'homme n'était pas dénué de charme, la jeune femme était forcée de l'admettre.

Et alors qu'il continuait à jouer, la grecque acceptait de se prêter au jeu, esquissant quelques risettes devant les efforts du maître de cérémonie.

« Je suis pourtant une femme simple, Monsieur Zacharias. Une femme qui aime les mots plus que les fleurs quand ils sont vrais. » De nouveau, ses yeux pétillaient, venaient confronter ceux de son adversaire/prétendant. Elle reprenait les armes. Un nouveau mauvais point pour ces flatteries dégoulinantes de mauvais goût. Quelle audace d'accuser les mots quand il était seul responsable de leur mauvais usage ! Du cuisiné tout prêt. Du réchauffé. Voilà ce qu'il lui servait. Et Elena pouvait continuer à feindre les offusquées. Elle leva toutefois son verre en écho au geste de Valérian. À elle ? À eux ? Au vainqueur de cette bataille sordide mais terriblement divertissante ? Qu'importe, la coupe était dressée et leur tête-à-tête se poursuivait sans que l'un ou l'autre ne démontre la moindre envie de battre en retraite. Lui, n'avait pas l'intention de rentrer chez lui bredouille quand elle s'amusait grandement de le voir ramer à contre courant, et s'aventurer dans l'autodérision. Elena sentit sa voix se déployer dans un éclat de rire spontané. Naturel. Contagieux. De ceux qu'elle ne connaîtrait plus jamais plusieurs mois plus tard.

« Allons, vous ne tromperez personne. » Elle se pencha légèrement en invitant l'homme à s'approcher, prête à livrer une confidence : « Ils sont noirs. » Les sous-vêtements. L'homme était peut-être un orateur hors pair, un homme avec de l'assurance à revendre, mais il n'y avait pas la moindre chance pour qu'un motif quelconque ne vienne jurer avec l'élégance sobre et classique qu'il arborait. Joueuse, Elena était prête à parier. Un sourire malicieux, presque provocateur ponctua sa déclaration, alors qu'elle se redressait sur son tabouret en brisant la soudaine proximité avec le grec.  Et alors que la discussion reprenait son cours, Valérian avoua sans surprise connaître son père. Un sentiment de fierté lui gonfla la poitrine comme à peu près toujours lorsqu'elle évoquait son géniteur. Un trésor de sagesse. Elena aimait cette comparaison. Un nouveau sourire, plus doux, plus vrai, dénué d'espièglerie retroussa ses lèvres cette fois. Un point pour Valérian.
Elle acquiesça doucement, acceptant l'invitation du jeune homme. « En accaparant ainsi le maître de cérémonie et jeune héritier célibataire de surcroît, je me risque à l'animosité générale. C'est moi qui suis folle de prendre pareil risque. » Elena fit de grands yeux comme pour grossir la dangerosité de sa situation.

Le serveur revint quelques minutes seulement après chargé des deux coupes qu'il disposa près des deux jeunes gens.
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Re: Vows made in wine

Mar 26 Mar 2019 - 19:44

Valérian, accoudé au bar dans une attitude de nonchalance absolue, haussa imperceptiblement les sourcils avant d’afficher une moue offensée à la remarque d’Elena : « Vous doutez de l’honnêteté de mes compliments ! Je vous assure pourtant qu’ils ne sauraient être feints en votre présence. Certes, l’imagination devient parfois un atout de choix lorsque l’inspiration nous fait défaut ; dans ce cas, libre à chacun d’interpréter ses désirs chez la femme qu’il souhaite flatter. » Il sourit à la jeune femme et lui lança un regard entendu : « Mais votre beauté m’offre un éventail d’idées si large qu’il serait absurde de ma part d’y glisser un mensonge. »

Le grec échangea avec Elena un coup d’oeil pétillant et se fendit d’un sourire sincère. Ah ! Il avait beau couvrir sa partenaire d’éloges, celle-ci n’était pas dupe ! Et Valérian, quelque peu pantois, le réalisait parfaitement, car jamais Mlle Hortos ne parut désarçonnée par les démonstrations de politesse qu’il livrait à son impassible forteresse. Bien au contraire ! La jeune femme se contentait d’écarter ses assauts par le biais d’élégantes chiquenaudes pour jeter sans scrupules Valérian au bas de ses remparts. Mais il en fallait bien plus pour décourager ce-dernier ! Le maître de cérémonie, radieux, persévérait en effet et s’activait à puiser dans ses ressources la répartie nécéssaire pour surpasser son adversaire : à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire !

Paré d’un nouvel argument, Valérian brandissait ainsi sa lance, prêt à lancer l’assaut, lorsque carillonna soudain le rire d’Elena. Un son si léger et vibrant d’enthousiasme qu’il prit au dépourvu le grec. Sous ses yeux ébahis, une brèche apparut soudain dans l’épaisse carapace de son adversaire et lui permet d’entrevoir au delà de celle-ci.

« Je ne trompe personne ? » Répéta Valérian, étonné par la remarque d’Elena. Sans crier gare, celle-ci franchit alors la distance qui les séparait pour lui souffler une confidence dans l’oreille - une confidence qui ne manqua pas d’élargir le sourire du grec : « Noirs ? Vous avez une bien piètre opinion de moi. Je me plie en quatre pour prétendre à une certaine élégance et voilà que, d’un revers de main, vous balayez tous mes efforts ! » Malicieux, il reprit : « Non, Mlle Hortos. Je crains que vous m’ayez très mal jugé, car je porte en vérité un sous-vêtement gris. »

Une sourire au coin de l’oeil, le grec plongea son regard dans celui d’Elena : Dieu qu’elle était belle ! Valérian ne se lassait décidément pas d’admirer ses yeux de miel, si doux et mordants à la fois. Et la répartie de la jeune femme lui plaisait tout autant ! Ses anciennes partenaires n’avaient jamais été en mesure de lui clouer le bec : Elles avaient toutes choisi de capituler, une fois les hostilités déclarées, en lui claquant la porte au nez au lieu de chercher à répliquer. Ce qui constituait un ennui terrible pour Valérian : rien ne l’amusait en effet plus que les joutes verbales, pendant lequel il mettait allègrement à profit son talent de baratineur et l’éclat de son sourire ! Mlle Hortos était issue du même milieu que lui, ce qui expliquait probablement la facilité avec laquelle elle lui renvoyait la balle.    

Le sourire tendre qui étira les lèvres d’Elena, à l’évocation de son père, fit comprendre à Valérian qu’il avait finement joué la carte du paternel : Giorgos n’avait jamais évoqué en ces termes Nikola Hortos, qu’il jugeait au contraire trop effacé du paysage viticole. Valérian soupçonnait pourtant son père d’éprouver un certain respect pour le patriarche Hortos, dont il ne critiquait que rarement le nom. Chose exceptionnelle, concernant Giorgos ! Le grec avait par conséquent pris la liberté d’interpréter l’opinion de son père, et ne regrettait en rien son audace : Elena avait un sourire charmant !

Valérian s’esclaffa lorsque la jeune femme feinta une inquiétude à l’idée d’accaparer son attention : « Ah ! Vous croyez donc ? Figurez-vous que depuis mon irruption à vos côtés, je remarque que la moitié des hommes de cette salle vous reluquent de manière scandaleuse ! Quant-à l’autre, j’imagine qu’elle ne s’y risque pas en raison de l’épouse suspendue à son bras. Je ne saurai par conséquent dire lequel d’entre nous encourt le plus de périls à partager ce verre. » L’air grave, il s’approcha d’Elena et lui confia : « Mais j’imagine que si nous restons ensemble, tout se passera bien. »

Portant le Champagne à sa bouche, Valérian adressa un clin d’oeil à Elena : « Dans notre meilleur intérêt, je pense par conséquent que prétendre à une attirance mutuelle décourageait nos admirateurs respectifs. Je pourrais par exemple…» Il hésita un instant, avant de s’engaillardir d’un sourire à la fois séducteur et malicieux : « Poser ma main sur la vôtre ? »
Valérian Zacharias
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Re: Vows made in wine

Dim 14 Avr 2019 - 17:02

Il était drôle de voir Valérian s'offusquer du peu de crédit qu'elle accordait à ses compliments. Compliments qu'il s'employait à dispenser avec une énergie surprenante, Elena devait bien l'admettre. Malgré un numéro on ne peut plus vieux jeu et qui aurait facilement pu rebuter la jeune femme, cette dernière s'amusait au contraire de voir l'homme d'affaires d'apparence fier s'abaisser à une sérénade tout en essuyant dignement sa résistance piquante. Habile et persévérant, comme investi d'une mission qu'il mènerait jusqu'au bout qu'importe les obstacles que pouvait hisser sa proie du soir. Le jeu aurait pu durer longtemps, Elena aurait pu minauder tout en repoussant les avances de l'homme jusqu'à l'abandonner tout simplement à son sort à l'issue de la soirée. Mais à son tour, elle avait développé un réel intérêt pour l'orateur du soir.

« Gris ? » répéta avec étonnement Elena, avant de feindre la déception. « C'est une couleur terriblement décevante. » Le gris n'était-il pas un compromis peu risqué entre l'élégant noir et l'immaculé blanc ? A l'image de la parade du grec. Insipide et dénuée d'audace. Le sous-entendu flottait malicieusement entre les deux jouteurs.

Finalement, après avoir subtilisé les cartes d'Elena pour en tirer son propre avantage en invoquant une supposée ardeur générale à son égard, l'homme s'aventura jusqu'à proposer un rapprochement physique. En parfait cavalier qui demande son accord à la femme qu'il convoite. Ou en mauvais élève qui n'a toujours retenu la leçon. Combien de fois devrait-il être éconduit avant de comprendre ? La jeune femme fit néanmoins glisser sa main sur le quartz brillant du comptoir, sans lâcher des yeux le brun face à elle.

« Parce que votre engouement à corrompre mon cœur ce soir serait presque de taille à flatter mon ego, je suppose que vous avez gagné le droit d'écarter vos rivaux potentiels. » répliqua la grecque, l'oeil rieur. « Cependant, j'ose espérer que vous avez d'autres tours dans votre sac pour la suite de la soirée, Monsieur Zacharias. Même si je suis une femme qui aime flâner avec le danger, je ne me risquerais pas à devenir le modèle grossier de quelques poupées vaudous pour m'être exhibée en votre compagnie sans une solide garantie.»

Le regard pétillant de la jeune femme défia celui de Valérian. Elle voulait plus. Plus que de simples phrases pré écrites, plus qu'une cour vulgaire glorifiant son physique. Elle voulait que Valérian cesse d'être ce gentleman qui faisait vibrer les demoiselles aux rêves de grand amour pour toujours, qu'il soit l'homme qu'il était réellement. Qu'il assume ses vices et ses ambitions, qu'il laisse tomber le masque. Il était un prédateur sans foi ni loi, ce goujat qui disgrâce les plus vertueuses et envoûte les plus farouches. Il était le cauchemar de ces femmes à la recherche perpétuelle de l'âme sœur. De ces malheureuses qui n'aspirent qu'à être aimées par l'homme parfait. Valérian était loin d'être l'époux idéal. Ce qui tombait plutôt bien ; Elena n'était pas prête à se laisser passer la bague au doigt.

« Ménagez-vous Valérian, et gardez votre... « éventail d'idées » pour d'autres occasions. »

La jeune femme laissa sa main posée sur le comptoir près de son verre. Parce qu'elle avait décidé de mettre un terme au jeu peu convainquant de l'italo-grec, qu'elle était décidée à jouer tout autrement. Elle resta alors suspendue au regard de son vis-à-vis, curieuse de voir si l'homme consentirait à mettre de côté le masque et s'il finirait de demander l'autorisation, quand tous les deux savaient pertinemment qu'il était homme à prendre plus qu'à attendre que ça ne lui tombe dessus.
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Re: Vows made in wine

Ven 17 Mai 2019 - 14:55

Son jeu en main, Valérian adressa un regard brûlant à son adversaire tandis qu’accéléraient les battements de son coeur. Il était conscient d’avoir joué gros en proposant à la jeune femme un rapprochement physique : l’humour, mêlé à l’audace, faisait généralement bon ménage face à la gent féminine et lui avaient permis, à plus d’une reprise, de tirer son épingle du jeu. Mais Elena Hortos était une adversaire de taille ; Valérian l’avait deviné à sa seule façon de se tenir à l’écart de la foule, droite et distante. Aucun des invités ne s’était ainsi risqué à aborder Elena, à l’exception de Valérian qui avait aussitôt reconnu en la jeune femme un adversaire à sa hauteur. Une conquête de choix à épingler au sommet de son tableau de chasse et qui ferait, de surcroit, beaucoup d’envieux parmi les convives. D’un pas conquérant, il s’était par conséquent avancé vers cette beauté froide, prêt à croiser le fer en sa compagnie, sa meilleure lame affutée pour l’occasion !

Valérian s’était préparé à un affrontement musclé, mais pas à ce point. Quelque peu déconfit, le grec se voyait en effet démuni de ses meilleurs atouts au fur et à mesure que progressait leur aimable discussion. L’un après l’autre, il les déposait en effet avec prudence, dans l’espoir de faire mouche, avant qu’Elena ne les balaye d’un simple revers de la main. Le combat était rude, mais Valérian refusait de s’avouer vaincu ! Il était hors de question pour lui de tirer sa révérence, surtout pas en la présence d’autant de témoins !  

À force de courbettes, le grec renouvelait ainsi ses compliments et ajustait à chaque tentative son angle d’attaque. Il était, en effet, intimement convaincu de l’existence d’un orgueil typiquement féminin que le jeu de la séduction consistait à débusquer. Elena était fière, et pourtant la flatterie semblait n’avoir aucun effet en sa compagnie. Pire encore, elle semblait renforcer l’épaisse armure de la jeune femme et allumer une lueur dangereuse au fond de ses yeux. C’est pourquoi, lorsque Mlle Hortos avança sa main sur la table et planta brusquement ses prunelles dans les siennes, Valérian sut qu’il avait raté son coup.

D’un ton courtois, la jeune femme mit alors un terme à ses efforts et pointa du doigt les véritables motivations de Valérian, qu’elle railla sans se départir de son sourire à la fois doux et féroce. Ce faisant, elle lui arracha littéralement ses cartes en main pour les lui jeter tout bonnement à la figure ! S’il parvint à conserver son sourire, Valérian fut pourtant stupéfait par la manoeuvre d’Elena et demeura muet l’espace d’un instant. Celle-ci l’avait en effet pris à contre-pieds, faisant complètement fi des règles du jeu qu’il avait jusqu’alors suivi avec assiduité.

Pris au dépourvu, Valérian retrouva cependant vite son assurance habituelle et tenta de sauver les apparences à l'aide d’une ultime pirouette : « Le modèle de quelques poupées vaudous ? Quelle drôle d’image vous faites vous de moi ! Loin de moi l’idée de… » Il s’interrompit brusquement, au moment où se haussaient les sourcils adverses, pour se fendre contre toute attente d’un petit rire coupable et changer radicalement d’approche : le grec comprit en effet le jeu qu’essayait d’instaurer son adversaire et les nouvelles règles que celui-ci impliquait. Pour remporter cette partie, il lui faudrait abandonner les sentiers battus et s’engager sur une route bien plus hasardeuse. Soit. Prenant de l’élan pour mieux repartir à la charge, Valérian lança un regard franc à Elena et dit : « Très bien, j’imagine qu’il est inutile de prétendre à davantage de courtoisie. J’aurais beau me plier en quatre que vous ne seriez pas dupe ! Et à raison : je dois avouer qu’à compter du moment où je vous ai aperçue, j’ai effectivement souhaité vous exhiber à mon bras et faire saliver de jalousie mes collègues, dont la plupart ne m’inspire pas grande sympathie et me déteste en retour, je suppose »

Valérian but une gorgée de Champagne avant de reprendre d’un air nonchalant : « Croyez-le ou non, je suis cependant heureux de vous avoir sous-estimée : j’étais persuadé que vous séduire ne serait pas chose facile, mais vous êtes tout de même parvenue à me surprendre. » Il la regarda de ses yeux verts : « Et ça me plaît terriblement. » S’il ne toucha pas la main de la jeune femme, Valérian la contempla alors si ouvertement qu’il aurait été malvenu pour quiconque d’intervenir à cet instant et de rompre une telle intimité.

Valérian lâcha finalement la jeune femme des yeux et déclara : « La garantie que je vous offre pour cette soirée, si vous accepterez de la passer en ma compagnie, est celle de vous dire la vérité. » Nouvelle gorgée de vin, brève hésitation et enfin : « Et vous, Elena Hortos, quelle vérité êtes-vous en mesure de m’avouer en retour ? »
Valérian Zacharias
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