-    Mon père était pompier et ma mère institutrice. Ils ont mis énormément de temps à m’avoir ce qui fait que je suis leur seule enfant. Je dois avouer que j’aurais vraiment aimer appartenir à une grande fratrie.

-    Une enfance tout ce qu’il y a de plus normale, une scolarité basique et là où certains parents souhaitent voir leurs enfants devenir médecins ou faire un métier prestigieux, les miens m’ont laissée faire ce que je souhaitais. De nature plutôt rêveuse et rapidement attirée par la photographie, c’est tout naturellement que j’ai décidé de suivre cette voie.

-    C’est au lycée que j’ai rencontré Asher. Il était tout ce qui m’insupportait chez quelqu’un. Monsieur était capitaine de l’équipe de foot et croyez moi qu’il aimait bien le faire savoir. Il aurait pu avoir toutes les filles qu’ils voulaient mais c’est moi qu’il a choisi et autant vous dire qu’il a dû faire énormément d’efforts pour que je finisse par lui accorder le bénéfice du doute.

-    Allez savoir pourquoi mais assez vite, j’ai oublié tous mes aprioris sur lui. Je me suis rendue compte que contrairement à ce que j’avais pu penser de lui, Asher était quelqu’un de bien, prêt à aider les autres et surtout, il faisait attention à moi, il était attentionné.

-    Juillet 2009. 19 ans, on a décidé de franchir le pas et on s’est marié. C’était jeune oui mais au fond de moi, je savais déjà qu’il était celui avec qui je voulais passer le reste de ma vie et là encore, mes parents ont fait le choix de me soutenir et de valider ce mariage. Bon, mon père a quand même voulu mettre un petit coup de pression à Asher mais ce dernier s’en est plutôt assez bien tiré puisque cela fait maintenant 14 ans que je suis mariée avec lui.

-   Novembre 2011. Lorsque j’avais 21 ans, la vie a décidé qu’elle avait été trop gentille avec moi puisqu’un soir, j’ai reçu le genre d’appel que personne ne souhaite recevoir. Mes parents venaient d’avoir un accident de voiture et n’avaient pas survécu. Encore aujourd’hui, je me dis que j’avais de la chance d’avoir Asher prés de moi puisqu’encore une fois, il a été mon plus grand soutien.

-    La photo est alors devenue mon exutoire et pendant quelques temps, je me suis noyée dedans pour oublier mon chagrin, oubliant presque l’homme qui partageait ma vie. D’un commun accord et parce que le travail d’Asher le nécessitait, nous avons pris la décision de quitter Los Angeles pour rejoindre Washington.

-   Septembre 2013. Lorsque nous sommes arrivés dans cette nouvelle ville, ce nouvel état, j’avais 23 ans. Il a fallu que je me batte bec et ongles pour réussir à me faire une place dans le monde de la photographie et là où je faisais la photographe pour des mariages et autres évènements, je passais mon temps libre à faire des photos de paysages, des portraits en continuant d’espérer qu’un jour, mes photos seraient exposées dans une galerie.

Octobre 2015: Une sirène retentit dans la ville. je suis au studio, en train de retoucher des photos lorsque je me rends compte que Asher m'a appelée une bonne vingtaine de fois et m'a laissé autant de messages vocaux. Il a peur, je l'entends à sa voix et j'ai du mal à comprendre pourquoi. Seulement, lorsque je remonte pour rejoindre l'accueil de la petite boutique de photos, mon patron m'ordonne de rentrer de suite à la maison. La peur se lit sur tous les visages, les gens crient, paniquent et j'ai la sensation d'être dans un film d'horreur. Alors que je sors, Asher déboule avec la voiture et me crie de monter, qu'il nous a pris quelques affaires et qu'on doit vite quitter la ville... J'étais loin de m'imaginer tout ce qui allait nous arriver...

Décembre 2015 : Cela fait maintenant 2 mois que cet enfer a commencé. Je continue d’écrire dans ce petit cahier tout ce qu’il se passe durant nos journées même si ces derniers temps, les rencontres sont plutôt rares et on commence à avoir un peu de mal à trouver de la nourriture. Avec Asher nous restons seulement tous les deux, on évite de se mêler aux autres groupes surtout que la dernière fois, le dernier groupe croisé a essayé de nous voler… je continue de rester optimiste, je suis sûre qu’un vaccin sera trouvé et que la vie pourra reprendre son cours normal.

Février 2019: On s'est trouvé un petit endroit aux alentours de Sacramento. C'est une petite maison, un peu isolée, parfaite pour éviter de croiser trop de monde, qu'il soit mort ou vivant. Avec Asher, on essaie de penser à autre chose qu'à tout ça et on se surprend à discuter de ce que notre vie aurait pu être si les rôdeurs n'avaient existé... On aurait probablement des enfants aujourd'hui et là où il y a encore quelques temps l'idée de faire une croix dessus était douloureuse, j'ai appris à vivre avec parce que clairement, des enfants, dans le monde de maintenant, auraient très peu de chances...

Juillet 2019: Encore une fois, la vie nous rappelle à la réalité en nous faisant comprendre qu'on ne peut pas rester trop longtemps à un endroit. Des pilleurs, encore et cette fois, la maison a fini dans les flammes. On n'a pas le choix, on doit quitter Sacramento et c'est donc, avec le peu d'affaires qu'il nous reste qu'on reprend la route...

Août 2020 : Il fait chaud, c’est intenable. On peut sentir les morts à plusieurs kilomètres à la ronde. J’essaie de continuer de croire que tout finira bien mais c’est de plus en plus compliqué. Avec Asher, on s’est encore disputé hier soir. Je suis fatiguée, je n’arrive pas à fermer l’œil parce qu’à chaque fois que je le fais, je les entends, j’entends leurs grognements. Ils sont partout, les endroits sécurisés sont de plus en plus rares et on sait tous les deux qu’il va falloir trouver un groupe si on veut avoir une chance de survivre. Notre prochaine étape ? Rejoindre Seattle.

Avril 2021: On est encore loin de Seattle et on commence même à se demander si rejoindre la ville est une bonne idée. C'est le début du printemps et j'aime tellement cette saison. Bientôt 6 ans que tout a commencé et lorsque je regarde Asher marcher devant moi, je ne peux pas m'empêcher de me dire que j'ai de la chance de l'avoir encore prés de moi... Je l'aime tellement... et s'il devait lui arriver quelque chose, je ne le supporterais pas...

Janvier 2022 : Nous avons rejoint un camp. Ils se font appeler The Remnants. C’est notre camp référent. Tout se passe assez bien, on rend service et en échange, nous avons de quoi survivre. On a rencontré quelques personnes, certaines sont devenues des ami(e)s. Finalement, rejoindre un groupe ce n’est pas si mal… et j’ose même croire qu’on pourrait vivre ici, sereinement… Mais Asher continue de croire qu’on serait mieux sur les routes.

Septembre 2022 : Lors d’une expédition, notre groupe s’est retrouvé coincé dans un vieil hôtel. Beaucoup, beaucoup trop de rôdeurs et j’ai cru qu’on n’allait jamais s’en tirer. Vraie journée de merde puisqu’un groupe d’hommes a décidé de s’en mêler. Heureusement, on a réussi à s’en tirer par je ne sais quel miracle…

Décembre 2022 : Avec Asher, nous sommes partis en expédition pour notre camp référent. Séparés, chacun dans un groupe, nous avons pris des directions opposées. Son groupe et lui avaient la tâche de trouver des pièces mécaniques et mon groupe et moi devions trouver des choses utiles pour les soins (médicaments, pansements, désinfectants etc…)
Mon groupe et moi sommes revenus mais au bout d’une heure, aucune trace de celui d’Asher. Une seule personne est revenue au camp et nous a fait savoir que le groupe avait été attaqué par une horde. Certains sont morts, d’autres disparus et je n’ai aucune idée de ce qui est arrivé à Asher.

Début Mai 2023 : 5 Mois qu’Asher a disparu, 5 mois que je n’arrive plus à dormir et 5 mois que je continue désespérément les recherches. Je sens au fond de moi qu’il est toujours vivant, je ne saurais expliquer comment alors je continue de garder espoir même si son absence est de plus en plus pesante.

Ces derniers temps, mes journées sont rythmées par mes recherches d'Asher et par mes petites expéditions pour aider le camp. Je me suis habituée à faire en sorte que mes journées se déroulent toujours de la même façon parce que ça m'évite de devenir complètement folle. Lorsque je suis là pour le camp, je sors avec d'autres personnes, on fouille des zones différentes tous les jours, à la recherche de tout ce qui pourrait aider et j'en profite aussi pour essayer de trouver quelque chose, tout ce que je peux, qui pourrait me donner ne serait-ce qu'un signe de la part de mon mari. Des fois, je dors au camp mais depuis quelques jours, je dors dehors. Je me suis trouvée un endroit en hauteur, que je peux surveiller facilement et qui me permet de voir un peu plus loin, au delà des habitations.