The Walking Dead RPG

Tout se bouscule et s’enchaine beaucoup trop vite pour que, dans notre état de nerfs et de fatigue, nous ayons réellement le temps de paniquer. De temps à autre, je cherche le regard d’Elliot pour me rassurer, me dire que la situation ne nous a pas encore plus échappé. Et je finis par lui lancer ma précieuse boite d’allumettes quand il est question de faire bouillir de l’eau. Elohim attrape ce qui semble être une énorme casserole en soufflant, d’un ton angoissé. « J’ai entendu une espèce de cours de d’eau dehors. Je reviens tout de suite. » Pour un peu, je me dirais qu’il fuit la pièce et je l’envierais presque.

Mais je reste avec Tasya, écoutant ce que me dit de faire Line, avant d’écarquiller les yeux quand mon cerveau finit par me rappeler ce qui va se passer. Et ce que je vais voir. Je ne suis définitivement pas prêt pour ça. « Seigneur… » J’aurais dû aller chercher de l’eau. Une longue inspiration, alors que de son côté, Line incite Tasya à respirer. J’ai moi-même récupéré un linge qui me semble propre, bien plus que tout ce qu’on peut avoir sur nous de toute façon.

Le temps semble brusquement suspendu. Je serais incapable de dire combien de temps Tasya pousse ou ce qui se passe autour de nous. Plus rien n’a d’importance alors que le soleil commence à pointer le bout de son nez. La lumière se fait petit à petit dans la pièce, comme porteuse d’un espoir un peu fou à l’idée que la vie peut absolument tout vaincre, y compris la nuit cauchemardesque que vous venons de traverser.

Et d’un coup son petit cri. A elle donc. Une petite fille. J’ai un sourire incrédule alors que je la tiens entre mes mains. « Elle est tellement petite… » Je relève alors la tête quand Tasya la nomme et j’ai un hochement de tête, le regard embué par l’émotion. « C’est parfait comme prénom. » Vraiment parfait. « Je suis fier de toi Tasya. »

Nous nous rendons dans l’espèce de ferme abandonnée. Nous avons de la chance, je suppose, mais je suis bien trop à cran pour le réaliser, je crois. Tout va trop vite. Les contractions de Tasya en chemin et maintenant le travail qui commence. Faire bouillir de l’eau. Je savais qu’il y avait de l’eau dans tout ça, pourtant je suis presque figée sur place, incapable de réfléchir de façon cohérente tellement je suis épuisée, dépassée. Elohim attrape une grande casserole et je me retrouve avec des allumettes entre les mains.

Ok. Ok, ok, ok. Faire un feu, comme dans le temps avec papa et maman. Je peux le faire.

On s’occupe de l’eau, puis Tasya me remet son scalpel. Je blêmis encore plus, alors que je ne pensais pas ça possible. De la corde. D’accord. Une tâche à la fois. Je peux le faire pour elle, pour mon amie, pour ma famille ! Tout s’enchaine à une vitesse folle, enfin, à mes yeux seulement et sans doute. Les cris, les poussées, la douleur, l’angoisse…

Puis, un tout petit cri. Une nouvelle vie. Libre.

Le regard plein de larmes, je suis émue par ce moment. Encore plus quand j’entends le prénom que choisit ma sœur de cœur. Alba. Je ne l’ai pas connu autant que Mason et Tasya, mais c’est un très bel hommage. Je m’approche un petit peu, presque chambranlante après autant d’émotion en une seule journée.

- Bravo Tas. Elle est magnifique. Elle est passée par les mêmes choses que nous et elle a accouché en plus… Cette force me dépasse, me rend plus qu’admirative. Nous sommes plus forts que nous le pensons, mais surtout… nous sommes libres.

Freedom

IN MY HEAD

A SOUL ON FIRE AND A WILL TO LIVE

Tasya a un nouveau sanglot. Sa fille est si belle, la mexicaine peine à réaliser qu'elle a bel et bien accouché, qu'elle a réussi. Alba est en effet toute petite, probablement car elle est née un peu trop tôt, mais ses cris vigoureux prouvent qu'elle est en pleine forme. « Merci... » souffle-t-elle à ses amis. Sans eux, elle n'aurait jamais réussi à arriver jusque là. Mason et Elliot l'ont aidé à tenir, ils l'ont soutenu et toute la force nécessaire pour mettre sa fille au monde, elle l'a eu grâce à eux.

*****

Une ou deux heures à peine se sont écoulées depuis l'accouchement. Ils ont trouvé des draps propres dans les étages. Alba est emmitouflée dans l'un d'eux et se repose maintenant dans les bras d'Elliot. La mexicaine a une brutale retombée d'adrénaline. Son corps refuse de la porter plus et elle ne tient plus debout. Elle tremble, elle a froid, elle est complètement épuisée. L'accouchement aura épuisé ses dernières réserves. Sa tête tourne dès qu'elle essaye de se redresser, elle s'est rarement sentie aussi faible. Si elle aurait besoin de soins, ce n'est pas possible pour le moment.

« Et si tu ne reviens pas ? » demande-t-elle d'une petite voix à Mason tandis qu'il se prépare à les quitter selon le plan qu'ils avaient évoqué. Et si à Spokane, c'était à nouveau la prison qui l'attendait ? Et s'ils l'empêchaient de revenir les chercher ? Elle a tellement peur que les miliciens les emprisonnent à nouveau, qu'ils lui enlèvent sa petite fille. Ses yeux fiévreux suivent son ami. Elle a envie de lui demander de rester, mais tous ici savent que ce n'est pas possible.

J’ai une brève inspiration, alors que je montre une dernière fois à Elohim comment utiliser l’arme à feu que je lui confie. « N’oublie pas ce que je t’ai dit et ça ira. » Je lui tapote l’épaule, avec un sourire que j’espère rassurant, avant de revenir devant Tasya et Elliot. Je m’agenouille devant le matelas où elle est installée, non sans tendre la main pour effleurer la joue d’Alba, bien en sécurité dans les bras d'Elliot.

J’ai une brève hésitation à la question de la jeune maman. Et je finis par prendre la chaine que j’ai autour du cou pour la glisser entre ses mains. « Si je ne suis pas revenu dans 48 heures, vous partez. J’ai fait un plan à Elohim. Vous allez à Olympia. Il y a des groupes qui seront prêts à vous accueillir là-bas. » J’en avais entendu parler avant d’être disgracié et j’ai envie de croire que ce sera le bon endroit pour eux. « Line et Anna ont décidé de fouiner un peu aux alentours pour vous trouver quelques trucs. Il vous faut à manger, on a vu des lapins sur le chemin. Et de l’eau. C’est faisable, j’ai toute confiance en vous. Et vous prenez soin les uns des autres, d’accord ? » Je n’ai pas envie de les laisser, mais on ne peut pas rester comme ça, sans aller jusqu’à Spokane. Et si quelqu’un doit être arrêté, autant que ce soit moi. Je suppose.

J’ajoute, en direction de Tasya, refermant sa main sur la chaine. « Et si je reviens, tu me le rends. » Je leurs rends un sourire empli d’une confiance que je n’ai absolument pas et je me redresse, hochant la tête en direction d’Elohim, serrant l’épaule d’Elliot en passant. Avant de partir, sans un mot de plus. Ca ne servirait à rien de toute façon.

Je suis terrorisée.

J’ai peur que Tasya soit trop épuisée par son accouchement, peur de la perdre. Peur que Mason ne revienne pas de Spokane. Peur qu’il revienne et que l’on soit de nouveau arrêté. J’ai peur que la petite Alba n’aille pas bien. Peur de manquer de force et de l’échapper, de la blesser.

Je suis une boule d’angoisse, mais j’essaie de garder une apparence calme pour les autres. Pour Tasya surtout.

Assise aux côtés de mon amie, j’écoute attentivement ce que Mason nous dit : 48 heures, Elohim a le plan. Olympia. Je ne connais pas cet endroit, j’ai peur des autres groupes, mais bien moins que de finir entre les griffes de New Eden à nouveau. Je déglutis avec peine, réprimant les larmes qui menacent de remplir mes yeux.

- Reviens. S’il te plait. Que je souffle à Mason. C’est une supplique d’enfant, je sais bien, mais… Je ne supporterais pas de le perdre. Pas lui. D’accord. Que je balbutie quand il nous demande de prendre soin les uns des autres.

Je déteste qu’il donne sa chaine à Tasya. Le geste est beau, la promesse aussi, mais à mes yeux ça ressemble trop à un cadeau de départ. Jusqu’au dernier instant, je le suis des yeux, jusqu’à ce qu’il disparaisse.

Je me blottis un petit peu contre Tasya, serrant Alba contre moi.

- Si tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas d’accord ? Repose-toi. Je veille sur vous.

Malgré la peur, malgré l’incertitude, je veux qu’elle sache que je suis là.

Freedom

IN MY HEAD

A SOUL ON FIRE AND A WILL TO LIVE

Tasya le suit des yeux quand Mason quitte la maison, serrant la petite chaîne entre ses doigts. Il faut qu'il revienne. Ils ne peuvent pas continuer sans lui et de toute manière, la mexicaine serait bien trop faible pour reprendre la route. Elle sait que s'il ne peut pas revenir, alors elle sera condamnée. Elle hoche doucement la tête à l'intention d'Elliot. Oui, se reposer est ce que Tasya a de mieux à faire. Il faut à tout prix qu'elle reprenne des forces. « Merci... » murmure-t-elle à la jeune femme alors que peu à peu ses paupières deviennent si lourdes qu'elle ne peut plus lutter contre le sommeil. Alba est en sécurité dans les bras de son amie, Elohim, Anna et Line feront des rondes pour s'assurer de la sécurité des lieux.

****

Les heures se sont passées. Il doit être 19 ou 20h et la nuit s'installe peu à peu. Le petit groupe s'est préparé à la passer ici. Ils ont rassemblé le plus de couvertures possible et fait un feu dans la cheminée. Ils parlent peu. Chacun redoute l'avenir ou compte les heures avant qu'ils ne doivent se mettre en route vers Olympia. Ils redoutent tous ce moment. Le silence est pesant dans la petite maison. Anna et Line ont bien réussit à attraper un lapin mais l'appétit ne semble pas être au rendez-vous. Tasya en tout cas, n'a rien pu avaler.

La mexicaine se sent faible. Elle a bien tenté de se lever dans la journée pour s'occuper d'Alba mais ses jambes ne la soutiennent pas. L'accouchement après ces longs mois à Colville a été rude. Elle a somnolé quasiment toute la journée, alternant juste avec des moments d'éveil pour nourrir son bébé. Elle a l'impression que son corps a tenu bon pendant tous ces mois, pour son bébé et qu'il lâche, maintenant. Elle frissonne sans cesse et se sent épuisée.

Soudain, Elohim prend la parole. « J'entends des bruits de moteur » Tasya les perçoit aussi. L'homme se dirige vers la fenêtre et jette un coup d'œil à travers les rideaux. « Il y a deux véhicules qui arrivent dans notre direction. Ils.. Ils se garent devant la maison. » La brune tente de se redresser. « C'est lui... C'est forcément lui... » Son regard reste bloqué sur la porte. Qui la franchira ? Mason ? Des Trônes ? Il y a des bruits de pas. Elohim relève son arme en direction de la porte. Il a promis qu'il les protégerait et il le fera.

Cet instant est décisif et Tasya sent son cœur battre fort dans sa poitrine. Alba laisse échapper un long sanglot, dans ses bras et elle tente maladroitement de la bercer pour la rassurer. Elle-même est à deux doigts de la crise de panique alors ses efforts sont vains et le bébé ne se calme pas. « Chuuuut... » murmure-t-elle à l'oreille de Alba. Les pas s'arrêtent enfin devant la porte. Faites que ce soit lui... Pitié

C’est un peu hébété que je monte dans la voiture pour aller chercher les autres. J’ai encore du mal à comprendre ce qui nous arrive et je suis tellement épuisé que je titube, manquant plusieurs fois de tomber. Ce sont les soldats qui m’aident à tenir debout et il m’est difficile de ne pas voir la pitié dans leurs yeux quand leur regard croise le mien. De la gêne aussi. Mais en l’état, je n’ai pas envie de m’appesantir là-dessus.

Je garde le silence tout au long du trajet, ma main se crispant sur la poignée de la portière sans même que je m’en rende compte. Avant que je ne souffle un « c’est là », d’une voix un peu rauque. Je reconnais le camion que nous avons tant bien que mal tenté de cacher sur le bas-côté. « Laissez-moi y aller en premier. S’il vous plait. » Je n’ai pas vraiment besoin d’insister, même si je fais signe à David de me suivre.

Et j’inspire longuement, alors que je finis par pousser la porte, accompagné par un « c’est moi » assez fort pour qu’ils m’entendent. Quand j’entre dans la pièce, suivi de David, j’ai un temps d’arrêt, alors que mon regard de brouille de larmes à croiser celui de Tasya et Elliot. « Elohim ! » Je vois les deux frères se précipiter dans les bras l’un de l’autre, alors que je lâche, incapable de cacher mon émotion. « L’Adonaï a été renversé. C’est Armand qui dirige tout maintenant. On va pouvoir rentrer à la maison. » Et j’ai un sourire soulagé, alors que je finis par me rapprocher pour m’agenouiller devant le bébé. « Hé ma grande, tout va bien. On va s’en sortir. » Enfin. Le cauchemar est peut-être vraiment terminé.