The Walking Dead RPG

De toute évidence, Aaron compte bien me présenter toutes les excuses du monde pour tenter d'échapper à une potentielle leçon d'équitation. Mais si aujourd'hui je ne compte pas insister pour des raisons évidentes, j'ai bien l'intention de le foutre sur le dos d'un cheval un jour ou l'autre. Pour faire plaisir à ma mère, pour pas mourir con, je sais pas encore quel argument sera le meilleur, mais d'ici à ce qu'il soit rétabli je sais pertinemment que l'idée parfaite me sera venue. Et en temps voulu, je m'amuserai beaucoup à le voir galérer. Pas méchamment, hein. Je vais pas non plus lui demander d'aller faire le tour du domaine en galop en étant chronométré. Non, ça c'est les conneries que je m'impose à moi et qui font autant plaisir à Sleipnyr qu'à moi. Bref.

On fait quelques petits tours d'enclos, répétant parfois les figures enseignées par Liv quand elle était ici histoire de pas oublier et de perfectionner mon agilité sur le dos de ma monture, puis je reviens près de Aaron. Je descends du dos de mon cheval sans même qu'il soit complètement arrêté, laissant l'animal continuer de profiter un peu librement. C'est là que le copain de ma mère me pose une question pour le moins... surprenante. Je hausse un sourcil, le regardant comme si la réponse allait de soit. Enfin, question de logique quoi en fait. J'avais une dizaine d'années quand l'apocalypse a commencé. Bien sûr que non je sais pas conduire.

A ça, j'ai une pensée qui me fait rire jaune et relève le regard vers le brun après avoir tendu la main vers mon frère qui tendait les siennes dans ma direction pour qu'il puisse la saisir et jouer avec mon doigt manquant. Je sais pas pourquoi ça l'amuse autant. Au début ça me faisait chier mais maintenant je m'en fiche, j'ai l'habitude. Faut dire que c'est le genre de choses que va t'apprendre ton père, enfin j'imagine, quand t'en as l'âge ou même quand t'es gamin à te foutre sur ces genoux et des conneries du genre. Pour mes parents, la priorité c'était uniquement leur carrière et l'argent. Ils en avaient rien à foutre de moi. Alors ils allaient certainement pas prendre la peine de rentrer de tel ou tel endroit où ils étaient dans le monde pour passer du temps avec leur fille unique. Je hausse les épaules, paraissant détachée de tout ça alors que dans le fond, ça reste toujours une plaie béante dans mon cœur. Le sentiment de jamais avoir vraiment eu d'importance. La peur d'être abandonnée et négligée à nouveau.

T'apprendras à Gawain, quand il sera plus grand ? Parce que bizarrement, l'idée qu'il puisse vouloir le faire avec moi ne m'effleure même pas l'esprit. Après tout... pourquoi est-ce qu'il voudrait de moi ? Je suis pas directement la fille de Faith, contrairement à mon frère qui lui partage son ADN. Enfin, encore d'autres conneries qui viennent fleurir dans mon esprit quoi.

Je crois que la normalité de cette conversation, de cette situation entièrement en fait, me perturbe un peu dans le fond. Parce qu'on va pas se mentir, jamais j'aurais passé du temps comme ça avec Edwin avant. Parce que je l'ai toujours vu comme un crétin qui finalement n'était bon que pour vendre du rêve sur un écran quand il était star de cinéma et ça s'arrêtait là. Alors que là, avec Aaron, c'est différent. En fait... je crois même que j'aime bien discuter avec lui. Sa présence est apaisante, d'une certaine manière. Et puis, on va pas se mentir, le fait qu'il me prenne pas pour une débile ou une incapable simplement parce que je suis jeune est un sacré plus.

J'observe le brun des pieds à la tête, haussant les épaules avant de me passer la main dans les cheveux. J'imagine que c'est faisable, mais t'attends pas à ce que je te transforme en ballerine hein. Le prend pas mal, mais t'as l'air d'avoir la souplesse d'un tétraplégique un peu trop amidonné. Ouais, je peux pas m'empêcher de rire à la connerie que je viens de lâcher. Je me racle la gorge, tentant de reprendre mon sérieux, surtout pour parler de l'opportunité dans le futur de potentiellement prendre soin de Gawain et lui apprendre à conduire, des choses comme ça.

Sauf que ce que me rétorque le copain de ma mère, ça me surprend et surtout ça a le mérite de me clouer le bec. Et ça, franchement, on va pas se mentir : c'est super rare que quelqu'un y arrive. Moi? Je serais presque balancée quelques années en arrière, avant que je ne me fasse cette carapace d'arrogance dans laquelle je me complais au quotidien. Je prends une inspiration presque difficile, fixant Aaron comme s'il venait de débarquer d'une autre planète. Enfin, je... Difficile de cacher à quel point je suis troublée. Parce qu'en fait, bizarrement, ce qu'il vient de me proposer et son comportement collent avec l'image que je m'étais toujours faite de ce qu'un père est censé faire pour ses enfants.

Je me racle la gorge, détourne le regard, tente de reprendre contenance et d'avoir de nouveau mon assurance. Mais bon, je crois que c'est un peu trop tard. Si tu veux, faudra d'abord voir avec Faith si elle est d'accord de dépenser de l'essence pour ça mais pourquoi pas. Je veux dire, si ça peut te faire plaisir, je peux faire un effort quoi. Ouais... Tout ça pour pas dire que ça me touche ce qu'il fait. Espèce de dinde va.

Oh tu sais, ça, ça peut toujours s'arranger... J'ai un air malicieux pas du tout dissimulé au visage, un sourire au coin des lèvres et le regard qui en dit long sur ce que je peux avoir en tête. Une petite expédition rapide, au détour d'une session de chasse, pour lui trouver tout le nécessaire pour avoir l'air d'un parfait petit rat de l'opéra est très vite réalisée. Alors j'espère qu'il ne sera pas choqué quand il aura droit à son petit cadeau un de ces quatre devant la porte de la chambre qu'il partage avec ma mère.

En tout cas, évidemment il se rend compte que sa proposition m'a mise dans une position délicate. Bah ouais, il enchaîne directement avec ça alors qu'on vient de dire que c'est un truc que généralement les pères font avec leurs enfants. Enfin, dans mon imaginaire. Donc le lien de cause à effet est vite fait dans mon esprit. C'est juste que bah... J'ai jamais vraiment eu de père, quoi, avant maintenant. Je hausse les épaules, détournant le regard, presque honteuse. Surtout parce que je viens de sous-entendre un truc vachement important quand même. Comme quoi je laisse la porte ouverte à la possibilité de le considérer comme mon paternel à terme, au même titre que Faith est ma mère. Enfin, elle m'a adoptée en prime, donc c'est différent. Bref, je m'éloigne.

Je hoche la tête face à ses arguments, bien incapable de les contrer. Il a pas tort, il vaut mieux que je sache me démerder si une fois dans une situation d'urgence je me retrouve à être la seule à pouvoir conduire. Et c'est pas comme si j'avais pas l'habitude d'être celle sur qui tout repose ici en fin de compte. Non parce que quand tout le monde soignait ses plaies et pleurait ses blessés ou ses actes, c'est Bibi qui se retrouvait à nettoyer les derniers morts présents et à défaire les pièges disséminés dans le domaine après qu'on se soit débarrassés des pirates.

Finissant donc par relever la tête vers Aaron, je lui offre un petit sourire et acquiesce à sa proposition. Deal, on fait comme ça. J'essaie de te rendre un peu plus souple et en échange, tu m'apprends à pas faire exploser un moteur. Ça me va ! En plus, j'imagine qu'on y trouve chacun notre compte. Donc c'est tout bénef non ?