The Walking Dead RPG

Sienna se dirige vers ce qui fait office de cuisine pour rapporter de quoi boire un peu d’eau. Les deux verres sont dépareillés, mais de toute façon elle n’a rien de mieux à offrir à la blonde, alors il faudra s’en contenter. Elle tend le premier verre à son invité avant de venir s’asseoir sur son vieux canapé. Il est vieux, et un peu sale, mais le plaid dont elle l’a recouvert vient d’être lavé. Elle proposerait bien à Amalia de s’asseoir aussi, mais elle semble bien trop agitée pour avoir envie de s’installer confortablement dans un canapé pourri pour discuter de la météo. Elle boit une gorgée d’eau pour se donner bonne contenance avant d’afficher un sourire contrit en réponse à la question qui vient de lui être posée. « Je suis désolée, Amalia, mais je ne suis jamais venue avec toi au motel et je n’ai jamais rencontré celles avec qui tu travaillais. » Même si la blonde lui avait proposé de l’accompagner à l’époque, elle n’aurait jamais osé mettre les pieds dans un tel lieu de perdition, éducation catholique oblige. C’était surement stupide de regarder le monde d’aujourd’hui à travers le prisme de celui qu’elle avait connu avant l’épidémie, mais c’était difficile de se défaire de ses préjugés et de ses certitudes. Aujourd’hui, elle le comprenait mieux. Tout le monde n’avait pas eu le luxe de voyager en groupe. D’avoir des gens forts pour prendre soin des plus faibles. De s’endormir avec le ventre plein parce qu’une bonne âme avait décidé de partager ses trouvailles.

Pour l’heure, elle se sent inutile. Elle aimerait pouvoir aider davantage celle qui se trouve dans son salon à faire les cent pas. Elle fouille sa mémoire, à la recherche du moindre indice. « Tu ne m’as– En fait tu n’as jamais vraiment partagé de choses personnelles avec moi. » Elles avaient eu quelques discussions bien sûr, mais ça n’avait jamais été vraiment profond. La pluie et le beau temps. Les hommes et les rodeurs. La fatigue et la faim. Sienna s’était beaucoup livrée, comme à son habitude, mais ça n’avait pas nécessairement délié la langue de la blonde. Probablement parce que son instinct de préservation était plus fort que le sien, et qu’elle savait qu’il ne fallait pas faire confiance aux inconnus. Il y avait bien eu quelques petites informations, ça et là. « Je sais que tu es de Seattle, et que tu avais deux petites sœurs, des jumelles. » Elles étaient venues dans la conversation lorsque Sienna avait évoqué ses petits frères, jumeaux eux aussi, froidement abattus en pleine forêt avec son père et son plus jeune frère. C’était le drame qui l’avait poussée à joindre une communauté nomade et à s’aventurer dans le No Man’s Land pour y faire du troc. « Il y avait un prénom que tu prononçais souvent. Alma je crois ? Ou peut-être que c’était Ava. Est-ce que ça t’évoque quelque chose ? » Sa mémoire lui fait défaut, et de toute façon elle n’a aucune idée de qui pourrait être cette personne.

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Sienna ne peut pas comprendre la détresse de la blonde assise à ses côtés, parce qu’elle n’a aucune idée de ce que ça fait de se retrouver dépossédé d’une si grande partie de soi-même. Bien sûr, elle se sent mal pour elle, mais elle ne réalise pas tous les enjeux, tous les problèmes que cela implique. Elle s’imagine que, dans son malheur, Amalia a eu de la chance. Parce qu’aujourd’hui, elle est en sécurité derrière les murs de la communauté, et qu’elle a probablement bénéficié de soins médicaux pour les nombreuses blessures qu’elle arbore. Elle n’imagine pas que New Eden puisse être à la fois la pomme et le ver qui la ronge de l’intérieur. Parce que ça remettrait trop de choses en question et qu’elle n’est pas encore prête à voir la vérité en face. Elle préfère garder espoir et continuer à faire ce qu’elle sait faire de mieux : prendre soin des autres, parfois de manière maladroite, mais toujours de façon désintéressée. D’une main, elle pousse son verre d’eau sur la table en direction de la blonde qui a avalé le sien d’une seule traite, au cas où elle aurait encore soif. « Il faut que tu te laisses du temps. Parfois il suffit d’un son ou d’une odeur pour raviver des souvenirs. Parfois c’est plus compliqué. » Elle se rend compte qu’elle est en train de dire des choses très banales qui ne rendront pas la vie plus facile à Amalia, mais elle n’a rien d’autre à offrir.

Un sourire un peu triste se dessine sur les lèvres lorsqu’elle entend son invitée surprise s’excuser à nouveau. Son air abattu fait peine à voir. « C’est sûr que je ne m’y attendais pas. » C’est l’euphémisme du siècle, car plus la situation se prolonge, et moins elle fait sens. La retrouver à New Eden était déjà assez peu probable. La croiser fortuitement encore moins compte du tenu du nombre de survivants dans la communauté, et plus particulièrement dans le cinquième district. Découvrir qu’elle avait perdu presque tous souvenirs de sa vie d’avant n’était finalement que la cerise sur le gâteau. Sans réfléchir, mais dans un geste lent, Sienna vient poser sa main sur celle d’Amalia dans un geste réconfortant. « Mais je suis contente de t’avoir trouvée. J’aimerais pouvoir faire plus, je suis désolée. » Il y a une petite part d’elle qui se sent coupable de n’avoir jamais cherché à en savoir plus sur elle, à essayer de briser les barrières que la blonde avait érigées autour d’elle pour se protéger lorsqu’elle vivait dans ce motel de Seattle. « Si tu as besoin de quoi que ce soit, surtout n’hésite pas à venir me voir. Je n’ai pas grand-chose, mais parfois les familles pour lesquelles je travaille me donnent de quoi manger. Et si tu ne retrouves pas ton appartement, tu peux dormir ici. Le canapé n’est pas très confortable et les enfants de la voisine s’invitent parfois à l’improviste, mais c’est toujours mieux que de dormir dehors. » Si les gens arrêtent de s’entraider, alors tout espoir est vraiment perdu pour cette communauté.

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