Les echos de cette sortie à l'hôpital n'ont pas mis longtemps à lui revenir aux oreilles, et Andrea n'en est que plus mortifiée actuellement. Si elle s'est tenue tranquille, au maximum, en espérant de tout cœur que ça n'est que des exagérations assez communes dans le genre, comme beaucoup de guerriers peuvent se le raconter quand l'occasion se présente, pour se faire mousser, ses pas prennent la direction de l'infirmerie avec une allure pressée. Calme pour l'heure.
Nolan ! Appelle-t-elle, jusqu'à voir son ami s'extirper de derrière une séparation en toile, les bras chargés de... Elle ne sait même pas. Elle ne calcule pas non plus, à dire vrai. Les lèvres pincées, l'afro-américaine ne sait pas vraiment par quoi commencer avec tout ça. Elle se sent... tendue. Fatiguée. Elle trépigne, s'agace avant même de savoir. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?! Demande-t-elle alors dans l'urgence, l'inquiétude prenant le pas sur son bon sens. Elle verra plus tard pour le pragmatisme et le calme.
Oh, my eyes are seein' red. Double vision from the blood we've shed. The only way I'm leavin' is dead : That's the state of my, state of my, state of my head
Je me sens crevé comme jamais. Enfin, comme à chaque retour dans ce genre d’expédition mais là, c’est multiplié par 10. Surtout avec toute la fatigue que je me traine depuis des semaines. Une dernière vérif et j’attrape un casier contenant les quelques médocs qu’on a pu récupérer. J’ai qu’une envie, c’est d’aller me poser au tipi et de souffler un peu. Mais ce sera pas pour de suite, on doit encore faire le point et…
Ah. Andrea.
Forcément.
Je pose la caisse, tirant le rideau derrière moi. « Salut Andrea. » Soufflé d’un ton un peu fatigué. « Comment ça qu’est-ce qui s’est passé ? Une expédition. Et plutôt réussie. » Les blessés ne le sont que légèrement et on a trouvé du matos. Franchement, on s’en sort bien. « Faut que tu me précises ta pensée là. »
"Our wounds are often the openings into the best and most beautiful part of us."
Waban qui revient avec une entorse et une épaule déboitée ? Rétorque-t-elle d'une voix grondante en plantant sur lui un regard fâché. Il se moque d'elle, non ? C'est forcément ça. Forcément. Son petit air d'enfant tombé toujours de son pays natal lui donne envie de lui balancer des objets au visage en lui hurlant des injures dessus. Les mâchoires serrées, son expression se fait plus insistante : Duncan également ?
Donc oui, il se moque d'elle. D'une manière ou d'une autre, il se moque d'elle. Dans un hôpital rempli de rôdeurs abandonné depuis les premiers temps ? Elle a du mal à croire qu'il puisse parler seulement d'une réussite, surtout vu le rendu. Et elle n'a pas les détails de la situation, ceux qui aggraveraient clairement la claque qu'elle a envie de lui mettre. Tu as besoin de plus de précisions ? Renchaine-t-elle simplement en fronçant les sourcils.
Oh, my eyes are seein' red. Double vision from the blood we've shed. The only way I'm leavin' is dead : That's the state of my, state of my, state of my head
Je me pince l’arête du nez, réprimant un soupir, sans pour autant baisser les yeux. « Leurs épaules ont été remises en place sans problème. Et j’ai comme dans l’idée que Waban a déjà connu largement pire qu’une entorse. » J’essaie encore de savoir où elle veut en venir et je la fixe quelques secondes, curieux. « Tu savais pertinemment où on allait. On était tous conscients des risques. Tout comme on est conscients que nos stocks médicaux sont au plus bas. Et que la prise de risque était nécessaire. » Une brève inspiration. « Franchement, on s’en est bien sortis. » Surtout en comparaison d’autres sorties qui ont viré au drame. « Donc oui, j’ai besoin de savoir où tu veux en venir. D’autant que tu sais déjà tout ce qui s’est passé visiblement. »
"Our wounds are often the openings into the best and most beautiful part of us."
Tu te moques de moi ? Demande-t-elle en fronçant les sourcils, fixant un regard dur dans celui de l'homme. Elle n'aime pas ce ton, elle n'aime pas son attitude et très honnêtement, la claque est sérieusement en train de la démanger actuellement. Mais elle se contient, du mieux qu'elle peut. Elle fait en sorte de souffler, respirer par le nez, expirer très lentement. Désolée, je ne vois pas les choses de la même manière que toi avec autant d'optimisme, claque-t-elle d'une voix froide en fronçant les sourcils. Et puis, pourquoi garder ses nerfs ? A quoi bon ? Si pour me sauver, vous devez mettre vos vies sur le fil, tu sais très bien qu'elle est ma réponse, Nolan !
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Ca n'allait pas. Venant poser une main tremblante contre son ventre, devinant sans mal le dessin de la corde qui était venue enserrer sa taille avec force au moment de la chute, serrant les mâchoires en réalisant qu'elle peinait seulement à respirer sans souffrir. Ne relevant son haut que pour grimacer en constatant une large entaille violacée sur le long de son ventre, là ou la corde et le tissu avaient frotté avec force au moment de l'impact. Fuck. Jure t-elle pour la seconde fois de la journée, alors qu'elle rejoint enfin l'infirmerie. Crispant brièvement sa main sur son hématome grandissant, se redressant sitôt qu'elle entend les éclats de voix dans le bureau le plus proche.
Nolan et ... Bonne question. Pas Quinn, qui était occupée ailleurs. Et alors qu'elle fronce les sourcils en se rapprochant, elle finit par entrer en silence, reconnaissant la silhouette d'Andrea de dos, alors que sa dernière phrase la fait se raidir. Oubliant ses lésions ou la fatigue qui broie son cou et ses épaules, quand ses yeux noirs sondent le dos de son amie, silencieuse.
Te sauver de quoi ? Bref regard à Nolan, avant de revenir à la métisse. Pas vraiment sûre que cette sentence annonce une bonne augure pour la suite...
Là encore, j’attends de savoir où elle veut en venir. Et son agacement monte d’un cran. Je sais que je pousse un peu ma chance, mais c’est probablement le seul moyen de lui faire cracher le morceau. Parce que des sorties comme ça, on en a fait beaucoup – trop. Avec des résultats bien moins probants. Alors ouais, y a autre chose.
Et finalement, elle finit par lâcher le morceau. J’ai un bref soupir, avant de souffler, d’une voix bien plus douce. « Bon, on y est. J’ai failli attendre. » Un silence et je reprends, plus sérieux. « Andrea… y a deux choses qu’il faut prendre en compte dans tout ça. » Je désigne les lieux autour de nous, la voix étrangement calme, surtout en comparaison de la sienne. « On a presque plus rien. A ce train-là, si on a une épidémie, si quelqu’un d’autre est malade ou gravement blessé, je pourrais rien faire. Rien du tout. A part le regarder mourir. Cette sortie et toutes les autres… c’est une nécessité. Pour tout le monde dans ce camp. » Et je la fixe un instant en silence, ouvrant la bouche avant de me figer quand j'entends la voix de Nihima. Merde. « Nihima... comment tu te sens ? » Là, c'est la merde.
"Our wounds are often the openings into the best and most beautiful part of us."