The Walking Dead RPG

J'ai beaucoup de mal à comprendre les raisons de sa gentillesse. Est-ce que tous les gens ici sont comme ça ? Et si oui, dans ce cas, pourquoi est-ce qu'on m'a fait croire que cet endroit était le mal incarné ? Car si j'ai encore du mal à faire le tri dans ce qui est vrai ou faux dans ces images qui trottent dans ma tête, j'ai la profonde conviction – encore aujourd'hui – que je n'ai rien à faire dans cet endroit.

Installée sur la chaise, je sens le regard de la brune sur mon œil et mon oreille, détournant rapidement le regard avant de remettre la mèche supposée cacher tout ça devant mon visage. Je laisse Nell s'éclipser le temps d'aller me chercher une assiette et des couverts, la remerciant quand elle dépose tout ça devant moi. Vous allez trouver ça stupide, mais je n'arrive même pas à retrouver l'adresse de l'appartement où on m'a dit que j'habitais... Et il faut dire qu'étrangement, c'est presque plus naturel pour moi de traîner dans les rues et m'abriter où je peux plutôt que de trouver refuge dans une véritable habitation. Comme si j'avais fait ça pendant des années.

Mais le pire, c'est quand j'ouvre le plat que m'avait confié la femme quand je l'ai rencontrée. Là, je découvre une recette qui ravive immédiatement des souvenirs. Des jumelles, mes sœurs, qui se précipitent à table quand je leur pose leur repas à leur place. Le problème, c'est que dans ma mémoire leurs voix ne m'atteignent pas. Comme si c'était trop lointain pour que je m'en souvienne vraiment. Mais surtout, sur leurs lèvres, ce n'est pas Skylar le prénom que je les vois prononcer...

Ce plat... Je... Je le faisais il y a des années... Pour mes sœurs... Difficile de cacher mon trouble.

Euh, oui. C'est juste que j'ai des petits soucis de mémoire ces derniers temps... Je réponds à sa question avec une petite moue honteuse, bien loin d'être fière de me retrouver dans une telle situation. D'autant que j'imagine que raconter ces choses à n'importe qui pourrait potentiellement m'isoler encore davantage que je ne le suis déjà. Enfin, j'imagine.

A l'ouverture du plat confié précédemment par la brune, je me fige un instant alors qu'un souvenir semble refaire surface dans mon esprit. Il est bien plus vieux que les images que je peux apercevoir d'habitude dans mon esprit. Fixant les aliments, laissant leur odeur emplir mes narines, je penche légèrement la tête en me perdant dans ma mémoire. La question de Nell me force à réfléchir quelques instants, puis cela finit par me revenir. C'était l'un de leurs plats préférés. Dakota et Leane, elles étaient jumelles...

Je finis par relever le regard sur la brune, prenant une grande inspiration. Vous les avez peut-être rencontrées ? Elles sont peut-être ici ?

Un calepin ? Non, il faut dire que je n'ai pas grand chose. J'avoue ça honteusement, baissant le regard sur ce plat face à moi délivrant des odeurs familières. J'hésite d'ailleurs quelques instants, sentant mon estomac se tordre d'envie de goûter à quelque chose d'aussi nourrissant, avant de finalement venir planter ma fourchette dans le plat et d'en porter une bouchée à mes lèvres.

J'ai cependant à peine le temps de déguster cette dernière que Nell me pose une question qui me perturbe grandement. Avalant péniblement ce que je venais de finir de mâcher, mon regard se perd à nouveau dans le vague quelques instants. J'essaie de fouiller dans les souvenirs erratiques qui se promènent dans mon esprit, mais rien de bien concret ne me vient.

Une petite moue se dessine à nouveau sur mon visage alors que je relève le regard vers la brune. Euh... Je dirais... quinze ? Peut-être plus je... je m'en souviens plus... Quelle honte bon sang. Je ne sais pas où elles sont. Tout ce que je sais, c'est qu'elles n'étaient pas au bidonville avec moi avant que j'arrive ici...

Je cligne plusieurs fois des yeux, de surprise, lorsque la brune me tend un carnet et me le confie en m'affirmant qu'il s'agit d'un cadeau. Sur l'instant, je me mets à rougir légèrement de gêne sans trop savoir comment me comporter face à un tel geste. Je... Merci, mais vous n'êtes pas obligée... J'ignore pourquoi est-ce qu'elle se montre aussi gentille avec moi. Mais il semblerait qu'elle soit réellement touchée par ma situation.

Comme elle me l'intime, je commence effectivement à noter ce dont je viens de me souvenir, comme si cela allait me permettre de ne plus l'oublier. On ne sait jamais, après tout. Mais si elles ne sont pas au Bidonville, où est-ce qu'elles pourraient être ? Ici? Ça non plus, on ne sait jamais. Poser des questions, même stupides, pourraient peut-être mener à un quelconque déblocage.

Puis, soudain, à la question de Nell, je m'arrête à nouveau quelques instants. Je me souviens de la douleur. Des cris, de mon corps qui se tord sous les assauts qu'il subit. Si je suis bien incapable de savoir qui est à l'origine de tout cela, une chose semble pourtant relativement claire dans mon esprit. Et sans même m'en rendre compte, ma main note un mot sur la page du carnet que je tiens. Torture.

Je... Je crois que quelqu'un m'a fait ça. Qu'on m'a torturée... Mais pourquoi ? Comme si elle allait pouvoir me répondre...