New Eden faisait au moins de la distribution gratuite de denrées en tout genre, elle s'enfonce dans un fauteuil abimé. La poussière lui remonte au nez et un éternuement lui échappe. Ana a un soupir ensuite, fatiguée par cette journée de marche, elle relève les yeux vers les flammes. Enroulée encore dans son écharpe, elle n'ose pas se défaire de ses vêtements. Elle devrait pourtant, ne serait-ce que pour se faire une toilette, dormir confortablement et essayer de récupérer de l'énergie. L'hispanique n'insiste pas pour l'instant, si elle est éreintée, elle n'est pas suffisamment KO pour s'endormir d'un claquement de doigt. Tant qu'on n'y met pas les pieds, j'imagine qu'on peut abuser de leur générosité, ajoute-t-elle.
Mais ses yeux reviennent vers Liam lorsqu'il prend la parole, et sa déclaration lui arrache un froncement de sourcils : Quoi ? Elle n'est pas certaine de comprendre... tout en comprenant très bien de quoi il est question. Elle retient un soupir avant de fermer les yeux un instant : Liam, l'appelle-t-elle pour croiser son regard fermement. Concentre-toi sur l'idée de retrouver ta copine et ton enfant, peu importe où ils sont et qui ils sont après tout, c'est un point qui ne concerne pas Ana. Elle s'en moque, même, disons-le comme ça. Un souffle lui échappe cependant. Tu as été un bon père pour Luz, même si ça a fini par nous briser tous les deux, ajoute-t-elle.
Elle détourne les yeux en le disant, sans doute parce que c'est plus sincère qu'elle ne le voudrait. Parce que pendant longtemps, ça a été plus simple de s'en prendre à Liam sur ces questions. Aujourd'hui, la donne semble différente à ses yeux. Ton enfant aura de la chance de t'avoir, c'est pour ça que tu dois rentrer auprès de lui et faire ce qu'il faut pour survivre, ajoute-t-elle fermement en haussant les épaules. Je préfère te le dire tout net : si pour retrouver mon fils, je dois te sacrifier toi, tu sais que je n'aurais aucun scrupule, n'est-ce pas ? Elle insiste : Il faut que ça soit clair. Je n'attends pas à ce que tu me protèges, d'une quelconque manière, parce qu'elle ne le fera pas pour lui.
Un petit rire m'échappe à la remarque de mon ex-femme. Ouais, enfin, sauf quand ils t'ont dans le collimateur. Là, ils sont plus du genre à raser par le feu l'endroit où tu vivais et à te pourchasser jusqu'à ce que mort s'en suive. Je hausse les épaules et là, un souvenir me revient avec un certain amusement. J'imagine que depuis le temps, y'a prescription. A l'époque, à la cage, y'avait des New Eden qui sont venus. Et ils avaient un médecin avec eux qui a beaucoup trop bu. Je sais pas pourquoi en plus, je sais plus si c'était un pari ou si j'avais juste mal compris, mais en gros j'ai fait croire au type que j'étais gay et qu'en plus on s'était envoyés en l'air. Enfin, je crois qu'il l'a imaginé tout seul en se réveillant le matin dans le lit et en me voyant me balader dans la pièce à moitié à poil. Alors qu'il y avait rien eu, mais tu me connais, je me suis toujours baladé comme ça.
Prenant une grande inspiration, je retrouve assez vite mon sérieux malgré tout en faisant mon annonce à Ana. Le regard rivé sur les flammes, je ne relève les yeux vers elle que lorsqu'elle prononce mon prénom. Et je dois dire que la suite me surprend, et pas qu'un peu. Est-ce que ça me touche ? Beaucoup. Je m'attendais pas vraiment à ce qu'un jour on ait une conversation du genre. Et encore moins à ce que la brune finisse par me dire quelque chose d'aussi gentil. Sur le coup, je déglutis presque difficilement en la regardant avec des yeux ronds comme des billes. Merci... Et... Oui, ça nous a détruit toi et moi. Mais une chose est sûre, Luz a eu une super maman. On en a passé du temps à s'insulter et à se détester. Sauf qu'au final, j'ai surtout l'impression que c'était parce qu'on se pardonnait pas nous-même d'avoir rien pu faire pour sauver notre fille. Et le plus simple était d'en vouloir à l'autre.
Je détourne à nouveau le regard, hochant la tête quand Ana parle du fait qu'elle n'hésitera pas à me sacrifier pour s'en sortir. Un sourire étire mes lèvres et je rigole un peu. J'avoue que j'en attendais pas vraiment moins de sa part. Malgré tout, sans perdre mon sourire, je tourne la tête vers elle et hausse les épaules. J'ai pas envie de crever pour toi, on est d'accord. Mais tu sais aussi bien que moi que si la situation se présente, j'hésiterai pas à te protéger. Je suis comme ça, tu le sais. Trop bon trop con. J'ai toujours dit que ça finirait par causer ma perte.
Oui, une secte, donc, soupire Ana-Lucia sans avoir besoin d'en rajouter, elle a suffisamment étudié ces phénomènes de groupe pour savoir à quoi s'attendre. Combien de fois a-t-elle été sollicité d'ailleurs pour aller vérifier l'éducation et la santé d'enfants dans des rassemblements du genre ? Elle ne les compte plus, non plus. Et la misère humaine a ce quelque chose d'habituel pour elle. Je ne vois pas ce qu'il y a d'étonnant là-dedans, précise-t-elle rapidement en soupirant.
Ils ont le comportement de ce genre de groupuscule, si on omet leur nombre un peu trop exponentiel pour nos conditions de vies, c'est juste une suite logique, dans les moments désespérés, les gens se tournent vers des cadres désespérés également, et New Eden a pu ainsi s'épanouir. En bon colonisateur, les premiers temps à distribuer des vivres auraient eu forcément un prix. Qu'est-ce que tu leurs as fait d'autres pour les détester ? Demande-t-elle en fronçant les sourcils.
Avant de se taire. Pas un mot. Pas un merci, à la remarque de Liam. Elle le sait toucher par ses propos, en se gardant bien de renchérir. Le reste lui arrache un soupir de circonstances alors qu'elle secoue la tête : Je sais que tu es un vrai crétin, ça n'a donc vraiment pas changé, souffle-t-elle en haussant les épaules, elle n'insistera pas, il est assez grand pour faire ses propres choix, et elle ne tient pas à y contrevenir. Réveille-moi dans trois heures, lui demande-t-elle en tirant sa couverture pour se lover dedans, épuisée.
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Selon les informations, ce n'est pas loin, ils ont marché, beaucoup. Les arrêts chaque nuit leurs ont permis de récupérer de l'énergie et de progresser efficacement. Elle replie la carte, ils approchent, clairement. Elle a faim, se permet de boire pour couper cette sensation. Attaquer ne sera peut-être pas envisageable s'ils sont trop nombreux, dans leur état de toute façon, ils auront besoin de plus pour pouvoir avoir le dessus. On peut se contenter d'espionner, ajoute-t-elle.
Je me passe la main sur le visage, essayant de chasser la fatigue qui creuse mes traits. Comme si ça allait fonctionner. Au moins, le froid du vent qui me fouette la peau a le mérite de ne pas vraiment me laisser l'occasion de piquer du nez. Je sens mon corps qui réclame une vraie nuit de sommeil, mais je suis pas vraiment prêt de pouvoir lui offrir un tel luxe.
Remontant mon écharpe pour essayer de me tenir un peu plus chaud, j'écoute les mots de Ana avant de hocher la tête. S'ils nous ont pas mentis, et si on part du principe qu'il reste bien les bâtiments alentours mentionnés sur la carte, on devrait pouvoir s'installer pas trop loin pour pouvoir les observer. Mais le problème c'est qu'on a pas la moindre idée de comment est-ce qu'ils se sont organisés et d'à quel point ils ont investi la zone. Ça, ça va être problématique.
Qu'on se le dise, je suis pas le plus doué pour l'espionnage. Mais peut-être que je peux servir de leurre, aussi, pendant que toi tu vois pour t'infiltrer dans leur camp et les prendre à revers? Le souci c'est qu'avec tout ça, on fait qu’échafauder des plans qui tiendront peut-être pas la route selon ce qu'on découvrira là-bas. Alors pour l'instant, le seul truc qu'on peut faire, c'est continuer d'avancer dans leur direction en espérant qu'on va pas se jeter la tête la première dans un piège.
***
Accroupi dans les buissons, je me redresse un tout petit peu pour observer les silhouettes qu'on a aperçu quelques secondes plus tôt. Apparemment, à en juger par leur attirail, on a fini par trouver le camp. Ou au moins, les alentours de ce dernier. J'échange un rapide regard avec mon ex-femme. A l'évidence, si on ne fait pas demi-tour tout de suite, je crois qu'on risque de ne pas avoir d'autre choix que d'attaquer. Le problème c'est que dans les environs, y'a pas vraiment d'endroit où on pourrait s'installer pour tranquillement les espionner en attendant d'avoir l'occasion parfaite pour nous les faire. Je suivrai ta décision, que je lui dis à voix basse pour qu'elle soit la seule à m'entendre. Là, tout de suite, ils ont l'air d'être 4. Ça se tente. Mais je sais pas s'il y en a d'autres dans le coin ou pas.
Elle hoche la tête aux remarques de Liam. Ils n'ont concrètement aucun plan d'action concernant ce qu'il se passe, elle soupire : Si je suis bien positionnée, tu peux focaliser leurs attentions sur toi pendant que je les prends à revers. Tu prendras évidemment le risque de te faire blesser voire tuer, mais je devrais pouvoir les abattre de ma position, il te suffira d'avoir le dessus ensuite sur ceux restants, souffle-t-elle en scrutant la réaction de son ex-compagnon : A partir de là, si tu te débrouilles bien, Crocodile Dandy, on devrait pouvoir obtenir des informations, rien de plus.
Tout cela semble convenir dans l'idée, elle n'est de toute façon pas vraiment stratège dans l'idée, et plus douée dans le feu de l'action que le reste. Ana-Lucia pince les lèvres, et alors que leur poste d'observation prend des allures de campement viable, finalement les Oblivions qu'ils recherchent se montrent. Quatre. Ils sont quatre. Elle les imaginait plus nombreux pour des sorties du genre, des expéditions aussi loin de Portland, mais ne criera pas à la révolte de pouvoir les cueillir quand ils sont gérables. Ses yeux reviennent sur Liam.
Tu t'approches d'eux, je te couvre au fusil, propose-t-elle en saisissant son arme d'ailleurs. Elle n'est pas sniper mais se débrouille suffisamment bien à distance grace à Symea pour pouvoir soulever un homme à plus de cent mètres. Je n'ai pas mieux en stock, annonce-t-elle alors que son ex-compagnon s'esquive à son tour pour descendre. Légèrement en contre bas, Ana a une vue pleine sur la situation, la zone est parfaite pour elle, elle aura l'avantage. Pourvu qu'elle soit suffisamment réactive pour protéger Liam.
Sans rien entendre de la situation, elle perçoit dans sa lunette la présence de l'homme, et très vite, la tension grimpe. Son doigt passe sur la gâchette jusqu'à aviser que certains portent des gilets pare-balles. Pour ça, elle préfère viser ceux qui n'ont qu'un masque. Sécurité retirée, elle relâche son souffle et... Bang. Un crâne se fracasse, éclate d'une balle bien placée. Moment suspendu, ça n'est pas encore temps de se relâcher. Bang. Une deuxième balle traverse la poitrine d'un homme. Les autres fondent à l'abri. S'ils en ont l'occasion.
Striker. C'était Crocodile Striker, que je réponds avec un petit sourire en coin. Ouais, qu'elle en déduise que je suis ok avec son plan, parce que c'est le cas. Oui, je vais prendre des risques. Ouais, si ça se trouve je vais me faire dézinguer pour pas grand chose. Mais je savais à quoi je m'exposais en décidant de partir à la chasse aux Oblivions plutôt qu'en me mettant à fuir pour le reste de mes jours. J'imagine que ça fait partie du jeu du coup. Moi, ça me va. C'est pas comme si j'avais vraiment le choix de toute façon, je suis pas arrivé ici pour faire demi-tour dès que ça commence à puer pour moi.
Je laisse donc mon ex-femme aller se placer pour qu'elle puisse me couvrir au mieux, et quant à moi je prends une grande inspiration et prends mon arme. J'ai pas l'intention d'y aller en faisant genre de quoi que ce soit. On est pas là pour enfiler des perles. Plutôt pour leur prouver qu'ils ont essayé de retrouver les mauvaises personnes. Ils auraient vraiment mieux fait de ne jamais se lancer dans cette quête.
Mon arrivée est bien vite remarquée. En même temps, faut dire que je passe pas trop inaperçu, encore moins quand je me plante directement devant eux. Sauf que pour l'instant, je ne fais rien. Je veux laisser à Ana le temps de profiter de l'effet de surprise. Et dès que les premières détonations résonnent, que les corps tombent et que leur effectif est subitement réduit de moitié, je m'élance à mon tour. Franchement ? Je suis presque déçu qu'ils ne prennent même pas la peine d'attaquer et se contentent d'essayer de fuir. Ça va pas se passer comme ça.
Si y'en a un qui arrive à partir se planquer, le second a mis plus de temps à partir. Et c'est l'occasion parfaite pour moi de me le faire. Je lui colle un plaquage digne d'un champion de football, le faisant tomber au sol. Maintenant, on va se battre. Bon, il se laisse pas trop faire parce qu'il vient me coller son pied en pleine tronche pour se dégager, me faisant directement saigner du nez. Ah il veut la jouer comme ça ? Je cherche pas plus, attrape sa chaussure en étant toujours au sol pour le faire ramper vers moi et je tends l'autre main pour littéralement lui broyer le service trois pièces dans mon poing. Son cri résonne et je profite de ça pour me relever. Là, il se relève à son tour en titubant et balance son arme devant lui pour tenter de me taper avec. Heureusement que j'esquive, ça m'entaille juste un peu la veste. C'était pas loin. Mais en tout cas, ça m'empêche pas de décider d'en finir en venant brusquement abattre ma hache sur son crâne en la passant par-dessus ma propre tête.
Crocodile Dandy ou Striker, qu'est-ce que ça change ? Ana le fixe en fronçant les sourcils, l'air de lui dire qu'il n'est pas obligé de lui raconter non plus sa vie actuellement. Il file rapidement, s'esquive comme elle lui a demandé, avant qu'elle ne lui adresse un autre regard perçant pour lui dire de décamper avant qu'ils ne ratent le coche. Les choses en contre bas se déroulent sans encombre, Liam se bat comme un chef, et elle s'arrange pour viser la jambe de l'autre pour qu'il ne soit pas pris à revers. Trois balles, finement investies, elle n'a aucun regret.
Elle se relève, alors que Liam peut relativement bien géré en bas, le temps de faire la route jusqu'au local et rejoindre le duo. C'est gentil de m'attendre pour le bouquet final, souffle-t-elle en ajustant son fusil sur son épaule. L'homme au sol a pris quelques cours de la part du pompier, suffisamment pour avoir le visage tuméfié en se tenant la jambe qui pisse le sang. Rien d'anormal, elle admire le résultat de sa propre entreprise avec un sourire, avant de s'installer à côté de lui : Combien vous étiez initialement ? Est-ce que vous êtes tous là ?
L'homme gémit et lui lance un regard assassin à la place, de quoi lui faire froncer les sourcils rapidement. Vraiment ? L'œillade de tueur n'a pas beaucoup d'effet sur elle, elle en a connu suffisamment pour ne plus en avoir rien à faire. Mais pour ça, il faudrait encore connaitre à quel point son humanité s'est fait la malle. Et pire encore, en prenant Matias, ils lui ont arraché la part belle de son existence. Où sont allés ceux qui n'ont pas atterrit à Junk Town ? Questionne-t-elle d'un ton plus sec, en venant poser le doigt sur la plaie pour l'enfoncer sans vergogne : Dépêche-toi, je n'ai pas exactement la patience pour les suppliques, et tu as un autre genou que je ne manquerais pas d'exploser par pur plaisir, grogne-t-elle.
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