C'est vraiment compliqué pour moi ces dernier temps. Pas uniquement parce que je dois faire avec l'absence de mon avant-bras – ou d'une partie de celui-ci – mais surtout parce que je me retrouve à ne rien pouvoir faire de mes journées à part attendre que les heures passent. Et... clairement, on va pas se mentir, c'est chiant. Moi qui étais tellement motivée par ma formation, par le fait de faire enfin des progrès et d'être capable de créer un sentiment de fierté chez Nihima... Voilà que je me retrouve au point mort. En tout cas, c'est mon ressenti.
Le pire dans tout ça, c'est certainement l'interdiction que j'ai de ne serait-ce que m'approcher du terrain d'entraînement. C'est nul. J'aurais vraiment aimé pouvoir au moins regarder les entraînements des autres, pas spécialement pour me rincer l’œil mais... Juste pour pas trop perdre la main et garder frais dans ma mémoire les différents enchaînements. Mais bon. J'imagine que je dois faire sans et accepter la sentence.
Tucker est occupé, Waban est allé à son entraînement – lui au moins, la chance – alors je me retrouve à errer dans le camp en essayant de trouver quelque chose à faire. Sans trop savoir pourquoi, me voilà en train de marcher en jouant avec un réceptacle d'explosif vide. Je le balance dans l'air, le rattrape. J'ai que ça à faire donc bon. Sans même m'en rendre compte, je m'approche du terrain d'entraînement – en restant à bonne distance – sûrement par habitude. Et c'est évidemment à ce moment là que je fais tomber mon jouet du moment, le voyant alors rouler dans la légère pente qui est à côté de moi. Et merde.
Soupirant, je me mets à avancer en étant presque pliée en deux pour le récupérer. J'ai presque l'impression que je me retrouve dans un cartoon à la Looney Toons parce qu'à chaque fois je tape dedans avec mon pied, avec ma main en tentant de le rattraper, et ainsi de suite. Jusqu'à ce qu'il roule sous un buisson. Sérieusement? Fait chier. Bon, puisque je n'ai pas le choix.
Je décide donc de me mettre à quatre pattes, passant dans le fameux buisson pour finalement arriver de l'autre côté et récupérer mon bien. Et ce... sans me rendre compte d'où j'ai atterri. Bingo ! Et qui est-ce qui vient de se retrouver à quelques mètres de Nima, en plein pendant l'entraînement de Waban ?
Tu es blessé ? s'enquit la native auprès de Waban qui vient retirer son haut pour vérifier. Si le brun n'était pas du genre douillet, l'arme de bois n'en avait pas moins profondément frapper sur sa peau, assez pour déchirer un bout de tissu. Rien d'insurmontable. Promet le Cree en désignant l'estafilade sur son flanc, ripée d'une bonne dizaine de centimètres alors qu'elle hoche la tête.
Je te l'ai dis. Il n'y à aux ... lance la native en signant du même mouvement, rapidement reprise par son apprenti. Cadavres qu'on expose son dos. Bien. Esquissant un sourire satisfait, venant lui récupérer son arme. Va me soigner ça. Et assure toi que Daryl continue de faire ses pompes, ou je viens m'asseoir sur son dos.
Ca lui apprendrait à faire le clown avec son bandeau sur les yeux, en faisant tomber Devon de la structure. Des enfants, voilà ce qu'ils étaient. Mais l'ombre de sourire au coin de ses lèvres est rapidement partagé avec le natif qui s'éloigne, avant qu'un bref cri de joie ne lui fasse tourner la tête.
Et se demander sincèrement, à quel moment elle avait pu contrarier à ce point les Esprits pour que Vi se retrouve à jouer les voyeuses à quatre pattes à quelques mètres d'elle. Ses yeux noirs venant s'ancrer dans ceux de son élève avec sa froideur habituelle. Si elle avait exigé de son apprentie qu'elle se repose et veille sur cette récente amputation, à quel moment la blonde avait compris de travers sa demande en venant faire ... ça ?
Avalant la distance qui la séparait de la blonde pour l'attraper par le col et la tirer hors de sa cachette pour la relever d'une main, reprenant avec sécheresse.
C'est ton bras qu'on t'a coupé, ou une partie de ton cerveau ? Question fort pertinente, au vu de la situation. Fusillant Vi du regard sans lui laisser le temps de s'exprimer, avant de reprendre. Même ce crétin de Bill sait pertinemment qu'il y à une limite à ne pas dépasser et à compris que je me chargerai de son cas s'il venait observer les valkyries à moins d'un kilomètre. grogne la native en la relâchant enfin, avisant finalement l'objet toujours au sol.
Tu as trois minutes pour t'expliquer, avant que je ne traîne à l'infirmerie par les cheveux.
Si sur le coup je suis relativement satisfaite d'avoir réussi à remettre la main sur mon jouet du jour, je dois avouer que lorsque je me rends compte d'où je suis je me fige brutalement. En fait, sur le coup, j'avais vraiment pas remarqué. C'est plutôt quand j'ai vu des chaussures s'approcher de moi et que j'ai immédiatement reconnu à qui elles appartenaient. Oh non.
C'est tout ce qui a eu le temps de passer par mon esprit avant que je ne sente une poigne saisir mon col et me forcer à me relever. J'en lâche mon bien au passage, grimaçant parce que c'est pas super agréable comme sensation de me faire étrangler par mon propre vêtement qui sert à me mettre debout. Si de base j'avais dans l'idée de saluer mon instructrice avec un petit air penaud, croiser son regard suffit à me glacer le sang. Tant et si bien que je ne prononce pas le moindre mot.
J'ai presque du mal à avaler ma salive sur le coup, parce que clairement je crois que la situation est pas du tout en ma faveur et que Nima est persuadée que je suis ici simplement pour contester ses ordres. Mais je suis pas venue observer, que je tente d'expliquer quand elle me parle des menaces proférées à l'encontre de Bill. D'ailleurs, j'ai du mal à comprendre pourquoi elle mentionne ça. Elle pense que j'étais venue faire quoi, au juste ?
Par réflexe, je lance un coup d’œil autour de nous et c'est là que je distingue Waban torse nu plus loin. Est-ce que je pique un fard sur le coup ? Bah... Ouais peut-être un peu. Mais je m'en rends même pas compte. Pourtant, bizarrement, je suis sûre que ça ne va pas du tout jouer en ma faveur. Me raclant la gorge, je reporte mon attention sur la native qui continue de me tenir et attend de pied ferme de véritables explications. Sauf que je sens que ce que je vais lui dire va passer pour l'excuse la plus bidon du siècle.
Je faisais que marcher dans le camp, en jouant avec ce réceptacle d'explosif vide. Je le balançais en l'air pour le rattraper avec ma main et bosser le fait de plus avoir le réflexe de me servir de celle qui est plus là quoi. Et... J'ai fini par le faire tomber et il a roulé jusqu'ici... Sur le coup, on dirait presque une gamine qui tente d'expliquer comment est-ce que le vase préféré de ses parents a fini explosé au sol en mille morceaux. Ça craint.
Alors, tu es venue faire quoi, au juste ? S'enquit la brune en fronçant les sourcils, avant de voir le regard clair de Vi dévier sur le côté, tournant à son tour la tête pour aviser Waban qui profite un peu d'une pause méritée en discutant avec Daryl qui semble proche de l'évanouissement à force d'enchaîner sa punition, ses yeux noirs revenants s'ancrer avec force sur son apprentie. Sans aucune envie de rire de la situation, dans l'immédiat, alors que la blonde devient subitement écarlate.
Mater, observer. Ce sont des synonymes dans ta langue, non ? Fait-elle remarquer d'un ton acerbe, ne la relâchant que pour venir la repousser du plat de la main contre sa poitrine et disparaître du champ de vision de Waban et Daryl. Si Vi devait obtenir une punition digne de ce nom, ça ne serait pas en laissant entendre aux garçons qu'ils étaient là pour être observés comme des animaux de foire. Ecoutant son explication qui ... La fait soupirer, venant croiser ses bras contre sa poitrine en avisant son apprentie de haut en bas, pinçant brièvement les lèvres à ses explications.
Hmhm. Et un raton laveur à surgit de nulle part pour déposer ton réceptacle ici à quel moment, dans ton histoire ? Parce qu'elle était prête à entendre une énormité de ce genre, vu les arguments d'en face.
Si Waban te plaît tant que ça, tu l'invites à boire un verre en dehors de ce terrain d'entraînement, ou à une balade en forêt, ou à coucher avec toi en lui montrant tes seins si ça te chante. Pas en venant l'observer en douce comme tu le fais. Tu apprécierai que les rôles soient échangés ? Non, bien sûr que non. Même Devon qui avait les hormones en furie depuis qu'ils étaient arrivés ici, se tenait mieux. Et c'était pourtant le cadet de leur bande d'apprentis. Secouant doucement la tête en soupirant, venant se détourner de la blonde pour aviser les autres occupés à s'entraîner.
J'ai promis à l'équipe de l'infirmerie que tu ne t'approcherai pas d'ici tant que tu n'aurai pas terminé ta rééducation, en prime. souligne la native en venant piocher une cigarette roulée de son étui, l'allumant rapidement tant que les autres avaient le dos tourné. Je te donne une dernière chance de m'assurer que tu n'étais pas ici pour jouer les immondes perverses. Même si ça y ressemblait quand même beaucoup.
Je grimace et viens me frotter le torse du bout des doigts juste après que Nima ait frappé du plat de la main pour me forcer à reculer. Franchement, j'ai du mal à comprendre comment est-ce que je me suis retrouvée aussi rapidement dans une situation aussi merdique. Et surtout, je me demande comment je vais faire pour m'en sortir sans casseroles. Parce que là, il me suffit de voir le regard de ma formatrice pour savoir que je suis dans une merde noire. J'ai l'impression de la décevoir. J'ai qu'une envie : devenir une souris et pouvoir m'échapper dans un trou pour ne plus jamais en ressortir et risquer de lui imposer ma vue.
Quoi? Comment ça mater ? Comment ça un raton laveur ? C'est quoi cette histoire ? Je secoue la tête négativement, me rendant bien compte que mon histoire doit avoir l'air de sortir de nulle part alors que je ne fais que dire la vérité. Mais - J'ai pas le temps de continuer ma phrase que la native enchaîne et parle de Waban.
Évidemment, je rougis. Mais plus parce que ça m'arrive à chaque fois qu'on parle de lui en sous-entendant des trucs que j'assume pas vraiment que pour avouer une quelconque culpabilité. Quoi ? Je – Non, y'a rien entre Waban et moi ! Bien sûr que non j'aimerais pas qu'on vienne me mater à l'entraînement et je sais très bien que ça fait partie aussi des règles. Nima, je te jure que je te dis la vérité. Dans mon regard que je plonge dans le sien, j'espère sincèrement qu'elle pourra y lire toute la sincérité de mes mots. Mais franchement, j'en doute. Elle a l'air bien trop convaincue par sa version des choses.
Un soupir m'échappe et je viens passer ma main sur mon visage avant de prendre une grande inspiration et de reprendre avec tout le sérieux du monde. J'essayais vraiment de travailler sur mes réflexes. Alors ouais, je sais que juste lancer un truc qui ressemble à une balle et la rattraper avec une main ça a pas l'air dur, mais j'en ai parlé à Nolan et... apparemment mon cerveau a pas encore compris l'info selon laquelle il me manque une main. Alors ouais, souvent je me retrouve à vouloir faire des trucs avec celle qui est plus là... Je baisse le regard, honteuse, et surtout parce que je crains que ça ne motive encore davantage la brune à me tenir éloignée de la formation.
Je tiens à pouvoir revenir au plus vite, oui. Mais... J'ai conscience qu'actuellement, je serai pas capable de protéger qui que ce soit...
Une ado. Voilà à quoi elle avait à faire, alors qu'elle avise Vi devenir écarlate en bégayant que ce n'est pas ce qu'elle croit, fermant les yeux en soupirant silencieusement pour apaiser sa contrariété. Ses élèves avaient beau être des guerriers capables d'affronter le pire ... Parfois, la décompression les ramenaient quand même à une époque insouciante, celles que l'épidémie leur avait arraché de force. Venant par réflexe porter la main à son cou pour triturer son pendentif, avant de se rappeler qu'elle l'avait rendu à Hayden quelques mois plus tôt, stoppant son geste dans le même mouvement, quand son élève assure à nouveau qu'il ne s'agit que d'un malheureux hasard.
Hm. Pas entièrement convaincue, quoi qu'elle ne se laisse porter par cette explication de réflexes qui lui fait légèrement froncer les sourcils, se concentrant pour entendre ce qu'avait évoqué Nolan sur la question. Les membres fantômes, ce genre de choses que Quinn avait répété en boucle, après cette sortie désastreuse du mois de Janvier, donc.
Je vois l'idée, oui. Concède t-elle néanmoins en hochant la tête, lui faisant signe de tendre son bras amputé pour en aviser les dégâts. Les devinant sous le bandage épais, pinçant brièvement les lèvres à l'idée. Ses yeux noirs se relevant silencieusement quand la blonde continue, assurant être consciente de ne pas pouvoir protéger qui que ce soit, en l'état actuel des choses.
Ce n'est pas ça, le problème. Assure fermement la native, relâchant sa prise pour venir l'aviser de bas en haut. Ce qui m'importe, c'est que tu sois apte à te défendre, même avec un bras en moins. Il va falloir repenser toute ton armure, tes armes, ta façon de combattre pour faire de ta faiblesse une force supplémentaire. Une raison supplémentaire de la garder éloignée, pour espérer trouver un nouveau mode d'entraînement qui pourrait lui convenir.
Vi, je ne le dirai qu'une fois. Alors qu'elle écoutes bien, parce qu'elle n'était pas réputée pour faire dans le sentimentalisme. Ma priorité, c'est de vous garder en vie. C'est ça qui m'importe, avant le reste. Ils n'étaient ni des pions sur un échiquier, et moins encore de la chaire à canon. Ils étaient ses élèves, et sans doute était-elle dure d'apparence, mais prête à tout pour préserver leur vie. Si tu veux revenir au plus vite, commence par suivre scrupuleusement ce que te demandes Nolan. Et à réfléchir à une arme qui pourrait mieux te convenir. Waban et Charlotte pourraient l'aider à travailler là dessus.
Et par les Esprits... Cesse d'observer tes collègues en douce. Le regard en dit long, levant la main pour anticiper une tentative de contre argument. Tu as le bénéfice du doute pour aujourd'hui. La prochaine fois, je te traîne par les cheveux pour te jeter dans la horde des milles rôdeurs. Vu ?
Sans vraiment savoir pourquoi, j'ai l'impression d'être un peu une gamine en train de se faire engueuler par sa mère. Alors que pourtant, je ne crois pas qu'on ait vraiment une grande différence d'âge avec Nima. Mais le fait qu'elle soit mon instructrice et qu'elle représente une figure d'autorité dans le camp la rendent forcément plus impressionnante. Alors oui, je me sens vraiment con d'être dans une situation pareille.
J'ignore si elle me croit vraiment ou si elle se contente de me laisser le bénéfice du doute. Mais au moins, elle accepte de me relâcher. Par réflexe, je viens un peu remettre mon col comme il faut histoire qu'il ne me serre plus tant la gorge, et j'enchaîne en assumant ma faiblesse devant la native. Je ne sais pas s'il fallait que je le fasse. Mais je crois que j'en avais besoin.
Par contre, c'est la réponse de la brune qui me fait l'effet d'une claque. Enfin, pas dans le sens que ses mots sont douloureux, plus que... je sais pas, ça me surprend. J'ignore pourquoi d'ailleurs. Je déglutis presque difficilement alors que je soutiens le regard de Nima, sans oser bouger ou l'interrompre. Lentement, je hoche la tête avant de finir par baisser les yeux malgré tout. Je me sens honteuse, oui. Parce que ça me donne l'impression que malgré le temps, je n'ai toujours pas compris que ma vie avait de l'importance. Que je ne suis pas juste un élément sacrifiable du camp, dans le but de faire survivre le plus grand nombre. Bien qu'à mon sens, je me considère de la sorte. Disons que je vois ça de manière un peu trop pragmatique, en me disant qu'il vaut mieux perdre une vie que des dizaines. Mais c'est un détail.
Prenant une grande inspiration, je relève le regard lorsque Nihima me dit qu'il me faudra respecter scrupuleusement les consignes des médecins pour que je puisse espérer revenir au plus vite sur le terrain d'entraînement. Et par la suite, sur les missions extérieures. Il m'a parlé de la thérapie du miroir... Mais j'ai encore du mal à comprendre ce que c'est. Par contre pour ce qui est d'une nouvelle arme... Je dois dire que je sèche pas mal. Et la grimace qui naît sur mes traits à cette pensée en dit long. Je suis pas vraiment experte dans le domaine alors... Je risque d'avoir besoin de ton aide concernant le choix des armes. Enfin, si tu veux bien? J'avoue que sinon, ça risque d'être complexe.
Je relève le regard vers Nima, surprise par la fin de sa tirade. Je te jure sur tout ce que j'ai que j'étais pas là pour ça ! Bon... J'avoue que quand tu m'as sous-entendu que j'étais venue pour ça j'ai un peu eu le regard baladeur, mais c'était pas mon intention de base ! Promis, je viens pas espionner. Après tout ça fait partie des règles.