J’comprends la nécessité de brûler les rôdeurs - et j’ai pas l’impression qu’elle me ment - mais… cette colonne de fumée les rend super repérables, et de très loin. C’est risqué comme stratégie. Et puis, y’en a un paquet, quand même, de cadavres…
Mais surtout, c’est pas les motards. Là, franchement, tout s’complique dans ma tête et j’me dis que Kira serait nettement plus douée que moi pour relier les différentes pièces du puzzle.
“Content d’te rencontrer, Helene.” J’ai un début de geste pour lui serrer la main, façon diplomatique, mais la politesse est interrompue par un tintement métallique. Tant pis. “J’peux pas te dire exactement d’où j’viens. J’pense que tu ferais pareil à ma place, non ? D’toute évidence on s’fait pas encore assez confiance.” J’lui désigne les menottes qui me lient solidement au radiateur. “T’sais que tu peux me détacher. J’vais pas tenter ma chance contre autant de monde. Surtout quand j'suis là pour chercher de l'aide. Et puis à vrai dire il fait toujours moins froid ici que dehors.” J’dis ça mais il me tarde de retrouver Kira. D’m’assurer qu’elle va bien. J'me demande si elle a bougé de l'endroit où on s'est séparés. S'ils l'ont trouvée. Si c'est ça que l'autre type est venu lui annoncer. Et s'ils l'avaient tuée... ?
J'hésite un instant, inquiet, l'coeur battant un peu plus vite quand j'prends mon courage à deux mains pour lui demander, "Comment tu sais que j'étais avec quelqu'un de mon âge ?”
De multiples interrogations assaillent la gamine qui tentait, non sans mal, de glaner des informations en observant les allées et venues. Ses principales tournaient autour de leurs intentions, d’où pouvait bien être son acolyte et pourquoi ils avaient capturé le garçon plutôt que de discuter ou de lui signifier gentiment de s’en retourner et d’aller se faire foutre. Leurs méthodes, non pas qu’elle ait l’air sanguinaire jetait un voile de doute sur la jeune fille qui ne pouvait que cogiter, ses poignées liées par ces maudites menottes.
On l’amène à l’écart, docile, ne pouvant encore une fois pas faire plus elle suivit l’homme qui lui avait donné cet ordre. Peu bavard, il la conduisit jusqu’à un couloir où avec des manières peu commodes il lui indiqua un tabouret. La tchétchène ne se fit pas prier pour s’assoir, ses muscles se remettant à grande peine de sa course ratée. Ses écorchures aux joues et aux coudes la démangeaient sans qu’elle ne puisse gratter les croutes qui se formaient à toute vitesse sur sa peau à vif.
Elle attendit quelques minutes, récupérant de son attente mais bientôt la curiosité commençait à prendre le dessus. Puisqu’on ne se refait pas, la perspective d’explorer un peu les alentours dans l’espoir de tomber sur Ace ou bien sur des informations mena son bout chemin dans l’esprit de la jeune fille. Fille qui faisant fi de tout bon sens et de l’ordre bien clair de l’un de ses ravisseurs commença à se lever malgré ses mains entravé.
Sans grande difficulté, elle se remit donc sur deux pattes décidant d’ouvrir la porte devant elle. Le bout de bois à la peinture écaillé lui avait fait bien trop d’œil depuis qu’il l’avait laissé ici pour que Kira ne l’ignore. Contorsionnant ses bras ainsi que son bassin pour appuyer sur la poignée, elle dû s’y reprendre à deux fois avant que le poids de son avant-bras gauche ne suffise à pousser la poignée. Prise au dépourvue par sa propre réussite, la porte s’ouvrit en grand déséquilibrant la gamine qui par miracle ne tomba pas.
En relevant ses yeux, elle tomba nez-à-nez avec un homme qui l’observait. Comme deux bandits de l’Ouest, ils se jaugèrent pendant des secondes qui parurent être une éternité avant que…
Nous avons attrapé ton amie dehors, répond Helene sans chercher à te libérer encore. Son ton reste ferme, elle n'est pas hostile mais clairement, elle n'est pas encore ta complice de ce que tu en comprends. A peine dit-elle ça que des éclats de voix se font connaitre. Elle se fige, se tourne un temps avant d'esquisser un sourire amusé : C'est sans doute elle que tu entends...
Kira:
Avant que l'homme s'approche et t'attrape soudainement par le col de ton manteau : Petite merdeuse... Lâche-t-il entre ses dents serrées. C'est simple, il te soulève d'un bras et tu ne touches plus terre. Tu n'as pas le temps de faire davantage qu'il t'amène à quelques pas, frappant à une porte avant d'entrer, sans te laisser voix au chapitre.
/!\ Vous êtes à nouveau réunis !
Helene ! Lâche l'homme, un grand brun à la musculature dessinée : La fouineuse a essayé de nous voler ! Grogne-t-il avec agacement en te balançant, Kira, quasiment au pied de la dénommée Helene. Cette dernière soupire : Tu peux la relâcher, elle ne va pas voler grand chose... ou en tout cas, elle présume que tu n'auras pas le temps de faire plus avant de te faire plomber comme un lapin. Tu peux rejoindre ton camarade, t'annonce-t-elle par ailleurs. La porte se referme. Vous êtes tous les trois. Très bien, vous cherchez de l'aide contre ces pirates. Qu'a-t-on à y gagner ? Demande-t-elle finalement. J'ai peut-être des informations à vous fournir...
Ils l’ont attrapée ? Un sale frisson me raidit la nuque quand j’entends ses éclats de voix dans le couloir - et bientôt elle-même passer la porte pour se faire jeter dans la pièce par un homme de deux fois sa taille. “Kira !” Avec une inquiétude mêlée de surprise. Elle aurait dû filer, pas rester dans le coin !
J’aimerais approcher mais les menottes me retiennent fermement au radiateur dans mon dos. “Tu vas bien ?” J’la scrute un instant, sans déceler de blessures sur son corps. Moi non plus, ils ne m’ont rien fait. Mais la situation reste franchement délicate. Surtout maintenant qu’on connait la localisation d’leur camp.
Helene semble tout de même ouverte aux négociations. J’essaie de reprendre mon calme, finalement rassuré de retrouver l’adolescente entière, et relève mon regard vers l’adulte. “Contre des infos utiles, j’peux vous donner la position sur une carte de tout c’qu’on a vu jusque là. Y’a d’autres gens pas loin, ils ont déjà tué du monde, votre feu va finir par les attirer.” On peut p’t’être leur éviter des emmerdes, non ? Ne serait-ce qu’en faisant cesser ce putain de brasier qui empeste la mort. “Si on s’entraide sur le long terme, on pourra aussi vous proposer les services de notre groupe. Du genre, une cloture électrique pour ces foutus rôdeurs. Ou d’l’eau chaude pour vos douches…” J'ai aucune idée de comment ça marche mais Ruby sait faire tout ça non ?
- Nan mais c’est un malent- tenta d’expliquer la jeune fille avant que le type ne la soulève de terre à la simple force de son bras. La prenant par le col dont l’arrière lui rentrait douloureusement dans la nuque, il l’a traîna comme si elle n’était qu’un vulgaire gigot. Les chaussures de la gamine traînent sur le carrelage alors qu’il la pousse sans ménagement dans une nouvelle pièce, elle manqua une nouvelle de se tordre quelque chose et se réceptionna sur ses paumes elle-aussi éraflé par sa précédente chute.
Alors qu’elle tente de reprendre ses esprits, qu’elle essaie de distinguer quelque choser par-delà les tâches de lumières qui s’invite régulièrement dans son champ de vision. Elle tombe sur le visage d’une survivante, qui l’air revêche semblait en pleine discussion avec… Ace ! Son cœur fit un bond lorsque ses yeux se posèrent sur le garçon attaché quant à lui au radiateur, une petite moue qu’elle ne sut réprimer se transforma en un vague souvenir. L’adolescente était dans ces états mêlé, entre des sentiments agréables et ennuyeux. La tchétchène se sentait honteuse de n’avoir su le délivrer ou en tout cas de s’être fait capturer si vite. En même temps, elle était contente si ce n’est soulagé de le retrouver ignorant complètement les circonstances peu reluisantes dans lesquels ils furent.
- Pas trop mal, s’hasarda-t-elle à dire en l’inspectant aussi du regard craignant qu’ils n’aient commencé à le malmener pour le faire parler. Mais déjà la survivante qui s’occupe de conduire leur interrogatoire les rappelle à l’ordre.
Le garçon qui semble avoir déjà échangé plusieurs mots avec elle propose des choses, il fait des promesses sans savoir si les S.T.A.R.S pourront les tenir. Puis ils ne savaient pas grand-chose de ces survivants pourquoi leur accorder quoique ce soit ? Est-ce qu’ils étaient dignes d’intérêt ? Digne d’intégrer la lutte entrain de se constituer autour des pirates ? Tellement de questions, de pan entier de la conversation que la gamine n’avait pas pu suivre et qu’elle tentait vainement de rattraper au gré des intonations de voix et des regards. Alors qu’elle sentait son acolyte en difficulté, visiblement à manque d’arguments, la tchétchène fort d’un orgueil intact prit le relais :
- Puis vous êtes au bout du monde, ça doit faire des années que vous avez plus accès à p’lein de trucs parce que vous êtes coupé des grands centres urbains. Si c’est vous les motos, j’pense qu’on peut vous filez régulièrement de l’essence contre des informations voir de l’aide, expliqua-t-elle n’ayant de toute évidence aucune idée que le sujet avait déjà été mis sur le table. On cherche pas des gens qui veulent lutter contre l’mal ou je sais pas quoi, ça devient juste une nécessité de se liguer contre eux. Ils martyrisent toutes les côtes de la Mer des Salish, peut-être même qu’ils s’aventurent jusqu’à Seattle donc franchement si j’étais un peu maline, prévoyante enfaîte je saurais qu’un jour ou l’autre ils vont débarquer ici. Parce qu’ils ont aucune limites et c’pas votre position retranchée et la colonne de fumée grise qui vont les faire reculer quand ils décideront que c’est vot’ heure.
Vous allez un peu vite en besogne, tous les deux, souffle Helene avec un sourire amusé. Qu'est-ce qui vous dit que je ne connais pas ces groupes ? Ces motards ? Je bois le café certains jours avec eux, ou ce qui ressemble à un café. Ceux sont des alliés, ils ne sont pas commodes mais quand on les connait, ils ont beaucoup d'humour, ajoute-t-elle alors en haussant les épaules. Et ces pirates...
Son sourire se fait énigmatique l'espace d'une seconde : Leur capitaine est un homme instruit et intelligent, qui a beaucoup de goûts pour la littérature et l'alcool, glisse-t-elle alors. Si vous voulez négocier, apprenez à connaitre votre environnement, précise-t-elle. Et surtout l'environnement dans lequel nous nous trouvons. Nous n'avons pas attendu votre arrivée pour ces choses, nous avons appris à nous en passer. Si ça doit me coûter un rein d'avoir de l'eau chaude, alors je continuerais à la faire chauffer moi-même casserole par casserole, a-t-elle besoin de ça. Trouvez mieux, et peut-être que nous pourrons vraiment parler...
Lancez un dé 10 sur votre intuition ou votre perception.
Le ton qu’emploie Kira m’fait arrondir le regard, et j’lui fous un petit coup discret du bout d’la chaussure dans l’bas d’son dos, histoire d’lui suggérer d’se montrer un peu plus polie avec celle qui nous retient prisonniers. Parce que si on est en train d’négocier, et s’ils nous ont pas fait de mal, reste qu’on est menottés, et qu’on a aucune assurance de repartir.
Mais… quand Helene fait presque l’éloge du chef des pirates, j’dois bien admettre que c’est la colère qui me chauffe les entrailles. J’réponds sèchement, “Ses hommes ont violé, torturé et tué dans notre groupe. Qu’est-ce qu’on en a à foutre de c'qu’il aime picoler ou lire sur son temps libre ?”
J’me mords l’intérieur de la joue, contiens la frustration en repensant à l’état dans lequel j’ai retrouvé Dany et Thaïs après leur passage. Aux blessures infligées à Ruby. A la mort de Ronald. Putain ça m’fout même en rogne qu’ils aient emporté Reese alors que j’peux pas la piffer cette grognasse.
J’soupire doucement, appuie le dos sur la chaise en l’écoutant décliner nos offres. Qu’est-ce que j’en sais, de c’qu’ils veulent… Et franchement, elle devrait p’t’être prendre une bonne inspiration et s’regarder dans un miroir avant d’refuser des douches fonctionnelles.
“Si c’est pas ton pote le capitaine qui l’fait en premier, c’sont ses hommes qui vont t’baiser un jour ou l'autre.” Regard planté dans l’sien, j’peux pas croire qu’en tant que femme elle lui fasse confiance. “S’il tombe, tu pourras récupérer toute sa gnole. Des trucs de qualité, non ? Tu pourras p’t’être même embaucher les moins débiles de ses gars. Nous, tout c’qu’on veut, c’est récupérer les gens qu’il a fait prisonniers et les dégager d’la région, morts ou vifs.”