Laisser seul un temps, tu n'obtiens aucune réponse à tes questions. Tu tempêtes fort, encore un bon moment, avant que la porte ne s'ouvre finalement. De l'autre côté, tu vois une femme, qui pose loin de toi ses propres armes pour s'approcher. Est-ce que tu es seul ? Te demande-t-elle dans un premier temps, sans chercher à te libérer ou… à te faire du mal. Son timbre est maitrisé, sa voix calme, son attitude aussi. Qui es tu ? Quel âge as-tu ? Que fais-tu ici ?
Kira:
Ton manque de discrétion ramène des gardes vers toi, qui fouillent les décombres autour de ta position en essayant de trouver. Pour ta part, tu as avisé d'une entrée où tu peux te glisser pour gagner l'intérieur, mais il te faudra pour ça réussir un dé 10 sur ta vitesse, et un autre sur ton agilité. Si l'un des deux est manqué, alors les gardes te trouveront et tu n'auras pas le temps te rentrer par les égouts comme prévu. Tu devras fuir ou... Te rendre.
J’finis par me résigner à attendre. Et au bout d’un moment arrive celui où ils s’intéressent enfin à moi. J’ai un léger mouvement de recul quand la porte s’ouvre, mais mon dos est déjà collé à la chaise, mon poignet encore solidement attaché à ce radiateur. J’déteste me sentir coincé comme ça, aussi vulnérable.
Mon regard se pose sur la femme qui entre, scrute un instant le sien. J’suis rassuré d’la voir poser ses armes. Et d’voir quelqu’un tout court. Mais… si elle décide de m’faire du mal, j’suis vraiment dans la merde.
“Je… J’sais pas trop.” Si Kira est toujours dans le coin. Ou si elle est repartie. Probablement planquée quelque part à réfléchir. J’me doute que c’est pas le genre de réponse qu’elle attend, alors j’essaie de m’ouvrir un peu plus, “J’m’appelle Ace. Et toi ?” Elle est intimidante, en tout cas. J’ai un léger froncement de sourcils, méfiant, avant de continuer, “J’ai treize ans. Enfin, bientôt quatorze.” C’est important à préciser. J’hésite un instant avant de déballer le reste, “J’étais avec une amie, plus tôt. On cherchait de l’aide. Ou des infos. Sur les pirates qui sont dans le coin. On les a croisés tout à l’heure… C’est là qu’on a accosté ici, sur la baie, un peu à l’arrache, pour leur échapper. J’ai perdu mon amie dans la ville. J’ai aucune idée d’où elle est maintenant.” J'tourne la tête vers la fenêtre, lui désigne le grand brasier dont la fumée pue jusqu'ici, "Comment ils sont morts, tous ces gens ?" Est-ce qu'ils viennent de raser ce camp et se débarrassent des cadavres ? Est-ce que c'est l'œuvre des pirates ? D'une maladie ? Des rôdeurs ? J'ai vraiment besoin d'savoir.
Le temps passe, l’angoisse grandit jusqu’à être insoutenable. Il est heure d’y aller même si le ciel n’est pas complètement noir, que le jour n’a pas encore dit son dernier mot. Elle ne savait quand exactement l’aurore allait finir son ballet avec l’obscurité mais pour Kira il n’était point question de cela. C’était une perte de temps, une futilité qui ne changerait rien au cœur de ses objectifs. Objectifs qui ne résumaient qu’à retrouver le garçon et s’enfuir avec lui.
Endolori par les journées à vadrouiller dans ces espaces presque vierge, douloureuse parce qu’elle avait dû à de multiples reprises se contorsionner pour une place d'abord confortable puis discrète lorsque les patrouilles rôdèrent de plus en plus près de son bâtiment.
La tchétchène s’activa, gardant son petit pistolet à la main elle observa longuement la rue, devinant la bouche d’égout grâce aux dernières lumières de l’astre. Il suffisait d’une petite course, d’un peu de flexibilité et d’adresse pour y parvenir. Trois fois rien qui ne fit pas hésiter longtemps la gamine, prête à tout pour le retrouver.
Elle se prépare, s’appuie contre l’un des murs du local avant de s’élancer vers l’issue, se jetant littéralement vers la tanière du loup. Les premiers mètres se passèrent correctement, elle foulait le sol avec la grâce d’une ballerine. Mais d’un coup, ses jambes lui firent défaut. C’est comme si ses muscles refusaient de répondre et une vive douleur l’attaqua à la cuisse. L’adolescente tomba à la renverse, ses chevilles prenant des angles bizarres et dangereux. Ses membres inférieurs étaient épuisé, incapable de tenir le rythme d’une course. Prise de court, complètement éberlué, Kira tomba à la renverse dans un vacarme assourdissant. Ses mains, ses coudes mais surtout sa joue érafla l’asphalte fissuré laissant des marques vives, sanguinolente qui la piquèrent aussitôt.
Elle n’eut pas le temps de se remettre debout, de se diriger vainement vers le réseau inférieur de la ville que des gardes déboulèrent alerté par le bruit sourd d’un corps tombant et le râle de douleur que la jeune fille n’avait pu garder. La tchétchène aurait pu dans une tentative désespéré s’enfuir, espérer qu’ils ne puissent la rattraper malgré ses jambes qui l’avait lâché. Mais elle n’en fit rien, la douce et irrationnel idée qu’elle pourrait le rejoindre s’ils la capturaient acheva de la convaincre de se rendre. Levant les mains docilement, laissant son arme par terre, son couteau rituel planqué entre les plis de ses couches de vêtement et sa peau, elle les laissa l’encercler.
Elle ne répond pas et se contente de te scruter. Un lourd silence passe entre vous, quand on vient frapper à la porte. Quelqu'un se penche à son oreille, lui souffle quelque chose que tu ne peux pas entendre. Elle hoche la tête fermement. L'interruption s'esquive, pour vous laisser à nouveau binome. Comment deux adolescents de quatorze ans se trouvent confronter à des pirates ? Demande-t-elle de but en blanc. Elle veut la version longue, et son attitude ferme t'invite à procéder sans attendre.
Kira:
Encadrée fermement, tu es amenée à ton tour à l'intérieur du campement. Tu n'aperçois pas Ace, tu ne sais pas où il se trouve, et les autres ne sont pas encore disposés à te poser des questions. Une paire lourde de menottes t'est placée aux mains pour que tu ne puisses pas t'évader trop facilement. Tu n'es pas conduite à l'intérieur, en attendant, un homme en combinaison intégrale de cuire et de métal veille sur toi. Tu peux lancer un dé 10 sur ton intuition et ta perception.
J’lève les yeux vers l'homme qui entre, n'entends pas ce qu'il lui souffle avant de repartir. J'fronce brièvement les sourcils. Non seulement elle répond pas à mes questions, mais j’ai jamais parlé d’une autre ado...
“On vient d’un groupe qu’ils ont attaqué y’a quelques semaines. Ils ont fait des prisonniers. On a aucune putain d’idée d’où ils les ont emmenés, alors on cherche des infos.” Accrochant mon regard à celui de cette femme ; j’y vois autant un espoir qu’un danger. Et s’ils avaient chopé Kira ? Et si… et si elle avait eu moins de chance que moi ?
J’continue un peu plus nerveusement, “On a vu un paquebot échoué plus à l’Est. On a trouvé personne, mais y’a eu du passage. Et on a entendu des motos en arrivant dans l’coin. C’était vous ?” J’essaie d’deviner la réponse dans ses yeux, me doutant qu’elle ne me donnerait rien. Et ça m’agace un peu, que l’échange ne se fasse que dans un sens. “On est passé voir une prison aussi. Y’a eu un massacre là-bas, y’a pas si longtemps.” Je déglutis, conscient que si je suis face à la cheffe du groupe qui s’est fait décimer là bas, elle doit encore en avoir le coeur lourd.
“Vous avez l’air d’être dans la merde.” En jetant un oeil au brasier qui continue de se décharger de son épaisse fumée à l’extérieur. “Vous avez besoin d’aide vous aussi, non ?” En reportant mon attention sur elle, “J’veux juste savoir si on en a après les mêmes fils de putes. On pourrait sûrement trouver un arrangement si c'est l'cas. Si ça vous intéresse pas… foutez moi dehors, et on reviendra pas.”
Les mains fondent sur ses frêles épaules, elle est remise sur pied sans ménagement. Des étoiles commencent à s’infiltrer dans son champ de vision, encore sonné par sa chute et son manque flagrant d’énergie. Kira n’a pas le force de se battre, ni l’envie de tenter quoique ce soit. Cela ne servait plus à rien d’écouter ses instincts de rongeurs, de vouloir prendre ses jambes à son cou. Elle ne pouvait qu’espérer deux choses, qu’elle puisse retrouver Ace et que leurs ravisseurs ne leur réservent pas un horrible sort.
Elle ne pouvait pas mourir ici, pas aussi jeune, pas sans avoir tout vu, tout entendu mais surtout tout ressenti. La gamine vivait avec ce poids constant d’inachevé, cette impression terrible qu’elle pourrait faire plus. Que la tchétchène pourrait se rendre plus affable et serviable ou bien qu’elle pourrait devenir un moteur de son groupe. Elle n’était finalement qu’une éternelle insatisfaite, incapable de se contenter de ses victoires aussi petite et futile soit-elle.
On lui retire son pétoire ainsi que son sac, une mesure de sécurité logique, classique mais qui chagrina la jeune fille qui avait l’impression qu’on lui retirait une partie d’elle. Avec le regard d’un chien battue, elle les observa s’éloigner avec ce bout de toile contenant toute sa vie. Alors qu’un garde couvert des pieds à la tête de bout de cuir mêlé à des plaques métalliques lui enserrait les poignets dans vieilles menottes rouillés. Par réflexe elle tenta d’écarter ses bras mais elle en fut incapable. La petite chainette empêchait tout mouvement ce qui ne laissait à l’adolescente que le loisir de laisser ses membres supérieurs secoué au rythme de ses pas. L’aspect rouillé de la lourde paire de menottes fit craindre à l’adolescente que la serrure ne fonctionne plus, la laissant à jamais dépérir avec ces lourdes entraves. Une peur irrationnelle certes dont les probabilités avoisinent le zéro mais c’était son moyen à elle de penser à autre chose que le futur immédiat. Un horizon menaçant teinté de mystère et d’appréhension, Kira n’avait encore aucune idée de ce qu’ils leur réservaient…
A sa grande surprise elle n’est pas conduite à l’intérieur, au contraire sous bonne compagnie on la laisse choir là, sur le trottoir d’une rue qui n’est plus emprunté par les voitures depuis bien longtemps. Ne pouvant rien faire d’autre que d’observer, son garde semblant peu disposer à lui parler. Après de longues minutes à scruter le moindre mouvement, les lumières s’allumant progressivement, elle put établir que le camp était habité sur la durée mais elle ne décelait parmi les quelques personnes s’activant aucun enfant, ni adolescent et encore moins la silhouette familière d’Ace…
Non, répond-t-elle finalement à ta question après avoir bien pris note de ton histoire. Ce bucher réduit en cendre les morts qui s'aventurent à nos portes, nous le faisons pour éviter les épidémies, explique-t-elle. Certes, le bucher tourne tous les jours et permet de déduire facilement leur position mais peu importe, ils font juste ce qui doit être fait. Finalement, les morts sont sans doute moins nombreux dans le coin désormais. Elle prend le temps de te scruter. Nous avons déjà eu à faire à ces pirates, mais nous sommes suffisamment équipés pour qu'ils ne parviennent pas à nous prendre ici, il faut dire que la ville est un peu retranchée. Elle te le précise ensuite : ils n'ont pas de motos. D'où est-ce que tu viens comme ça ? Demande-t-elle finalement. Je m'appelle Helene, précise-t-elle.
Kira:
Suis-moi, tu es amenée à l'écart, loin de ce lieu de passage à l'évidence où tu as eu l'occasion de voir quelques détails. Rien de très parlant à ton niveau cependant, ça n'est pas suffisant pour te dire qui sont concrètement ces gens et comment ils fonctionnent. Conduite jusqu'à un couloir, tu es laissée sur un tabouret placé devant une porte close. Il y a d'autres portes : Attends ici, on va venir te chercher, assume l'homme en récupérant ton sac à dos pour t'abandonner toute seule ici. Kira, un choix s'impose à toi. Tu peux attendre et obéir sagement, ou jeter un coup d'œil dans les différentes pièces.