The Walking Dead RPG

Une ombre de sourire. « Et ça t’agace que je ne réagisse pas ? » C’est bon à savoir. Quant au fait de tester une nouvelle techniquement, évidemment qu’il ne compte pas lui répondre. Pas dans l’immédiat en tout cas.  Du reste, il la fixe quelques secondes. « Et donc, tu penses que je déteins un peu sur toi ? » Si oui, il serait étonné de savoir comment. Un bref hochement de tête quand elle continue. « Je ne dirais pas flemmard. Je dirais plutôt que j’utilise mon énergie à bon escient. »

Et forcément, elle en profite pour dénigrer le travail de médiateur. Le contraire l’aurait surpris de toute façon. « Tu es consciente que ça impliquerait de travailler sous les ordres de Madisson au moins ? » Soufflé d’une voix tranquille, avant qu’il ne continue. « Tu as toujours toute confiance en tes capacités, mais je pense que ta diplomatie laisse parfois à désirer non ? » Non, vraiment, il ne l’imagine pas dans ce rôle.

Mais l’esprit de Noël arrive un peu à se frayer un chemin dans leur maison. Il est surpris – agréablement – de l’étreinte de la jeune femme, ce qui le conforte dans le fait qu’il a pris la bonne décision en organisant tout ça. Et il l’observe, alors qu’elle regarde l’album. L’effet sur elle est visible, mais il ne fait pas de commentaires. « Oui, je lis. Et j’ai même des livres que j’aime relire plusieurs fois, qui sont dans ma chambre. Tu devrais essayer aussi, c’est une activité intéressante. » Son regard se fait pétillant d’amusement à la voir dubitative face aux carnets. « Absolument pas. Tu as bientôt 18 ans, je considère que tu es assez grande pour savoir si tu veux ou pas retourner en apprentissage. Je pensais surtout que ce serait une bonne façon de vider ton sac, sans pour autant heurter les sensibilités de qui que ce soit. Une espèce de journal. Tu vois l’idée ? Ou tu peux juste dresser la liste de tes ennemis en couleurs, ça marche aussi. »

Il s’affaire alors à tirer sur la guirlande volée par Dynamite, avant de relever la tête vers Zelda quand elle reprend la parole. Forcément, les paroles de Zi lui reviennent en tête, surtout sur la capacité de la jeune femme à vouloir saborder les bons moments ou les relations. Probablement qu’elle se dit que, comme ça, elle brise tout avant d’y accorder trop d’importance. Notant dans un coin de son esprit d’en parler à sa femme, il laisse filer un silence, observant l’australienne avant de hausser une épaule. « Je me suis posé la question oui. Comme à peu près tout le monde dans ce camp. Et je n’ai pas peur de la réponse. Parce que je serais incapable de savoir si tu me mens ou pas. Tu pourrais me dire que oui par pure provocation. Ou me dire que non, pour te dédouaner. » Il a un soupir, se pinçant un instant l’arête du nez. « Ce qui s’est passé, c’est entre toi et ta conscience. » Est-ce qu’il pense que Zelda aurait pu le tuer pour des raisons qui lui sont propres ? Evidemment que oui. Elle a un code moral et une notion de la réalité qui le dépassent un peu. Mais il fait avec. Tout du moins, il essaie. « Et je ne suis pas là pour soulager ta conscience, ce n’est pas mon rôle. » Il ajoute pourtant, la fixant quelques instants. « Tu voudrais ? Que je te le demande ? Et tu serais prête à assumer mes réactions si ta réponse ne me plait pas ? » A dire vrai, il n’a aucune idée de ce qu’il pourrait lui dire. Mais ça, elle n’est pas obligée de le savoir.

- Tu sais qu'on dirait Zi quand t'es comme ça, hein ?!

À toujours poser des questions, à toujours vouloir comprendre exactement où se situe le problème. En soi, d'accord, ce n'est pas dérangeant. C'est même plutôt la marque d'une forme d'intérêt. Mais ça donne l'impression à l'australienne d'être une sorte de patiente à la psyché étrange alors qu'elle a pourtant l'impression de balancer des évidences qui devraient être communes à tout le monde. J'ose pas imaginer la gueule d'vos discussions... Une succession de questions et de réponses qui s'enchaînent, comme à la bataille navale. Sans les bateaux, la triche et le fun...

Quoi qu'il en soit Zelda évoque cette petite touche d'elle qui se retrouve maintenant chez Yu'. Et lui, en retour, lui demande s'il a déteint sur elle. Ben maintenant qu't'en parles... Bonne question ! Est-ce qu'il l'a changée ? J'dois bien avouer qu'parfois, sans qu'je sache pourquoi, j'ai l'irrépressible envie d'me mettre un chapeau pointu et d'chevaucher un dragon ! Elle plaisante parce qu'elle n'a pas trop envie de lui concéder une influence sur elle, toute bonne soit-elle. Puis lâche un petit reniflement dubitatif lorsqu'il se défend d'être flemmard. S'il le dit...

J'pourrais directement travailler sous les tiens, plutôt, non ? propose-t-elle lorsqu'il est question des médiateurs. Et puis surtout, du fait de travailler sous les ordres de Maddie. Une sorte d'unité spéciale qui n'répond qu'à toi ? Et qui la placerait donc plus ou moins hors de portées des griffes de la mégère locale ? Quant à cette histoire de diplomatie... Et si j'te promets d'cogner seulement ceux qu'tu m'désignes, hein ? Ils n'ont qu'à s'organiser un peu et il n'y aura pas de problèmes. On invente un code - genre tu clignes trois fois des yeux ! - et si tu m'actives pas, j'dis rien et j'me contente de regarder d'un air sévère les gens ! Deal ? Il faut toujours un mauvais flic pour chaque bon flic. Tout le monde sait ça. Surtout Scorsese !

Et puis un peu plus tard, une fois la distribution de cadeaux terminés et l'heure des commentaires arrivée, l'asiatique confirme à l'australienne qu'il lui arrive de lire et qu'elle devrait essayer un peu aussi. Parce que c'est une activité intéressante. De relire plusieurs fois des trucs ? Elle pince les lèvres pour exprimer ses doutes. Merci mais non, je passe ! Chacun son délire et celui-là n'est incontestablement pas le sien. Mais même si les passions de Yu laissent à désirer au moins a-t-il le bon goût ne pas vouloir la renvoyer à l'école. Mieux encore : il l'estime en âge de choisir sa voie : Amen... Que dire de plus ? Quant à cette histoire d'écrire ce qu'elle ressent dans ces cahiers... Comme ça l'premier curieux venu qui tombe dessus connaîtra tous mes petits secrets ? Et pourra menacer les gens à qui j'tiens vraiment  J'te rappelle que j'ai pas d'clef pour ma chambre... Ca revient à faire une liste de ses relations. C'est... stupide. Même si ça doit avoir un sens dans la tête d'une personne qui aime les bouquins. Il faudra qu'elle demande son avis à Ka.

Toujours est-il que sur leurs points de vue diverge, le duo passe un réel moment de complicité. Sans doute trop complice puisque Zelda en vient à aborder tranquillement un sujet qui fâche. Le silence qui suit est pesant. Mais la réponse de l'asiatique à l'avantage d'être... étonnante. C'est ça, ta réponse ? Qu'c'est entre moi et ma conscience ? Celle-là, elle ne s'y attendait pas. Il s'en fout où il a déjà compris et il ne veut pas être mêlé à cette histoire ? La suite lui apporte au moins un début de réponse puisqu'il lui rappelle qu'il n'est pas là pour soulager cette fameuse conscience. Et c'est quoi alors, ton rôle, hein ? répond-t-elle alors, provoquante. Il n'est pas là pour la protéger ? S'assurer qu'elle va bien ? Où était-il quand elle a été virée de l'armée ? Est-ce qu'il ne veut vraiment pas savoir s'il habite sous le même toit qu'une assassine ?

Ah ben si, quand même !

Au moins laisse-t-il une porte ouverte. L'ennui c'est que sa dernière question refroidit presque immédiatement l'adolescente. Sa réaction... Elle ne peut pas dire qu'elle n'y avait pas pensé mais elle a l'impression qu'elle a un peu sous-estimé le problème... Pourquoi ? Tu réagirais comment si j'te disais que j'l'avais tué ? ne peut-elle s'empêcher de se demander, mue par la curiosité. Et ce qui doit s'apparenter tout de même un peu à de l'instinct de préservation. J'te rappelle qu'tu m'as juré qu'tu m'laisserais pas tomber ! Est-ce qu'il a déjà oublié ? D'toute façon un tuteur c'est pas un peu comme un avocat ? T'es pas sensé garder mes secrets et tout ça ? Et ne les révéler à personne parce que sinon...À quoi ça sert d'avoir une personne à qui l'ont fait confiance ?

Il a un sourire amusé à la remarque de la jeune femme. « Et bien, je vais prendre ça comme un compliment. » Ce qui n’a pas l’air de réellement en être un à l’entendre, mais il ne va pas se laisser démonter pour si peu. « Et nos discussions sont toujours particulièrement intéressantes, ne t’en déplaise. » Même si, en effet, durant des années, elles étaient surtout… polies. Sauf quand il s’agissait de Tao. Depuis quelques mois, les choses ont changé. Parce qu’ils ont changé tous les deux probablement. Sûrement même. Et c’est appréciable. Il est heureux d’avoir réussi à devenir ami avec Zi malgré tout ce qu’ils ont pu vivre et c’est précieux à ses yeux.

Du reste, il laisse filer un rire en secouant la tête. « Je connais parfaitement ces envies. Tu devrais y laisser libre court, surtout pour le chapeau pointu. Je peux t’en trouver un si tu veux. Et même des baguettes pour manger ton riz. » Lui-même n’en a pas touché une depuis près de 10 ans. S’il est respectueux des traditions de son pays natal, il ne faut pas être ridicule et s’attacher de trop à ce genre de choses.

Mais la description de son rôle de médiateur lui fait tout de même hausser un sourcil. « … j’ai la vague impression que tu idéalises quelque peu le métier. Désolé de te décevoir, mais il n’y a pas d’unité spéciale ou… peu importe. On ne cogne personne. » Décidément, son aplomb l’étonnera toujours. « Mais si tu veux travailler autrement pour la communauté, on peut y réfléchir ensemble. Si tu veux. » Qu’elle ne se pense pas inutile maintenant qu’elle n’est plus dans l’armée. Il ne sait pas si la sanction est temporaire ou définitive mais, en l’état, il ne peut rien pour elle à ce niveau-là.

Et si l’album photo et son polaroïd ont leur petit succès, c’est un peu moins le cas pour les carnets. Peu importe au fond, même s’il se fend d’un sourire amusé. « Je suis sûr que trouveras quoi en faire. Mais interdiction de les échanger contre des clopes. Compris ? » Il la voit venir. Enfin, pas totalement, vu qu’il ne s’attendait pas à ce qu’elle lui parle de la mort de Caleb. Et il est tout de même content d’arriver à garder une neutralité de façade, même s’il l’observe avec une acuité inhabituelle. « Tu crois que ça ne doit pas être réglé en premier lieu entre toi et ta conscience Zelda ? » Et il ajoute, d’une voix tranquille, qui tranchant avec la provocation qui émane de l’adolescente. « Tu te rappelles ce que tu attendais de moi au tout début ? Et aujourd’hui, c’est quoi mon rôle à tes yeux ? » Parce qu’il se souvient bien qu’elle l’a alpagué uniquement pour rendre Zi chèvre. Elle s’est lourdement trompée et, surtout, Yuan a commencé à réellement s’attacher à la jeune femme. Et il a envie de croire que la réciproque est vraie. C’est probablement pour ça qu’elle chercher à tout foutre en l’air en cet instant précis en parlant de ça.

Mais il ne se démonte pas. « Tu réponds à ma question par une autre question. Toi aussi tu prends des cours avec Zi ? » Il se baisse pour attraper la boule que Dynamite a réussi à chiper dans le sapin et continue, comme si de rien était. « Je t’ai dit que je ne te laisserais pas tomber. Et je ne compte pas le faire. Mais c’est à toi de me dire si pour toi, c’est important que je le sache. Ce que ça changerait pour toi de me dire la vérité. » Il reprend, baissant d’un ton. « Tu as vraiment besoin de raconter ce qui s’est passé ? Parce qu’en ce qui me concerne, je n’ai pas besoin de l’entendre. » Ce n’est pas vraiment une question d’envie le concernant. Et il tient à être clair là-dessus.

- Tu prends comme un compliment l'fait d'être comparé à ton ex ?

L'australienne penche un peu la tête sur le côté et se fend d'un petit sourire goguenard. Il ne va pas la tromper, oh que non. Dans le fond il doit surtout avoir un peu peur qu'elle aille tout répéter à Zi si d'aventure il s'essayait à la critiquer. C'est tout. Il est prudent, Yu'. Et malin. Suffisamment pour ne pas provoquer une guerre avec son ex, en tout cas. Alors Zelda joue le jeu et fait un petit signe affirmatif de la tête lorsqu'il affirme que ses discussions avec la psy sont toujours intéressantes. Mmh mmh... C'est plus fort qu'elle : l'adolescente ne peut pas s'empêcher de faire malgré tout une petite moue empreinte de scepticisme.

Ni de rire lorsqu'ils plaisantent sur sa culture et qu'il l'encourage à laisser libre cours à ses envies. Et même à s'adonner au masochisme. Des baguettes, vraiment ? Son sourire s'accentue en songeant à la drôle d'expérience que ce serait. C'est bon, je passe ! Mais faudra quand même qu'tu m'expliques pourquoi vous avez pas inventé un truc qui ressemble à des vrais services. Sérieusement... C'est quoi votre délire, là, à vouloir attraper du riz avec des bouts d'bois à la con ? Elle ne voit pas la fun là-dedans. Juste la crise de nerf. Encore un casse-tête... chinois ! Badum tsss ! C'est débile mais elle en est plutôt fière de celle-là, Zelda !

Elle est moins fière de se heurter à ce qui ressemble à un refus de la part de Yu'. Ouais, c'est bien ce qu'elle se disait : il tente de la dissuader de devenir médiatrice. Avec des arguments qui lui semblent relever de la science-fiction. Genre vous tapez personne ? Le doute se devine aisément dans son regard. Jamais ?! Elle peine vraiment à y croire mais bon. Comment prouver le contraire ? Quant à cette proposition de réfléchir ensemble à une possible reconversion : T'as un truc à proposer ? Un vrai truc ? précise-t-elle. Parce que punie ou non, Mademoiselle Anderson a toujours ses habituelles exigences ! Pas d'la conciergerie, pas un truc en rapport avec les champs, la terre ou l'autre pétasse de Val' ? Ni le ménage ou l'empathie ? Ni Maddie, aussi ? S'il a quelque chose qui tient la route alors elle est prête à l'entendre.

Mais pas tout de suite puisqu'il y a la distribution de cadeaux. Et l'évocation de ce qu'elle pourrait échanger contre ces cahiers qui ne lui disent pas grand chose. Pas des clopes, donc ? Et de l'héroïne ? C'est bon ou pas ? ironise-t-elle. C'est bon, qu'il ne s'inquiète pas... Elle leur dégotera un petit truc cool pour un repas. Ou une nouvelle veste pour lui. Ca lui ferait pas de mal, tiens.

Et puis après ces quelques instants un parfum de sincérité succède à l'esprit de Noël. C'est Zelda qui évoque Caleb. Avec le désir de se confier sans le dire. Mais la réaction de Yu' est mesurée. Très mesurée. En fait il ne semble pas vouloir connaître la vérité. C'est entre elle et sa conscience, qu'il dit. C'est toi, ma conscience ! lui rappelle-t-elle sur un ton d'amertume. Elle peine à accepter ce qu'elle perçoit comme du désintérêt de sa part. Ca la... frustre. Quand bien même il lui rappelle le rôle dans lequel elle l'a cantonné depuis le début. Qui sème le vent... Mais ca a changé ! Et aujourd'hui elle ne saurait plus trop dire quelle place elle lui accorde. Alors elle hausse les épaules à sa question et détourne le regard. Me protéger d'moi-même, j'suppose ? Parce que finalement le plus grand danger pour elle, c'est elle-même. Mais si tu peux pas alors j'me contenterai de c'que tu peux m'offrir. Ou de c'que tu veux m'offrir, plutôt ! Parce qu'après tout le silence de June est devenu assourdissant. Et hormis Ka', il est ce qui ressemble le plus à ce fameux phare qui guide les marins dans la tempête. Elle ne peut pas se permettre de le repousser. Et elle ne le désire pas non plus.

Mais il y a un temps mort dans la discussion. Une petite touche de légèreté qui à défaut d'être pertinente a au moins le mérite de radoucir l'ambiance. Ouais, trois fois par semaine dans son bureau ! Des cours particuliers ! ironise-t-elle. N'empêche... Elle espère qu'elle ne ressemble pas tant que ça à Zi quand même. Elle est chouette, la psy, au fond. Mais pas super fun... Tout comme cette discussion qui en revient aux fondamentaux. Est-ce qu'elle a vraiment besoin de se confier à Yu'. Elle n'en sait trop rien. Tout lui dit que c'est la pire de ses mauvaises idées.

Et pourtant il a confirmé qu'il ne la laisserait pas tomber. Et quelque part si elle éprouve un désir en cet instant alors c'est surtout celui de le faire mentir. Pour avoir raison lorsqu'elle prétend que les gens ne peuvent pas l'aimer. Ka' est simplement la plus merveilleuse anomalie qu'elle ait eut la chance de rencontrer, c'est tout. Quand Caleb et moi on est arrivés sur le lieu du crash et qu'on a trouvé Adel, j'ai pas réagi tout d'suite. Pas parce que j'avais peur ou que j'étais incapable d'me décider mais parce que j'me suis dit qu'finalement, si j'faisais rien, Adel allait juste crever ! Et franchement c'était plutôt logique d'hésiter vu que c'te pétasse a juré d'me buter un jour ou l'autre ! L'adolescente hausse les épaules avant de poursuivre : Caleb, ça, il l'a bien senti. Mon doute ! Il m'a parlé comme si j'étais la psychopathe de service, m'a menacé de tout dire à Stan' pour que j'me fasse virer d'l'armée !  Voir pire ! L'australienne relève timidement les yeux vers son tuteur. Ouais, forcément, elle n'a pas hyper envie de croiser son regard en cet instant. Donc j'l'ai buté ! Une balle dans la nuque, une autre dans l'crâne ! Elle l'explique froidement, sans grande émotion. Parce que si c'est d'abord les regrets et sa conscience qui ont prédominé après ce meurtre, c'est son pragmatisme qui a fini par la convaincre qu'elle avait fait ce qu'il fallait. Il a voulu mettre ma vie en danger alors j'ai pris la sienne ! Fin de l'histoire ! Enfin pas tout à fait. Elle se doute bien que Yu' aura peut-être des questions. Des remarques, pour le moins.

Elle anticipe déjà l'une d'entres elles et décide de prendre les devants. J'te l'dis pas pour soulager ma conscience, Yu' ! Pas seulement, en tout cas... L'adolescente ne peut pas nier qu'avouer cet acte ne lui fait pas du bien. Elle est apaisée, presque soulagée. Mais pas contrite, ça non. Mais parce que j'veux qu'tu saches que n'pas m'laisser tomber, ça a aussi un prix ! Et que j'veux voir si t'es vraiment prêt à l'payer ! C'est stupide, irrationnel. Et pourtant l'australienne vibre d'une forme d'excitation malsaine. Eh, on dirait que j'viens d't'offrir un autre cadeau en fin d'compte ! Mon destin ! Qu'est-ce qu'il va en faire ? Bien sûr qu'elle a peur, Zelda. Il pourrait la détruire si l'envie lui en prenait. Mais il ne lui a jamais donné de raisons de douter de sa parole jusque-là. S'est-elle trompée ?

Il a un hochement de tête à la question de Zelda. « Pourquoi ? Je ne devrais pas peut-être ? Il y a clairement pire comme comparaison. » Et il a un profond respect pour la femme qui a partagé sa vie pendant des années, même si leurs attentes étaient différentes. Ce qui semble laisser l’adolescente sceptique mais, au fond, il ne peut pas lui demander de comprendre ce qui le lie à Zi. C’est quelque chose qui semble dépasser toutes les personnes qui les entourent, y compris leur compagnon respectif.

Un sourire amusé quand elle s’emballe à propos des baguettes, même s’il lève les yeux au ciel à la chute de son histoire sans faire plus de commentaires. Tout comme il songe à s’abstenir concernant les médiateurs, même s’il souffle, un brin dubitatif. « Le principe de la médiation, c’est d’accorder les gens entre eux, de trouver des solutions. La violence n’en est pas une à mes yeux, elle ne fait que reporter le problème ailleurs. » Et il laisse filer un silence pensif à la question de Zelda. « Qu’est-ce que toi tu as envie de faire ? Imaginons que tu retournes dans l’armée, la guerre avec les New Eden se finira un jour ou l’autre. Il faut que tu réfléchisses à ce qui pourrait te convenir. Tu veux rester un soldat toute ta vie ? » Si tant est que son exclusion ne soit que temporaire. Si c’est plus définitif, ils devront réellement trouver d’autres options avant qu’elle ne craque totalement.

Le regard qu’il lui lance quand elle parle d’héroïne est assez parlant pour qu’il ne songe même pas à s’y attarder, surtout qu’il préfère se focaliser sur le reste. « Je ne suis pas ta conscience Zelda, je suis ton allié, ton ami. Mais certainement pas ça. » Et il arque un sourcil quand elle reprend. « Ne commence pas. Je te l’ai dit, je joue dans ton camp depuis le début. Alors ce serait plutôt ce que toi tu me laisses t’apporter qu’il faudrait dire. » Son ton s’est fait un peu plus dur, mais c’est quelque chose d’important à ses yeux. Quand bien même il a un sourire à l’évocation des cours chez sa femme. « Tu devrais retenir autre chose que la capacité à poser des questions à tout bout de champ alors. »

Et finalement, elle raconte ce qui s’est passé. Yuan écoute en silence, finissant par se laisser tomber dans le canapé alors que Dynamite vient se poser entre eux, museau sur sa cuisse, à moitié endormi. Et il a une profonde inspiration, s’efforçant de rester calme, objectif, quant à ce qu’elle vient de lui dire. « Je vois. » Un temps, avant qu’il ne reprenne. « J’aurais quelques questions. Pourquoi à tes yeux la seule option, c’était de le tuer ? Et de fait, tu as quand même été virée de l’armée, alors qu’est-ce qui pouvait arriver de pire à tes yeux ? » Il l’observe longuement, avant de continuer, d’un ton toujours aussi posé. « Et qu’est-ce que tu as ressenti quand tu l’as tué ? » Quant au fait de la laisser tomber ou non, c’est une autre histoire. Il a envie qu’elle prenne conscience de la gravité de ses actes, du poids que ça devrait avoir sur sa conscience. Et pourtant, aujourd’hui, ils ont tous du sang sur les mains. Absolument tous. Difficile de faire la morale dans un tel contexte, même si elle doit absolument comprendre ce que ça implique.

- Non mais ouais, t'as raison ! C'est pas du tout louche !

Il y a des moments où Zelda ne cherche même plus à comprendre la psychologie de son tuteur. Son esprit est parfois comme la muraille de Chine : infranchissable ! C'est comme ça, il faut se faire une raison. Tout l'monde adore être comparé à son ex ! Personnellement ça la ferait tiquer qu'on lui balance qu'elle est semblable à Sean mais peut-être qu'en Asie, après tout, les mecs ont appris à vénérer les femmes qui partageaient leurs vies. Allez savoir !

Au final ce n'est que l'une de leurs nombreuses divergences sur leurs visions respectives du monde. Et ce postulat se confirme peu après lorsqu'il est question des médiateurs : La violence est toujours la solution ! Toujours ! L'adolescente l'affirme avec aplomb, sur un ton scolaire. Presque patient, en fait. Souvent, alors ? négocie-t-elle ensuite lorsqu'elle se heurte au regard de l'asiatique. Elle permet d'évacuer la pression, tout ça. Tu sais que si tous les gens qui peuvent pas se piffrer pouvaient s'cogner d'temps en temps, y'aurait sûrement moins d'soucis ? C'est une théorie qui mérite en tout cas d'être vérifiée, à son sens. Pour le reste elle a compris que ce travail n'est pas fait pour elle...

Alors ce qu'elle aimerait faire... L'adolescente relève un regard accusateur vers Yu' lorsqu'il semble placer la guerre comme un travail à durée déterminée. Au final lorsqu'il lui demande si elle veut être militaire toute sa vie, Zelda l'imagine carrément étonné par cette perspective. Et pourquoi pas ? Y'a pas de honte, hein, tu sais ! C'est un boulot noble. Qui permet de s'affranchir des petits boulots ingrats. Mais non, j'ai d'autres projets ! Inutile de se prendre la tête pour une carrière militaire qui aurait de toute façon été avortée un jour ou l'autre. L'armée n'était qu'un moyen pour arriver au sommet. Mon but n'a pas changé : diriger Fort Ward ! Et là encore ce n'est pas une plaisanterie, juste un fait. Tu sais comment j'peux faire ? Si t'as une idée, j'suis preneuse ! Mais elle a déjà réfléchi à la question et en étant virée de l'armée, elle a aussi perdu la meilleure façon de se positionner efficacement pour la succession. Ce n'est pas pour rien qu'elle hurle à qui veut l'entendre que sa vie est terminée !

Quoi qu'il en soit la discussion ne s'attarde bientôt plus sur l'avenir mais sur le passé. Sur Caleb, et ce que Zelda a fait. L'apparent désintérêt stoïque de Yu' ne le sauve pas de la vérité. Et c'est anxieuse que l'adolescente attend la réaction de son tuteur. Prête à faire face à cette réaction qu'elle peine pourtant à imaginer. Tu... vois ? C'est tout ce qu'il trouve à dire ?! C'est une réponse inacceptable. Mais qui est heureusement bien vite complétée par trois autres questions. L'australienne pourrait s'en formaliser mais malgré le calme apparent de Yu', elle sait aussi que l'instant n'est pas anodin et qu'il vaut mieux persévérer sur le voie de l'honnêteté.

Donc... Pourquoi la seule option à ses yeux était de tuer son camarade ? Parce que c'était l'plus simple ? Zelda laisse retomber ses bras contre ses flancs, presque abattue. Présenter les choses ainsi, c'est crû. Même pour elle. Et ces quelques mots ne traduisent pas précisément l'idée qui les anime. On était en zone de guerre, y'avait des cadavres et je connaissais assez Caleb pour savoir qu'il aurait tenu parole et tout balancé à Stan' ! Les conséquences exactes, elle ne les connaît pas. Elle s'est contentée de les ignorer. Du moins, c'est ce qu'elle croyait. Peu de temps, une décision à prendre... L'adolescente hausse les épaules. Difficile de décrire ce qui relève de l'instinct...

C'qui pouvait arriver de pire ? T'es sérieux, là ? grogne-t-elle en abordant sa deuxième question. J'ai déjà abattu Jaimie en mission pour éviter qu'il livre des secrets à New Eden ! S'il avait appris qu' j'ai rien fait quand Adel avait besoin d'aide, il aurait carrément pu décider d'me flinguer sur place ! Surtout qu'avec 'Sey c'est la merde j'crois et que bon, ça n'aurait pas aidé...Ce n'est pas à ça qu'elle a pensé sur le moment, c'est vrai. Mais cette crainte de Stan' existe et elle a joué dans sa décision, c'est évident. Qu'elle en ait conscience ou pas n'est pas la question. Et s'il m'avait laissée vivre, j'te parle même pas d'la façon dont les autres m'aurait regardée en apprenant la nouvelle... Quant à la prison, c'est bon, j'ai assez donné ! L'australienne pensait naïvement qu'une balle règlerait le problème. Et dans une certaine mesure, oui, ça a été le cas.

Mais Yu' est maintenant au courant. Et sa curiosité n'est pas encore pleinement contentée. Zelda n'a pas oublié cette troisième question, non. Mais elle s'accorde un peu de temps avant d'y répondre. C'est que la réponse, justement, son tuteur risque de ne pas trop l'apprécier. Ce qu'elle a ressenti ? Rien ! Absolument rien ! Enfin non, ce n'est pas tout à fait exact. Il y avait l'adrénaline, l'excitation. J'te l'ai dit : il s'est posé en ennemi alors j'l'ai traité comme tel. C'est tout ! L'adolescente hausse à nouveau les épaules. Elle aurait pu mentir. Mais est-ce qu'elle se sentirait mieux en ne parcourant que la moitié du chemin de la confidence ? Mais aujourd'hui, je regrette... D'avoir malgré tout éveillé les soupçons de Stan', de n'avoir pas su se justifier efficacement. D'avoir eu besoin de deux balles pour se débarrasser de cet homme qu'elle appréciait mais qui s'est retourné contre elle, aussi.

Tu sais qu'ta réaction n'est pas normale, hein ? se hasarde-t-elle à demander après quelques instants. Avec une timidité peu commune, d'ailleurs. Normalement il aurait dû lui sauter dessus. Ou dehors, en la traînant jusqu'à June ou Stan. Ou au moins taper dans quelque chose. J'vais pas dire que j'suis une experte des relation sociales mais là, j'suis à peu près sûre que t'aurais déjà dû péter un grain d'riz... Elle n'est pas sûre que le lui faire remarquer soit très pertinent mais sous ce petit air désabusé, c'est bien l'inquiétude qui anime l'australienne : pourquoi est-ce qu'il est si calme, putain !

Il se contente de fixer la jeune femme un moment, préférant au final, ne pas surenchérir sur cette histoire de comparaison avec ses ex. Si elle a des problèmes par rapport à ça, ce n’est pas son cas. Mais il n’a pas envie d’entrer dans un débat sans fin pour lui expliquer pourquoi sans entrer dans cette sphère qui n’appartient qu’à lui et qu’il ne souhaite pas partager. Surtout pas connaissant Zelda qui ne me manquera pas d’utiliser ce qu’elle apprend au pire moment. Du reste, il a un profond soupir. « La violence n’est pas toujours la solution. Ni même souvent. Et tu peux trouver d’autres moyens d’évacuer la pression. Laisser les gens s’entretuer parce qu’ils ne s’aiment pas, c’est la porte ouverte au chaos et à la chute des dernières marques de civilisation que nous tentons encore de maintenir. » Soufflé d’un ton un peu plus sec, alors qu’il préfère de loin se focaliser sur l’avenir l’adolescente.

Ladite adolescente semble avoir en effet d’autres projets. Et il se pince l’arête du nez quand elle parle de diriger Fort Ward. « Si tu veux diriger cet endroit un jour, apprend déjà à respecter les gens qui travaillent ici au quotidien sans être des soldats. » Qu’elle réfléchisse déjà à ça avant de sombrer dans la mégalomanie.

Pour un peu, il aurait presque préféré continuer de parler de l’avenir de Zelda. Parce que son passé va la marquer et durablement, surtout au vu de ce qu’elle lui raconte. Il s’efforce au calme, à la neutralité, alors qu’elle lui répond. « C’est donc plus simple pour toi de tuer un problème plutôt que d’essayer de l’affronter. Et donc, il aurait tout balancé à Stan… tu aurais probablement fini virée de l’armée. Rappelle-moi où tu en es aujourd’hui ? » Il croise les bras, fixant la jeune femme, alors qu’elle continue de parler. « Abattre quelqu’un en mission pour qu’il ne livre pas nos secrets à New Eden est une chose. Abattre un allié parce que tu n’as pas eu le bon réflexe sur le terrain et que tu ne voulais pas en assumer les conséquences c’en est une autre. »

Et au final, la réponse la plus importante. A ses yeux en tout cas. Elle n’a rien ressenti. C’était un peu ce qu’il craignait, que l’idée de vie ou de mort n’ait plus la moindre importance aux yeux de Zelda. Tant que ce n’est pas la sienne qui est en jeu. Forcément, ça la rend autrement plus dangereuse, il en est bien conscient. Et, quand elle souffle qu’elle regrette, il laisse filer un sourire. « Tu regrettes quoi ? D’avoir tiré ou d’avoir à en subir les conséquences ? » Il sait pertinemment que c’est la deuxième option.

Quand elle reprend, c’est à son tour de hausser une épaule. « En quoi ce serait normal d’exploser ? Ca n’apporterait rien à la discussion. Sauf si au final, tu m’as juste annoncé ça pour que je t’envoie balader. Comme ça tu pourras clamer haut et fort que tout le monde te laisse tomber. » Une inspiration, alors qu’il regarde Zelda, accrochant son regard, la mine encore plus sérieuse que d’habitude. « Stan a eu raison de te virer de l’armée. Tu n’es pas fiable Zelda. Et tant que ce sera le cas, tant que tu penseras que mettre une balle dans la tête d’un allié parce que ce qu’il va faire n’arrange pas tes affaires, je m’opposerais fermement à une éventuelle réintégration. »

Il continue, d’un ton toujours aussi calme. « Tu vas m’écouter très attentivement maintenant. » Son ton ne souffre pas vraiment la réplique, alors qu’il monte d’un cran. « Tu vas maintenir ta version de l’histoire. Et tu vas te la répéter assez souvent pour que tu en sois toi-même convaincue. Tu ne parleras à personne d’autre de ce qui s’est réellement passé. » Il se redresse un peu, surplombant la jeune femme, la mine toujours fermée. « Et tu vas apprendre. En quoi rien de ce que tu as fait n’était normal. En quoi ça fait de toi un danger pour tout le monde. Si tu ne changes pas de comportement, s’il s’avère qu’un jour, tu recommences ou même si tu fais mine de menacer quelqu’un de le tuer parce que son comportement ne te plait pas, ne t’arrange pas ou que sais-je encore… Je te tue moi-même. » Il ne laisse filer qu’une seconde. « C’est compris ? »