J’arrive a avoir un petit sourire, malgré le pli inquiet qui marque mon front, a sa remarque, avant de faire une mimique sur le fait qu’elle n’a pas tout a fait tort. En fait elle est têtue, presque autant que moi et ca ne sert absolument a rien de tenter de la prendre de front. Je me contente de passer mon bras autour de sa taille dans un geste inconscient de protection en repensant a ce que le mot « viol » veut dire chez les Oblivions. J’ai trop de souvenir de ces regards éteins, de ces corps déchirés et meurtrie, de ces femmes réduites, dans la souffrance, a n’être que des objets remplaçables que l’on passe de mains en mains s’appliquant a l’abimer un peu plus,
physiquement et mentalement. Olivia ne pas imaginer le nombre de suppliques muettes que j’ai dû affronter, sans pouvoir offrir à ces victimes la délivrance d’une mort plus douce que ce qu’elles devaient endurer. Quelque part, je trouve cela mieux qu’elle ne sache pas. Le simple fait de connaitre les horreurs de Portland suffit a empoisonner l’âme, surtout quand on sait que trop des chemins qui s’offrent a nous mènent à cet enfer. Je veux plus que tout épargner cela a Olivia.
« Je te propose un pacte : je fais tout pour ne pas mourir et toi pour ne pas te faire violer ? »
J’essaye de mettre un peu de légèreté dans ce qui me semble si sombre. Je ne peux que me baser sur la promesse qu’elle m’a déjà faite de ne pas prendre de risques excessifs et d’accepter de me laisser gérer en espérant qu’elle arrivera a rester maitresse de ses émotions quand tout cela nous rattrapera. Nous restons simplement enlacés dans ce lit, avec juste des gestes tendres pour essayer d’oublier tous ses « et si » trop prématuré. Je l’écoute avec attention alors que mon sourire devient plus doux et sincère a mesure qu’elle explique, sa façon ce qu’elle veut. D’une certaine façon, je crois que c’est aussi ce que je veux, même si la protéger doit passer avant. Ma main libre trouve la sienne pour enlacer ses doigts des miens alors que je lui propose :
« Alors … si on essayait ça ? Juste rester ensemble aussi longtemps que l’on pourra ? Ici, Gig Harbour, et partout où nos pas nous conduirons ?»
Amis aux yeux des autres, beaucoup plus quand nous seront seulement deux, mais ensemble tant que cela sera loin des Oblivions. C’est presque timidement, ce qui ne m’arrive que rarement, que j’ajoute, tout en serrant un peu plus sa main :
« Moi aussi… je veux juste ne pas te perdre et être sûr que tu sois heureuse Olivia. »
Mais ca ne fait pas de moi un homme simple, surtout quand on connait le chat noir qui est dans mes bras et sa capacité a aller au-devant des pires danger. En fait, c’est même un challenge complexe dans lequel je me suis engagé, la preuve en est avec ces quelques jours de fièvre ou les fêtes de noël.
« Je ne peux pas te promettre un avenir radieux, ni de te mettre a l’abri du besoin ou du malheur. J’aimerais vraiment, mais on sait tous les deux que ca n’est pas possible. Par contre je peux te jurer de tout faire pour que tu sois heureuse, prendre soin de toi et aussi d’accepter de te prêter mes chemises si elles ne finissent pas en loisir créatif pour Romy. »
Je lui fais un petit clin d’œil complice a l’évocation de feu ma chemise qu’elle avait garder comme relique de notre première rencontre… enfin, confiée a sa fille qui avait été très inspirée en la voyant.
« Si tu penses que tu peux te satisfaire du peu que je peux te donner, je te l’offre de bon cœur. »
Ça ressemble à un deal honnête, en tout cas, pas un pire que les autres. S'il suffit qu'on survive aussi longtemps que possible ensemble, chaque jour sera une victoire. Le temps que ça durera. Je reprends un sourire plus timide, en hochant la tête. Partout où nos pas nous conduirons. On pourrait aller loin comme ça, assez loin pour amener Portland sur un autre continent et le laisser là-bas si l'occasion se présente. Quand on dit que l'amour peut aider à déplacer des montagnes, pourquoi n'en ferait-il pas autant pour des villes ?
Sa déclaration, presque timide, me fait relever les yeux vers lui et saisir son regard plus intensément. Ce n'est pas grand-chose mais ça me touche. Il ne se doute probablement pas que je n'ai été heureuse dernièrement qu'avec lui. Vraiment heureuse. Sans hésitation, sans trouble, ces quelques jours ensemble sont pour moi un souffle qui me sort la tête de l'eau, qui me fait oublier aussi la réalité et ce qu'elle a de compliqué. Mais là-dessus, je ne lui apprendrais rien. Sebastian se traine quelques casseroles bien pires que les miennes. Un bref rire m'échappe alors, je sens mes joues rougir à nouveau et ça n'est pas à cause de la fièvre pour une fois. Je vais faire avec, de ce peu, là.
Peut-être qu'à un moment, ça ne sera pas assez pour moi, et je ne sais pas si ce moment viendra vraiment. De la même manière, je ne sais pas si je peux moi-même lui offrir tout ce dont il a besoin pour être vraiment heureux, j'ose croire que oui. Mais j'en suis incertaine, et souvent, je me dis que je ne suis pour lui qu'une emmerdeuse qui lui fait perdre le précieux temps qu'il lui reste à vivre. Je chasse ces pensées qui me parasitent en gagnant ses lèvres pour un baiser tendre : Et en parlant de chemises, j'en veux bien une nouvelle, que je lui souffle d'un ton complice. Je n'aurais jamais l'endurance pour un round avec lui, mais je ne connais pas mes limites quand il s'agit d'être dans ses bras.
FIN
We're all stories in the end, just make it a good one
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