The Walking Dead RPG

Quand Phoebe affirme qu'il y a eu des morts et pire que des filles manquent à l'appel, Tasya se sent se décomposer sur place. Elle ne voulait pas tout ça. En aidant Hoani à se débarrasser du corps, ce n'était pas pour condamner des innocents. Une partie d'elle est complètement abattue par tout ça et une autre partie est en colère. Même si elles sont responsables du feu, les districts ont mis tellement de temps à réagir pour contrôler l'incendie. C'est un terrible constat : ils se fichent de leur sort. Il n'y a eu aucun appel, aucune réaction pour savoir combien de personnes sont mortes, aucune demande pour savoir s'ils ont besoin de soins, de vivres. Les disgraciés ne sont rien à leurs yeux, tout juste bons à travailler et à crever sur place « C'est injuste » souffle Tasya. « Ils ont tellement peu de considération pour nous » Ses yeux deviennent un instant larmoyant.

A la question de Ray, Tasya hausse les épaules, le regard toujours obstinément tourné vers le sol. De toute manière, elle est suffisamment abattue depuis des mois pour que ça passe aisément pour du désespoir. A l'interrogation de Harper, la mexicaine relève pourtant les yeux pour la fixer. « ça n'arrêtera pas certaines filles. J'ai vu Javotte et Anastasie en venant, elles ont trouvé un refuge et un homme rentrait chez elles. » La prostitution continuera, elle sera moins encadrée c'est tout. « Comment ? » souffle alors Tasya en soutenant le regard de Hoani. L'atelier de Joe a été épargné par l'incendie, heureusement d'ailleurs car sinon ça aurait créé un beau feu d'artifice. « Se rebeller ? » demande-t-elle. « Les gens dehors, ils sont tellement en colère » Il suffirait d'une étincelle pour que le bidonville explose. « Il serait peut-être temps de rassembler tout le monde » suppose-t-elle.

Certains sont des ... Tu sais ? Des clients. Qu'elle sous entend à Harper qui s'inquiète de la potentielle visite de la milice, haussant les épaules. Le bordel était mal vu. Je doute qu'ils fassent une véritable enquête... Et si ils viennent, je vous préviendrai de toute manière. Ne t'inquiètes de rien là dessus, d'accord ? Elles n'étaient personnes, ici. Pas besoin d'Hoani pour le savoir, alors que Tasya se lamente sur les potentiels morts, et que... Quoi ?

C'était ça, le résumé ? Aller manifester, jouer des coudes et hurler leur frustration au monde ? C'était le moment idéal, à leurs yeux ?

Des gens sont morts, Tasya. Plus que des gens, en fait. Certaines des filles étaient devenues des amies. Je me fiche de la milice, là tout de suite. Ce que je veux, c'est le coupable. C'est lui qui m'intéresse, bien plus qu'une potentielle milice qui de toute manière, se fiche bien de savoir si on meurt de la peste ou d'une mst. Quand à se rebeller ? Elle avise Tasya, de son unique oeil valide. Et après, quoi ? Ils n'avaient pas d'armes, pas de protections, rien qui ne leur permette de tenir face à des miliciens. Levant les mains en signe d'abandon, secouant doucement la tête.

Faites ce que vous voulez, mais ça sera sans moi. Amalia tenait à peine debout, eux aussi, ils comptaient la jeter dans la manifestation ? Dans l'immédiat, on doit trouver une solution viable pour se remettre, nous. Elle n'avait plus d'emploi -si on pouvait le désigner comme tel ? - certaines de ses amies avaient péri dans les flammes. Elle se fichait bien de leur rebéllion, dans l'immédiat.

Amalia est souffrante. On à même plus un semblant de toit. Ma priorité pour le moment, c'est qu'on trouve de quoi se remettre. Pas le reste.

Where to, Miss?

To the stars.

Aux paroles de son amie, Tasya frémit. Il y a eu des morts. Des prostituées peut être,  effectivement. Pour autant, elle choisit délibérément de s'attarder sur les dernières paroles de Phoebe. « Le coupable ? » répète la mexicaine. « Tu as vu l'état du bordel ? Les tapisseries déchirées, les meubles abimés, les courants d'air partout... C'est sûrement une bougie tombée qui a fait que tout s'est embrasé. » Ses yeux evitent volontairement Hoani qui sait que ça ne s'est pas passé ainsi. Quant à Amalia, si elle a pu constater que le feu venait de la chambre où Tasya et son amie étaient, elle ne sait pas exactement ce qu'il s'est passé. La thèse de l'acccident reste possible.

« Et puis... même s'il y a un coupable, tu voudrais qu'il soit pendu sur la place publique ? En exemple ? » Elle sent une nouvelle énergie s'emparer d'elle. Tasya ne veut plus être traitée comme une petite chose fragile à protéger, elle ne veut plus continuer ainsi et reproduire les erreurs du passé. « Mais tu te trompes, les coupables ce sont eux : les autorités qui nous forcent à vivre dans des conditions misérables. Attendez, presque la moitié du bidonville a brûlé sans qu'ils ne lèvent le petit doigt ! Ils n'ont fait aucune recherche pour trouver les victimes, ils ne nous ont rien apporté pour soigner les brûlés, ils nous laissent à notre sort. A leurs yeux, nous ne sommes rien, ils nous ont emprisonné ici jusqu'à ce qu'on en crève... » souffle Tasya.

Elle est sincèrement désolée pour Phoebe mais toute cette situation la révolte. Au fil du temps, elle réalise qu'ils vont mourir ici s'ils ne font rien. « On a pas été condamné à passer 6 mois ici.. Si on ne fait rien, c'est à perpétuité.. » Et vivre ici jusqu'à sa mort ? Hors de question. Tasya comprend l'urgence de la situation, trouver un nouveau refuge, mais après ? « L'un n'empêche pas l'autre. On peut trouver un abri plus sûre mais s'organiser aussi pour la suite. » affirme-t-elle. « Et même si on trouve une maison, un nouveau boulot... Ça ne me suffit pas.. » Sa voix vibre d'une colère mal contenue.  « Je suis enceinte et dans quelques mois, ils prendront mon bébé. Et ça se reproduira encore et encore, avec un autre homme... Pour vous toutes. Alec m'a violée et il n'a pas été punit et depuis, deux hommes ont tenté de m'agresser. Un ici au bordel  » Ray peut en témoigner « L'autre au sein même des districts.  » Alors même s'ils essaient de se protéger mutuellement comme Phoebe le fait avec elle, ils n'y arriveront pas. « Nous ne sommes que de la viande à leurs yeux. Alors, j'en ai marre de vivre dans la peur, j'en ai marre d'avoir faim, froid, j'en ai marre de vivre loin de mes enfants et de Jacob, j'en ai marre de n'avoir aucun espoir ici, j'en ai marre d'aller astiquer les maisons des riches jusqu'à en avoir mal partout... Je n'appelle pas ça vivre... » Il faut que tout ça change.

Le bordel a donc pris feu par accident - du moins c’est l’hypothèse la plus probable. Et effectivement, personne n’a pris le temps de réagir avant que la moitié du quartier soit carbonisé. Parce qu’ils valent moins que leurs chiens.

Lorsque Tasya évoque le milicien qui a tenté de l’agresser au bordel avant de s’en prendre à lui, Ray encaisse un sale frisson. Bras croisés, renfermé dans la lourdeur de cette ambiance morose, il hésite. Entend à peine les arguments de chacun.

Ce qui est certain, c’est qu’il ne peut pas continuer à vivre ainsi. “Je préfèrerais mourir.” enchaîne-t-il aux paroles de Tasya. Les derniers mois passés à se prostituer ont achevé d’anéantir ce qui lui restait d’amour propre. La faim, la soif, la violence et le mépris ne sont plus loin de le rendre fou.

Il sait pertinemment dans quel état se trouve Amalia. Mais il n’a aucune idée si elle arrivera à s’en remettre. Lui est encore debout, mais ça ne tient qu’à de la chance et à sa lâcheté. Alors il comprend, bien sûr, qu’elle n’est pas en état. Son regard s’arrête un instant sur Phoebe, qu’il voit bien abattue elle aussi. Ils n'auront pas tous la force d'agir.

Lui a toujours pris ses décisions par égoïsme, jusqu'à entraîner ses amies dans sa chute. Il y voit la possibilité de se racheter. Et s'il leur trouvait une porte de sortie ?

Dans un soupir, il se tourne vers Hoani, “Je suis prêt à tenter quelque chose. Je n’ai plus rien à perdre.” Et à défaut de réussir, il s’assurera une mort à laquelle il ne pourra plus échapper. “Mais on n’a pas vraiment de levier d’action. Pas d’armes. Et on est tous à bout de force…” Il détourne le regard, pensif. “Quelle serait notre priorité ? Sortir, ou… les renverser ?” Ça paraît complètement irréalisable. Mais après tout… Ils sont nombreux à être désespérés entre ces murs.

Le ton monte un peu et je fronce les sourcils à la réaction de Phoebe. Si sa colère est légitime, la nôtre l'est tout autant, ce pourquoi j'aimerais qu'on soit sur la même longueur d'onde. Mais je ne me fais pas d'illusion. Convaincre tout le monde n'est pas aisé, sinon on en serait pas là aujourd'hui. Et hors de question pour moi de perdre à nouveau le contrôle. Lâcher mes nerfs ne me sied pas, d'autant plus que j'essaie de convaincre d'éventuels alliés de se joindre à une cause qui paraît perdue d'avance. Je soupire alors, en croisant les bras, tâchant de mesurer ma respiration défaillante : « Et après quoi ? C'est bien là le problème. Rien de bon ne nous attend ici. S'en remettre, évidemment que c'est une priorité, mais quel est l'intérêt d'aller mieux si c'est pour finir de mal en pis, ici ? » Cela m'agace quelque peu, que certains préfèrent se terrer dans la peur plutôt que d'agir. Je le reprochai déjà aux districts, ait regretté que les choses ne bougent pas assez vite. Je ne ferai pas la même erreur ici. « Je perçois les opinions de chacun, mais pour moi, il faut remonter à la source du problème. On ne mérite pas de vivre comme de vulgaires parasites dans un putain de bidonville. »

Entre deux quintes de toux, je m'assure de contrôler mon ton, bien qu'il soit vibrant de colère. Je renifle même, songeant que Phoebe pourrait bien aller me trouver pour l'incendie une fois toute cette histoire terminée. Mais pour l'heure, ma priorité est d'agir, pas de se lamenter et de laisser les choses s'empirer. « Qu'est-ce qu'on veut faire passer comme message, hein ? Qu'on peut brûler vif dans le bidonville, c'est tout à fait acceptable puisque personne ne s'en soucie, c'est ça ? On ne branle rien de plus alors que tout s'effondre autour de nous ? » C'est trop facile. Allie prend alors la parole, se joignant à Ray en nous fixant, Tasya et moi  : « Admettons. On en a marre de cette vie, vous proposez quoi alors ? De manifester ? Ce n'est pas ici qu'on va nous écouter. Et on ne croule pas sous les moyens de pression. »

J'ai un râlement moqueur qui déclenche une nouvelle toux, et je secoue la tête. « C'est évident, et c'est pour ça qu'il faut changer les choses. On ne écoute pas d'ici, mais on peut se faire entendre. Ce n'est pas le bidonville qu'il faut viser, c'est la ville elle-même. » Je regarde chacun, suggérant : « Comme le dit Tasya, on peut faire deux choses à la fois. Trouver un toit sur la tête, et agir pour que cette affaire ne se reproduise pas. » Je sonde Ray, qui questionne à juste titre. « Les deux, mais chaque chose en son temps. On ne peut pas sortir d'ici sans que l'autre côté ne soit affaibli. Il faut qu'on se rassemble, et qu'on prenne le taureau par les cornes. Il y a de plus en plus de monde ici, qui est prêt à se révolter. Ce qu'il nous manque, c'est une organisation. Les moyens d'agir, on peut les construire. mais la volonté, c'est à nous de la trouver. » Je redresse le menton : « J'a fais une promesse, en arrivant ici. De ne pas abandonner le combat. Et c'est pour ça que je suis là, aussi folle que je puisse sonner :  il est temps de montrer que nous ne sommes pas que des déchets bon à jeter. La ville nous exploite. Utilisons ses failles pour la retourner de l'intérieur. »

Spoiler:

I'll walk through fire and through rain

Snakes and stone, Skin and bone. Vain and revenge, Betrayed by a friend. Grow cold heart consumed by green, Mesmerize me. Oh, I dare you to try, dare hypnotize me, with medusa's green eyes. ----

 

Je fronce un peu les sourcils. Les miliciens vont continuer de foutre la merde, oui. J'imagine que ce n'est rien de nouveau. Mais Hoani s'acharne et s'entête, jusqu'à proposer de renverser la tendance. Je suis intriguée, évidemment - mais j'ai l'impression que quelque chose cloche. À peine arrivée qu'elle souhaite déjà lancer les hostilités? Elle pense peut-être qu'elle est la révolution incarnée? Qu'elle est la seule à vouloir se révolter, à vouloir tout risquer? Elle semble oublier qu'elle n'est pas la seule à se faire chier ici - et nous tous depuis plus longtemps qu'elle, au final. Est-ce qu'elle avait vraiment besoin de l'incendie pour capter que personne ne se préoccupe de notre sort, d'ailleurs? Enfin. Tasya précise que rien ne pourra se mettre au travers du chemin du plus vieux métier du monde, tandis que Phoebe tente de me rassurer, par rapport aux visites de la milice. Mais je n'ai pas le temps de placer un mot que la discussion s'enflamme rapidement - sans mauvais jeu de mot.

Le fait de voir Tasya parler de rébellion est assez particulier. Elle est typiquement l'image même de la victime plutôt effacée, la plupart du temps. Et de toute évidence, Phoebe se fâche. Je suis légèrement mal à l'aise de la voir si perturbée - je me demande un instant pourquoi. Je réalise rapidement que c'est simplement parce qu'elle est toujours de notre côté, normalement. C'est la première fois que je la vois s'opposer à un membre de cette famille recomposée avec autant de violence. Elle insiste, du coup, préférant trouver le coupable de l'incendie et prioriser leur sécurité que de lancer la guerre du siècle. Hoani peste à travers ses paroles - entre quelques quintes de toux. Elle tente avec acidité de faire valoir son opinion, de nous convaincre de régler le problème à la source. J'ai l'esquisse d'un sourire, pendant une seconde. Personne ne mérite de vivre comme des parasites, non, mais personne ne mérite de vivre sous le régime de New Eden non plus. J'ai été vachement critiquée pour ma ridicule tentative de mettre un terme à tout ça, et la même énergie est en train de naître ici, là, tout de suite. Ironique, quand même.

Et pour continuer dans le palmarès des choses que je ne vois jamais, Tasya s'agite presque en répliquant qu'il est impératif de résister à l'autorité. Je ne sais pas si j'ai entendu autant de mots sortir de sa bouche depuis que je suis arrivée ici. Je ne sais même pas si j'ai déjà vu autant de colère dans ses billes. Elle parle de son viol, de sa grossesse, et du fait que rien ne pourra plus jamais la satisfaire ici. Plus maintenant. Ray ajoute qu'il est prêt à tenter le tout pour le tout, d'ailleurs, ne manquant pas de préciser que ce ne serait certainement pas chose facile.

Je le regarde un instant, avant de fixer longuement Hoani. « On arrivera certainement à rien en s'engueulant. » que je lâche avec un peu plus d'intention dans la voix. Je soupire, avant de continuer, mon regard noisette toujours posé sur l'instigatrice de cette petite réunion. « Qu'est-ce que tu nous demandes, exactement? » Qu'elle le dise, et qu'elle ose me regarder droit dans les yeux quand elle me demandera de joindre le mouvement. Ce mouvement qui va assurément signer mon arrêt de mort - et sans procès, cette fois. J'imagine qu'il faut ce qu'il faut.

And I roam again, I ain't got no home. On my own again, but I never felt so close to them. My only feeling. A lonely feeling. L o n e l y f e e l i n g s.

Son oeil clair se fait plus froid au fur et à mesure que Tasya s'emporte. Se renfermant sans mot dire, alors qu'elle n'a pas élevé la voix une seule fois, quand son amie ose exposer ses propres sévices. Pour toute réponse ? La blonde défait avec lenteur son bandage, laissant toute la possibilité à la brune et aux autres ce qu'elle cachait honteuse depuis son arrivée ici. Sa paupière résolument close, encore entaillé de la pointe de la lame d'Alec.

Pas de ça avec moi Tasya. Car si elle ne s'était jamais montré en colère, s'entendre presque traitée comme une gamine quand la mexicaine réclamait sa famille et son confort en se persuadant que leur équipe de bras cassés allait retourner le monde, avait le don de lui donner envie de tous les laisser ici en plan. Je n'ai pas perdu qu'un oeil dans cette histoire. Pour elle. Pour Ray, pour cette façade de justice que New Eden assurait vénérer. Ses enfants lui avaient été arrachés. Liam, également. J'ai littéralement vendu mon corps, pour espérer nous trouver un abri. Alors non, je ne réclame pas la loi du Talion pour le coupable. Mais j'estime avoir le droit de pleurer celles qui sont mortes brûlées vives dans ce brasier, sans qu'on vienne les aider. Tout comme Amalia n'est pas en état de se battre. Du temps. Voilà ce qu'il leur fallait. Et qu'importait qu'Hoani veuille jouer les grandes sauveuses de l'humanité.

Si vous voulez vous lancer dans une mission suicide, allez-y. Mais moi je n'attaquerai pas de front. Et pas maintenant, pas comme ça.

Where to, Miss?

To the stars.