The Walking Dead RPG

Si Alice s’était, ces derniers mois, noyée dans les voyages à bord du voilier qu’ils possédaient, c’était exactement ce dont elle avait eu besoin, pour surmonter la mort d’Alaska et – dans une moindre mesure – celle d’Alaska. En plus de la présence des autres, des confessions que Moon lui avait arrachées, de la présence apaisante de Roman. Et si elle repartait sous peu pour rejoindre la base de leurs alliés où ils devaient effectuer de nombreux travaux en échange de ressources, elle n’avait plus l’impression d’avoir la tête sous l’eau. Elle était, autant que possible, apaisée et sereine.

Les choses reprenaient un cours à peu près normal. Le bref voyage à Fort Nisqually avait été physiquement éprouvant, mais elle n’avait pas été plus affectée que ça par l’effervescence inquiète qui y régnait, plutôt détachée de tout ça – après tout, contrairement à Kaycee, Luna et Tiago, elle ne connaissait personne là-bas. Même si elle avait été ravie de rencontrer Tomas, qui avait fait du beau travail. C’était presque du gâchis, au final, qu’ils doivent tout abandonner. Mais il ne semblait pas perdre espoir. Ils avaient remis les lettres que le navigateur lui avait confié à l’endroit indiqué, et ils avaient repris la route, l’eau plutôt, vers Silverdale.

Elle ne s’était pas fait prier pour rejoindre Roman, et reprendre la discussion qu’ils avaient eue la veille de son départ, quoi qu’elle ait été un peu retardée. Elle aurait été déçue qu’il en soit autrement et Roman ne pouvait pas en être surpris. Même s’ils avaient mis au clair leurs attentes à tous les deux – et qu’Alice avait arraché à Roman la promesse de le lui dire, si cela ne lui convenait plus. Elle tenait à lui et elle ne voulait pas qu’il souffre de la situation. Même s’il semblait ne pas s’en plaindre pour le moment. Ils s’étaient séparés le matin pour veiller aux derniers préparatifs, mais elle ne doutait pas de son retour à ses côtés dans la soirée ou à l’orée de la nuit. Et si elle en croyait les coups sur la porte derrière elle, elle avait eu raison – ce qui se confirma sans grand doute, alors qu’elle l’ouvrait sur lui, s’effaçant pour le laisser entrer, se retenant de se moquer gentiment sur le sourire sur ses lèvres. Après tout, son humeur à elle aussi s’allégeait en sa présence. « Tout est là, dit-elle en montrant de petites piles du doigt, destinées à être stockées dans son sac de voyage. Je les rangerai après. »

Elle repousserait clairement la tâche à plus tard, alors qu’il l’embrassait. « Depuis hier soir ? J’espère bien ! » Elle se moquait gentiment, appréciant qu’il le lui dise. « Tu n’es pas mal, toi-même. » Surtout quand il la regardait comme ça. Lui prenant la main, elle l’entraîna sur le lit, s’asseyant sur ses genoux pour l’embrasser à son initiative cette fois, avant de se glisser à côté de lui. « J’espère que tu es prêt aussi. » Parce qu’elle ne comptait pas vraiment le lâcher. « Tu connais les gens que l’on va voir, là-bas ? » Pas elle. Elle savait juste que les relations étaient tendues entre Joaquin, Ruby, Salem et eux, mais elle n’en savait plus. Comme Roman, elle ne s’était jointe à eux qu’après.

Elle le regardait, appuyée sur le bord de la porte, s’amusant de le voir patienter comme ça, alors qu’il avait probablement envie de l’embrasser à nouveau. « Tu sais que je te laisserai entrer même si tu ne dis pas ça. » Elle n’était ni timide ni gênée d’avoir envie de lui et l’assumait parfaitement. Qu’importe ce qui les liait, au final, tant qu’ils étaient bien ensemble. « Ah oui ? Il va falloir que tu me décrives un peu plus la compétition… » D’un air taquin, elle l’entraîna à sa suite. « Parce que j’ai rencontré de beaux surfeurs, plus petits que toi peut-être, mais blonds, très bronzés… » Tous les mecs imbus d’eux-mêmes qu’elle avait toujours fuit, malgré leur physique.

Jouant distraitement avec les cheveux de Roman, sa main posée sur son cou, elle l’écoutait, intriguée par ce qui les attendaient. Par les gens qu’ils allaient rencontrer, dont Salem, Ruby et Joaquin s’étaient séparés en mauvais terme. Elle n’aurait probablement jamais le détail de ce qui les opposait même si elle en avait les grandes lignes, de toute façon. « C’est un euphémisme… Mais c’est encore un sujet sensible, j’ai l’impression. Peut-être plus encore pour Salem. Enfin, tu étais là comme moi quand elle nous en a parlé… » Après la tempête, quand ils avaient réussi à se retrouver. Il était peut-être même plus conscient qu’elle de ce qu’il se passait, alors qu’elle se trouvait encore dans un nuage cotonneux dont elle n’arrivait pas à se défaire. « Pas que je sache, je ne crois pas les avoir déjà vus. Mais bon, s’ils acceptent les uns et les autres de se revoir et de s’entraider… Ça n’est pas vraiment notre conflit. » Et leur présence pourrait sûrement arrondir les angles.

Posant sa tête sur son épaule après qu’il l’ait embrassée à nouveau, elle ne put retenir un soupir à sa question. Pas dirigé contre lui, mais contre elle. « J’ai… L’impression de trahir Alaska. Et Nova. » Même si la seconde comptait moins pour elle. Elle résista difficilement à l’envie de se lever et de se rassoir sur lui pour mieux le repousser sur le lit, pour éviter cette conversation. De toute façon, il reviendrait à la charge. Mais est-ce qu’elle désirait vraiment avouer qu’elle culpabilisait ? Pas tellement. Elle savait à quel point c’était irrationnel. « Et toi ? »

Souriant légèrement, elle haussa les épaules, prenant un air innocent. « Qui sait… Peut-être que je serai jalouse d’elles comme de toi. » Même si elle doutait que la réciproque soit vraie, si elle parlait des femmes pour qui elle avait eu des coups de cœur et avec qui elle avait été plus intime. « Et je sais que tu préfères les femmes plus petites, quoi que tu en dises ! » Une affirmation potentiellement erronée, même si elle était persuadée qu’il appréciait son apparente fragilité – même si elle n’était que physique, et moindre qu’elle ne paraissait être au premier abord.

De toute façon, ses bravades ne la rebutaient, bien au contraire, alors qu’elle se rapprochait de lui, appréciant le contact qu’il lui offrait alors qu’elle s’était laissée glisser à ses côtés. « Au moins on sera là pour faire tampon, s’il le faut. » Ce ne serait pas la première fois, même si les tensions entre eux et d’autres groupes n’étaient pas toutes connues d’elle. « Il n’y a pas de raison que ça se passe mal. Ils demandent nos services, et nous fournissent les leurs en retour, c’est un marché qui doit être bénéfique pour tout le monde. » Et elle aidera, comme Ruby les y a engagés.

Serrant brièvement ses mains entre elles, quittant le visage de Roman, elle détourna aussi le regard, alors qu’elle avait essayé de répondre le plus sincèrement possible. Incapable de briser le silence dans un premier temps, il lui semblait alourdir l’atmosphère, alors qu’elle remonta un de ses poings serrés sur son cœur, le frictionnant par réflexe. « J’ai l’impression que le poids qui m’accablait disparaît petit à petit, et que les battements de mon cœur sont assourdissants. Comme si je passais à autre chose, comme si je renonçais à ce qu’elle a représenté pour moi… » Comme si tout ce qu’elle avait construit avec Alaska se dissipait dans le néant.

Elle aurait peut-être dû se taire. Elle savait ce qu’il allait lui dire. Qu’Alaska n’aurait pas voulu qu’elle se lamente. Qu’elle serait heureuse à l’idée qu’Alice, qu’elle chérissait, aille de l’avant, et qu’elle savait qu’elle aurait toujours une pensée pour elle. « J’espère que ces pensées finiront par ne plus t’embrouiller… » Elle se doutait bien qu’il s’agissait de sa famille, de son conflit avec eux. Elle n’aurait jamais envisagé se séparer de sa famille, malgré leurs remarques incessantes sur le fait qu’elle ne soit ni en couple ni mère, avant que leur monde ne soit gouverné par les morts-vivants, mais ils s’aimaient sincèrement et n’étaient pas en compétition à cause d’une volonté ridicule d’être les meilleurs de tous. Au contraire, ils s’épaulaient en toutes circonstances, malgré les défauts qu’ils se reprochaient. Elle était convaincue que Roman serait mieux sans eux. Chuchotant, approchant ses lèvres de son oreille, elle reprit la parole. « Tu sais que tu as une famille ici, qui t’apprécie à ta juste valeur… »

Elle ne savait pas vraiment s’il l’avait entendue, alors qu’il inversait la tendance, descendant le long de son cou pour le parsemer de baiser. Elle frémissait sous ses gestes, glissant ses mains froides sous son t-shirt alors qu’il faisait glisser son haut, après qu’elle lui ait donné son assentiment. Il avait le don d’étouffer ses pensées néfastes, d’éloigner sa culpabilité, même si ça n’était que pour un temps.