The Walking Dead RPG

Je lève un sourcil quand je vois Cassidy poser une énième plante dans un coin du tipi. « Tu comptes nous laisser de la place pour marcher ou comment ça se passe ? » Soufflé d’un ton malicieux, alors que je continue d’empiler les cubes de bois devant Andrew qui s’occupe surtout de taper dedans pour tout faire tomber dans un éclat de rire. Au moins, il arrive à tenir assis assez longtemps sans finir par faire le basculo, y a du progrès. « Maman veut qu’on vive dans la jungle. » Il agite les bras et commence à crier un « MAMAMAMA » joyeusement.

On commence tout juste à s’installer, alors qu’on est arrivés il y a quelques jours à peine. Ca me fait bizarre de dormir dans un tipi, mais c’est carrément plus confortable que je l’aurais cru. Et si on a dit que ce serait temporaire, ptet qu’on changera d’idée d’ici le printemps. Je saurais pas trop dire. En tout cas, dormir là la première nuit m’a fait un bien fou. Etre au calme, loin de tout ce qu’on a pu vivre ces dernières semaines, c’était presque surréaliste. Sans l’alien, je suis persuadé qu’on aurait fait une grasse mat’ de dingues.

Et, depuis une heure, Cass’ essaie d’agencer un peu tout ça. Entre le berceau du petit que les natifs ont été ravis de nous trouver et le lit blindé de coussins, elle a l’air de s’éclater. Sauf quand elle doit bouger les piles de livres que j’ai déjà posés l’air de rien. Ouais, on trouve vite nos marques, je sais.

Je relève la tête quand la tenture de l’entrée est soulevée pour révéler la silhouette de Tomeo. « PAPAPAPA ! » J’arque un sourcil, fixant mon fils. « T’es sérieux toi ? » Il se marre et tend la main vers Dawn. « PAPAPA ! » C’est moi ou il est aussi en train de désigner son doudou ? Ah bah super, maintenant il montre le foyer à quelques mètres de nous. L’abus sérieux. Je roule des yeux avant d’agiter le cube devant mon ingrat de fils. « Tu perds rien pour attendre toi. » Un rire en réponse alors que j’agite la main pour saluer mon meilleur ami. « Ton filleul te réclame. Ou il réclame le chien. Je sais pas trop. Hum. » Chien qui bien évidemment, après avoir fait la fête pour saluer Tomeo, est déjà en train de se rouler aux côtés d’Andrew, répondant visiblement à papa sans problème. Ouais, possible que je sois un peu vexé là. « Comment ça va ? Vous vous êtes installés où avec Farah alors ?  Et gaffe où tu t’installes, y a des plantes par-tout. » Sans exagération aucune évidemment.

Nolan s’occupe de l’alien, jouant son rôle favori de super papa, alors que j’essaie d’arranger au mieux l’espace qui nous sert de maison. C’est plus grand que ce que j’aurais cru, et vachement plus confortable que ce que j’aurais imaginé. En même temps, après avoir passé des semaines sur la route, à ne pas dormir et à tourner en rond, je crois qu’il nous en fallait pas beaucoup… Mais c’est vraiment chouette, et ça le sera encore plus quand j’aurais fini.

J’ai une grimace amusée à l’intention de Nolan, posant néanmoins la plante que je tiens à l’emplacement prévu. Je me tourne vers lui, haussant un sourcil en le voyant jouer avec l’alien, et j’ai un immense sourire satisfait. « Tu vois, il est d’accord avec moi ! » Je fais un clin d’oeil au papa et récupère un des doudous du petit. Il tend les mains vers moi, continuant ses vocalises qu’il est le seul à comprendre, partant tout seul dans un nouveau fou-rire quand je lui donne le renard. Je laisse filer un soupir quand il se met à le mâchouiller, non sans continuer de faire tomber les cubes en bois.  

« Elles vont geler dehors, j’en ai déjà perdu pendant le trajet, j’aimerais bien pas devoir tout recommencer. » Et pourquoi je me justifie d’abord ? J’ai un large geste des bras en montrant l’intérieur du tipi. « Et tu veux vraiment qu’on parle de places ? T’as vu tous tes bouquins ? Alors que ça sert à rien en plus. Moi au moins, ça fait de la vie et ça fait joli ! » Argument imparable, et totalement de mauvaise foi. Enfin pas totalement et il le sait. Ça peut paraître superflu, c’est pas forcément le plus urgent à faire. mais perso, je trouve ça super important. On a assez morflé sur la route, ça a été suffisamment long et traumatisant, Nolan a assez donné et encaissé, pour qu’on puisse avoir juste envie de souffler. Pour qu’on puisse avoir le droit de souffler. Rendre cet endroit chaleureux, vivant, le transformer en cocon, c’est bien la moindre des choses que je puisse faire. Se sentir bien ici, dans ce nouveau chez-nous, est bien plus important que tout le reste dans l’immédiat.

Je tourne la tête en entendant Andrew changer de disque pour voir Tom entrer. J’échange un regard avec lui, pour revenir sur Nolan et le petit. Heureusement que Nolan s’inquiète plus, et qu’il peut pas vraiment y avoir de doutes sur qui est le père vu la bouille de l’alien… Mais si j’ai essayé de me retenir quand il a désigné Tom, je peux pas m’empêcher de souffler un rire quand il continue en désignant la moitié de ce qui lui tombe sous les yeux … sauf Nolan. « J’ai toujours dit que ça craignait d’être parent, j’avais raison. » Je lui fais un clin d’œil et souris au nouvel arrivant. « Salut Tom. » Je hausse un sourcil quand mon cher et tendre reprend et se fout à nouveau quelque peu de moi. Je lève les yeux au ciel en m’adressant à notre invité. « Tu peux t’asseoir sur les livres donc. Y en a partout aussi, mais ça peut servir de sièges ou de cale-porte… Pas vrai Andrew ? » « MAMAMAMA » Et un nouveau sourire ravi de ma part. Finalement je l’aime bien le petit alien.

La migration jusqu’ici a été laborieuse et dangereuse. Non sans pertes malheureusement. Des enfants… Il a été difficile de quitter notre foyer. Après tant de temps à y vivre, à y survivre… malheureusement, nous n’avons pas la mise sur les évènements. Le soulagement a été intense de pouvoir retrouver Farah, Nolan et Cassidy, sains et saufs. Je me suis écroulé une fois installé, récupérant le sommeil en retard à cause de la route, de l’angoisse, des circonstances tout simplement. Avec ces hordes de rôdeurs qu’il a fallu éliminer, avec peu de moyens, mais de l’ingéniosité et de la détermination.

Profitant d’un moment de calme, je m’en vais voir l’installation de Nolan et Cassidy et aussi profiter de mon adorable neveu. Franchement, si cette situation dire plusieurs années, ce sera col pour lui. Gamin, j’aurais adoré vivre comme ça, à l’indienne. Il faudra rendre ça naturel et amusant pour lui. Le protéger de la dureté de la réalité, tout en lui apprenant à survivre. Inutile de l’enrouler dans une bulle non plus. Cela ne sera pas lui rendre service. Mon visage s’éclaire alors que je pénètre à l’intérieur, et que je suis accueilli par le babillage d’Andrew qui commence à prononcer ses premiers mots. « Je ne sais pas trop comment je dois le prendre du coup… » Je caresse Dawn qui s’est précipitée vers moi pour me faire la fête. Mais elle revient vite près du petit, veillant sur lui comme une mère sur son enfant. C’est bien, il a une bonne chienne de garde.

Je m’assois en tailleur, pour mieux approcher Andrew et embrasser son crâne duveteux. « Les écoute pas, tes parents ne disent que des bêtises et ne comprennent pas encore ton humour… » Je glisse un regard vers Nolan : « Pourtant ton père a un humour merdique. » C’est un peu le bordel dans le tipi encore, entre les fleurs et les bouquins… « Vous pouvez pas avoir une déco minimaliste ? » Je saisis un livre par hasard, lis le titre et soupire, le reposant doucement. Quant à Andrew, il nargue juste son père en appelant très bien sa mère. C’est drôle… Alors qu’elle est celle qui l’accepte le moins du couple, c’est pourtant vers elle qu’il se tourne. Comme quoi. « Ah vous voyez, il te taquine juste Nolan. » Je fais une grimace. « Vous avez de la chance qu’il ne sait pas encore ramper ou marcher… Vous allez pas lui faciliter la vie avec tout ce bazar. Cass, faudra faire gaffe à tes plantes, ou tu vas avoir des accidents. » Déjà miraculeux que Dawn ne fasse pas de conneries dedans, du genre pisser sur la terre, ou aller les déterrer.

« Ca va. On agence doucement tout ça mais c’est clairement pas aussi complet que chez vous. Mais on n’a pas de passions aussi dévorantes non plus. » Et pas de chien ni de bébé, ça fait gagner beaucoup de places quand même. « Comment vous avez fait pour récupérer tout ça ? » Je jette un regard au berceau.

Je secoue la tête, fixant Andrew, la mine dépitée. « Genre, t’es d’accord avec elle ? Ca craint. » Le renard entre les doigts, il vit clairement sa meilleure vie, me focalisant sur Cass. « T’en as perdu tant que ça ? Et déjà, j’ai pas pu amener autant de bouquins que je voudrais. Les pauvres que j’ai abandonnés, t’y penses au moins ? » Je relève même pas sa mauvaise foi criante, notant dans un coin de ma tête de lui ressortir au pire moment, genre quand elle demandera une info que je pourrais trouver que dans un de mes livres inutiles. Et toc.

Pas le temps d’en rajouter une couche que Tom débarque. Forcément, je le fixe plus longuement que la normale, cherchant à déceler des traces de fatigue – ou pire encore – qu’il pourrait cacher pour pas nous inquiéter. Mais j’ai l’impression que ça va vraiment mieux. Qu’il a réussi à remonter la pente, même si je suis persuadé que ça reste fragile. En tout cas, je sais qu’Andrew l’aide beaucoup à se focaliser sur l’avenir. En même temps, c’est pas comme s’il lui laissait vraiment le choix.

A la remarque de mon meilleur ami, j’ai un haussement de sourcils, agitant un cube en direction du bébé qui continue de babiller comme si de rien était. « Dis-toi que tu as autant de valeur que le chien et le truc qui chauffe et qui lui évite de se balader avec 18 couches de fringues. Donc c’est plutôt positif. »  Andrew ferme les yeux et laisse filer un rire quand Tom vient l’embrasser, avant de tendre les bras, ouvrant et fermant les mains, pour qu’il l’attrape.

De mon côté, je me contente de rouler des yeux et de me draper dans ma dignité. Ouais pour ça, je suis trop doué. « Mon humour est parfait, je vois pas de quoi tu parles. » Et je pointe un index en direction de Cass. « Même pas t’y penses ou je te balance les pires blagues que j’ai dans mon répertoire dès que Tom aura le dos tourné. » Et je plisse des yeux quand elle prend encore une fois Andrew à partie. Le pire ? C’est que ça marche. « Pfff… vous perdez rien pour attendre tous les deux. »

J’ai un sourire amusé quand je vois Tom choper un bouquin au hasard, avant de hausser une épaule. « Tu sais bien que non, sinon ce serait pas drôle. Et on a réussi à empêcher Dawn de bouffer les plantes ou les bouquins, je me dis que le petit devrait piger quand il aura l’âge de faire autre chose que de basculer sur le côté quand il se marre trop. » Doudou jeté sur le côté, Andrew est d’un coup très occupé avec le pouce de Tom, jusqu’à en loucher dessus alors qu’il essaie de le serrer entre ses propres doigts. Et je me marre au reste. « Attends que Farah ait de nouveau envie d’un coin pour développer ses photos, ce sera le bordel. » Je me fais quand même plus sérieux à sa question, fixant le berceau un instant avant de replier une jambe contre moi. « En fait, direct après qu’on ait choisi un tipi, les natifs ont débarqué avec un paquet de trucs. Je sais qu’ils ont fait ça chez Nihima aussi. Je crois que ça leur fait vraiment du bien de voir des petits bouts. Et qu’ils avaient gardé tout ce qu’ils avaient pour leurs propres enfants. » Ca me serre le ventre rien que d’y penser, surtout avec l’histoire que m’a racontée Cass sur le petit rôdeur de 2 ou 3 ans. Un regard vers elle, alors que je sais pas si elle a envie d’en reparler ou si même Tom est au courant. Je sais que c’est compliqué pour elle d’y repenser. « Donc on a récupéré le berceau, on a même un petit meuble pour lui. J’ai le parc à l’infirmerie qu’ils nous ont refilé. Et je te parle pas des jouets en bois ou des fringues. » J’ai un temps, avant de reprendre, songeur. « Je pensais pas. Qu’on finirait par vivre dans un endroit pareil. Je trouve ça un peu dingue. Pas vous ? » Surtout vu d’où on vient tous les trois.

« Fais pas cette tête. Evidemment qu’il est d’accord avec moi, j’ai raison. » Je secoue la tête en riant. « Pauvres petits livres. Mais je sais que t’en as laissé beaucoup oui… On pourra peut-être essayer d’aller les récupérer plus tard, tu crois pas ? » Après tout, ils sont restés à l’abri du mobil-home, avec un peu de chance, ça les protégera. « Et non, j’en ai pas perdu tant que ça. Enfin, pas plus que ce que j’avais prévu. Mais ça fait chier quand même. » Pour de vrai. Mais même si je fais genre, ce sont que des plantes, c’est pas dramatique. C’est juste plus facile de déconner là-dessus que de penser au reste et à tous ceux qu’on a perdus en cours de route. Faut dire que par contre, le trajet a été bien plus éprouvant que ce qu’on avait prévu à ce niveau-là.

J’ai beau être attachés au groupe, avoir trouvé ma place et m’être fait de nombreux amis parmi eux, je suis malgré tout sincèrement soulagée qu’aucun des deux n’ait été blessé durant les opérations… Okay, qu’aucun des trois n’ait été blessé, petit alien inclus. Ils vont bien et c’est tout ce qui importe. Et ouais, c’est profondément égoïste donc, je m’y suis faite. Tom a même l’air d’aller mieux, probablement grâce à son neveu, et sans doute que je dois lui être reconnaissante de l’aider comme ça, sans même en avoir conscience.

« Il adore Dawn. C’est un super compliment du coup. » Dawn qui a salué Tom comme il se doit, sans doute pour vérifier que c’était bien lui et pas une menace au passage, et qui est déjà de retour, sagement allongée près d’Andrew. Elle pose son museau entre ses pattes, alors que le p’tit alien s’intéresse au pouce de Tom comme si sa vie en dépendait. J’ouvre la bouche pour répondre, fronçant les sourcils à la remarque de Nolan. « Déjà, je dis pas de bêtises. Deuxio, on parle du machin qui rigole quand quelque chose tombe, ou quand on met un chapeau à Dawn. Tertio, je subis déjà ton humour pourri à longueur de temps et tu sais très bien que je peux totalement occulter que tu me parles en trente secondes et te laisser planté avec tes blagues à deux balles. » Mon sourire s’agrandit évidemment quand Andrew me répond et que Nolan ronchonne.

J’offre un regard outré à Tom en grimaçant. « Minimaliste ? Eurk. Mais pourquoi faire ? » Genre j’ai jamais fait quoi que ce soit de… minimaliste. Délaissant son pouce, Andrew tente de se mettre debout en s’accrochant à la jambe de Tom. C’est flageolant et hésitant, mais il tient. Il tente même de grimper tout seul sur la jambe de Tom… ça, ça marche moins bien. Mais il est persévérant, faut lui accorder ça. « Dawn a jamais touché aux plantes, elle va creuser des trous dehors quand elle s’ennuie. Elle mangeait les pieds de chaises au réfectoire quand elle était petite… Peut-être qu’il fera pareil ! » Je hausse les épaules. « Il apprendra. Je lui laisserais un pot vide pour jouer au pire, il mangera la terre et se roulera dedans. » Je suis pas aussi confiante que le papa, et je sais pas trop si je redoute plus qu’il arrache des feuilles d’une plante ou d’un bouquin en vérité… Mais on verra bien. « Il sera sans doute trop occupé à vouloir s’évader de toute façon. » Je souris quand il parle de leur installation avec Farah, satisfaite de me rendre compte que la pointe de jalousie que je ressentais n’est plus là. Presque plus là.

Je laisse Nolan répondre et quand mon regard croise le sien, je laisse filer un soupir. « Tu te souviens quand j’ai dit qu’on avait dû faire nos preuves la première fois qu’on est venus ? Il y en avait une dizaine enfermés dans une grange, les morts les plus récents… » J’inspire et détourne le regard malgré moi. « Il y avait un gamin dans le lot de rodeur… Un tout petit. Il avait encore les jambes toutes potelées… » Je fixe Andrew en parlant, me souvenant sans mal comment son visage s’était superposé à celui du gamin mort quand j’avais dû l’achever. « Lily n’a pas réussi à le tuer, alors je… je m’en suis occupée. » Je déglutis et secoue la tête, ne voulant pas m’y attarder plus que nécessaire. « Bref, du coup, les natifs ont pas pu faire leur deuil, ni offrir de cérémonie à leurs morts, avant qu’on arrive. Je pense que ça les a aidés et… ouais, ça leur fait du bien d’avoir des petits aliens qui courent partout en riant. » Ce que je comprends, même si ça doit être particulièrement difficile pour certains d’entre eux. Berceau, parc, jouets, fringues, on a eu la totale. « Je suis contente qu’il soit trop petit pour s’en compte, parce qu’à être pourri gâté comme ça, il deviendrait insupportable. » Non pas que ça s’arrangera forcément en grandissant, mais avec le temps, ça leur paraîtra moins incroyable d’avoir des gamins… Et puis surtout, s’il me ressemble, il va être grave intenable.

Mon sourire revient, plus léger. « Tu veux me faire croire que toi, t’as jamais imaginé vivre comme les indiens quand t’étais petit ? Avec un tipi et tout, comme Peter Pan ou euh le mec de Danse avec les loups là. » Mais je peux que hocher la tête pour acquiescer, souriant aux deux hommes. « J’aurais jamais imaginé qu’on finirait ici. C’est tellement différent. Loin de tout. Et magnifique. » A défaut d’autres mots. C’est même un peu trop beau, trop parfait, non ?

« Il sait ce qui est important. » Je préfère prendre ça de façon positive effectivement. Je fonds quand même complètement devant sa petite bouille adorable.. Je ne peux que vanner Nolan quand il est question d'humour. C'est une référence après tout, une sorte de running gag. Les piques fusent entre Cassidy et Nolan, en une mécanique bien huilée. Dans ce tipi, je ne ressens que de bonnes ondes, des vibrations positives, de la bienveillance, et beaucoup d'amour. Est-ce que c'est la présence d'Andrew ? Un tout ? Je l'ignore franchement, mais qu'importe finalement. Ils ont réussi à se créer un cocon et cela est apaisant de pouvoir y faire un break. Comme d'aller dans une bulle d'oxygène avant d'affronter les flammes d'un incendie. Je souris : « Désolé vieux, on dirait bien qu'ils vont s'allier contre toi. » Je suis soulagé de voir Cass accepter sa maternité. Ce n'est peut-être pas encore la panacée, mais il y a une nette amélioration quand même.

Leur intérieur est d'ailleurs bien à leur image, entre les plantes et les livres. Ce qui risque de poser soucis à un moment donné, non ? C'est très fourni en tous les cas. « Vrai que j'espère qu'il est plus intelligent que Dawn. Sans offense ma belle. » Je grattouille tranquillement l'animal qui entend bien qu'on prononce son nom et qui est plus intelligent que certains humains, je n'ai aucun doute là dessus. « Ah, oui mais c'est un bordel appréciable. » Parce que cela fait de beaux souvenirs, même si certains portraits immortalisés appartiendront forcément à des gens disparus. « Vous devriez penser à une laisse. » Je taquine, mais n'empêche que cela pourrait être un peu réconfortant.

Je suis surprise de l'aménagement pour Andrew cependant et Nolan m'explique que les natifs ont voulu se montrer agréables et ont pensé au confort du bébé. Même si songer que cela a pu servir pour d'autres enfants aujourd'hui disparus ou jamais nés a quelque chose de dérangeant et de terriblement triste aussi. On a amené un peu de vie... mais on a aussi perdu des gens pendant ce déménagement. Une fuite en avant, du moins je l'espère. Mais nous avons bien été accueilli ici. Jusqu'au moment où il y aura des problèmes, ou il faudra de nouveau fuir... Je doute qu'on puisse échapper aux nombreuses menaces trop longtemps. Nous sommes un peu... cernés. Je pose un regard curieux sur Cassidy quand elle parle d'avoir fait ses preuves en venant la première fois. Et elle me narre ce qu'il s'est passé. Un enfant... C'est le pire. Ils ne sont plus humains, ils ne seront plus jamais ce qu'ils ont été. Mais Cassidy a du l'achever. C'est difficile en temps normal, mais davantage encore en étant une mère... « Je l'ignorais. » Ma voix est un peu voilée. Désolée, très clairement. Mais je préfère m'accrocher au positif. « Avec vous, si il a hérité de vos gênes, il sera doublement insupportable. »

Je ne peux que hocher la tête aux paroles de Nolan, c'est assez incroyable de vivre ici. Comme ça. « On a vécu beaucoup de choses incroyables en même temps, que nous n'aurions pas pu imaginer, est-ce si étonnant ? Mais oui, c'est un peu un rêve de gamin qui se réalise. Enfin un autre rêve, le premier était de devenir pompier. C'était pas super compatible avec celui de devenir indien. Ou Cow-Boy. » J'ai un sourire, mais je n'arrive pourtant pas à être aussi détendu qu'eux. Aussi serein. Font-ils semblant, ou arrivent-ils vraiment à se projeter ici et à ne pas penser à l'avenir ?

Ca fait un bien fou. Ce genre de moments. Ca me rappelle qu’on a pas fait que survivre ces dernières années, que malgré les difficultés, on arrive à se trouver des vrais bons moments et que tout ça, toutes ces galères, ça en vaut carrément la peine. Même si ma chère et tendre et mon fils semblent donc se liguer contre moi. En vrai, ça me fait surtout plaisir de la voir commencer à tisser des liens avec Andrew, ça me rassure. Et ça me fait du bien.

Tout comme la présence de Tom qui vient de débarquer. Ca a quelque chose de terriblement normal et on a tous terriblement besoin. Surtout après le trajet depuis Nisqually qui s’est pas aussi bien passé qu’il aurait pu. Tellement de morts et de blessures qui seront plus que difficiles à panser. Et s’il se joint au duo, je peux pas m’empêcher de tousser un rire aux échanges avant de suivre Andrew des yeux quand il essaie tant bien que mal de tenir sur ses jambes. Un sourire attendri avant d’arquer un sourcil à la remarque de Tom. « Tu parles du chien ou du gamin ? Remarque, ça marcherait pour les deux. »  Dawn s’allonge de tout son long alors que Cassidy finit par raconter ce qui s’est passé au moment de leur arrivée ici.

J’ai une grimace, laissant filer un silence, mon regard se perdant un instant dans le vide alors qu’Andrew finit par abandonner et par se laisser tomber sur les fesses, délaissant Tom pour attraper un cube. « Y a pas grand-monde au courant de cette histoire je crois. Et puis, ça vaut mieux. Je suis pas sûr que les natifs aimeraient qu’on les prenne en pitié. » Ce qui pourrait arriver avec ce genre de trucs. On sait déjà qu’ils ont vécu des années très difficiles, pas la peine d’en rajouter une couche. Mais, à leur remarque à tous les deux, je secoue la tête, non sans un nouveau rire. « J’aurais bien aimé protester, mais ouais, je me dis qu’un combo de nos deux caractères, ça doit être quelque chose. T’en dis quoi bonhomme ? » Andrew relève la tête, se contente de glousser et retourne tenter d’empiler les cubes avec une concentration toute relative.

Et je me fais un brin plus sérieux au reste des échanges. « J’ai envie de croire que maintenant, ils vont plus avoir peur de construire des trucs. Et d’avoir des enfants. Ca finira par redevenir normal… et je compte sur les autres pour qu’Andrew soit pas pourri gâté. » Même si c’est mal barré. Et j’ai un sourire plus songeur avant de reprendre. « J’ai jamais voulu être cowboy ou pompier perso. Et franchement… vous l’auriez cru vous ? Si on vous avait dit que je passerais des heures à cheval ou même à m’entrainer ? » Je secoue la tête, les yeux ronds, avant de tendre les bras pour attraper Andrew qui se laisse tomber sur moi avec un rire. « J’espère juste qu’on aura pas encore un truc plus gros qui va nous tomber dessus. » Soufflé, sourcils froncés. Forcément, je m’inquiète. Tout le temps. Je vois les stocks à l’infirmerie, je vois l’état de fatigue de tout le monde. Si quelque chose devait nous tomber sur le coin de la gueule demain, on serait pas capables d’y survivre. Ou alors, pas sans énormes pertes.

J’ai un temps, non sans chatouiller mon fils, avant de fixer Tom, le regard plus sérieux. « Et ton rêve maintenant, c’est quoi ? » Hé, la question a le mérite d’être importante. « Je sais aussi que, même si l’endroit et magnifique et qu’on pourra y être vraiment bien… faudra qu’on réfléchisse. Au cas où ça se passe pas comme prévu. » J’ai pas envie de le faire, surtout qu’on va passer du temps et de l’énergie à nous reconstruire une vie. Mais faut qu’on soit pragmatiques. Ce qui me ressemble pas vraiment, je sais bien.