The Walking Dead RPG

J’ai un froncement de sourcils alors qu’elle commence à s’emballer. Et elle me rappelle beaucoup Tasya, alors que je me demande vaguement à quel point elle n’est pas juste elle aussi une pomme pourrie. Mais, contrairement à elle, je garde mon calme. Je me contente d’une profonde inspiration. « Des adolescentes ? Dans quel monde tu vis Neela ? Ca fait 7 ans que la notion même d’adolescence n’a plus de sens. Tous ceux qui, comme moi, étaient enfants quand tout a commencé n’ont pas eu la même chance que vous. J’ai dû devenir adulte quand j’ai vu des morts dévorer les membres de ma famille. Quand mon père a dû m’apprendre à tirer pour éviter que je me fasse agresser alors que je n’avais même pas 14 ans. Quand j’ai dû aider ma mère pour qu’elle élève seule une fillette alors qu’elle avait du mal à se remettre de son propre deuil et que mon père était dehors, à manquer de mourir tous les jours que pour vous, vous soyez en sécurité. »

Si son ton s’est fait plus froid, je ne suis pas en reste de mon côté. Je pose une main sur mon ventre, alors que le bébé s’agite un peu et je continue, le menton relevé. « Tu ne me crois clairement pas assez intelligente pour prendre mes propres décisions visiblement. J’ai fait mon choix en épousant Ray et personne ne m’a obligée à quoi que ce soit ou n’a essayé de m’en empêcher. J’ai commis une erreur. Alors tu attends quoi de plus de moi ? Explique-moi, je suis toute ouïe. »

Je finis par la pointer du doigt, non sans un claquement de langues agacé. « C’est sur vous qu’ils ont tiré. J’étais sur le chemin. Rien de plus. » Et, à sa dernière question, je sens mes joues s’empourprer de colère. « Je ne t’ai jamais insultée. J’apprécierais que tu en fasses de même. » J’ai un reniflement dédaigneux. « Surtout que tu parles de traiter les gens avec respect, mais tu n’en as absolument pas pour moi. Alors tu devrais penser à balayer devant ta porte avant de me faire des leçons de morale. Ou alors, peut-être que c'est absurde d'attendre de toi que tu aies un peu de respect pour moi ?»

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Ce n'est pas parce que tu n'as pas eu le choix que tu es forcément mature pour les questions de la sexualité, Lynn, rappelle-t-elle en fronçant les sourcils, loin d'être étonnée par la levée de bouclier, Neela l'est d'autant plus par la bêtise de ses arguments : Tu sais tenir une arme ? Tu sais te battre ? Très bien, félicitations, fait-elle en applaudissant sèchement : Mais tu vas devoir t'occuper d'un être humain que tu as fait avec un homosexuel torturé par les bons soins d'une société qui le renie pour ce qu'il est, souffle-t-elle.

Son regard se fait incisif : Tu ne me feras pas dire que te faire passer dessus par un quadragénaire excité par des filles qui n'ont aucune notion de consentement, c'est normal ou admissible. Fais-moi passer pour folle mais c'est ce camp qui est complètement timbré, et il n'y a pas un monde où je laisserais un vieux dégoûtant poser la main sur ma gamine. Ce que tu vis, tu accepterais que ton enfant le vive aussi ? Si c'était une fille, comme elle. Je te crois naïve, Lynn, tranche-t-elle néanmoins. Il en faut, des gens comme elle.

Naïve d'avoir cru que tu pourrais guérir Ray de qui il est, alors qu'il ne pourra jamais changer, et qu'il n'est pas malade, fait-elle. Ce que j'attends de toi ? Un rire sans joie lui échappe : Que tu te sortes la tête du fondement pour commencer : tu étais sur la route et ils n'ont eu aucune hésitation, même pas l'intention de t'épargner, rappelle-t-elle. Ce n'est pas eux qui ont couru à ton secours après t'avoir abattu alors que tu es enceinte jusqu'aux yeux : c'est moi, enchaine-t-elle encore.

Elle n'éprouve aucune pitié. Mais parfois pour réveiller certaines personnes, il vaut mieux y aller avec des claques : Qu'est-ce qui te gêne, Lynn ? Demande-t-elle alors : Que je ne prenne pas de détour pour te parler ? Tu veux de l'enrobant ? De l'hypocrisie ? Parce que c'est plus facile de vivre dans ton crâne, comme les enfants ? Et donc, elle est adulte, c'est bien ça ? Le monde est dur, la vie est dure, se faire violer par son mari, c'est dur, devoir faire des enfants et les élever, c'est dur, énumère-t-elle : Si c'est mon ton que tu trouves difficile à encaisser, crois-moi ma grande, tu n'es pas prête pour la suite du voyage, ajoute-t-elle froidement.

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ANAPHORE

Je me pince l’arête du nez, non sans un soupir. « Et tu crois qu’en me parlant de la sorte, qu’en m’insultant, qu’en insultant ce que je suis et ce en quoi je crois j’aurais envie de t’écouter ? » Je ne me démonte pas et je continue de la fixer, mâchoires serrées. « Et tu attends quoi là exactement ? Que je me mette à pleurer en disant que tu as raison ? Je me fiche de ta façon de me parler, je te soulignais juste que toi non plus, tu n’as pas le moindre respect pour moi. Alors que c’est exactement ce que tu reproches à l’ensemble de cette communauté. Pourquoi je t’écouterais toi plus que les autres ? » Elle croit pouvoir me choquer ou je ne sais quoi ? A dire vrai, ses propos, sa façon de me parler me choquent, bien évidemment.

Mais ce qu’elle me dit a plus tendance à me donner envie de me fermer comme une huitre qu’à l’écouter. Elle assène des paroles en croyant avoir la vérité absolue et ça m’agace prodigieusement. « J’ai déjà reconnu que tu m’avais sauvé la vie. Et que c’était bien pour ça qu’il ne me viendrait pas à l’idée d’aller te dénoncer pour ta présence lors de cette manifestation. » Je ferme les yeux quelques instants, posant mes deux mains sur mon ventre pour calmer le bébé qui s’agite. « Tu crois que je ne sais pas qu’élever un enfant c’est difficile ? Que je n’ai pas conscience que ça le sera encore plus avec l’étiquette qu’il aura sur le dos ? » Ma voix tremble – un peu – sous l’effet de la colère, mais je continue, la tête droite. « Ce qui me rend dingue, c’est que tu me traites comme si j’étais la dernière des sottes. Alors que tu ne sais rien de ce que je peux réellement penser. Tu as décidé que j’étais naïve, que j’étais une idiote qui ne voyait rien de ce qui se passait autour d’elle, parce que cette situation me convient. Et tu sais quoi Neela ? Nous sommes des centaines comme ça. Peut-être même des milliers. Et ce n’est pas parce que ça ne te plait pas que je vais courber l’échine et changer d’attitude. Je sais où est ma place, où est mon devoir. Mais ce n’est clairement pas ton cas. »

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Un rire soufflé lui échappe : Donc, comment tu penses, Lynn ? Demande-t-elle en fronçant les sourcils, sans cacher l'amusement que ça lui confère : Je peux essayer de deviner ? Propose-t-elle sans vraiment attendre sa réponse : Tu penses que ta place est sous la coupe d'un homme, tu penses que tu es restreinte à un rôle, auprès d'eux, que tu es là pour eux. Tu penses que tu dois te complaire dans l'idée qu'ils se font d'un idéal pour être considéré comme une bonne femme, la sainte, pas la pute qu'on ne peut pas épouser, ajoute-t-elle. Tu penses qu'Adonaï est un sauveur, qu'il est grand, beau et digne de ta loyauté, tu te sens redevable envers lui pour tout ce qu'il a construit, et tu n'aurais pas tort : avant qu'il se prenne pour Dieu, on lui était tous redevables de ne pas nous abandonner, souffle-t-elle.

Mais n'est-ce pas justement un problème, dans la Bible ? Les hommes qui se prennent pour des Dieux ? Tu penses qu'il y a une hiérarchie entre les hommes et les femmes. Et sans doute une entre les femmes également. Il y a celles qui méritent du respect et... Les autres, qui sont si différentes de toi, et qui ont probablement cherché ce qui leur arrive de mal, après tout ! Relève-t-elle. Tu penses que respecter des injonctions inatteignables, ça t'épargnera bien des ennuis. Qu'au final, sacrifier un petit peu de toi pour une plus grosse part des miettes qu'on nous laisse, c'est un calcul gagnant, elle pouffe à nouveau. Non, c'est ridicule. Tu penses que tu peux te complaire là-dedans et qu'avec le temps, si tu te forces assez, tu seras peut-être "heureuse", souffle-t-elle.

Autant dire que la grimace dubitative qu'elle affiche en dit long sur la réalité des faits : Tu penses que tu réfléchis par toi-même, mais tu te voiles la face dans une hypocrisie crasse, et tu oublies que l'orgueil est un péché, et pas le plus beau du lot, ajoute-t-elle. Tu penses que tu ne te mens qu'à toi-même aussi, mais c'est bien la moindre de tes erreurs. Tu t'ériges en exemple pour des gamines qui vont croire que ne pas avoir accès à l'éducation alors qu'elles sont plus qu'un utérus fait pour porter des enfants, et tu crois que malgré ça, tu l'emporteras au paradis, elle esquisse une moue : N'y compte pas trop, tu n'en verras pas la porte. Aucun d'entre nous, d'ailleurs, autant être réalité. Et moi, je pense... Que tu es trop intelligente pour te restreindre à des envies qui ne déploieraient pas un dixième de ton potentiel, elle hausse les épaules, a un soupir : Mais les ambitions, c'est un truc d'hommes, non ? Comment pourrais-je en avoir à l'égard d'une jeune femme qui sait déjà tellement et qui n'a pas besoin de ça pour être "heureuse" ?

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ANAPHORE

Et voilà que Neela reprend la parole, sans vraiment me laisser le temps d’en placer une. Oh, ce qu’elle dit est juste et, en effet, c’est comme ça que je me vois. Parce que c’est la réalité. Sans cet homme, sans les hommes qui m’entourent, je serais morte depuis longtemps. Alors faire mon devoir me parait être la moindre des choses pour les remercier et pour tenir mon rôle dans cette société.

Mais je n’aime pas le ton qu’elle prend. Ce mépris qui se dégage de chacune de ses paroles. Parce que ça me conforte dans l’idée que, pour quelqu’un qui parlait de me respecter moi-même, elle ne fait que m’enfoncer la tête dans le sable. Je finis par laisser filer un soupir et par lâcher, non sans claquer ma langue sur mon palais. « C’est bon ? Tu as terminé ta pseudo leçon de morale ? » Décidément, entre elle et Tasya, elles m’auront tout fait. « Et tu t’attends à quoi maintenant ? A ce que je piétine toutes mes croyances, tout ce qui fait ma vie juste parce que tu viens de m’insulter et de tenter de briser tout ce que je suis ? Je ne comprends même pas pourquoi tu es venue en fait. » Un nouveau soupir, avant que je ne reprenne, d’une voix que je m’efforce de garder calme et maitrisée. « Je ne m’érige pas en exemple et je sais que je suis loin d’être parfaite. Je fais juste de mon mieux. Pour ma famille, pour mes proches. Et je sais très bien. Que je n’irais jamais au Paradis. Ce n’est pas mon but de toute façon. » C’est probablement ça qu’elle ne comprend pas.

Cette fois, je me pince l’arête du nez et je finis par souffler, d’un ton presque las. « Je ne suis pas trop intelligente pour quoi que ce soit. » Est-ce que je regrette de ne pas avoir eu l’occasion d’étudier plus longuement ? De ne pas pouvoir lire tous les livres que je voudrais ? Evidemment que oui. Mais ce n’est pas mon rôle de critiquer ou de tenter de changer quoi que ce soit. Les hommes savent ce qu’ils font et c’est pour notre bien. Mais au final, je ne comprends toujours pas le but de sa visite. A part le plaisir de détruire tout ce qui fait ma vie.

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Tu n'as pas compris, fait-elle dans un soupir avant de rouler des yeux : Je veux que tu ouvres les yeux, bon sang ! Grogne-t-elle sans prendre de détour : Tu n'es pas qu'un vagin, qu'un utérus ! Avoir des enfants, ça peut être une merveilleuse chose, mais MERDE ! Un peu d'ambition pour eux ! Tu ne peux pas souhaiter à MA FILLE ou a TA SOEUR, le même avenir qu'on a ici ! Est-elle à ce point démunie d'empathie qu'elle accepte que d'autres subissent comme elle ? Qu'est-ce que tu as ressenti la première fois que Ray t'a prise ? Hm ? Est-ce que c'était vraiment bien ? Est-ce que c'était vraiment ce que tu voulais ?!

Bien sûr que non, parce que ça n'a rien de doux, rien de bien, rien de consenti. Tu ne peux pas croire que toutes les femmes ne sont bonnes qu'à obéir en baissant la tête, pour ne jamais contrarier un homme ! Tu ne peux pas croire que tu n'es pas assez intelligente pour pouvoir faire aussi bien qu'eux ! Sinon MIEUX ! Rien de compliqué là-dedans, il suffit de le voir : Tu serais à la place d'un de ces types, d'un McCoy par exemple, avec les bonnes études et des informations parfaites, aucun enfant n'aurait à être envoyé pour servir d'amuse-gueule à des pédophiles ! Grogne-t-elle de rage.

Et toi, tu me regardes, avec tes grands yeux, en me demandant ce que j'attends de toi ?! MAIS REVEILLE-TOI BON DIEU ! Ce n'est quand même compliqué de ne plus se servir de son fondement comme un chapeau ! C'est ça ta vie, et tu t'en contentes ! Tu pourrais avoir le monde, et tu pourrais en faire quelque chose de merveilleux, où il y aurait l'espérance et la PAIX ! Ajoute-t-elle : Alors pourquoi tu restes là à accepter qu'un homme que tu n'aimes même pas te toucher ? Pourquoi tu acceptes d'être traité comme une gamine idiote ? Oh bon sang, Ray est bien gentil mais il t'a pris pour une dinde alors que tu es cent fois plus maline que lui ! N'es-tu pas en colère qu'on vous ait amené tous les deux dans cette impasse ?! Vous n'avez rien demandé, vous n'avez pas eu le choix malgré ce que tu racontes, et tu es là à faire croire à tout le monde que tu gères, que ça te convient, que c'est normal ?!

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Je ne peux pas m’empêcher de sursauter quand elle hausse brusquement le ton. Et j’ai même un mouvement de recul sans même m’en rendre compte. Ray m’a déjà fait assez peur avant qu’il ne soit disgracié pour que j’ai envie que les choses recommencent.  Et la voilà qui s’emporte de plus en plus. J’essaie de ne pas me laisser gagner par la peur et j’ai une grande inspiration, la laissant déverser tout son fiel.

Et je ferme les yeux quelques instants, m’efforçant de garder mon calme alors que je sens mes mains trembler. « Arrête Neela. » Avant de reprendre, un ton plus haut. « ARRÊTE ! » Je vois la tête d’Onyx se relever alors qu’il grogne doucement et je tends une main dans sa direction. « Ca va. Couché. » Il repose son museau sur ses pattes, le regard toujours rivé en direction de Neela. Je finis par prendre une grande inspiration, alors que mes yeux brillent, relevant la tête, sans réaliser le moins du monde à quel point j’ai fini par ressembler à ma mère. « Au moins ici ils ont un avenir, qu’il te plaise ou non. Tu crois qu’il se passerait quoi dehors pour ma sœur sourde ? Ou pour mon petit frère cardiaque ? » Sans la protection de New Eden, ils seraient morts.

« Evidemment que je suis en colère contre Ray. J’ai cru en lui, j’ai cru qu’avec lui, je pourrais avoir le foyer qui pourrait accueillir mon frère et ma sœur en cas de problème. Parce qu’il n’y a que ça qui compte Neela. Ma. Famille. Et non seulement il a tout fichu en l’air, mais en plus, il ne se soucie pas le moins du monde de son fils. Alors ce bébé, il n’a que moi. Personne d’autre. » Je claque ma langue contre mon palais dans un signe d’agacement mais je reprends, mettant toute mon énergie à garder une voix égale, sans me laisser envahir par l’émotion. « Je me fiche de ta fichue révolte, de baisser la tête ou je ne sais quels délires tu peux avoir à l’esprit. Tout ce que vous faites, c’est attiser un brasier qui va tout brûler sur son passage. Et faire du mal aux miens. Vous croyez que ça va finir comment tout ça ? Il y aura des morts, toujours plus. C’est à cause de votre manifestation que j’ai failli perdre votre bébé. » Et je lève une main vers elle avant qu’elle ne me réponde. « Oh oui, je sais, vous n'avez pas tiré. Mais uniquement parce que vous n’aviez pas d’armes. Je suis certaine que tes amis n’auraient eu aucun scrupule à me tuer. Et n’essaie même pas de me faire croire le contraire. » Ma voix a fini par se mettre à trembler, mais qu’importe. « Il n’y a plus rien de normal. Mais je sais une chose. Un jour, mon père ne sera plus là. Et April et Wilan n’auront plus que moi pour les protéger. Parce qu’ils ne laisseront pas Jena s’en occuper, elle n’est pas leur mère. Alors je dois faire ce qu’il faut pour ça. Si ça doit passer par un mariage avec un homme qui me touchera même si je n’en ai pas envie, je m’en moque. Il y a plus important que ma petite personne. » C’est comme ça et pas autrement. Quoi qu’elle en dise, je n’ai aucune autre option.

Et je finis par rouler des yeux. « Et arrête de dire que je suis plus intelligente que Ray ou que… je ne sais même plus. C’est ridicule. » En plus d’être faux. Si j’étais plus intelligente qu’un homme, ça se saurait.

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