The Walking Dead RPG

28 novembre 2022 ••

Isalín s’en souvient encore.

Quand on lui a annoncé qu’elle était en état de voyager, qu’elle partirait avec Kaya pour rejoindre leur « ferme » ; que là-bas, les attendaient des proches. L’appréhension du voyage lui a bouffé les entrailles. Joachim, elle était persuadé que c’était lui. Il n’a pas fait chaud le jour du trajet : il pleuvait même beaucoup, la voiture a pris deux énormes nids-de-poule cachés sous les flaques qui inondaient les routes.

Elle s’en souvient encore.

De cette impatience mêlé à un puissant sentiment de peur. Allait-il la reconnaître ? Ses cheveux étaient plus courts et elle portait des vêtements qu’on lui avait donné. Un jean, un pull, un anorak, simple. L’aimera-t-il toujours ? Ça ne faisait que quelques semaines, mais pour elle, ça avait duré trois ans. Alors ils étaient enfin arrivés, ils s’étaient garés… et tous les doutes s’étaient envolés.  

Isalín s’était jetée dans les bras de son petit ami et l’avait embrassé avec passion. Lui ou rien. Elle se l’était promis, et pourtant, elle avait cru le perdre. Ils avaient failli se perdre. Alors à ce moment, ce fragile moment en équilibre sur le fil du temps, elle était plus heureuse qu’elle ne l’avait jamais été. Elle en avait le tournis. Et ensuite, ils durent se séparer, car ils n’étaient pas que tous les deux…

***

La nuit suivante, ils sont tous les deux dans l’une des chambres qu’on leur a attribué. Il y a peu de monde sur l’avant-poste en ce moment d’après ce qu’elle a compris, alors ils ont pu avoir leur cocon pour se retrouver dans intimité. Une bougie achève de se consumer sur leur table de cheveux alors qu’ils sont allongés côte-à-côte, se regardant, enchevêtrés nus dans les draps. Ils viennent de se retrouver, avec cette fougue impatiente propre à leur âge mutin, et l’islandaise tente reprend doucement son souffle. Elle n’a plus vraiment mal, seulement une sensation sourdre et diffuse, qui lui rappelle qu’elle a failli y passer…

- T’as d’jà pensé à… après ? Demande-t-elle doucement, tirant les couvertures pour se couvrir mieux – elle a froid, j’veux dire… l’groupe, c’est fini pour nous, hein ?  

Au final, ils n’ont pas eu le temps de vrai causer dans la soirée. Le temps de décharger les véhicules, de s’installer, de se faire un bilan dans les grandes lignes, de parler avec tous les présents… ce n’est que maintenant, qu’ils peuvent prendre le temps. Leur temps, dans cette bulle impénétrable.

« We are the wild youth »

So leave me in the cold ♪ wait until the snow covers me up so I cannot move... so I'm just embedded in the frost ♫ Then leave me in the rain. Wait until my clothes cling to my frame ♪ Wipe away your tear stains...

Titres:

L’attente était bien le pire.

Une part de moi s’était vaguement imaginé que ce serait aussi simple que de toquer à leur porte pour pouvoir de nouveau serrer Isa’ dans mes bras, mais il n’en était rien. Après un périple intense et difficile avec le traumatisme crânien que je me coltinais, il fallait encore attendre. Ceux présents sur place avaient dû partir se renseigner. Il avait fallu attendre qu’un roulement s’opère pour ça, et encore un autre pour avoir enfin un semblant de réponse. Nous n’étions clairement pas leur priorité du moment, même si nous faisions notre part ici pour pouvoir payer notre pitance.

Mes nerfs étaient à bout après plusieurs semaines d’une attente interminable. J’avais au moins eu le temps de me remettre tant bien que mal de mes blessures. Je ne tenais clairement pas le rythme des autres, mais je compensais grâce à la présence d’Anoki qui me permettait de me rendre utile autrement. J’avais également appris assez de choses sur les variétés de plantes auprès de Cassidy pour que mes connaissances se révèlent un peu utiles. N’empêche que le temps me paraissait affreusement long.

Jusqu’à ce qu’enfin, les deux filles se présentent avec la nouvelle équipe. Jusqu’à ce qu’enfin, je puisse à nouveau serrer Isalín dans mes bras de toutes mes forces. J’eus ce rire heureux et soulagé de la retrouver, de pouvoir de nouveau la sentir contre moi, mais il fallut retarder un peu de nos réelles retrouvailles car nous n’étions pas seuls.

~~~

A la lueur d’une bougie, nous avions pu enfin nous retrouver dans une étreinte plus charnelle. « Je ne t’ai pas fait mal ? » Ca faisait longtemps que je ne me posais plus cette question, mais je ne pouvais pas empêcher mes doigts de retracer les cicatrices au niveau de ses côtes, témoignage des dommages internes qu’elle avait subi dans cette confrontation. Je m’en voulais encore de l’avoir entraîné là-dedans. Il s’en était fallu de peu.

Je lovai ma tête dans son cou, dans un soupir retentissant. « Je me suis simplement dit que… après cette bataille-là… j’arrêterais tout. » Je me reculai un peu pour croiser à nouveau son regard. « En voulant arranger les choses… j’ai failli vous perdre Kaya et toi et… je suis pas prêt à ça. » Je ne savais pas bien comment l’exprimer, mais ça avait été un déclic pour moi.

C’était bizarre de l’entendre parler du groupe comme s’il s’agissait de parfaits étrangers, mais je croyais comprendre ce qu’elle voulait dire par là. « J’en sais trop rien, Isa’. On a choisi de rester en arrière pour leur faire gagner du temps, pour faire ce en quoi on croyait vraiment. » Et maintenant, c’était terminé. « Je sais que j’ai pas envie de continuer avec les Scarecrows, c’est fini pour moi ça. » Je marquai un silence, un voile sombre passant dans mon regard. « Tu sais que Johanna va bien ? Elle était à la prison… comme si tout était normal. Sauf qu’elle nous a lâchés en fait. Je n'ai pas eu le temps de lui parler, je suis parti directement. En même temps, je ne suis pas sûr que j'aurais eu envie de le faire. » Je n'étais pas du genre violent, mais là, elle aurait bien mérité un poing en pleine figure.

« On peut seulement attendre du cheval le même degré de sensibilité qu'on lui montre, le même degré de concentration qu'on lui offre. Le travail avec le cheval commence par là, par nous-même. »

- Tu peux pas m’faire mal, lui a-t-elle soufflé avec tendresse.

Isalín sent ses doigts qui effleurent ses nouvelles cicatrices. Peut-être que ça a tiraillé un peu, mais les shots de plaisir lui ont vite fait oublier ses douleurs fantômes. C’est maintenant qu’elle peine un peu, ses poumons encore fragiles souffrent de la cavale qu’elle leur a imposé, mais c’est supportable. Pour le retrouver, pour sentir jusque dans sa chair qu’il l’aime encore, ça valait le coup.

- Tu sais que c’est pas ta faute ?! murmure l’Islandaise.

Dans le timbre de sa voix, et à sa manière de se réfugier dans son cou, elle capte le sentiment de culpabilité de Joachim. Elle dépose un baiser sur le haut de son crâne et respire l’odeur de ses cheveux en fermant les yeux. Plus que jamais, elle se sent à sa place ; et les doutes qu’émettent son petit ami ne suffisent pas à l’ébranler. Elle n’a qu’un froncement de sourcil à l’évocation de Johanna.

- Cette fille… nous a causé des problèmes dès le début…, c’est elle qui les a poussés à rejoindre les Scarecrows, c’est elle qui a conduit à tout ce qui a suivi ensuite, mais.. j’vais te dire c’que j’ai dit à Kaya : j’pense qu’on vaut mieux que ça. Cette « guerre », tous ces problèmes… ce sont pas les nôtres. Et où sont ceux qui ont déclenché tout ça d’ailleurs ? Les membres du Conseil sont partis, pas un seul ne s’est battu, ils ont laissé une poignée d’alliés et des adolescents le faire à leur place, et… avec Kaya, on pense qu’ils ont essayé d’nous tuer. Comme on n’a pas voulu suivre, et qu’on a refuser l’entrainement d’Nima… on a été fichés comme maillons faibles, alors ils ont préféré qu’on crève plutôt qu’on soient capturés…, chaque fois qu’elle y repense, ça fait encore plus sens ; c’est une évidence désormais, c’est pour ça qu’les bombes étaient surchargées… et r’garde Harper, hein ?! Ce serait pas la première fois qu’ils laissent tomber quelqu’un…

Un soupire lui échappe. Cette histoire commence à lui donner lui tournis. Isalín voudrait simplement que ce soit terminé, de ne plus avoir besoin d’en entendre parler. Nisqually est un épisode qu’elle veut ranger dans la boîte du passé. Même si Lara lui manque, même si leur bande d’amis et leur mobile home lui manque… ils n’ont pas le choix que d’aller de l’avant désormais.

« We are the wild youth »

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Je caressai doucement sa joue avant de la ramener contre moi. Isalín avait à cœur de me rassurer, alors même qu’elle peinait à reprendre son souffle. Je savais bien que ce n’était pas aussi évident qu’elle le prétendait. J’avais bien failli la perdre pour de bon, et Kaya avec.

Elle se sentit obligée de me souligner que tout ce qui s’était passé n’était pas de ma faute. Lovée dans mon cou avec tendresse, elle ne surprit pas ce regard chargé d’incertitude en retour. « Je sais bien que Kaya a choisi de se battre mais toi… tu as surtout voulu nous suivre. » J’aurais fait le choix de ne pas tenter le coup, Isalín n’en serait pas là. Mais pour autant… « Je suis content qu’on l’ait fait, d’être allé jusqu’au bout de mes convictions. On a réussi à chasser New Eden de Seattle, c’est pas rien ! Je crois que… c’était important pour moi. » Je glissai une de ses mèches d’ébène derrière son oreille, dans un geste plein de tendresse. « Mais juste… pas autant que toi. » Si elle était morte là-bas, dans cette explosion… plus rien n’aurait eu de sens à mes yeux. Elle était ma raison de vivre.

« T’as raison… » Ce n’était pas évident de le reconnaître, mais ceux qui avaient décidé initialement de déclencher cette guerre avait décidé de rompre avec. Nous n’avions eu qu’à ramasser les pots cassés derrière eux, alors ils n’auraient jamais dû nous reprocher notre acharnement. « Quoi ? » Lâchai-je d’une voix blanche à son aveu. Je me reculai un peu pour mieux la détailler, surpris. Kaya et elle pensaient vraiment que le Conseil avait cherché à nous tuer ? « Mais je comprends pas, pourquoi… » Parce qu’on aurait refusé de les suivre ? D’écouter leurs enseignements ? A leurs yeux, on en avait peut-être fait qu’à leur tête mais… « Mais je peux pas croire ça ! Andrea me ferait jamais ça… » Elle avait pris ma défense, même quand la situation lui paraissait inextricable. Elle n’avait eu de cesse de me rappeler qu’elle avait peur pour moi, qu’elle n’était pas prête à perdre un autre membre de sa famille.

Mais pour autant… je ne pouvais pas nier que cette explosion n’avait rien eu de normal. « C’est Violet qui a chargé les bombes… » Ce n’était pas la disciple de Nihima ? Elle serait vraiment prête à aller aussi loin simplement parce qu’on avait refusé de suivre ses ordres ? « Il y a une différence entre laisser tomber quelqu’un et signer son arrêt de mort, Isa’ ! Tu les crois capable de faire une chose pareille ? Ils ont passé leur temps à être passif, ça ne leur ressemble pas. Je pense plutôt qu’ils ont été négligents, parce que ce combat n’était déjà plus le leur. » Alors ils s’en moquaient pas mal. « En plus, ils n’ont jamais cru à notre réussite… »

« On peut seulement attendre du cheval le même degré de sensibilité qu'on lui montre, le même degré de concentration qu'on lui offre. Le travail avec le cheval commence par là, par nous-même. »

- J’sais plus ce que j’dois croire sur eux… j’ai été trop déçue, souffle-t-elle.

S’en suit un profond soupir. Avec Kaya, isolées qu’elles étaient sur l’île de leurs alliés, cette théorie du complot paraissait réellement séduisante. Mais maintenant que son petit ami expose sa divergence d’opinion, Isalín doute. Elle ouvre la bouche, prête à rétorquer que de la passivité au passage à l’acte, il n’y a parfois qu’un pas, mais elle se ravise. Elle vient de retrouver Joachim, ils viennent de faire l’amour, elle n’a pas envie de gâcher ça en ressassant l’incident. C’est passé, ils sont vivants, c’est tout ce qu’il faut retenir.

- Bref, on s’en fiche. C’est… c’était avant. … je t’aime, lui dit-elle, avalant la distance qui les sépare désormais pour déposer un baiser sur les lèvres du jeune homme, puis sur son menton, puis dans son cou, puis…, j’ai pensé à « après », moi, reprend-elle à propos du sujet initial, j’voudrais… j’voudrais qu’on ait notre vie, t’vois ? On laisse tomber les alliances, les guerres, tout ça… on part sur les routes, et on fait c’qu’on a envie.

L’Islandaise se blottit plus encore contre son copain et mêle une jambe aux siennes. Sa peau lui semble brûlante et ravive une envie à peine endormie. La convalescence loin de lui a été trop longue, son corps est en manque. Son âme est en manque. Isalín a justement besoin de ça : de vivre de toutes ces émotions purement humaines, épidermiques, avec une gourmandise maligne.

- On aura sans doute pas mieux ailleurs, mais j’crois pas qu’on ait pire, parce que New Eden, les Oblivions, et toutes les autres emmerdes qu’ils ont connu à Nisqually, c’est quand même déjà le gratin, j’préfère mourir en ayant profité à fond… faire une bucketlist de conneries, voyager, respirer ! Le ballet de ses lèvres reprit, dégringolant de la gorge qu’elle mordit tendrement à son nombril, j’veux pas qu’on finisse comme les vieux…

Non, Isalín veut monter au sommet d’un immeuble et hurler au monde entier, rien que pour entendre sa voix se perdre dans l’immensité. Elle veut explorer des lieux interdits et écouter les échos se répercuter à l’infini.

- T’en dis quoi ?

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Je baissai le regard, sans mot dire. Je pouvais comprendre la déception qu’Isalín et Kaya ressentaient vis-à-vis du conseil et des gens qui la composaient, mais tout n’était pas bon à jeter non ? Lara l’aurait soutenue envers et contre tous. Andrea m’avait couvert et laissé choisir ma propre voie. Nihima n’aurait jamais fait de mal à sa propre fille. « Ils nous ont sans doute pris pour des fous de vouloir rester en arrière pour combattre New Eden, mais c’est tout. Et puis nous on pourrait dire pareil d’eux. Ils ont quand même décidé de partir affronter une horde à l’autre bout de l’état en déménageant tout le camp aux portes de l’hiver… » Etait-ce vraiment moins inconscient que de faire barrage à l’avancée de New Eden avec toutes les factions alliées ? « Je comprends toujours pas leur choix. On a réussi à déloger New Eden de Seattle en étant juste une poignée, alors s’ils étaient restés pour se battre, tu imagines ? » J’étais moi-même assez déçu, mais pas pour les mêmes raisons qu’Isalín. « Ils auraient dû croire en nous, en notre plan. » Que nos propres amis refusent de répondre à l’appel quand des gens qu’on connaissait à peine l’avait fait à leur place… ça avait été dur à encaisser.

Mais Isalín avait raison. C’était du passé. Elle me détourna bien vite de ces pensées sombres en m’embrassant un peu partout. Un bref rire filtra entre mes lèvres avant que je ne la serre un peu plus contre moi sous la couverture de fourrure qui nous protégeait des températures basses du camp. Elle me confia vouloir se concentrer plutôt sur l’avenir. « Ah oui ? » J’appuyai ma tête contre mon coude replié, sans la quitter du regard. Ma main frôla doucement sa joue dans un sourire doux. « La guerre est finie, Isa’. On a réussi à chasser New Eden de Seattle, on n’a plus rien à craindre… » Tout ira mieux maintenant pour nous, mais aussi pour Selene et Juliet. « Et on ne reverra pas nos amis avant le printemps, alors on est libre comme l’air d’ici là. »

Elle se serra de nouveau contre moi, avant de reprendre ses baisers brûlants sur ma peau. J’avais un peu de mal à rester concentré sur ce qu’elle disait alors qu’elle réveillait à nouveau un désir certain en moi. Je l’arrêtai pour l’embrasser longuement et avec une passion non contenue, deux mains de chaque côté de son visage. Le sourire que je lui adressai ensuite était resplendissant. « Je te l’ai dit, Isa. J’ai compris ce qui était vraiment important à mes yeux, et c’est toi. Alors on fera tout ce que tu voudras. Anoki peut nous emporter jusqu’au bout du monde… on est capable de survivre pendant des mois dehors, en partant sans rien, on l’a déjà prouvé. Alors ce sera juste nous, maintenant. » Elle et moi. Aussi ceux qui voudraient nous suivre dans nos folles aventures. Je m’en fichais. Je ne m’étais jamais senti aussi vivant que lors de nos escapades, avec Ruben, Kaya et elle… « On va vivre notre vie comme on l’entend maintenant. » C’était libérateur de le dire, au point où je finis par simplement rire, d’un air joyeux, avant de la serrer à nouveau dans mes bras. « Tu veux commencer par quoi ? »

« On peut seulement attendre du cheval le même degré de sensibilité qu'on lui montre, le même degré de concentration qu'on lui offre. Le travail avec le cheval commence par là, par nous-même. »

La guerre est finie ? Elle n’en est pas sûre. Ce n’est pas ce qu’ils avaient l’air de dire à Fort Ward en tout cas. Là-bas, ils ne vivent encore que pour ce conflit. Il y a même des graffitis sur les murs, des sessions de formation, de la sensibilisation à « l’école »… bref, c’est un autre monde. Un monde dont elle est bien contente de s’être extraite. Quant à leurs amis qu’ils ne reverraient pas « avant le printemps », elle ne dit rien. Où seraient-ils, eux aussi, au printemps ? L’Islandaise a des envies de liberté qu’aucun ne semble capable de mesurer. Aux beaux jours, elle espère bien être loin d’ici. Très loin.

Un sourire fend son visage moucheté de son et un rire mutin remonte de ses entrailles. Son copain coupe le cycle de ses baisers pour l’embrasser avec une passion langoureuse, ses mains autour de son visage. C’est fou ce qu’elle aime ça. Est-ce que c’est mal ? Parfois, elle se pose la question ; mais très vite, elle oublie.

- Hum…

Son expression espiègle s’élargit, faisant mine de réfléchir. Sous l’épaisse couverture chaotiquement jetée sur leurs corps nus, elle fait glisser sa cuisse contre les jambes de Joachim, puis prend position à califourchon sur lui. Déjà, rien ce contact intime déculpe le désir dont le brasier est férocement ravivé ; et non sans ravissement, elle sent que c’est la même chose pour lui.

- Je veux commencer par remettre ça !

*

Cette fois, elle est blottie dans ses bras. La respiration calme, les cheveux en pagaille, elle fixe distraitement le néant. Isalín se sent plus vivante que jamais ; vivante et invincible. Lui ou rien. Cette promesse, elle la tiendra, sans hésiter une seule seconde. Après la fougue des ébats enflammés vient les brumes de la somnolence, mais elle ne veut pas s’endormir. Elle aurait l’impression de perdre sa nuit, de voir le temps lui échapper, alors qu’elle voudrait que ça dure pour toujours.

- D’abord… j’crois que j’voudrais aller au nord. Genre vraiment au nord. On trouverait des lacs gelés, et j’pourrais patiner jusqu’à plus tenir debout, pensive, elle marque une pause – ce serait vraiment un beau point de départ, un jour, si j’devais être folle, j’te dirais que je voudrais voir l’Alaska…, une risette fleurit sur son visage, tu m’suis jusque-là ? Elle rit doucement, y’a un endroit en particulier qu’tu voudrais voir toi ? Si on pouvait aller n’importe où !

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