The Walking Dead RPG

Forcément, le dessin, ça n'a pas l'air de l'emballer plus que ça. « Je n'ai que ça à te proposer. » Renchérit-il en haussant les épaules, une once d'agacement dans la voix. Le métis est clairement sur la défensive et il ressent étonnement un sentiment qu'il éprouve rarement pour les autres : de la rancœur. La façon dont elle soupire ne lui plaît pas mais il ne dit rien, conscient qu'il doit éviter de la contrarier. Alors quand elle lui demande finalement de dessiner un hélicoptère avec, à l'intérieur, le portrait d'une autre jeune femme, Otis lui répond. « Bien sûr que je peux te faire ça. » Pour ce qui est du décor apocalyptique, cela ne devrait pas être trop compliqué également, il a suffisamment dessiné de paysages chaotiques ces dernières années.

Il observe la photographie qu'on lui tend, se gardant bien de la toucher. Zelda l'a prévenu, il ne doit pas y poser les doigts. Il soupire avant d'ouvrir son carnet de s'exécuter. « Est-ce que tu peux m'éclairer, que j'y vois plus clair. » Demande-t-il pour que ce soit plus simple pour lui.

- La clarté d'la lune, ça suffit pas ?

Bon, dans le fond, Zelda sait bien que la demande d'Otis n'est pas déraisonnable. Elle suppose que les artistes ont besoin d'une bonne vision pour laisser leur art s'exprimer. Et que même si c'est de l'excentrisme, ça fait partie du processus créatif. T'sais qu'y'a des mecs qui terminaient des jeux vidéos les yeux fermés ? Littéralement, j'veux dire ! se sent-elle malgré tout obligée de préciser. Pour lui faire comprendre qu'il pourrait faire un effort. Ou même qu'il n'est sûrement pas aussi doué qu'il semble le penser.

L'australienne fnit quand même pas hocher la tête de dépit avant d'enclencher sa lampe torche. Elle balaie les environs devant eux pour s'assurer qu'aucune menace ne s'avance dans les bois puis éclaire les yeux du dessinateur. Vérification des pupilles ! C'est bon, elles réagissent. Il n'a pas l'air drogué non plus. Au final, à part son air de merlan frit, il a l'air plutôt alerte. Check ! Et ce n'est qu'alors qu'elle éclaire le papier et la photo pour que le jeune homme puisse se mettre au travail et lui concocter un petit souvenir pour Ka'.

Mais très vite, engoncée dans ce rôle d'inspectrice des travaux - pas vraiment - finis, l'adolescente se sent obligée de jauger chacun des traits de crayon de son voisin. Elle tique, s'agite un peu. Puis lorsque elle n'y tient plus, forcément, elle reprend la parole : C'est sensé représenter quoi, ça ? Zelda pointe de l'index ce qu'elle espère être une simple esquisse inachevée. C'est un rôdeur ? Si oui elles sont où, les tripes ? Elle éclaire à nouveau son visage et fronce les sourcils : T'as compris c'que j't'ai demandé, hein, rassure-moi ? Peut-être qu'elle aurait dû être plus précise dans sa demande ? Ou plus exigeante ? Il lui a répondu avec arrogance qu'il était capable de la satisfaire alors... il a plutôt intérêt ! Hésite pas à poser des questions si t'as un doute, hein ! Ca va l'agacer s'il le fait, oui, c'est sûr. Mais elle préfère encore mettre à mal sa tension que ramener à Ka' un cadeau de Noël qui ressemble à un gribouillis de clochard...

Quand le métis demande à la jeune femme de l'éclairer avec la lumière d'une lampe torche pour y voir plus clair, elle rechigne un peu. Néanmoins, le dessinateur n'a pas besoin d'insister, elle finit par s'exécuter, non sans éblouir l'artiste au passage. Otis ferme brusquement les paupières aveuglés, grimace sur les lèvres. Mais, il ne s'en formalise pas outre mesure ; de toute façon, il n'est pas du genre à s'agacer pour si peu. Et puis, il commence à connaître sa cadette, cela ne l'étonne pas vraiment.

Prenant le temps de s'installer, il sort de son sac ses crayons, qu'il dispose avec soin près de lui. Puis, il récupère ses lunettes, toujours rangées au même endroit. Méticuleusement, il en nettoie les verres, répétant l'opération deux fois. Il commence par le droit, puis le gauche, comme à chaque fois. La présence de Zelda n'arrange pas ses tocs mais heureusement, il ne met pas trop longtemps à se mettre au travail. Il commence son esquisse, ses gestes sont nets et précis. Un silence agréable s'installe durant quelques minutes.

Mais très vite, l'impatience de la blonde se fait sentir. Le dessinateur peut le sentir, elle s'agite près de lui. Il ne se laisse pas déconcentrer jusqu'à ce qu'elle rompe le calme environnant. Elle le questionne sur son dessin, l'aveugle une nouvelle fois avec le faisceau lumineux. Cette fois, Otis grommelle légèrement, manquant de tracer involontairement un trait incontrôlé sur son dessin. « Tu verras bien. Quand j'aurais terminé. J'en ai pour un bon moment. » Se contente-t-il de dire calmement avant d'attraper doucement la main de la blonde pour guider à nouveau la lampe vers la feuille. Une fois que c'est fait, il se remet au travail, sans broncher.

- Un bon moment ?

Elle ne lui demande pas non plus de lui reproduire cette connasse de Joconde... Zelda retire un peu sa main pour qu'il la lâche et lui faire comprendre qu'elle va éclairer sa feuille. Et que ce contact physique n'était pas nécessaire. Ca veut dire quoi, ça, un bon moment ? grogne-t-elle. C'est une unité de mesure qui n'a aucun sens. Autant dire que la réponse du jeune n'a pas de réel autre effet que de décupler l'impatience de l'australienne.

Mais elle s'abstient de l'ouvrir encore pendant quelques instants. Parce qu'elle ne veut pas que l'autre se plante davantage et qu'un taquet derrière la tête ferait sûrement dévier son trait. Alors Zelda se retrouve un peu à observer l'artiste et son oeuvre comme un chat guettant une souris dans sa cage, hors de portée. Tu m'agaces... rumine-t-elle finalement, après un petit soupir, se résignant enfin à le ménager un peu pour qu'il puisse tirer le meilleur de ses doigts. Et elle, de son côté, elle s'installe un peu plus confortablement sur leur rocher. Le temps de frissonner un peu à cause de la fraîcheur de la nuit mais aussi de surveiller un peu les environs. Deux secondes, Picasso ! L'adolescente balaie les environs du faisceau de sa lampe puis éclaire à nouveau le dessin du jeune homme.

Et puis quelques nouveaux instants de silence plus tard, elle n'en peut plus de se la fermer alors que le silence relatif de la forêt ne lui convient plus. Et du coup ? Pourquoi t'as survécu ? Plus elle y pense et plus l'australienne se dit que ce n'est pas logique. Il a l'air un peu trop gentil, ce type. Et les personnes gentilles sont mortes depuis bien longtemps. Sans déc', c'est une vraie question ! Il y a un truc qui lui échappe et forcément elle va bien devoir contenter sa curiosité.

La patience n'a pas l'air d'être son fort. Pourtant, elle finit par laisser le dessinateur faire son travail. Otis se remet à la tâche, ne pouvant s'empêcher d'afficher un petit sourire quand elle lui demande combien de temps cela représente. « Tout vient à point à qui sait attendre... » Se contente-t-il d'ajouter sans en dire plus. Il poursuit le dessin en silence, s'appliquant du mieux qu'il peut, comme toujours.

A côté de lui, il sent Zelda s'agiter à nouveau au bout de quelques minutes. Elle l'interpelle d'ailleurs, pour le prévenir qu'elle va détourner le faisceau lumineux quelques secondes. L'artiste fait une légère pause « Tu sais que si tu bouges toutes les cinq minutes ça va être plus long ? » Remarque-t-il simplement sans chercher à l'énerver, c'est un simple constat.

Quand la lumière l'éclaire à nouveau, il se remet au travail. Mais très vite, sa cadette l'interroge, incapable de fermer sa bouche plus de quelques minutes. Otis relève les yeux vers elle, il soupire doucement avant de lui répondre, simplement... « J'ai eu de la chance, faut croire... » Ce genre de remarque, il l'entend régulièrement. Cela lui fait toujours quelque chose... Il a du mal à ne pas penser aux mots durs de Valérian quelques mois plus tôt, qui lui avait demandé comment il avait fait pour ne pas mourir plus tôt...

- Ouais ! Et Pierre qui mousse n'amasse pas... truc !

Elle aussi elle peut sortir des espèces de dictons à la cons mais il n'empêche qu'Otis n'a toujours pas répondu à sa question : ca va lui prendre combien de temps pour terminer le portrait ? T'en as beaucoup des phrases débiles du genre ? S'il y a bien un truc qu'elle déteste, Zelda, c'est les gens qui s'expriment avec un vocabulaire qui n'a rien de naturel. Un peu pédant, même. Non mais sérieusement. On est au 21ème siècle, en pleine apocalypse. Fuck le passé et ses relents de poésie. Tant va l'eau à la cruche ! Non, franchement, c'est débile. Elle ne sait même pas pourquoi elle a essayé !

En tout cas ce que son camarade au rabais a visiblement oublié de comprendre c'est qu'elle s'assure aussi, pendant qu'il dessine, qu'aucun cadavre ou bigot ne s'aventure dans le périmètre. À la base c'est quand même un peu pour ça qu'on monte la garde. Ouais ben excuse-moi d'vérifier qu'on nous attaque pas, hein, Da Vinci ! grogne-t-elle en braquant à nouveau le faisceau sur son oeuvre. Le faisceau et un regard critique, surtout. Mais pour l'heure ça ne ressemble pas forcément à grand chose, c'est un truc d'artiste. À un moment le dessin révélera toute sa complexité et sa beauté. En théorie. Faut croiser les doigts.

Ca existe pas, la chance ! contre-t-elle lorsqu'il justifie la survie par le fait qu'il ait probablement une bonne étoile. L'australienne marque quelques instants de silence. Enfin si, ça existe... Mais faut s'la s'créer ! Le hasard peut donner un coup de pouce mais sûrement pas vous permettre de survivre aussi longtemps. Ce type, cet Otis... Il doit forcément avoir des compétences cachées. C'est sûr. Azy, raconte ! C'est quoi ton truc ? le presse-t-elle, curieuse. L'Kung Fu ? L'humour ? La lèche ? Pourquoi ne pas lui dire ce qui fait de lui quelqu'un de précieux aux yeux de son groupe ? Ton sens inégalé de la répartie ? Il est vraiment pas drôle. Concentré ou pas, il pourrait au moins être un peu plus loquace. Elle n'est pas non plus enchantée de faire équipe avec lui mais elle sait aussi que le temps paraît toujours moins long quand on papote. Ouais, même avec un gueux.

Discuter avec Zelda, ce n'est pas simple. Alors, le métis préfère se concentrer sur son dessin, écoutant d'une oreille les paroles de sa cadette. Puis, quand elle le questionne à nouveau sur les raisons de sa chance, l'artiste relève la tête en haussant les épaules. « J'ai su m'entourer des bonnes personnes, tout simplement. » Dit-il à la jeune femme, conscient qu'elle va certainement lui souffler que c'est une technique de faible. Qu'importe, en rejoignant les Expendables, le métis a fait le meilleur choix possible. Il ne le regrette pas.

Et malgré de nombreuses déconvenues, des événements douloureux, il est toujours là. « Je me débrouille plutôt bien au tir. Mon père m'avait appris à tirer au début de l'épidémie. » Explique-t-il avant de se remettre à dessiner. Puis, tout en continuant son œuvre, il ajoute d'un air détaché « Et toi ? A part embêter les autres, qu'est-ce que tu sais faire ? »