Sujet: Re: Everything collapses | Elijah Dim 12 Mar 2023 - 11:53
Luther n’a jamais rien su ? Peut-être qu’Elijah n’est pas au courant. Loin de moi l’envie de faire des vagues entre les deux jumeaux dont la relation semble tenir en un parfait équilibre. Alors je me tais, pudique et défoncé par la douleur et les médicaments ; du moins jusqu’à ce qu’Elijah me pose directement la question et que les mots coulent sans filtre ou retenue, “Il a maintenu que… c’était un diable avec lequel on n’avait pas d’autre choix que cohabiter…”
J’ignore si ce sont ses mots ou le piquant du désinfectant qui m’infligent ce désagréable frisson. Affirmer à Walla-Walla que la thérapie de conversion est inefficace relève de l’inconscience. Mais je suppose qu’entre les murs du bidonville, plus personne ne prend la peine d’écouter. “Oui je… je le savais, je l'ai juste oublié… un moment, je…” Confus, le regard planté sur mon bras et sa chair grossièrement recousue, comme les fragments de mon esprit qui peinent encore à cicatriser. Je fronce les sourcils, ne sais plus trop quand j'ai perdu ma capacité à penser, ni quand j'ai commencé à la retrouver.
“Tu ne devrais pas le dire… trop fort.” la voix chargée d’une certaine inquiétude. Je me pince les lèvres, la sensation du baiser encore marquée, coupable. “Ce n'est pas que ça, c'est… Luther m'a laissé entendre qu'il connais bien ce… problème. Comme si l'un de ses proches était… tu vois.” Je relève le regard sur le sien, “Peut être qu'il l'a deviné. Je ne sais pas. Ton… mariage avec Hoani semblait… crédible. Sans doute plus que le mien.”
Un léger rire, presque silencieux, passe entre les lèvres d’Elijah en entendant les propos que Luther aurait tenu. Il n’est pas surpris, loin de là: ce n’est là que le triste reflet des convictions de son jumeau, d’une lecture biaisée d’un livre soit disant sacré, qui ne condamne aucunement ces attirances. Rien d’étonnant jusque là, de sa part. Le milicien est à mille lieux de penser que son frère parle de lui… Ne percevant là qu’une forme de fanatisme religieux.
Ray murmure de nouveau, et l’attention d'Elijah se pose de nouveau sur lui: sa main vient attraper prudemment son menton, l’obligeant doucement à le regarder en relevant sa tête. Ce n’est pas de ta faute, reprend-t-il, d’un ton toujours bas. Ils ont essayé de te le faire oublier, en le brisant notamment. Mais il n’y sont pas totalement parvenus, et c’est le plus important.
Puis il le relâche, afin de continuer les soins: du moins, jusqu’à ce que l’ex kiné lui conseille de parler moins fort. Difficile d’entendre des chuchotements, même avec des murs aussi fins que du papier. A l’intérieur de cette ruine, il n’y a que des enfants qui n’ont pas d’existence. Et à l’extérieur, qui aurait intérêt à écouter entre les murs ? Je vois, ajoute-t-il ensuite, ses sourcils se fronçant légèrement tandis qu’il réfléchit.
Écoute… soupire-t-il ensuite, tout en chuchotant de nouveau. Je suis pratiquement certain qu’il ne s’agit pas de moi. Pas totalement non plus, car Elijah ne peut taire ce léger doute que le plus jeune vient d’éveiller… La crédibilité se base uniquement sur les apparences, Ray. D’autant plus quand on oblige des gens à se marier. Mais… c’est devenu sincère.
Même si les choses semblent devenir compliquées entre eux, depuis sa disgrâce. Et mon mariage avec la mère de Mia l’était aussi. Ainsi, comprendra-t-il qu’ils sont à la fois similaires tout en étant différents ? Son regard croise celui du plus jeune, scrutant ses réactions, avant de reprendre les soins.
Pas de ma faute. Le contact d’Elijah et la manière dont il force son regard sur le mien sont d’un coup désagréables. La culpabilité est encore comme une barrière trop solidement érigée et je ne peux pas admettre d’avoir totalement perdu le contrôle sur mon esprit. Peu importe qu’il s’agisse d’une maladie, d’un choix ou d’un simple hasard de la vie ; le problème est toujours bien ancré en moi.
Il me relâche, le vertige revient, la douleur se dissipe doucement sous l’effet des médicaments et la double dose se fait ressentir. Je me décrispe. Me ramollit. Pose le haut du front sur le mur froid en le laissant travailler sur mon bras. Persuadé d’entendre quelque chose remonter en milliers de petits pas frénétiques dans le plâtre. Mais les rats n’iront probablement pas colporter nos secrets. “Peut-être que Luther en est lui-même, alors.” Sur le ton d’une plaisanterie vaporeuse. “Enfin, il m’a plutôt l’air de n’être de rien du tout, si tu veux mon avis...” Toujours trop sérieux, guindé, trop froid, c’est à se demander s’il est capable d’un peu de chaleur.
Mais le sourire ivre s’efface quand Elijah affirme que son mariage est devenu sincère. “… Je vois.” soufflé en roulant le crâne contre la paroi, la déception se lit peut-être quelque part sur mes traits. “Je suis désolé, alors..." Pour ce baiser. "Toutes ces alliances heureuses donneraient presque raison à ce système. Min-Oh, Mason, Tasya… toi, et… plein d’autres. Je suppose que les choses auraient pu finir par fonctionner avec Lynn, si je n’étais pas…” Détraqué. Je soupire, les yeux mi-clos, le teint pâle et épuisé. “Je suis assez envieux des gens comme toi. Qui ont… le choix.”
Elijah a presque un rire en écoutant Ray: visiblement, les cachets font désormais effet, lui retirant tout filtre. C’est une manière de dire qu’il n’est pas intéressé par tout ça. Aux yeux du milicien cela n’a pas d’importance, surtout si Luther était heureux ainsi… Loin de se douter que la solitude pesait sur les épaules de son jumeau, tout comme son lourd secret. Sa femme a accouché il y a quelques jours, d’ailleurs.
Information dont l’ex kiné n’aura certainement rien à faire, mais de son coté, Elijah s’y fait à peine. Nul doute que l’existence de son neveu, tout autant que le mariage de Luther et Ela, est le fruit d’une simple obéissance aux règles dictées par New Eden. Tout en continuant les soins, le milicien précise un peu plus ses propos, non sans remarquer le changement d’attitude de Ray. Il hausse les épaules à ses excuses. Inutile de t’excuser.
Pourquoi faire ? Il n'en voit pas l'utilité, ne percevant pas le lien avec ce qu'il vient d'avouer. Et puis, ce serait cocasse de sa part d'exiger des excuses, après avoir rendu ce baiser. Heureuses ? Non, tout n’est pas aussi simple. Le plus jeune reprend, et Elijah a presque un rire en l’entendant. Les lois rendent les unions obligatoires. Tu penses que tous se seraient mariés, s’ils avaient eu le choix ?
La majorité d’entre eux, non. Moi y compris. Certes il aime Hoani, mais il reste pragmatique sur ce point: sans obligations ni répressions, ils n’auraient sûrement jamais été ensembles. Non Ray, ça n’aurait pas forcément fonctionné avec Lynn, même en étant "différent". Puis il reprend les soins. Tout ça repose uniquement sur de la chance.
Beaucoup ne l’ont pas eue. Puis il regarde Ray: il a un instant d'hésitation avant de reprendre. Il n'y a pourtant rien à envier. Nous n'avons pas plus de choix que d'autres. Soupir las, en réaction à ce préjugé. Devoir renier une partie de soi-même n'est pas plus simple. Mais ici c'est soit ça, soit... La thérapie, et finir brisé.
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CASIER DE SURVIVANT
Sujet: Re: Everything collapses | Elijah Ven 31 Mar 2023 - 13:46
”Super.” La femme de Luther a accouché. La lassitude dans ma voix trahit grassement que je n’en ai rien à foutre. Apparemment, la nouvelle touche Elijah comme si elle était étonnante. C’est pourtant bien ce à quoi se résument ces mariages à la base, non ? Des incubateurs à bébés…
Et pas forcément des liaisons heureuses, comme le souligne le milicien. “Je sais.” Beaucoup ne se seraient pas passé la bague au doigt. Se seraient contenté de concubinage ou de rien du tout. Mais si ces unions forcées leur apportent du bonheur, sont-elles encore à combattre pour ceux qui en jouissent ? “Hm…” Le regard vaporeux penché sur les lésions dont il s’occupe soigneusement. “On n’est jamais d’accord… toi et moi.” Un simple constat qui se voudrait amusé, mais aucun des muscles de mon visage ne daigne s’activer pour déclencher un sourire.
Je redresse les yeux vers lui ; sa silhouette se découpe étrangement du reste de la chambre, qui semble tourner lentement. Les fils dorés du soleil qui filtre à travers les rideaux attirent ce qu’il me reste d’attention, alors que je lui réponds sans vraiment être là, “En thérapie, les bisexuels n’ont pas eu de mal à prouver qu’ils pouvaient bander devant des femmes.” Je fronce briècement les soucils au souvenir nauséabond de ces étranges séances de torture. Bien sûr que si, sa vie est plus… simple. “Je crois que si je revois une vulve de trop près, je risque de vomir…” Ces affreux coquillages gluants… bon sang.
Les gestes lents et contraints par la sensation désagréable mais éteinte des chairs déchirées, je me redresse et prends appui sur la cuisse du milicien. Je replie une jambe et la sors des draps, en garde un pan contre moi plus par frilosité que par pudeur. “Je suis quand même… content que le bordel ait brûlé. Je crois que ça m’aurait rendu malade des hommes aussi.” L'œillade se voudrait ridiculement suggestive mais ressemble davantage à celui d’un animal écrasé et agonisant sur le bord de la route. “Je peux m’occuper de ça.” En prenant maladroitement la compresse de ses mains, je lui fiche à moitié dans le visage, et ça suffit à m’arracher un petit rire vite avorté par le tiraillement de ma joue.
Je soupire, penché en avant, presse mon épaule face à la sienne autant pour trouver un semblant d’équilibre que de réconfort. Le menton posé sur la pointe de sa clavicule, je dépose la compresse sur ma blessure, essuyant lentement et sans doute trop faiblement les quelques saletés qui s’y sont logées, forment une espèce de mélasse brune bien peu ragoûtante.
“Je suis désolé pour Eve, d’ailleurs…” que je marmonne contre sa veste. Je n’ai pas à affronter son regard, comme ça. “Au moins, elle est tranquille où elle est, maintenant…” Et je crois bien que j’en suis jaloux.
En toute réponse, Elijah hausse les épaules. On ne peut pas toujours être d’accord. Se concentrant d’autant plus sur la blessure, le milicien ne relève la tête qu’une fois les soins terminés. Son regard se pose de nouveau sur Ray, vérifiant par la même occasion son état, avant d’avoir un soupir. Certes.
Il n’est pas vraiment surpris: là où New Eden brille d’inventivité pour détruire tout personne hors de leurs critères, ce qu’ils font subir en thérapie n’est qu’une continuité du monde d’avant. Mais ils n’en ressortent pas moins brisés. Elijah n’a aucun doute sur ce point. Puis il a un vague sourire amusé: clairement, les médicaments font bel et bien effet. Eh bien… Tu n’as pas de raisons d’en revoir une d’aussitôt. Normalement.
Une fois les soins du bras terminés, Elijah laisse Ray prendre appui sur lui, afin qu’il s’installe au mieux. C’est compréhensible. Vu les mots employés, l'ex kiné n’a pas eu le choix de se prostituer, tout comme ses alliées d’infortune. Sans aucun doute, mais ce n’est pas le cas. Peut être parce qu’il en a été extirpé à temps, indirectement. Tant mieux, non ? Au moins, il évite des traumatismes supplémentaires.
Ses yeux de nouveau rivés sur ceux de l’ex kiné, il ne remarque pas de suite que ce dernier tente de lui prendre la compresse tout juste récupérée, jusqu’à ce qu’il y parvienne, maladroitement. Tout en assurant qu’il peut s’en occuper seul, la lui fichant à moitié dans le visage. Elijah a un vague rire en réponse. J’en doute un peu, mais vas-y. Fais donc.
Faisant office d’appui, l’une de ses épaules contre la sienne et sa clavicule servant d’appui menton, il regarde comment le plus jeune s’en sort: sans grand surprise, le nettoyage de la blessure n’est pas suffisant. Il se fige un instant, quand ce dernier parle d'Eve. Tu n’y peux rien. Qui aurait pu prévoir un tel incendie ? Elijah est loin de connaitre la vérité... J’imagine, oui. Plus personne ne lui fera du mal.
Une piètre consolation, pour la perte d’un énième proche. Mh. Attends, laisse moi t’aider, dit-il après un temps de silence, récupérant la compresse sans trop de difficulté. Le milicien se rapproche, et passe de nouveau la compresse sur les zones moins bien nettoyées de la plaie. Voilà, c’est déjà mieux. Puis il continue, enlevant les dernières traces de saleté.