The Walking Dead RPG

"Ça sert à rien d’savoir compter maintenant.” Que j’souffle avec assurance quand il m’parle de son père banquier. Reese a essayé d’me convaincre du contraire, mais j’ai toujours du mal à l’concevoir. J’vois pas en quoi c’est une preuve d’intelligence.

J’soupire et roule un peu des yeux. Ça l’met en danger de pas apprendre à s’défendre. C’est con qu’il s’en rende pas compte. Mais son père a l’air de grave faire sa loi sur lui, alors bon, est-c’que j’peux vraiment y faire grand chose ?

“Nan j’ai jamais vu d’pédo en fait.” Heureusement, même si j’aimerais bien avoir l’occasion d’démontrer à quel point j’ai progressé.

La douche de bière m’refroidit un coup, le petit rire qui fond dans un sourire quand il m’demande si on va avoir des problèmes, “Nan, t’inquiète. Y’a tout le temps des verres qui volent ici.” Ce sera sûrement ni le premier, ni le dernier de la soirée. Et si j’connais ce mec ? “Nan. Mais les adultes s’croient tout permis. J’aime pas qu’on m’fasse ça.” En fronçant les sourcils, replaçant correctement mon T-shirt trempé. “Enfin c’est mieux que m’faire casser la gueule, j’imagine.” J’suis pas sûr que j’aurais fait le poids.

J’reporte mon attention sur le match. Le type qui se faisait déjà malmener finit par se faire carrément assommer d’un coup dans le crâne. Il tombe à la renverse, le nez en sang, alors que, tout autour de nous, les gens se lèvent pour crier, acclamant le vainqueur et insultant le perdant. J’regarde ça avec intérêt et, quand le volume redescend, j’glisse à mon nouvel ami, “J’te prête un T-shirt s’tu veux.” Il est un peu plus grand qu’moi, mais pas plus large. “Ton père t’engueulera si tu sens la bière, j’suis sûr.” Si j'capte bien le genre du daron.

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”Hey j’suis pas petit.” En fronçant l’regard d’un coup. Malik est plus grand qu’moi, mais j’espère qu’il me prend pas pour un gamin. Ou pour un nain. J’soupire, reviens dans le match, jusqu’à ce qu’on en sonne la fin.

On s’extirpe de la foule pour pénétrer dans les couloirs, “Dans l’dortoir. C’est là qu’on garde nos fringues.” Dalida garde l’entrée des quartiers privés des Bastards. Il est immense, peut sembler menaçant, mais nous fait passer avec un petit clin d’oeil.

S’il a le droit d’être là ? “J’crois. T’façon si tu fais quelqu’chose de louche, j’te défonce.” Ca doit sonner comme une plaisanterie, mais c’est sérieux. Il a pas intérêt à chourer quoi qu’ce soit.

On entre dans la chambre, y’a une dizaine de lits superposés qui encombrent la pièce jusqu’au plafond. C’est un peu le bazar, y’a quelques affaires qui traînent ici et là. Des trucs persos, alors on y touche pas. J’approche des meubles au fond, ouvre un tiroir dans lequel j’ai rangé mes affaires. Comme j’reste tout l’temps sur la péniche, y’en a pas mal.

“Tiens.” En lui balançant un T-shirt noir un peu trop grand pour moi, floqué d’une illustration de crâne en blanc. “Tu m’le rendras quand tu pourras.” Moi, j’pose mes armes pour m’changer vite fait de haut. Un T-shirt Levi’s avec un grand logo rouge. Pas besoin d’plus, il fait encore chaud.

“On y retourne ? Faut qu’on r’trouve ton ballon aussi.”

***

Quelques jours ont passé, la péniche est toujours amarrée au quai de Nisqually, et il fait un peu trop chaud pour y rester enfermé. Alors, à la première occasion, j’suis sorti. Il m’a suffi d’demander à quelques personnes pour trouver là où Malik habite. J’connais pas grand monde de mon âge, le courant est bien passé l’autre fois alors… bah, me voilà.

J’toque à la porte de la caravane, lève les yeux vers l’homme qui m’ouvre quelques secondes plus tard. Il est super grand. Ça doit être son père. “Malik est là ?” J’le vois m’scruter le visage. Mes bras aussi, qui sont à l’air libre. Y’a un truc qui lui plaît pas, et j’suppose que c’est les tatouages. Y’en a toujours, des mecs coincés comme ça. Qui s’offusquent pour quelques dessins. Il baisse encore les yeux, vers le sac que j’tiens en mains. C’est des gants d’boxe. Malik m’a fait découvrir le foot, j’veux lui faire essayer c’que j’maîtrise. Mais j’suis pas sûr que ça plaise au daron, de c’qu’il m’en a dit, alors j’cache un peu le sac derrière mes jambes. “C’pour aller… aider aux potager. J’ai ramené du compost de la péniche.” Un gros mytho - j’espère qu’il passera.

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J’comprends pas ce qu’il dit. D’toute façon, il ne me regarde plus et s’adresse uniquement à son fils. J’plisse légèrement le regard, devinant l’énervement et la pointe de mépris dans les mots qu’il prononce. Est-ce qu’il m’a seulement compris ?

J’fronce le regard, essaie de capter celui de mon ami qui parle le même langage. Le T-shirt ? “Ah, ouais.” J’y pensais plus trop, à vrai dire.

Mais j'sens la colère monter quand le père s'en empare alors que Malik s'apprêtait à m'le rendre. “Hey. C’est à moi. Il parle pas anglais, ton père ?” sur un ton un peu plus ferme qui n’a pas vraiment l’air de lui plaire. C’est pas parce qu’il est grand que j’vais courber l’échine. En 1v1, j’suis sûr que j’lui ferais bouffer la poussière.

J’lui arrache le vêtement des mains, peste en reculant. J’soupire, assez blasé de devoir jouer l’jeu pour que son paternel le laisse sortir. “Ouais, du foot.” en roulant des yeux à moitié. J’sens bien dans son regard qu’il me croit pas. J’m’y accroche quelques secondes, contenant difficilement la franchise qui voudrait m’échapper. J’ai horreur qu’on m’manque de respect.

“Viens, on y va.” J’agrippe le haut du garçon pour l’tirer avec moi. Quand on s’éloigne, j’le relâche et jette un oeil derrière nous, le voit nous observer. J’murmure à mon pote, “Qu’est-ce qu’il a dit ?” En continuant d’avancer vers la zone libre à l’orée de la forêt. “Ça sonnait pas sympa.” Il aime sans doute pas mon style. Ou les Bastards, pour les combats qu’on organise. Il a l’air sacrément vieux jeu, et ça m’fait d’la peine pour Malik - même s’il a d’la chance de vivre avec son père.

J'lève un peu le sac que j'tiens à bout de bras, "C'est vrai qu'c'est pas du compost. C'est des gants d'boxe." Dans un petit sourire malicieux, "J'vais t'apprendre à t'battre."

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