Quand il avait été averti de la visite prochaine de membres de Sanctuary Point à Nisqually, le chilien s’était empressé de préparer son propre voyage là-bas, histoire de profiter de la présence de l’un d’eux pour ne pas faire la route seul. Son absence serait gérée par Nolan sans soucis - l’été étant plutôt propice à son séjour, compte-tenu des maladies peu nombreuses. Les pneumonies - dont la sienne - découlant de la tempête du mois de juin, avaient été gérées et pour l’infirmerie, on pouvait dire que les conséquences de cet orage étaient à présent terminées. Il n’avait alors aucune culpabilité à partir quelques temps - moins bien longtemps que l’hiver dernier - et à laisser ses filles, encore une fois.
Ils avaient pris le temps, avec Andrea et sa grossesse, d’organiser son absence. Il n’aurait pas le loisir de partir plus tard, plus que jamais elle aurait besoin de lui une fois l’accouchement passé, pour s’occuper d’Annabella et soulager un peu son ex-compagne. Heureusement, Corray était un futur père présent et engagé - un peu stressé aussi, mais qui lui en aurait voulu ? Pas lui, non.
Alors oui, il avait hâte un peu de partir rejoindre Matias et les siens. Et surtout Eden. Cela fait quelques mois maintenant, est-ce que cette étincelle sera toujours là ? Les lettres échangées l’avaient entretenues mais il y avait toujours la crainte que ce ne soit pas suffisant. Il ne savait même pas, à dire vrai, si elle avait reçu la dernière lettre déposée il y a quelques semaines quand il avait été suffisamment en forme pour la délivrer. Son absence de réponse avait pu être mal prise, et peut-être ne s’était-elle plus déplacée pour voir s’il lui répondrait un jour. C’était l’inconnu. C’était le risque aussi, mais dans tous les cas ; il n’avait aucun regret. Et puis, il savait que Matias, au moins, saurait lui faire bon accueil.
La rumeur de l’arrivée de Sanctuary Point remonta rapidement jusqu’à lui, et terminant ce qu’il était en train de faire à l’infirmerie, Lisandro se parra de son plus chaleureux sourire pour accueillir les arrivants… Jusqu’à se figer en observant les silhouettes si familières qui se rapprochaient d’eux. Eden. « Madre Dios » Qu’il murmure, pour lui-même. Ses pas se font un tantinet plus pressé alors qu’il n’ose pas trop carrément s’élancer dans sa direction. Tariq est le premier à arriver, très vite entouré des autres membres de The Haven. Les salutations, les présentations de rigueur se passent et le chilien reste un peu en retrait le temps que l’effervescence passe, les yeux timidement rivés sur Eden. Enfin, c’est à son tour - ou à leur tour ? Il appréhende un peu et cherche un signe - n’importe lequel ! - jusqu’à son sourire qui lui permet de franchir les derniers pas qui les séparent pour l’enlacer brusquement dans cet élan chaleureux et cette spontanéité qui le caractérisait si bien. Il ne pousse pas la folie jusqu’à l’embrasser ici, devant tout le monde, comme il en rêve, l’étreinte suffit - et ne manque pas d’attiser sourires et regards amusés autour d’eux.
« Je ne t’attendais pas… Je ne savais pas si tu avais reçu ma lettre. Je suis désolé. Est-ce que tu vas bien ? Tu veux quelque chose à boire, à manger, après cette route ? Comment vont tes enfants ? » C’est qu’il parle vite en plus, le bougre.
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Eden, elle-même, était très étonnée, il y encore un an de cela, elle n’aurait été aussi, frivole. Cette partie d’elle la fascinait, autant qu’elle lui faisait peur. Avait-elle réellement la place pour ce genre de sentiments ? Ce genre d’émotions qui lui étaient tombé dessus comme un cheveux sur la soupe ? La mère de famille n’avait eu aucun mal à voir la différence entre sa vie avant son arrivée à Sanctuary Point et ce qu’elle ne voyait aujourd’hui comme une survie. Eden n’avait réussit qu’à maintenir ses enfants en vie, peut-être qu’on ne lui trouverait pas de faute, c’était déjà beaucoup. Mais elle se trouvait parfois rongée par la culpabilité de ne pas avoir pu faire plus, plus tôt. Seulement, aujourd’hui, Eden contemplait l’évolution de ses enfants, Poppy et Adriel, qui s’épanouissaient, souriaient bien plus. Une stabilité qui lui avait permit de s’octroyer l’égoïste caprice d’entretenir une relation d’abord légère, puis épistolaire avec Lissandro.
Alors, quand il avait été question de faire quelques kilomètres, le prétexte avait été un peu trop beau, et l’élan peut-être un peu trop enthousiaste. Mais ce n’était que la question de quelques jours tout au plus, une partie d’elle avait l’impression d’être une mère indigne, mais ses enfants ne semblaient pas lui tenir grande rigueur de cette liberté à laquelle eux-même avaient pu accéder. La mère hélicoptère qu’avait été Eden avait sans l’ombre d’un doute pu se montrer étouffante. La coréenne avait prit la route, leur assurant de revenir avec des surprises, sans réellement savoir ce qu’elle allait pouvoir trouver.
Sans grande surprise, Eden fut étonnée par la communauté de Tacoma, elle n’y avait jamais mit les pieds. Le monde en dehors de Seattle n’avait pas prit le même pli ni la même philosophie. Rapidement, plusieurs personnes avaient fini par venir les accueillir, la mère de famille s’était présentée, jusque’à apercevoir Lissandro, un fin sourire s’était glissé sur la visage de la trentenaire, alors qu’il fut enfin le moment des retrouvailles.
L’étreinte arriva comme une récompense après la patience, un soulagement après ces lettres qui n’avait fait que soulager temporaire une frustration, un manque certain. - Je vais bien, répond t-elle, en souriant doucement. Il semblait en bonne santé malgré la pneumonie dont elle même avait été victime. Et au sujet des lettres, - Je me suis dit que c’était mieux de répondre en venant. reprit-elle un peu embarrassée de cette initiative. - Poppy et Adriel vont biens, je crains n’avoir besoin de quelques cadeaux à leur ramener pour me faire pardonner ce caprice. Le caprice étant Lissandro mais elle n’avait pas été aussi franche avec ses enfants.
- Tu me fais visiter ? Je ne suis jamais venue, nous parlerons en chemin ? dit-elle en lui souriant.
C’était un tourbillon d’émotions mêlant à la fois inquiétude, étonnement, joie profonde et soulagement. C’était un peu compliqué à gérer, à expliquer même. Il s’était préparé à monter jusqu’à Olympia, à aller la rejoindre en espérant quelque part, que sa lettre n’était pas arrivée trop tard. Parce qu’il y avait toujours un peu ce doute avec la distance, n’est-ce pas ? Il faut dire que ces quelques mois leur avait permis de poser des bases timides et puisque les promesses n’étaient que celles de ne pas se mentir et de laisser la liberté à l’autre de choisir… La possibilité que les choses changent était présente. Mais en la tenant là dans ses bras, son corps peut-être un peu plus mince que dans ses souvenirs, sa main glissée dans son dos pour la serrer contre lui, cela lui semblait réel - c’était réel.
« Je ne m’attendais pas à une telle réponse, mais j’en suis heureux. » Dit-il, pour la rassurer alors qu’il voyait le rouge lui monter aux joues. Et heureux était un faible mot. Il a un léger rire - si léger ! Quand il l’entend parler d’une promesse de cadeaux pour les enfants. « Je crois qu’on devrait trouver ça quelque part. » Et puis elle lui demande de visiter et c’est vrai que sur l’instant, il n’était obnubilé que par elle, par sa présence ici. Mais ils n’avaient pas vraiment bougé de l’entrée du camp alors que déjà, le comité venu les accueillir s’était éloigné en compagnie de Tariq pour - sans doute - leur laisser un peu d’intimité. « Oui, bien sûr ! Je vais pouvoir te montrer l’infirmerie et puis un peu tout ce qu’on a pu construire ici… Tu sais, on a même une école. Mais tu tombes après la tempête, les travaux sont bientôt terminés mais les dégâts sont quand même encore visibles. » Qu’il commence, en l’entrainant avec lui vers l’intérieur du campement.
Ils étaient encore en train de reconstruire, mais il était difficile d’ignorer tout le travail qu’ils avaient abattu depuis toutes ces années, ni de nier le confort qu’ils s’étaient créé ici. Lisandro avait plus d’une raison familiale à ne pouvoir partir d’ici, leur infirmerie avait besoin de toutes leurs compétences médicales et le chilien, malgré son handicap, demeurait essentiel pour la gestion et la formation des équipes. Il n’était pas médecin de formation - mais sans doute la situation l’avait autant formé que d’autres - et il ne se sentait toujours pas si légitime à cette place mais, il faisait de son mieux. Comme tout le monde ici. Il se sentait néanmoins intimidé de lui montrer son chez lui. Mais si elle était venue, c’était sans doute aussi parce qu’elle était prête à connaître cette partie de sa vie - sa famille, ses filles, ses amis. S’il voulait la préserver, c’était certain qu’elle serait connue de tout le monde avant la fin de la journée, hélas pour leur intimité.
« Comment ça s’est passé la tempête chez vous, les dégâts ? Nous avons souffert d’une épidémie de pneumonie - comme je t’en ai parlé - tout le monde s’est assez bien remis. Et chez vous, dis-moi ? Hazel doit avoir accouché maintenant, non ? Et Ana-Lucia, sa grossesse ? » Qu’il s’enquiert, autant en tant qu’ami que médecin attentif.
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Eden n’avait jamais certainement été impulsive, ou du moins elle ne l’avait plus été depuis bien longtemps. Assez longtemps pour qu’elle ne s’en souvienne pas. Sa vie, sa survie, celles de ses enfants n’avaient été qu’un enchaînement de décisions réfléchies, tout avait toujours été prévu. Il n’y avait jamais eu beaucoup de place pour le spontané ou l’impulsif, Eden n’avait jamais pu avoir ce luxe.
Les lettres qu’ils avaient pu échanger échappait, pour Eden, au rationnel. Et si elle voulait bien se prêter au jeu de d’irrationnel, elle demeurait parfois apeurée que cela puisse la faire passer pour une mère indigne. C’était certainement sa pire crainte. Seulement voilà, elle n’arrivait pas à se lasser de ce sentiment grisant qui semblait avoir insufflé à son existence un souffle nouveau et bienvenu. C’était donc bien maladroitement, et sans l’ombre d’un doute égoïstement, qu’elle avait décidé de pointer le bout de son nez en réponse à la dernière lettre de Lissandro.
Il en semblait heureux et il avait l’avantage d’être bien plus franc qu’elle concernant ses sentiments et des émotions. Eden n’avait jamais mis les pieds à Tacoma et n’avait d’ailleurs jamais vu plus grande communauté de laquelle Lissandro était un membre. La mère de famille avait toujours fui ses grands rassemblements qui créaient bien souvent des envieux ou des rivaux.
Ils ne s’étaient pas vu depuis plusieurs semaines, plusieurs mois même. Il y avait beaucoup de choses qui avaient traverser leur survie, la tempête tout particulièrement qui avait des ravages conséquents et dont l’une des conséquences avaient été qu’Eden s’était retrouvée alitée avec une pneumonie au fond de la gorge. - La maison n’a pas subit de trop gros dommages, explique t-elle. Ils avaient eu de la chance malgré tout, quelques carreaux cassés, mais rien qui menaçait l’intégrité de la maison. Ses enfants s’en étaient sortit avec une belle frayeur, mais rien qui ne serait jamais à la hauteur ce qu’ils avaient pu vivre. Eden avait contracté un pneumonie qui elle l’avait clouée au lit. Avec l’humidité et les allers-retours pour aider à maintenir la digue, j’ai été moi-même victime d’une pneumonie. Les enfants n’ont rien eu, heureusement. reprends t-elle. Eden avait l’impression d’avoir contracté toutes les maladies qui étaient passées dans la région. Un fait qui faisait sens, elle était bien souvent la première à devoir s’exposer. Mais la pneumonie, cette fois-ci, elle l’avait attrapée toute seule. Tout le monde va bien, il y a eu beaucoup plus de peur que de mal. Et tant mieux.
Eden préférait cette tournure de phrase. La digue aurait pu céder, les eaux monter. Mais Sanctuary Point s’en était sorti sans trop d’égratignures. Pour l’heure, Eden pouvait s’avouer qu’elle était heureuse de retrouver Lissandro. Tu n’as pas eu de séquelles après ta pneumonie ? Avec l’humidité des jours suivants… lui demande t-elle, la mine inquiète.
Quand elle avait apprit la contamination de Lissandro, elle s’était inquiétée. C’était peut-être aussi l’une des raisons pour laquelle elle avait voulu faire le déplacement. Calmer cette angoisse dont elle se serait bien passée.
Encore une fois, il s’emballait. Mais peut-être aussi avaient-ils beaucoup à se dire. Le papier était souvent bien trop court pour toutes les pensées et sentiments à poser. Mars, cela remontait à loin déjà. Il était heureux d’avoir de ses nouvelles, des nouvelles de Sanctuary Point aussi, de ses habitants. Il avait hâte de les retrouver d’une certaine manière, même si une de ses principales sources d’intérêt était venue lui faire la surprise de sa venue. « Non, aucune séquelle. La fatigue oui, mais je ne suis pas certain que ce soit uniquement lié à la maladie ; il y a eu beaucoup à faire ici. Et j’essaye de m’occuper d’Annabella aussi souvent que possible, sa mère est en fin de grossesse, on se relaie avec son compagnon pour la soulager du mieux qu’on peut. C’est pour ça d’ailleurs que je voulais venir jusqu’à Olympia. Je voulais être rentré pour l’arrivée du bébé et m’occuper d’Anna. » Qu’il lui raconte, avant de venir glisser ses doigts dans les siens alors qu’ils continuaient de traverser le campement. Est-ce qu’elle regardait vraiment tous les bâtiments qu’il lui présentait ? Est-ce que ça avait une quelconque importance ? « Je vais pouvoir te la présenter, d’ailleurs. Si tu es d’accord. » Qu’il lui souffle, avec douceur. Son cœur battait un peu fort, il n’était pas préparé à cette visite mais il en était heureux. Il savait aussi que les siens sauraient l’accueillir chaleureusement. Teresa la première, à n'en pas douter.
« Toi aussi, on dirait que la pneumonie n’a pas laissé trop de traces, laisse-moi te regarder. » Qu’il lance, en s’arrêtant pour la faire se tourner vers lui. Inconscient ou non, ils s’étaient arrêtés dans un coin à fort peu de passage - évidemment que c’était conscient. Sa main lâcha la sienne pour venir sur sa joue, l’envie était trop forte et le chilien se pencha pour venir l’embrasser tendrement, à l’abri de quelques regards trop curieux. « Tu m’as manqué… Je ne savais pas vraiment si… » Il n’arrive pas vraiment à le formuler. Cette histoire restait nouvelle pour eux. La correspondance était belle mais elle ne faisait pas tout. Il lui sourit, tendrement. « J’imagine que contrairement à Tariq, il faut que tu repartes rapidement. Tu passes quand même la nuit ici ? Je comptais venir de toute façon, on peut faire la route ensemble… J’ai un nouveau compagnon de route d’ailleurs. Il est aux écuries. » Dit-il, avec malice et joie de vivre, c’est vrai.
« Ca te laisserait le temps de rencontrer les personnes importantes, qu’est-ce que tu en penses ? » Qu’il lui demande avant de lentement se diriger avec elle vers les paddocks des chevaux. Là, avec une bonne touffe d’herbe dans la bouche, un élégant cheval dressait ses oreilles en direction du couple. « Il s’appelle Sabran, tu crois qu’il plairait à Poppy et Adriel ? » Qu’il s’amuse. L’hongre était tranquille et doux. Il eut même un frémissement de naseaux en voyant Lisandro s’approcher, en quête d’un bonbon - très certainement. « Il faisait partie du troupeau qu’Isaac et Raina vous a ramené à Olympia. Isaac dit qu’il me va bien, je ne sais toujours pas comment le prendre. » Il n’aurait jamais parié sur les chevaux avant, mais le caractère doux et facile de l’hongre l’avait rapidement rassuré. Sa nonchalance aussi, c’était sans doute ça, la ressemblance avec le chilien.
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En écoutant ce qu’il racontait à propos de la mère d’Annabella, Eden ne put s’empêcher de ressentir une petite pointe de cette jalousie qu’elle pensait pourtant avoir oubliée. Elle était pourtant certaine que ce n’était pas la peur qu’il retourne dans les bras de la mère de sa fille, mais plutôt l’attention qu’il pouvait lui porter et qu’elle ne pouvait elle-même recevoir autant qu’elle l’aurait voulu, une attention évidemment liée à la proximité. Eden savait être rationnelle et continua d’écouter attentive ce que lui racontait Lissandro à propos de son quotidien.
Il entrelace ses doigts avec les siens, elle sourit doucement sans vouloir y porter beaucoup plus d’attention sinon le rouge lui monterait certainement sur la pointe des oreilles. Ils continuaient de marcher. Évidemment, lui répond t-elle à propos de rencontrer sa fille. Eden ne doutait pas un instant que Lissandro fut assez entouré pour qu’elle ne puisse échapper aux présentations. Elle espérait ne pas se sentir trop acculée, elle s’habituait encore à cette vie en communauté où il y avait plus de sourires que de méfiance. Certaines de ses habitudes avaient réellement la dent dure, même si elle s’était véritablement adoucie, sur certains aspects.
À sa question au sujet des séquelles de sa pneumonie, Eden aurait bien répondu qu’elle avait été alitée pendant plusieurs semaines et qu’évidemment avait du perdre quelques kilos. Certainement les derniers de ses deux grossesses, les seuls, vraiment, dont elle pourrait se passer. Mais il avait la franchise et l’honnêteté qui parlaient bien plus vite qu’elle ne le pourrait jamais. C’était bien un trait de sa personnalité qui lui plaisait et qui lui avait manqué. Elle se laisse entraîné et elle sourit, doucement, alors qu’il pose sa main sur sa joue et l’embrasse. C’est pour ça que je suis venue, répond t-elle, en posant sa main sur la sienne.
Oui, c’était nouveau autant pour lui mais surtout pour elle. Elle, qui n’avait jamais envisagé de pouvoir retrouver quelconque relation ou partenaire, n’aurait jamais imaginé se découvrir aussi entreprenante. Il était vrai qu’elle ne pouvait rester longtemps, à la différence de Lisandro dont la fille avait ses deux parents, Poppy et Adriel n’avait que leur mère, et s’ils ne déploraient pas le fait d’aller faire une pyjama party pendant le départ de leur mère, Eden était foncièrement incapable de partir plus longtemps que nécessaire. Elle hoche la tête. Demain ou après demain, entre les enfants et les deux grossesses en cours, je n’ai que quelques jours de répit.. déclare t-elle, pensive et souriante.
Elle hoche la tête, elle passerait bien la nuit ici. La visite continue jusqu’au paddock. Eden avait évidemment entendu parlé de l’exploitation et l’élevage de chevaux par les habitants de la communauté de Tacoma, mais elle n’avait pas du tout envisagé pareil ampleur ou envergure. Depuis l’arrivée des équidés à Sanctuary Point, Poppy n’avait de cesse de vouloir monter à cheval, que la petite devienne une excellente cavalière ne déplaisait pas à Eden. La mère de famille ne voyait aucun inconvénient à l’indépendance de sa fille concernant des déplacements et dans le pire des cas, une fuite. Poppy ne jure que par les chevaux ses derniers temps. J’ai plus de mal à lui faire ses cours de science que de la faire monter sur un cheval. répond Eden, en s’approchant à son tour, elle pose distraite sa tête sur l’épaule de Lisandro.
Bien sur que c’est un compliment, ça a intérêt en tout cas.
C’était bon de la retrouver. C’était comme si le poids de la réalité s’ôtait de ses épaules alors qu’elle venait d’à peine arriver. Comme s’il oubliait, l’espace d’un instant, New Eden, les Scarecrows, les Oblivions et les autres petites guerres intestines. Ils pouvaient bien mettre ça sur pause, pas vrai ? Même si… Même si l’insouciance était parfois dangereuse. Mais là, que risquent-ils, à l’abri des regards, pour un baiser échangé ? « Elle a bientôt trois ans, je pense qu’elle ne devrait te rendre cette rencontre difficile, tout ce qui est nouveau l’extasie pour le moment. » S’amuse-t-il, au sujet de sa fille.
« On partira demain alors, c’était ce que j’avais prévu finalement. Les affaires d’Annabella sont déjà prêtes pour retourner chez sa mère. Je suis content que tu sois arrivé aujourd’hui pour le coup, je m’en serais voulu de te louper. » Dit-il, alors qu’ils approchaient des paddocks des chevaux. La réponse d’Eden sur l’hongre lui fait plaisir. « J’ai déjà mis Annabella sur son dos, elle était surexcitée. Et Sabran est d’une patience infinie, parce qu’elle criait bien fort quand même. » S’amuse-t-il, au souvenir. L’asiatique se pose, la tête sur son épaule et l’instant se suspend.
***
La journée avait été intense. Malgré son envie de ne pas la laisser, certaines responsabilités lui incombaient encore au camp, et Eden s’était retrouvée quartier libre quelques heures dans Nisqually. Il était revenu la retrouver plus tard, avec Annabella dans les bras pour la ramener chez lui, le temps d’une nuit du coup. « Alors, je sais que tu as rencontré Teresa… » Dit-il, avec un sourire complice. La première approche avec sa fille s’était passé comme prévu ; la fillette était sage et observait Eden avec de grands yeux intrigués, bloquée dans sa chaise à manger alors qu’ils étaient tous les trois à table en train de manger ce qu’il avait pu ramener des cuisines.
« Ca été ? Je n’ai pas… Prévu de grande soirée ce soir, je me disais que ça ferait beaucoup si je te présentais tout le monde… en grande pompe. Tu as peut-être croisé Andrea aussi, je lui ai dit que tu étais là. » Il se doutait que tout ça devait déjà être très intimidant pour elle et il ne voulait pas la brusquer. Tout ça, tout ce qu’ils vivaient restait nouveau et Nisqually était énorme. « Comment tu te sens ? » Dit-il, alors qu’ils étaient définitivement à l’abri du monde dans la caravane du chilien. D’habitude, celle-ci était encore plus pleine de vie que cela. Teresa et lui avaient beau ne plus vivre complètement ensemble, mais les caravanes accolées faisaient qu’ils étaient toujours l’un chez l’autre constamment.
A côté d’eux, Annabella émit soudain un petit babillement de mots compréhensibles dans une phrase qui l’était beaucoup moins. Le mélange d’anglais et d’espagnol n’aidait pas beaucoup. « Hey, querida… Qu’essayes-tu de dire ? » Sourit-il, complètement gaga. La fillette se tourna vers lui, gazouilla encore en désignant Eden dans une phrase probablement interrogative. Elle n’articulait pas encore beaucoup. « Je crois qu’elle se demande encore qui tu es » Dit-il, avant de venir embrasser la joue de sa fille qui le repoussa rapidement pour fixer à nouveau ses grands yeux noirs sur Eden. « Il va probablement falloir que tu racontes une histoire avec moi ce soir… Si ça ne te dérange pas. » Il souriait, devant la fascination qui habitait les traits de la petite.
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