Je m’étais débarrassée de la combinaison médicale et de mon masque dès que nous étions arrivés à Centralia, avec la ferme intention de me doucher avant tout le monde. Il m’avait malheureusement fallu attendre pour pouvoir mériter la mienne, car quatre d’entre nous s’était répandu sang et tripes à même leurs vêtements. Ils étaient bons pour les jeter à la poubelle maintenant. J’avais vaguement songé à accompagner Joaquin quand ce fut son tour mais… Quelque chose me retenait encore de le faire. C’était difficile de faire comme si nous n’avions pas eu cette discussion, à peine quelques jours plus tôt, comme si rien de tout ce qu’il avait pu me dire n’avait existé.
L’eau presque froide avait le mérite de me rafraîchir un peu les idées après cette journée particulièrement éreintante. Je savourais le simple fait d’être encore en vie. Tout le monde était rentré indemne de cette virée qui aurait bien pu virer au drame. Au fil des années, la survie s’était révélée de plus en plus compliquée. Le virus mutait, ce qui rendait chaque virée périlleuse. Et pour couronner le tout, les ressources se faisaient rares. Combien de temps pourrions-nous encore espérer tenir ainsi ? Combien de temps encore pourrions-nous conserver notre liberté si chèrement acquise ? Nous nous étions engagés dans des conflits armés qui risquaient bien de nous coûter la vie, ou pire… Mais est-ce que nous avions encore le choix de rester neutre ?
Je coupai l’eau, rougie par le sang à mes pieds. Je me demandais vaguement depuis quand j’avais commencé à réfléchir uniquement en termes de groupe. Et pourtant, dans le feu de l’action, le naturel revenait au galop. J’avais seulement songé à sauver ma peau. Je les avais finalement abandonnés à leur sort, Joaquin en tête. Etait-il resté volontairement à l’arrière pour s’assurer que tout le monde s’en sorte ? Ca ne me surprendrait même pas venant de lui.
J’avais regagné ma chambre dans la caravane pour quêter un peu de calme. Tout le monde s’était dispersé à travers le camp, les tours de garde déjà distribués. Je pouvais savourer ce moment de solitude, un livre à la main. Un voile obscur tomba bien vite sur Centralia, bruissant de la vie nocturne.
Je sursautai quand la porte s’entrebâilla, croisant brièvement le regard de Joaquin. Il était prêt à faire demi-tour. « Tu peux rester. » Je reposai mon livre sur mes jambes repliées, ramenant mes cheveux mouillés en un chignon pour qu’ils me gênent un peu moins. « Ca va ? »
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Sujet: Re: Confidence Mar 15 Mar 2022 - 17:22
« Oublie pas de cramer les fringues dès que t’en auras l’occasion. Avec un masque et des gants. » Mark hoche la tête, alors que j’m’éloigne et que j’finis le tour du proprio. J’sais pas trop combien de temps j’ai passé sous cette foutue douche mais putain, c’était plus que nécessaire là. J’aurais bien aimé que ça me lave tout ce qui tourne en boucle dans ma tête par la même occasion mais, visiblement, c’était en option.
J’remets en place un des pièges qui traine et j’assigne les derniers tours de garde de la nuit. Alors, aucun des membres de la petite expédition sont de la partie pour les prochaines 24 heures, faudrait voir à pas déconner. On est tous claqués et le contrecoup est un peu violent. Mais de toute façon, personne a moufté, pas même Kira qui a accepté le pire horaire. Après l’avoir menacée de la pendre par les pieds si je la chope en train de roupiller, j’finis par aller me chercher un casse-dalle.
Et là, forcément, j’hésite. J’me suis pas posé la question jusque-là et c’était pas plus mal. Mais du coup, j’peux aller pioncer dans la caravane ? J’dois aller dormir ailleurs ? Je me pince l’arête du nez, alors que je me dis que j’avais pas besoin de me rajouter cette merde en plus du reste. J’savais bien pourtant, que la question allait se poser. Ou alors, je me prends la tête tout seul comme un con. Au pire, elle est là et elle m’enverra péter. Affaire réglée.
Ouais, voilà, c’est pas mal. C’est déjà assez la merde dans ma tête pour que j’en rajoute une couche. Pourtant, je reste bien deux minutes à fixer la porte, prêt à faire demi-tour sans même frapper. Le pire, c’est que je suis même pas sûr qu’elle soit là. « T’es ridicule Joa putain… » Marmonné entre mes dents alors que je finis par pousser cette foutue porte.
Okay. Donc elle est là. Parfait. Je lève un index, prêt à faire volte-face, mais voilà qu’elle me dit que j’peux rester. « Cool. » Au moins, j’vais arrêter de réfléchir là-dessus pour rien. Je finis par m’assoir sur le bord du lit, pas si loin d'elle, avec un profond soupir, prenant le temps de me frotter le visage à deux mains avant de tourner la tête vers elle pour hausser une épaule. Okay, j’imagine que j’dois quand même dire plus d’un mot. « La journée a été longue. » La semaine. L’année. Ah putain, on en est qu’au tout début. J’laisse filer un silence alors que j’repense à notre petite virée. « On a ramené tout le monde en un seul morceau. Et on a le camion. Alors… on va dire que ça va. » Je suppose. Autant que possible quoi. « Et toi ? »
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Sujet: Re: Confidence Lun 21 Mar 2022 - 18:05
J’avais l’impression d’être retournée de très longs mois en arrière, quand Joaquin ne savait pas si j’avais envie de rester avec lui ou non. Nous en étions certainement rendus au même stade. C’était compliqué pour moi de savoir où j’en étais avec lui, et pour lui de savoir comment il fallait réagir en fonction.
Je lui demandais sincèrement comment il se sentait, mais l’hispanique me sortit une phrase toute faite en réponse. J’hochai lentement la tête sans faire de commentaires, rouvrant mon livre pour finalement reprendre ma lecture. Il n’avait peut-être pas envie qu’on en parle, alors… Il pouvait tout aussi bien rester là sans rien dire. Ca restait mieux que de me sortir des banalités, après tout.
Je m’interrompis après quelques pages quand il me retourna la question à son tour. Je relevai le regard sur lui pour le fixer longuement. Je soufflai à voix basse : « J’ai bien cru que tu ne ressortirais pas de là. » Je marquai un temps d’arrêt. « Je me suis demandée une seconde ce que j’allais bien pouvoir faire sans toi et… Ca m’effrayait un peu. J’ai été soulagée de vous voir sortir, Tony, Kaycee et toi. Il s’en est fallu de peu, et tout ça pour un camion médicalisé. » Kaycee avait raison. Nous avions pris des risques inconsidérés. Une fois à la morgue, il était compliqué de faire demi-tour. J’avais vécu un stress intense tout du long. Je lui avouai à demi-mots, en me passant une main sur le visage : « J’ai cédé à la panique. Je me suis enfuie… » Je l’avais laissé derrière sans même un regard.
Je déglutis difficilement, enserrant mes doigts entre eux au-dessus des pages égrenées. « Je ne pense pas que c’était un mauvais choix mais… Je suis désolée, Joa’. Je n’aurais pas dû douter de toi. » Je le fixai plus longuement. Joaquin était quelqu’un de fort, mais aussi de rapide. J’avais bien vu qu’avec les années écoulées, il n’avait plus aucun mal à tenir ma cadence. J’avais perdu mon principal avantage sur lui, mais je n’avais plus vraiment besoin de le fuir désormais. « Tu es resté en arrière pour les aider à s’en sortir, n’est-ce pas ? »
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Sujet: Re: Confidence Mer 23 Mar 2022 - 10:49
Putain je déteste ça. Avoir l’impression de marcher sur des œufs, de pas savoir si elle a envie que j’sois là ou pas. De pas savoir moi-même où j’ai envie d’être. Parce que ouais, j’suis pas totalement maso et franchement, l’ambiance gêné, c’est pas vraiment mon délire. Pourtant, j’ai besoin de la voir, d’être près d’elle. Surtout après ce qu’on vient de vivre. Comme pour m’assurer qu’elle va bien, quoi qu’il puisse se passe ou pas entre nous. Ca va bien au-delà d’une vague envie de me retrouver au lit avec elle. Même si, très franchement, vu tout ce qu’elle a remué pendant notre dernière discussion, autant dire que c’est clairement pas à l’ordre du jour dans ma tête. Oh, elle me plait toujours autant, c’est même assez dingue de voir à quel point elle me plait, juste que ouais, possible que je me sente … sale, juste à penser à ce genre de trucs.
… ouais, moi aussi je préférais quand j’étais juste un pauvre con qui suivait les ordres sans se poser de questions et sans avoir d’états d’âme.
Je finis par laisser le silence s’instaurer, laissant échapper un profond soupir. Le bruit des pages qui se tournent a quelque chose de familier, de presque rassurant. Et franchement, pour un peu, j’pourrais m’endormir comme ça, soulagé que tout le monde aille bien. Mais elle finit par répondre à ma question. Et j’ai un bref froncement de sourcils à ses paroles. Pourtant je la laisse parler sans l’interrompre. J’vois bien qu’elle est mal et que tout ça l’a bien plus travaillée que je l’aurais cru. Mais j’avoue que je pensais pas qu’elle pourrait… s’inquiéter de mon sort. ‘fin pas dans cette situation quoi. Sans trop réfléchir, je tends le bras et je vais effleurer le dos de sa main du pouce, avant de serrer ses doigts quelques secondes. « J’suis sorti chica. Et je vais bien. Perso, j’en ai pas douté un seul instant. Probablement parce que douter, c’est ce qui entraine les foirages. » Une micro-seconde d’hésitation, surtout dans cette situation et c’était la mort assurée. Mais j’ai suivi mon instinct et ça m’a bien réussi. « Et ça arrive tu sais. De pas réussir à tout gérer. J’peux piger que t’aies paniqué et que t’aies juste eu envie de te tirer. C’est la première fois qu’on tombe sur un truc aussi merdique. » Est-ce que j’suis déçu qu’elle m’ait planté pour sauver son cul ? Pas vraiment Je suis pas plus étonné que ça non plus.
Et je continue, à mi-voix. « Tu t’excuses d’avoir douté d’moi dans ce cas précis ou c’est plus général ? » J’ai aucun mal à soutenir son regard. La colère que j’ai pu ressentir il y a quelques jours, pendant qu’elle me prenait la tête, elle s’est envolée avec la fatigue. Et surtout, j’ai pu réfléchir vu que ça tourne en boucle dans mon esprit depuis. Je garde pourtant le silence quelques instants à sa question. « Ouais. Parce que c’est c’que je suis. Le type qui assure les arrières et qui veille sur son groupe. J’voulais être sûr que tout le monde sorte de là. Surtout que c’était ma décision de suivre ce chemin au départ. » Quand on a eu le choix de rebrousser chemin ou pas. Alors ouais, j’assume. « Et je sais de quoi j’suis capable. Je peux me démerder, même face à deux déviants. On me tue pas aussi facilement. » La preuve, on les a bien défoncés avec Tony, sans même une égratignure. Alors ouais, ptet que j’ai un peu trop confiance en mes capacités sur ce coup-là, mais j’crois que j’ai jamais été aussi assuré dans mes paroles face à Ruby. « Tu pensais que j’étais resté en arrière pour autre chose ? » Genre me suicider de façon spectaculaire ? Nan parce que bon, à la réflexion, y a pas de bonne façon de crever. Juste des trucs un peu moins pathétiques que d’autres. Et je reprends, pensif. « T’aurais fait quoi ? Si j’étais pas sorti ? »
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Sujet: Re: Confidence Sam 9 Avr 2022 - 17:52
Je relevai la tête vers lui quand sa main vint effleurer la mienne, captant brièvement mon attention. Je soufflai ce qui s’apparentait à un rire quand il chercha à me rassurer. « Ca a l’air confortable de ne pas avoir à penser. » La peur m’avait plutôt donné des ailes pour ma part. Je ne pouvais même pas concevoir de me mettre à ce point en danger pour les autres. Quand on était mort, c’était la fin.
Je soufflai doucement en réponse : « Ce n’est pas la première fois, Joa’. Quand ton ancien gang nous traquait… » Je marquai un silence, sans finir ma phrase. Il savait très bien où je voulais en venir. « Ca va recommencer. » Mais nous avions déjà eu cette discussion. Je n’avais pas envie de me battre pour lui faire entendre raison ce soir. Seulement… Peut-être que la prochaine fois sera la dernière pour lui.
Je secouai négativement la tête quand il me demanda pourquoi je m’excusais. « De tout. » J’avais douté de lui de façon générale, il ne pouvait pas nier l’évidence même. Notre dernière discussion en date avait brisé quelque chose entre nous, même si je ne pouvais pas concevoir un seul instant de me passer de lui. « Je n’arrive seulement pas à comprendre comment tu as pu être ce genre de type pour en arriver là. Celui que tu étais, celui que tu es maintenant, ça ne fait pas sens pour moi. » Comment pouvait-on pendant des années se complaire dans la crasse humaine pour ensuite se découvrir une conscience et jouer les chevaliers-servants ? Franchement, ça me dépassait. Il y avait une de ces deux versions qui n’étaient pas la vraie. « Je n’arrive pas à comprendre comment on peut changer à ce point. A moins de taire ce qu’on est au fond de soi, pour pouvoir survivre un jour de plus. J’ai eu à le faire souvent. Juste, ça me révolte maintenant. » Il avait l’air d’être tellement sûr de qui il était. Comment pouvait-il ne pas en douter un seul instant ?
Je niai de nouveau d’un signe de tête, quand il me demanda si j’avais cru que ses intentions étaient différentes. « Non. » Il aurait simplement pu rester coincé en arrière. Mes mains se fermèrent sur la couverture de mon livre quand il me demanda ce que j’aurais fait sans lui. « J’aurais continué sans toi. » C’était la réponse logique. « Mais… » Je baissai le regard, un peu plus incertaine de ce qui je risquais de dire. « J’aurais eu peur la nuit, seule, et… ça aurait été tellement vide. »
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Sujet: Re: Confidence Mar 12 Avr 2022 - 10:38
A sa remarque, j’ai un rire silencieux et j’souffle, avec un haussement d’épaules. « Franchement ? Ca dépend des jours. Mais sur l’coup ouais, ça a un côté pratique de pas réfléchir à toutes les options possibles. » Bon, les conséquences sont pas les mêmes et j’commence à peine à vraiment piger que j’peux pas me permettre juste de foncer dans le tas ou frapper sans avoir à réfléchir à la suite.
Un froncement de sourcils quand elle me répond et j’garde le silence quelques secondes. J’pourrais lui dire que c’est pas vraiment la même chose, que là, on est maitres de c’qu’on fait, qu’on peut anticiper la suite des évènements, mais j’me dis que c’est pas vraiment ce qu’elle a envie d’entendre. Pourtant j’souffle, pensif. « Y a pas mal de choses qui ont changé depuis. Et j’suis sûr qu’on pourra gérer ce qui va nous tomber sur la gueule. » Je pensais pas être aussi sûr de moi et pourtant, ça me parait naturel, normal quand j’le dis à voix haute.
Au reste, j’me contente d’un bref hochement de tête, accusant quand même le coup. De tout. Ca fait quand même beaucoup, même si j’m’attendais pas vraiment à une autre réponse. J’ai un soupir que j’essaie même pas de cacher alors qu’elle continue et qu’elle explicite un peu plus ce qu’elle a dans la tête. Cette fois au moins, elle est pas agressive ou essaie pas juste de frapper là où ça fait mal. Et j’pige un peu plus son raisonnement. J’finis par me passer une main sur la nuque avant de reprendre, à mi-voix. « J’sais pas trop si ça peut t’aider à mieux piger, parce que j’ai eu du mal à mettre tout ça au clair dans ma tête, mais… j’peux te dire deux trucs par rapport à toute cette merde. » J’ai un temps, avant de r’prendre. « J’ai toujours baigné dans la violence. D’aussi loin que j’me rappelle. J’avais pas à me poser la question de c’que j’voulais être ou pas, c’était tracé d’avance à mes yeux. Mais quand j’ai appris que j’allais être père, j’ai réalisé que j’avais le choix. Que j’pouvais être quelqu’un d’autre. Et j’ai pas hésité à tout larguer pour ma gamine. Pour la protéger. Et c’est un truc qui m’a fait sentir… pas meilleur, mais juste… j’étais sûr de faire ce qu’il fallait. » Bon, la suite m’a prouvé que c’était pas aussi simple, mais j’me dis que ça peut lui montrer qu’avant, j’avais pas envie d’être comme ça. « J’sais pas trop si j’suis clair en fait mais… bref. Ce type-là, celui que j’ai été pendant des mois, il me débecte à un point, t’as pas idée. Et j’commence plus ou moins à piger pourquoi j’suis tombé dans cette merde et pourquoi j’me suis enlisé dedans aussi longtemps. Ca excusera rien, j’sais bien. Mais j’suis sûr d’un truc. Je suis pas ce type. Et j’préfère crever que de revivre tout ça. » Je baisse les yeux en fixant mes mains, sourcils froncés, alors que j’laisse de nouveau filer un silence.
J’sais que j’aurais toujours cette honte et cette culpabilité à m’trainer avec moi. Et que rien de c’que je ferais changera la donne. Mais j’fais avec maintenant. Et j’essaie d’arrêter de me cacher derrière des excuses merdiques surtout maintenant que j’arrive à me rappeler qui j’ai pu être. Ou qui j’ai voulu être, y a une vie de ça. Et j’ai un vague sourire quand j’me tourne de nouveau vers elle. « J’sais pas si ça t’aide à comprendre ou pas. » Parce que j’ai toujours du mal à causer et à mettre les bons mots sur tout ce que j’ai dans la tête. C’est toujours plus compliqué que je le voudrais.
Au reste, j’ai un bref hochement de tête. « Okay. Mais si ça peut te rassurer, j’savais exactement ce que je faisais. Et à force, j’ai appris à me tailler presque aussi vite que toi tu sais. » Je lui assène un petit coup d’épaule avant de ciller quand elle continue. Si j’me doutais bien qu’elle continuerait sans moi et que j’m’attendais pas à une autre réponse, c’est le reste qui me laisse un peu sur le cul. Et je la regarde quelques secondes, incapable de répondre quoi que ce soit. Avant de souffler, dans un murmure. « J’vais finir par croire que j’ai vraiment pris de l’importance dans ta vie chica. » Et je me penche vers elle pour embrasser doucement sa mâchoire avant de me reculer, continuant sur le même ton. « J’suis là d’accord ? Et quoi qu’il se passe entre nous, tu seras jamais seule. » Pas tant que j’serais là en tout cas. « Même si tu me rends complètement dingue. » Et que j’ai eu plus d’une fois envie de lui dire d’aller se faire foutre.
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Sujet: Re: Confidence Jeu 21 Avr 2022 - 20:00
Comment pouvait-il être aussi sûr qu’on saurait gérer ce qui allait nous tomber dessus cette fois ? A croire que Joaquin ne doutait jamais de rien. Je l’enviais presque. Je vivais constamment dans la peur que nos choix ne finissent par nous tuer. Contrairement à lui, il ne me viendrait jamais à l’idée de me mettre en danger pour les autres. Je tenais bien trop à ma propre vie pour prendre des risques pareils. Quand je prenais les devants, c’était uniquement pour éradiquer une menace avant qu’elle ne vienne frapper à ma porte. Et, pourtant, il n’avait pas complètement tort. Beaucoup de choses avaient changé depuis l’année passée. J’étais à la fois la même qu’avant, et si différente.
Mais il était inutile de reprendre cette discussion là où nous l’avions arrêtée, nous risquerions de ne pas tomber d’accord à nouveau. Parfois, c’était à se demander ce que nous faisions ensemble, tellement nous étions aux antipodes sur quantité de sujets. J’avais quand même besoin d’éclaircir un point précis, parce que je ne pouvais pas rester sur ma faim. J’avais besoin de comprendre.
Je l’écoutai longuement sans mot dire, alors qu’il se confiait un peu davantage encore, sur qui il avait été, sur qui il pensait être vraiment. Je pensais enfin comprendre un peu. Il avait toujours nagé dans les gangs, et il avait fait plusieurs fois de la prison. Joaquin avait toujours été un suiveur, qui s’était laissé influencer par les mauvaises personnes. Il avait choisi la voie de la facilité, à plusieurs reprises, jusqu’à que sa famille remette tout en perspective. « Et maintenant, c’est nous, ta famille ? » Il m’avait déjà confié avoir seulement eu besoin de se rattacher à quelqu’un, à quelque chose. J’avais été une bouée de secours pour lui, qui était resté si longtemps en immersion total. Mais l’inverse n’avait pas été vrai immédiatement.
Je serrai un peu le livre sur mes genoux, sans bien savoir par où commencer. « Joaquin… » Je poussai un léger soupir, en secouant la tête négativement. « Quand l’épidémie a débuté… J’étais seule. J’avais peur. J’essayais de rentrer chez moi et… je suis tombée sur ce militaire gentil et prévenant, Warren. La limite est fine entre manipulation et affection, tu sais. » Je relevai le regard vers lui, en me pinçant les lèvres. « La vérité était qu’il est tombé très vite amoureux de moi, et que je suis devenue ce qu’il attendait de moi, parce que j’avais besoin de lui pour survivre. Alors… quand il a voulu d’un rapprochement, j’ai simplement laissé faire. » Je baissai le regard, un peu honteuse de lui avouer, même après tout ce temps. « Quand il est mort, je n’ai pas su survivre seule. Je suis devenue le reflet d’une fille perdue pour un autre, un rôle plus confortable encore, et puis… des pillards m’ont mise la main dessus. Avec eux, c’était clairement plus difficile de se faire une place. » Mes mains se crispèrent davantage sur la couverture du livre alors que je replongeais dans ces événements passés. « Ils me faisaient prendre tous les risques, à jouer les appâts pour eux, pour tendre leurs embuscades sur les routes… et le soir venu, ils ne me laissaient que les miettes. Et, si je voulais être tranquille, il fallait simplement que j’accepte leurs… exigences. » Ma voix se brisa un peu, à ce dernier mot. Je relevai un regard embué de larmes sur lui. « Ca n’a pas été facile. J’ai vraiment détesté celle que j’ai dû être pour survivre tout ce temps… mais c’est grâce à elle que je suis encore là pour en parler. Joaquin, ce que je veux te dire… c’est que des gens comme toi, j’en ai croisé des tas : des hommes qui s’imaginent que parce que tu dis oui c’est que tu le veux bien, alors qu’ils ne font que te forcer la main, sans parfois même s’en rendre compte, et qu’ils te traitent ensuite comme leur pute. Et même des personnes gentilles, comme Warren, ne voyaient rien du mal-être qu’ils me causaient. Quand il a compris, il était juste tellement furieux d’avoir été trompé qu’il me faisait vraiment peur… » Les larmes coulèrent subitement, sans que je ne puisse les réprimer. Je les essuyais d’un mouvement rageur, mais j’étais bien plus calme que la dernière fois qu’on s’était parlé. Je pris une longue inspiration, pour m’inciter à le rester. « Je pense qu’il était important que tu saches tout ça, parce que… tu n’as pas dû comprendre ce qui s’est passé ce soir-là. » Je ne lui avais pas tout dit. Je l’avais gardé pour moi tout ce temps, sans jamais en laisser filtrer un mot, sauf sur un coup d’éclat. En vérité, j’avais beaucoup trop honte pour en parler.